Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
1ère Chambre - Section C
ARRET DU 16 OCTOBRE 2008
(no , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/12356
RECOURS EN ANNULATION d'une sentence arbitrale
rendue le 5 avril 2007 à Paris par le Tribunal arbitral composé de :
M. Le Président Raymond DELAUZANNE, M. Pierre X..., et
M. Dominique Y...
DEMANDERESSE AU RECOURS EN ANNULATION :
LA SOCIETE S.A. PRIM'NATURE
ayant son siège : Les Hautes Terres
22540 PEDERNEC
agissant poursuites et diligences en la personne
de son président Directeur Général
représentée par la SCP DUBOSCQ et PELLERIN,
avoué à la Cour
assistée de Maître Frédérique Z...,
avocat plaidant pour la SELARL RACINE
du barreau de Paris Toque L 301
DEFENDERESSE AU RECOURS EN ANNULATION :
LA SOCIETE S.A.S TOP POMMES DE TERRE
ayant son siège : ZI de Villette
10700 ARCIS SUR AUBE
représentée par Me Frédéric BURET,
avoué à la Cour
assistée de Maître Jean-Paul A..., avocat plaidant
pour la SELARL CABINET JP MONTENOT,
du barreau de Paris Toque L 150
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 septembre 2008,en audience publique
le rapport entendu, devant la Cour composée de :
Monsieur PÉRIÉ, président
Monsieur MATET, conseiller
Madame BOZZI, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme FALIGAND
L'affaire a été communiquée au Ministère public
ARRÊT :
- Contradictoire
- prononcé en audience publique par Monsieur PÉRIÉ, Président,
- signé par Monsieur PÉRIÉ, Président, et par Mme FALIGAND,
greffier présent lors du prononcé.
*****
Dans le cadre de leurs relations contractuelles afférentes à l'achat de récolte de pommes de terre, la société PRIM'NATURE qui a pour activité le commerce de gros de pommes de terre lavées, et la société TOP POMMES DE TERRE ont choisi de se soumettre à l'arbitrage de la commission d'arbitrage des Règles et Usages du Commerce Intereuropéen des Pommes de Terre de Paris ( RUCIP).
Suivant projet de sentence du premier degré rendu le 30 mai 2006 par la commission d'arbitrage RUCIP, la société PRIM'NATURE a été condamnée à verser diverses sommes à la société TOP POMMES DE TERRE.
La société PRIM'NATURE ayant sollicité un examen au second degré, la commission d'arbitrage composée de MM. X..., Y... et de M.DELAUZANNE, président, a rendu sa sentence le 5 avril 2007, assortie de l'exécution provisoire, aux termes de laquelle elle condamne la société PRIM'NATURE à payer à la société TOP POMMES DE TERRE les sommes de 122 648,74€ au titre des prix des marchandises et des frais de stockage avec intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2005, 2.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et 8 130€ en remboursement de la provision d'arbitrage versée par la société TOP POMMES DE TERRE.
La sentence a fait l'objet d'une ordonnance d'exequatur du 4 juin 2007.
La société PRIM'NATURE a formé un recours en annulation de la sentence en articulant trois moyens d'annulation, d'une part la méconnaissance par les arbitres de la mission qui leur a été conférée (article 1484 3o du code de procédure civile) au motif que la procédure d'arbitrage au premier degré étant caduque la commission d'arbitrage ne pouvait pas lui opposer l'irrecevabilité de sa demande initiale au premier degré, que les arbitres ont accueilli la demande de la société TOP POMMES DE TERRE en violation des dispositions de l'article 6.4 du règlement d'arbitrage, et qu'ils ont violé l'article 5.1 du dit règlement en déclarant irrecevable son mémoire en réplique alors qu'il n'était pas tardif, d'autre part "l'irrégularité" des conditions de prorogation de la procédure d'arbitrage au second degré (article 1484 1o du code de procédure civile), et enfin le non respect du principe de la contradiction (article 1484 4o du code de procédure civile).
En outre, la société PRIM'NATURE sollicite la condamnation de la société TOP POMMES DE TERRE au paiement de la somme de 20 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société TOP POMMES DE TERRE conclut au rejet du recours qu'elle dit non fondé, subsidiairement en cas d'annulation prie la cour d'inviter les parties à conclure au fond, et sollicite la condamnation de la société PRIM'NATURE à lui payer la somme de 25 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que la commission d'arbitrage n'a pas méconnu sa mission puisqu'elle s'est bornée à appliquer les dispositions du règlement d'arbitrage en déclarant irrecevable la demande reconventionnelle de la société PRIM'NATURE, et en accueillant sa propre demande à laquelle on ne pouvait opposer les dispositions de l'article 6.4 du règlement précité, que la procédure d'arbitrage a été régulièrement prorogée par décision du délégué européen à la demande du président de la commission d'arbitrage, dans les conditions exigées du règlement, sans qu'il soit besoin d'un accord des parties, et que le principe de la contradiction a été respecté par la commission d'arbitrage.
Sur ce, la Cour
Sur le moyen d'annulation pris du non respect par les arbitres du
principe de la contradiction (article 1484 4o du code de procédure civile)
La société PRIM'NATURE fait grief aux arbitres d'avoir rejeté le mémoire en réplique qu'elle a adressé au Secrétariat le 22 novembre 2006 en vue de la séance de la commission d'arbitrage du 30 novembre 2006 alors que son expédition a été faite dans le délai de huit jours prévu par l'article 5.1 du règlement d'arbitrage. Dans le cadre de son moyen d'annulation, elle articule que la commission d'arbitrage n'a pas respecté le principe de la contradiction dès lors qu'elle a soulevé d'office le moyen d'irrecevabilité du mémoire en réplique sans inviter les parties à s'en expliquer.
Considérant que selon l'article 5.1 du règlement d'arbitrage "les parties ont la possibilité d'adresser au Secrétariat des mémoires écrits pour appuyer leur demande ou pour préciser leur défense au plus tard huit jours avant la date de la séance de la Commission d'arbitrage" ; que la société TOP POMMES DE TERRE fait grief à la société PRIM'NATURE d'invoquer un grief alors que cette dernière a adressé son mémoire en réplique moins de huit jours avant la date de l'audience - un jour trop tard-et qu'elle avait disposé d'un temps suffisant pour répliquer au mémoire de la société TOP POMMES DE TERRE remis le 14 novembre ;
Or considérant qu'en déclarant irrecevable le mémoire en réplique de la société PRIM'NATURE alors qu'aucune demande en ce sens n'a été formée par la société TOP POMMES DE TERRE, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen de droit soulevé d'office, les arbitres ont violé le principe de la contradiction ; que, par suite, le moyen d'annulation est accueilli et il convient d'annuler la sentence arbitrale du 5 avril 2007 ;
Qu'il y a lieu d'inviter les parties, comme le sollicite la société TOP POMMES DE TERRE, à conclure au fond dans les limites de la mission donnée aux arbitres, ce avant le 15 novembre 2008, à peine de radiation, et de renvoyer l'affaire à la mise en état ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Considérant que la société TOP POMMES DE TERRE succombant est condamnée aux dépens et au paiement à la société PRIM'NATURE de la somme de 10000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par ces motifs
Annule la sentence rendue le 5 avril 2007 par la commission d'arbitrage RUCIP siégeant au second degré,
Invite les parties à conclure au fond dans les limites de la mission donnée aux arbitres, ce avant le 15 novembre 2008, à peine de radiation, et renvoie l'affaire à la mise en état,
Condamne la société TOP POMMES DE TERRE à payer à la société PRIM'NATURE la somme de 10 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société TOP POMMES DE TERRE aux dépens et admet la SCP DUBOSCQ et PELLERIN au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT
R. FALIGAND J. F. PERIE