La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2008 | FRANCE | N°06/13657

France | France, Cour d'appel de Paris, 23 octobre 2008, 06/13657


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre B



ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2008

(no 8 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/13657



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Octobre 2006 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY - RG no 04/01332





APPELANT



Monsieur Jean-Paul X...


...


75011 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Y... PETAT, avocat au barreau

de PARIS, toque : A.756







INTIMÉE



INSTITUT NATIONAL DE FORMATION DE LA LIBRAIRIE

TOUR ORION

12-16, rue de Vincennes

93100 MONTREUIL

représentée par Me Franck VERDUN, avocat au barrea...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre B

ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2008

(no 8 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/13657

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Octobre 2006 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY - RG no 04/01332

APPELANT

Monsieur Jean-Paul X...

...

75011 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Y... PETAT, avocat au barreau de PARIS, toque : A.756

INTIMÉE

INSTITUT NATIONAL DE FORMATION DE LA LIBRAIRIE

TOUR ORION

12-16, rue de Vincennes

93100 MONTREUIL

représentée par Me Franck VERDUN, avocat au barreau de PARIS, toque : R 244 substitué par Me Gaëlle LE SCOUL, avocat au barreau de PARIS, toque : L 0309

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Septembre 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Michèle BRONGNIART, Président

Monsieur Thierry PERROT, Conseiller

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Melle Chloé FOUGEARD, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Michèle BRONGNIART, Président et par Mme Nadine LAVILLE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

L'Institut National de Formation de la Librairie est une association de la loi 1901 dont l'activité essentielle est la formation des apprentis et la formation professionnelle aux métiers de libraire. L'institut emploie moins de 10 salariés.

Le 2 juin 2003, M. Jean Paul X... a été engagé par l' Institut National de Formation de la Librairie, par contrat à durée indéterminée, en qualité de directeur.

Le contrat de travail prévoyait une période d'essai d'une durée de six mois. Le 28 novembre 2003, l'employeur a adressé à M. Jean Paul X... un courrier l'informant de la validation de cette période d'essai et de son engagement définitif au sein de l'Institut National de Formation de la Librairie.

Le 23 février 2004, par courrier remis en main propre, M. Jean Paul X... a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement devant se dérouler le 15 mars 2004. L'Institut National de Formation de la Librairie a réitéré cette convocation par lettre recommandée du 4 mars 2004.

Par courrier du 17 mars 2004, l'Institut National de Formation de la Librairie a notifié à M. Jean Paul X... son licenciement pour faute grave.

La cour statue sur l'appel interjeté le 20 novembre 2006 par M. Jean Paul X... du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bobigny le 11 octobre 2006, notifié le 23 octobre 2006, qui a, après avoir requalifié la rupture du contrat de travail en licenciement pour cause réelle et sérieuse et fixé le salaire moyen à la somme de 4000 €, condamné l'Institut National de Formation de la Librairie à lui payer les sommes suivantes :

– 3272 € à titre du rappel de salaire de la mise à pied du 23 février au 18 mars 2004,

– 327 € au titre des congés payés et afférents,

– 12 000 € à titre d'indemnité de préavis,

– 1200 € au titre des congés payés afférents au préavis,

– 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil de prud'hommes a, en outre, débouté les parties du surplus de leurs demandes et a condamné l' Institut National de Formation de la Librairie aux entiers dépens.

Vu les conclusions du 11 septembre 2008 au soutien de ses observations orales par lesquelles M. Jean Paul X... demande à la cour :

– de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré qu'aucune faute grave n'était caractérisée à son encontre,

– d'infirmer le jugement déféré pour le surplus et, statuant à nouveau :

– de condamner l'Institut National de Formation de la Librairie à lui payer la somme de 130 558 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

– de débouter l'Institut National de Formation de la Librairie de son appel incident et de dire que la faute grave n'est pas constituée en l'espèce,

– de condamner l'Institut National de Formation de la Librairie à lui payer une somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Vu les conclusions du 11 septembre 2008 au soutien de ses observations orales par lesquelles l'Institut National de Formation de la Librairie demande à la cour :

– de constater l'existence d'une addition de faits fautifs matériellement constatés, imputables à M. Jean Paul X...,

– de constater qu'elle n'a eu connaissance des faits fautifs qu'à compter du mois de février 2004, et qu'elle a été dans l'obligation de mandater son commissaire aux comptes et un expert-comptable afin de tenter de redresser au plus vite sa situation financière désastreuse,

– de constater que la procédure disciplinaire a bien été engagée dans le délai de deux mois à compter du jour où elle a eu confirmation des agissements frauduleux de M. Jean Paul X... ,

En conséquence,

A titre principal :

– d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a requalifié la rupture du contrat de travail de M. Jean Paul X... en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

Et statuant à nouveau :

– de dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. Jean Paul X... est justifié,

– de débouter M. Jean Paul X... de l'ensemble de ses demandes,

– d'ordonner le remboursement par M. Jean Paul X... de la somme de 14 173,84 € versée en application du jugement du conseil de prud'hommes,

A titre subsidiaire :

– de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a requalifié la rupture du contrat de travail en licenciement pour cause réelle et sérieuse et débouter le salarié du reste de ses demandes,

En tout état de cause :

– de condamner M. Jean Paul X... à lui payer la somme de 2000 € au titre de l'article 700

du code de procédure civile, outre les dépens.

SUR CE LA COUR :

Sur le bien fondé du licenciement :

Considérant que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige , lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce est ainsi motivée :

« au regard des états financiers établis le 13 février par M. A..., expert-comptable, assisté de M. B... dont j'avais demandé la présence (e-mail du 13 février), du plan de trésorerie prévisionnel sur six mois qu'ils ont établi, des constatations de M. Aubailly, commissaire aux comptes et l'entretien du 23 février avec notre banquier, il est clair que l'organisme de formation n'a pas été correctement géré depuis des mois, la situation actuelle étant la suivante :

* absence totale de maîtrise des budgets, sans qu'aucun signal d'alerte de votre part n'ait été émis auprès du président, ni du bureau, ni du conseil d'administration au cours des derniers mois, entraînant un déficit de financement de l'ordre de 150 000 € et une mise en alerte du commissaire aux comptes,

* émission de chèques sans provision suffisante et sans prendre l'assurance que la banque allait couvrir, entraînant une interdiction bancaire,

* demandes de subventions non faites,

* investissements réalisés sans prévisions ni recherche préalable de financement (achat de mobilier et matériel informatique),

* budget prévisionnel 2004 du CFA, qui aurait dû être remis à la région avant le 17 février, non réalisé,

*défaillance du rôle de manager.

Pour tous ces motifs, il ne nous est plus possible de poursuivre une collaboration qui est préjudiciable à la bonne marche de l'institut et nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour faute grave ».

Considérant que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur ;

Que c'est à l'employeur qui invoque la faute grave et s'est situé sur le terrain disciplinaire et à lui seul de rapporter la preuve des faits allégués et de justifier qu'ils rendaient impossible la poursuite du contrat de travail même pendant la durée du préavis ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. Jean Paul X..., le poste de directeur de l'Institut National de Formation de la Librairie n'a pas été vacant plusieurs mois avant son arrivée ; qu'il résulte du courrier en date du 28 février 2003, adressé à M. C..., prédécesseur de M. Jean Paul X..., que ce dernier a assuré - en compensation de son préavis de trois mois sur la base d'un mi-temps et pour la période nécessaire à la recherche de son successeur, l'administration courante de l'institut (pièce 58 de l' employeur) ;

Qu'il résulte de l'attestation de M. C... que de nombreuses séances de travail ont été organisées entre les deux hommes, consacrées à la transmission des dossiers et plus particulièrement, les dossiers en cours et leur situation, les éléments de gestion courante, les comptes annuels et la nature des cycles de trésorerie de l'institut, les procédures administratives liées aux demandes de subventions ;

Considérant que dans sa lettre de candidature au poste de directeur de l'INFL en date du 3 mars 2003, M. Jean Paul X... revendique " ses compétences de gestionnaire"et son cursus en qualité en dernier lieu, de directeur administratif et financier de la CIMADE (ONG) et de gestionnaire de la formation continue de l'INFL; qu'il vise à la rubrique domaines de compétences de son curriculum vitae, la gestion administrative et financière ; que le contrat de travail du 1er juin 2003 confie, notamment, au directeur de l'INFL, des missions de manager et la gestion administrative et financière de l'organisme ;

Considérant que M. Jean Paul X... ne peut, ainsi qu'il le soutient dans ses écritures, soutenir qu'il n'était pas en charge des demandes de subventions, de la conduite des investissements ou ne pas être informé des conditions du fonctionnement des comptes bancaires, ou bien encore ne pas être tenu informé de la situation comptable de l'association ;

Qu'il appartenait au directeur administratif et financier, aux termes de son contrat de travail, d'assurer la gestion quotidienne de l'Institut, de s'assurer que les investissements qu'il prévoyait étaient financés, que les demandes de subventions avaient été déposées en temps et en heures et qu'il possédait les concours bancaires nécessaires ;

Considérant que M. Jean Paul X... ne justifie pas d'avoir, à aucun moment, alerté l'Institut National de Formation de la Librairie de la situation de ses finances en la personne du président ou de la trésorière qui sont, ainsi que les autres membre du bureau, des bénévoles ;

Considérant que l'Institut National de Formation de la Librairie a vu son attention appelée sur sa situation financière par un courrier recommandé du commissaire aux comptes en date du 1er mars 2004 valant procédure d'alerte au sens de l' article L 612-1 du code de commerce et portant à son attention les éléments suivants :

"- la projection de résultat au 31 décembre 2003 établie par votre expert comptable fait apparaître un déficit de 98979 euros ;

- des chèques ont été rejetés par la banque pour un montant de 67766,60 euros, ils reflètent une situation de trésorerie très dégradée notamment par des investissements récents;

- un compte de résultat prévisionnel 2004 provisoire qui présente un déficit de 90000 euros et qui ne tient pas compte de la baise probable de la taxe d'apprentissage 2004 du fait d'un fort retard dans l'envoi des bordereaux de taxe d'apprentissage" ;

Que ce courrier a été précédé les 9, 10 et 11 février 2004 d'avis d'interdiction d'émettre des chèques adressés par le Crédit Lyonnais ;

Considérant que c'est donc à compter du 9 février 2004 que l'Institut National de Formation de la Librairie a été informé de l'état des finances par son organisme bancaire ; que les fautes pouvant être imputées à M. Jean Paul X... ne peuvent qu'être postérieurs au 28 novembre 2003 date à laquelle l'INFL a validé la période d'essai de son directeur ;

Qu'en l'espèce, il résulte du procès verbal de compte rendu du conseil d'administration tenu le 19 janvier 2004 (pièce 63 de l'employeur) que le conseil s'est inquiété "de pas avoir de balance comptable permettant de vérifier notre état de santé financière et demande à Jean Paul X... de faire le nécessaire auprès du Cabinet pour qu'un état soit dressé au plus tard mi-février;" ;

Qu'en l'espèce, il est établi que M. Jean Paul X... a émis seul des chèques sans provision (pour un montant de 77048 euros) sans s'assurer que la Banque, en cas de découvert, allait couvrir, que ce comportement imprudent a entraîné une interdiction bancaire et démontre, à lui seul, la faute dans la gestion financière qui lui était confiée ; qu'il appartient à un directeur administratif et financier de s'assurer de la pérennité des facilités de caisse antérieurement accordées ;

Que de surcroît, il est établi par un mail du 25 février 2004 (pièce 12 de l'employeur) adressé par un fonctionnaire de la Région Ile de France (M. Jean D...) au Président de l'Institut que " en ce qui concerne les investissements , aucune demande ne nous a été faite en 2003 et les dossiers antérieurs sont soldés" ; que pour le budget 2004 la date ultime de remise des documents était le 17 février 2004 et qu'il n'a rien reçu ; que ce même mail établi que le budget prévisionnel n'a pas été transmis avant la date butoir ;

Considérant dans ces conditions que les fautes reprochées à M. Jean Paul X... sont établies, que son licenciement pour faute grave est justifié ; et qu'il convient d' infirmer le jugement déféré sur ce point ;

Sur les demandes sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile :

Considérant qu'il n'apparaît pas inéquitable que chaque partie conserve la charge de ses frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Bobigny le 11 octobre 2006 ;

Statuant à nouveau :

Dit que le licenciement de M. Jean Paul X... intervenu le 17 mars 2004 repose sur une faute grave ;

Rappelle que le présent arrêt constitue, pour l'Institut National de Formation de la Librairie un titre suffisant pour obtenir restitution par M. JEAN PAUL X... de toutes les sommes perçues en exécution du jugement infirmé,

Déboute M. Jean Paul X... de l'ensemble de ses demandes ;

Déboute l'Institut National de Formation de la Librairie du surplus de ses demandes ;

Condamne M. Jean Paul X... aux entiers dépens d'appel et de première instance ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 06/13657
Date de la décision : 23/10/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Bobigny


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-10-23;06.13657 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award