Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
15ème Chambre - Section B
ARRET DU 23 OCTOBRE 2008
(no , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/01022
Décision déférée à la Cour : jugement du 17 mars 2000 - Tribunal de grande instance d'EVRY - RG no 1998/08776
APPELANTE
Madame Linda X...
demeurant ...
représentée par Maître Bruno NUT, avoué à la Cour
assistée de Me Serge Y..., avocat au barreau de PARIS toque D1945
INTIMEE
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE DE CHAMPAGNE - BOURGOGNE - SOCIETE COOPERATIVE
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social ...
représentée par la SCP GOIRAND, avoués à la Cour
assistée de Me Vincent Z..., avocat au barreau d'EVRY.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 19 septembre 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Claire DAVID, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Marie-Christine DEGRANDI, Conseiller,
Madame Evelyne DELBES, Conseiller
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Claire CHARIAU, greffier en chef,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Claire DAVID faisant fonction de Président et par Madame Angélique VINCENT-VIRY, Greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire .
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Par acte notarié du 17 décembre 1993, Mme X... a acquis en état futur d'achèvement des biens immobiliers situés à Paray Vieille Poste (91). Par même acte, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de l'Yonne lui a consenti un prêt de 1 819 024 francs.
Le 1er avril 1997, la déchéance du terme a été prononcée et Mme X... a été mise en vain en demeure de régler les mensualités impayées.
Par acte notarié du 29 juillet 1997, Mme X... a fait donation à ses trois enfants d'un bien immobilier lui appartenant situé à Montgeron (91) et s'en est réservée l'usufruit.
Mettant en oeuvre l'action paulienne, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de l'Yonne a saisi le tribunal de grande instance d'Evry qui, par jugement du 17 mars 2000, a rejeté la demande de sursis à statuer et a déclaré inopposable à la banque l'acte de donation du 29 juillet 1997.
Par déclaration du 13 juin 2000, Mme X... a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt du 9 avril 2002, cette chambre de la cour d'appel de Paris a réformé le jugement et a sursis à statuer sur les demandes jusqu'à l'issue de la procédure engagée devant le tribunal de grande instance de Troyes. L'affaire a été retiré du rôle de la cour.
Elle a été remise au rôle le 18 janvier 2007
Dans ses dernières conclusions au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, déposées le 5 septembre 2008, Mme X... demande à la Cour :
- d'infirmer le jugement entrepris,
En conséquence,
- de dire que la donation est opposable à la banque,
- de condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Champagne Bourgogne à lui payer la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, déposées le 12 septembre 2008, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Champagne Bourgogne demande à la Cour :
- de dire n'y avoir lieu à sursis à statuer,
- de lui déclarer inopposable l'acte de donation,
- de condamner Mme X... à lui payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions déposées devant le conseiller de la mise en état le 5 septembre 2008, Mme X... demande de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale et de la procédure engagée devant le tribunal de grande instance de Paris. Elle sollicite en outre l'octroi de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ordonnance du 11 septembre 2008, le conseiller de la mise en état a joint cet incident au fond.
CELA ÉTANT EXPOSÉ,
LA COUR,
Considérant que Mme X... soulève l'irrecevabilité de l'action paulienne engagée pour défaut de publication de la procédure auprès de la conservation des hypothèques ;
Mais considérant que l'assignation introductive d'instance a été régulièrement publiée les 10 décembre 1998 et 3 mars 1999, comme en attestent les pièces produites ;
Que l'exception d'irrecevabilité doit être écartée ;
Considérant que Mme X... demande à la cour de surseoir à statuer, dans la mesure où elle a déposé une plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction d'Evry le 20 mars 1999 pour usage de faux et usage d'attestation inexacte ou falsifiée ; qu'elle y expose que l'opération immobilière était douteuse et qu'elle a été victime d'escroqueries de la part de la banque qui a caché à la juridiction civile que la société Le Diamentel était en état de cessation des paiements ;
Mais considérant que le présent litige porte sur la demande d'inopposabilité à la banque de la donation d'un bien immobilier par Mme X... à ses enfants ; que l'action pénale n'a pas d'influence directe sur le présent litige, d'autant que Mme X... ne précise pas quelles investigations sont encore faites par le juge d'instruction et ne justifie pas de l'état d'avancement de la procédure pénale engagée depuis plus de 9 années ;
Considérant que Mme X... demande encore de prononcer un sursis à statuer, dans l'attente de la décision du tribunal de grande instance de Paris saisi par acte des 5 et 19 août 2008 à l'encontre de la banque, contre laquelle est mise en oeuvre sa responsabilité délictuelle ;
Mais considérant que la demande présentée devant le tribunal de grande instance de Paris porte sur la mise en cause de la responsabilité de la banque et sur une demande de dommages et intérêts ; que cette action ne prive pas la cour de la possibilité de statuer sur la présente action paulienne qui tend simplement à l'inopposabilité au créancier de l'acte consenti à titre gratuit ;
Considérant que pour s'opposer à l'action paulienne, Mme X... expose qu'elle a fait donation de son bien à ses enfants, car elle était l'objet de menaces de mort de la part de son ex-époux ;
Mais considérant que Mme X... connaissait le montant de sa dette avant l'acte de donation pour avoir été destinataire de la mise en demeure ; que la fraude paulienne résulte seulement de la connaissance qu'elle avait du préjudice causé à la banque par l'acte litigieux ; qu'elle s'est manifestement appauvrie en faisant donation d'un bien à ses enfants ; qu'elle ne prétend pas disposer d'autres biens qui seraient de valeur suffisante pour permettre au créancier d'obtenir paiement de sa créance ; qu'il convient en conséquence de déclarer l'acte de donation inopposable à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Champagne Bourgogne ;
Considérant en conséquence que le jugement doit être confirmé ;
Considérant qu'il apparaît équitable d'allouer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Champagne Bourgogne la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
Rejette les demandes de sursis à statuer,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à l'action paulienne et en la condamnation de Mme X... au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens,
Condamne Mme X... à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Champagne Bourgogne une somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel,
Rejette les autres demandes,
Condamne Mme X... aux dépens avec distraction au profit de l'avoué concerné dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,