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09/10/2008 | FRANCE | N°06/19553

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0302, 09 octobre 2008, 06/19553


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

15ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 09 OCTOBRE 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/19553

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Septembre 2006 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 06/9496

APPELANTE

S.C.I. 2BMA

prise en la personne son gérant

ayant son siège social 60 rue Grignan

13001 MARSEILLE

représentée par la SCP BASKAL - CHALUT-NATAL, a

voués à la Cour

assistée de Me Denis PERIANO, avocat au barreau de MARSEILLE,

(SCP BOLLET et Associés)

INTIMÉE

Société CM-CIC LEASE

prise ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

15ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 09 OCTOBRE 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/19553

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Septembre 2006 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 06/9496

APPELANTE

S.C.I. 2BMA

prise en la personne son gérant

ayant son siège social 60 rue Grignan

13001 MARSEILLE

représentée par la SCP BASKAL - CHALUT-NATAL, avoués à la Cour

assistée de Me Denis PERIANO, avocat au barreau de MARSEILLE,

(SCP BOLLET et Associés)

INTIMÉE

Société CM-CIC LEASE

prise en la personne de son Président d'Administration et tous représentants l'égaux domiciliés audit siège,

ayant son siège social 48 rue des Petits Champs

75002 PARIS

représentée par la SCP GOIRAND, avoués à la Cour

assistée de Me Armand-René CERVESI, avocat au barreau de PARIS, toque : P 51

(SCP CERVESI et Associés)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 septembre 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Claire DAVID, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Evelyne DELBES, Conseiller

Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Conseiller

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Claire DAVID, conseiller faisant fonction de président et par Mme Angélique VINCENT-VIRY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Selon acte notarié du 13 février 2003, la société Solybail, aux droits de laquelle se trouve la société CM-CIC Lease à la suite d'une opération de fusion absorption, a conclu avec la SCI 2BMA, pour une durée de 12 ans, un contrat de crédit-bail portant sur un ensemble immobilier sis dans la zone industrielle de Vitrolles comprenant, notamment, un bâtiment industriel réalisé en exécution de deux permis de construire

délivrés les 19 mai 1967 et 23 septembre 1977.

Deux ans après la signature de ce contrat, la SCI 2BMA a fait procéder à une recherche d'amiante et à l'établissement d'un devis de "désamiantage" des façades.

Faisant grief à la société CM-CIC Lease d'un défaut d'information et de conseil notamment quant à la présence d'amiante dans les bâtiments donnés en crédit-bail et à la charge fiscale afférente à ceux-ci, la SCI 2BMA a, par acte du 19 septembre 2005, assigné l'intéressée devant le Tribunal de commerce de Paris pour obtenir le paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire du 27 septembre 2006, le tribunal de commerce de Paris a :

- débouté la SCI 2BMA de ses demandes,

- condamné l'intéressée à payer à la société CM-CIC Lease la somme de 44 885,45 euros TTC au titre du solde des taxes foncières 2003 et 2004,

- débouté la société CM-CIC Lease de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné la SCI 2BMA à payer à la société CM-CIC Lease la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande.

Par acte du 10 novembre 2006, la SCI 2BMA a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions, au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, déposées le 28 mai 2008, elle demande à la Cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes,

- condamner la société CM-CIC Lease à lui payer, à titre de dommages et intérêts, les sommes de :

+ 1 515,26 euros en remboursement des frais de recherche d'amiante qu'elle a exposés,

+ 241 283,43 euros au titre des travaux de "désamiantage" et de remise en état des locaux,

+ 360 000 euros au titre du surcoût de taxe foncière qu'elle subit,

le tout avec les intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société CM-CIC Lease de ses demandes reconventionnelles, à l'exception de sa demande en paiement de la somme de 44 885,45 euros TTC, montant de sa créance,

- prononcer la compensation entre créances réciproques,

- condamner la société CM-CIC Lease à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, déposées le 29 mai 2008, la société CM-CIC Lease demande à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCI 2BMA de toutes ses demandes,

- l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau,

- condamner la SCI 2BMA à lui payer les sommes de :

+ 62 835,45 euros TTC en remboursement du solde des charges foncières des années 2003 et 2004, outre les intérêts et pénalités contractuels,

+ 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

+ 4 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

LA COUR :

Considérant que la SCI 2BMA a transmis à la Cour, le 17 septembre 2008, pendant son délibéré, des pièces qui ne sont pas recevables faute d'avoir été régulièrement communiquées avant la clôture des débats et d'avoir été réclamées à l'audience ;

Sur les demandes relatives à l'amiante

Considérant que la SCI 2BMA expose que les dossiers techniques amiante établis en janvier 2005 à son initiative ont révélé la présence d'amiante dans la façade des locaux objet du contrat du 13 février 2003 ; que les frais de recherche se sont élevés à 1 515,26 euros et que le coût des travaux de "désamiantage" et de remise en état des locaux est estimé, selon devis, à 241 283,43 euros ;

Considérant qu'elle reproche à la crédit-bailleresse de ne lui avoir délivré, lors de la signature du contrat de crédit-bail, aucune information spécifique concernant la présence d'amiante dans les locaux, alors que l'article L 1334-7 du code de la santé publique issu de la loi du 13 décembre 2000 prévoit qu'un état mentionnant la présence d'amiante doit être annexé à toute promesse unilatérale de vente et qu'en l'absence de l'état annexé, aucune clause d'exonération de la garantie des vices cachés ne peut être stipulée à raison des vices constitués par la présence d'amiante ;

Considérant que la société CM-CIC Lease réplique que l'article L 1334-7 du Code de la santé publique n'est pas applicable au contrat de crédit-bail, contrat de louage sui generis, et que le problème de la présence d'amiante dans les locaux ne se posera entre elle et la SCI 2BMA qu'au moment de la transmission de la propriété de l'immeuble en fonction de la législation en vigueur alors applicable, si l'intéressée lève l'option d'achat ;

Considérant que l'article L 1334-7 du Code de la santé publique prescrit qu'un état mentionnant la présence d'amiante ou, le cas échéant, son absence, est annexé à toute promesse unilatérale de vente ou d'achat et à tout contrat réalisant ou constatant la vente de certains immeubles bâtis et qu'en l'absence de cet état, aucun clause d'exonération de la garantie des vices cachés ne peut être stipulée à raison des vices constitués par la présence d'amiante ;

Considérant que ces dispositions qui visent les immeubles dont le permis de construire a été délivré avant 1er juillet 1997, étaient en vigueur à la date de la signature du contrat de crédit-bail en cause ;

Considérant que si la convention de crédit bail immobilier fait appel à des éléments empruntés à d'autres contrats, elle constitue une institution juridique particulière et unique ; que la promesse de vente incluse dans un contrat de crédit-bail ne constitue qu'un élément d'une technique juridique permettant aux parties de réaliser une opération globale leur apportant des avantages réciproques ; qu'insérée dans un ensemble d'obligations dépendantes les unes des autres, elle ne peut en être dissociée ; qu'en conséquence, les dispositions de l'article L 1334-7 du Code de la santé publique, applicable, aux seules promesses unilatérales de vente, ne peuvent être appliquées au contrat de crédit-bail ;

Considérant que le crédit-bailleur n'est donc pas soumis à l'obligation d'information prévue par le texte précité ; que l'intimée n'a commis aucune faute à cet égard ;

Considérant que le décret du 7 février 1996 met à la charge des propriétaires d'immeubles l'obligation d'effectuer le repérage de la présence d'amiante et de réaliser les travaux de "désamiantage" dont les repérages auront révélé la nécessité;

Considérant que l'article PE 2 b) intitulé "Jouissance" du contrat de crédit-bail en litige met toutes les obligations résultant de la réglementation relative à la protection des risques d'exposition à l'amiante à la charge du crédit-preneur ;

Considérant que la SCI 2BMA argue de l'illicéité de cette clause à la suite de l'abrogation, intervenue le 19 septembre 2001, de l'article 10 du Décret no 96-97 du 7 février 1996 qui autorisait le transfert de la charge des travaux de "désamiantage" à une autre personne que le propriétaire ;

Considérant que l'abrogation de l'article 10 du décret précité a mis fin à la possibilité de dérogation conventionnelle que ledit article avait admise au principe selon lequel les obligations imposées par la réglementation en matière d'amiante incombent au propriétaire de l'immeuble ;

Considérant que la clause incriminée doit en conséquence être réputée non écrite :

Considérant que la société CM-CIC Lease ne peut donc s'affranchir de la charge des obligations résultant de la réglementation relative à la protection des risques d'exposition à l'amiante ;

Considérant que la SCI 2BMA justifie avoir exposé, pour la recherche d'amiante imposée par la réglementation en 2005, des frais d'un montant de 1 515,26 euros que la société CM-CIC Lease devra donc lui rembourser augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 19 septembre 2005 ;

Considérant que la SCI 2BMA n'est en revanche pas fondée à solliciter le paiement de la somme de 241 283,43 euros correspondant au montant d'un devis de travaux de "désamiantage" qu'elle n'a pas fait exécuter et au remboursement desquels elle ne peut, par conséquent, prétendre ; que force est de constater qu'elle ne sollicite pas la condamnation de la société CM-CIC Lease à faire procéder aux dits travaux ;

Considérant que le jugement entrepris est donc infirmé en ce qu'il a débouté la SCI 2BMA de ses demandes relatives à l'amiante et, statuant à nouveau quant à ce, de condamner la société CM-CIC Lease à lui payer la somme de 1 515,29 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 19 septembre 2005 ;

Sur la demande relative aux taxes foncières

Considérant que la SCI 2BMA a refusé de s'acquitter des taxes foncières afférentes aux années 2003 et 2004 que le contrat de crédit-bail l'oblige à rembourser au crédit-bailleur ; qu'elle expose que, lors de la signature du contrat, la taxe foncière à sa charge avait été estimée à 15 000 euros sur la base des avis émis par l'administration fiscale les années précédentes ; que les locaux ayant été agrandis et affectés pour partie à une autre destination en 2000, il lui a été demandé pour 2003, le paiement d'une taxe foncière d'un montant trois fois plus élevé ; qu'elle fait grief au crédit-bailleur d'un manquement à son obligation précontractuelle d'information sur le montant véritable des charges foncières lequel, si elle l'avait connu, l'aurait dissuadée de contracter tant il remettait en cause l'équilibre financier de l'opération et sa rentabilité pour elle ;

Considérant que l'appelante n'établit cependant pas qu'il lui aurait été affirmé que la taxe foncière annuelle serait limitée à 15 000 euros ; qu'elle était à même de se rendre compte de la consistance et de l'affectation des biens dont elle allait avoir la jouissance et par conséquent de l'assiette de calcul de la taxe foncière mise à sa charge ; qu'elle n'établit pas que le crédit-bailleur l'aurait trompée à cet égard ;

Considérant que conformément aux stipulations contractuelles, aux termes desquelles le crédit-bailleur lui a délégué ces démarches, la société 2 BMA a formé en mars 2004 une réclamation auprès du centre des impôts afin d'obtenir, pour le compte du bailleur, un dégrèvement ; que des pièces du dossier, il ressort que l'administration fiscale a ramené le montant de la taxe foncière à 31 000 euros au lieu des 46 785 euros réclamés, renonçant à la taxation d'office par elle effectuée pour opérer un calcul tenant compte de la réalité de la situation des bâtiments dans lesquels l'activité commerciale était exercée ; que la SCI 2BMA ne démontre pas que le retard mis par le crédit-bailleur à transmettre les éléments permettant le calcul exact de la taxe foncière, motif de la taxation d'office initialement opérée, aurait laissé subsister un préjudice à son détriment ;

Considérant que la SCI 2 BMA doit, en conséquence, être déboutée de toutes ses demandes formées au titre de la taxe foncière ;

Sur la demande reconventionnelle de la société CM-CIC Lease

Considérant qu'il y a lieu de faire droit à la demande en remboursement des taxes foncières 2003 et 2004 formée par la société CM-CIC Lease, et ce à hauteur de la somme de 44 885,45 euros ; que cette somme ne saurait être augmentée, comme le sollicite le crédit-bailleur, au prétexte de la résistance opposée et des procédures engagées par la SCI 2BMA dont le caractère abusif et préjudiciable aux intérêts de l'intimée n'est pas établi ; que la demande en paiement de dommages et intérêts d'un montant de

30 000 euros formée par la société CM-CIC Lease sur le même fondement doit, par suite, être également rejetée ;

Considérant que le jugement dont appel est donc confirmé en ses autres dispositions ;

Considérant que le crédit-bailleur est en droit de prétendre au paiement, sur la somme de 44 885,45 euros qui lui est due, des intérêts conventionnels (article 18 du contrat de crédit-bail) au taux de 2 % par mois à compter du 26 mars 2006, date de ses conclusions reconventionnelles ; que la société CM-CIC Lease ne justifie en revanche pas de l'existence et du montant des pénalités contractuelles dont elle sollicite en outre l'allocation ;

Considérant qu'il convient d'ordonner la compensation entre les créances réciproques des parties ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la SCI 2BMA de ses demandes relatives à l'amiante ;

Statuant à nouveau quant à ce,

Condamne la société CM-CIC Lease à payer à la SCI 2BMA la somme de 1515,29 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 19 septembre 2005 ;

Y ajoutant,

Condamne la SCI 2BMA à payer à la société CM-CIC Lease les intérêts au taux conventionnel de 2 % par mois à compter du 26 mars 2006 sur la somme de 44 885,45 euros ;

Ordonne la compensation entre les créances réciproques des parties ;

Rejette toute autre demande ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés en appel et dit que ces dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0302
Numéro d'arrêt : 06/19553
Date de la décision : 09/10/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 27 septembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-10-09;06.19553 ?
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