Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
5ème Chambre - Section B
ARRET DU 2 OCTOBRE 2008
(no , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 05/21301
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Septembre 2005 -Tribunal de Commerce de PARIS - 11ème Chambre - RG no 02/82618
APPELANTES
S.A.S. PRODIM agissant poursuites et diligences de son président
Z.I. Route de Paris
14120 MONDEVILLE
S.A.S. CSF agissant poursuites et diligences de son président
Z.I. Route de Paris
14120 MONDEVILLE
représentées par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avoués à la Cour
assistées de Maître PASCAL COSSÉ, avocat au barreau D'EVREUX
INTIMEES
SOCIETE ANONYME FRANCAP DISTRIBUTION prise en la personne de son Président Directeur Général
40 rue des Terroirs de France - Bercy Expo
75012 PARIS
représentée par la SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour
assistée de Maître Olivier GUIDOUX, S.C.P. DEPREZ DIAN GUIGNOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P 221
SOCIETE DIAPAR prise en la personne de ses représentants légaux
Rue Mares-Julienne
91380 CHILLY MAZARIN
représentée par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour
assistée de Maître Pascal BROUARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P 64
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral de Madame DEURBERGUE, Président, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 2 juillet 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Hélène DEURBERGUE, Président
Madame Catherine LE BAIL, Conseiller
Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Madame KLEIN
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme DEURBERGUE, Président, et par Mme BESSE, Greffier
Vu l'appel interjeté, le 27 octobre 2005, par les sociétés PRODIM et CSF d'un jugement du tribunal de commerce de Paris, du 26 septembre 2005 qui les a déboutées de leurs demandes contre les sociétés FRANCAP DISTRIBUTION et DIAPAR et les a condamnées à payer 3500 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à ces deux sociétés qui, elles-mêmes, ont été déboutées de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Vu les conclusions des sociétés PRODIM et CSF, du 11 juin 2008, qui prient la Cour d'infirmer le jugement, de condamner la société DIAPAR, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, pour avoir participé à la violation des obligations contractuelles de la Sarl Volant, à payer à PRODIM 45.302,58 € et à CSF 268.861,22 € en dédommagement de leur manque à gagner, 100.000 € en réparation du préjudice résultant de la désorganisation du réseau PRODIM pour le cas où la Cour retiendrait que la société DIAPAR est l'organisatrice de la rupture du contrat de la Sarl Volant, et 5000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, et de leur donner acte, enfin, de leur désistement d'appel à l'encontre de FRANCAP DISTRIBUTION ;
Vu les conclusions de la société DIAPAR, du 5 juin 2008, tendant à la confirmation du jugement, sauf sur le rejet de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, et à la condamnation des appelantes au paiement de 30.000 € outre une indemnité de procédure de 10.000 € ;
Vu les conclusions de la société FRANCAP DISTRIBUTION, du 27 juin 2006, tendant à la confirmation du jugement, sauf sur le rejet de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et à la condamnation des sociétés PRODIM et CSF à lui payer 15.000 €, outre une indemnité de procédure de 10.000 € ;
SUR CE, LA COUR :
Sur les faits :
Considérant que la Sarl Volant avait signé, le 24 septembre 1991 avec PRODIM filiale du groupe Carrefour :
- un contrat de franchise relatif à l'exploitation d'un fonds de commerce sous l'enseigne Shopi à Brou, dans l'Eure et Loir, à effet du 6 novembre 1991, pour une durée de 5 ans renouvelable par tacite reconduction pour 3 ans à défaut de dénonciation, sous réserve d'un préavis de 6 mois,
- un contrat d'approvisionnement d'une durée de 5 ans, pour lequel PRODIM a ultérieurement transféré ses droits à CSF, autre filiale du groupe Carrefour ;
Que, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 3 octobre 1996, la Sarl Volant a informé PRODIM de son refus de renouveler le contrat de franchise au delà de son terme et, le 6 novembre 1996, a poursuivi son activité sous l'enseigne Diagonal ;
Que PRODIM a été déboutée de sa demande tendant à faire retirer cette enseigne ainsi que les marchandises dont les marques étaient liées à celle-ci par une ordonnance du 3 février 1997 du président du tribunal de commerce de Chartres, et que la Sarl Volant a cédé son fonds de commerce courant 1999, puis a été mise en liquidation judiciaire le 23 janvier 2003 ;
Considérant que PRODIM, estimant que la Sarl Volant avait manqué à ses obligations contractuelles en ne respectant pas le préavis de dénonciation de 6 mois a mis en oeuvre une procédure d'arbitrage ;
Que la sentence rendue le 27 mars 2002 a décidé que le délai de préavis avait été insuffisant et a, notamment, alloué à PRODIM 18.773,74 € correspondant à 5 mois de cotisation de franchise pour le préjudice résultant du non respect du préavis et 15.244,90 € au titre de la perte de marge du fait de la rupture des deux contrats au 6 novembre 1996 ;
Considérant que PRODIM et CSF, estimant que DIAPAR et FRANCAP DISTRIBUTION s'étaient rendues complices de la violation de ses obligations contractuelles par la Sarl Volant les ont assignées, le 22 octobre 2002, devant le tribunal de commerce de Paris qui a rejeté leurs demandes en retenant qu'elles ne démontraient pas l'existence de contacts pré-contractuels entre les défenderesses et le franchisé et que l'approvisionnement par DIAPAR avait démarré après la rupture du contrat de franchise, et qu'elles avaient été indemnisées par la sentence arbitrale ;
Sur le désistement :
Considérant que les sociétés PRODIM et CSF admettent que la société FRANCAP DISTRIBUTION, qui est une centrale d'achats, n'a pas été directement complice de la violation de ses obligations contractuelles par la société Volant, et se désistent à son égard de leur appel ;
Qu'elle font valoir que leur action n'était pas abusive ; que leur erreur à maintenir cette partie dans la cause s'explique par la complexité de l'organisation de cette société et de ses affiliées et que, comme elles l'ont déjà fait dans une procédure proche qui a donné lieu à un arrêt du 27 mars 2008, elles renoncent à leurs prétentions contre elle ;
Considérant que la société FRANCAP DISTRIBUTION n'a pas accepté ce désistement ;
Qu'elle se borne dans ses conclusions à demander la réformation du jugement sur le rejet de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et sur le montant de l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'elle souhaite voir porter à la somme de 10.000 € ;
Considérant que c'est effectivement de manière abusive que les sociétés PRODIM et CSF ont engagé la présente procédure contre la société FRANCAP DISTRIBUTION et ont maintenu leurs demandes contre elle en appel, alors qu'elles n'ignorent pas qu'elle est une centrale d'achats qui n'a pas de lien direct avec le franchisé, ce qui a été jugé à maintes reprises et pas seulement par l'arrêt de cette Cour du 22 novembre 2007, et qu'il ne s'agit de leur part que d'une manoeuvre pour faire pression sur un groupe concurrent dans le même secteur d'activité ;
Que ces sociétés ne se sont pas mépris sur leurs droits en formant des demandes de condamnation contre la société FRANCAP DISTRIBUTION et que leur comportement sera sanctionné par leur condamnation à lui payer 10.000 € de dommages et intérêts ;
Considérant que l'équité commande aussi de condamner ces mêmes sociétés au paiement à la société FRANCAP DISTRIBUTION d'une indemnité de 8000 € en dédommagement de tous les frais de procédure qu'elle a été contrainte d'exposer pour sa défense ;
Sur la complicité de la société DIAPAR :
Considérant que les sociétés PRODIM et CSF partant du principe que la sentence arbitrale est opposable à DIAPAR dans ses rapports avec l'ancien franchisé, lui reprochent de l'avoir approvisionné, alors qu'ayant une parfaite connaissance du réseau concurrent, elle savait qu'en le quittant pour adopter l'enseigne Diagonal, propriété de la société Bise, elle aussi affiliée de FRANCAP DISTRIBUTION et ayant le même dirigeant, il violait ses obligations, puisqu'il n'était pas libéré de son engagement antérieur, et qu'elle aurait dû de ce fait refuser de contracter avec lui ;
Que, selon elles, DIAPAR a enfreint sur ce point l'obligation qu'elle avait de se renseigner sur la liberté contractuelle de ce franchisé ;
Qu'elles font aussi grief à DIAPAR d'avoir aidé la Sarl Volant à violer ses obligations en contractant avec elle et en lui apportant ainsi une aide par une participation active et en parfaite connaissance de cause, notamment, en lui suggérant la rupture ;
Que ces actes participent directement de la volonté de désorganisation du réseau PRODIM, ce que démontrent aussi les autres procédures les ayant opposées aux sociétés de la mouvance de FRANCAP DISTRIBUTION, et qu'il s'agit d'actes de concurrence déloyale ;
Qu'elles ajoutent qu'en raison de la liquidation judiciaire de la Sarl Volant, elles n'ont pu exécuter la sentence arbitrale, et demandent de réparer le préjudice qu'elles ont subi du fait du non renouvellement des contrats de franchise et d'approvisionnement, soit une année de cotisations de franchise impayées et une indemnité pour la désorganisation du réseau ;
Considérant que DIAPAR se présente comme un grossiste alimentaire livrant tout commerce alimentaire, sous enseigne ou non, sans exclusivité d'approvisionnement, sans qu'il y ait de contrat écrit, sans clause de non concurrence ou de réseau, et sans pacte de préférence en cas de cession de fonds de commerce ; qu'elle conteste avoir démarché la Sarl Volant et lui avoir apporté une aide, ajoutant qu'elle n'a fait que constater la rupture des relations entre les appelantes et leur ex-franchisé et que la circonstance qu'elle l'a approvisionné après cette rupture n'est pas de nature à établir l'existence d'une faute à son encontre ;
Qu'elle observe que les appelantes ont été indemnisées par les dommages et intérêts alloués par la sentence arbitrale et qu'elles n'établissent pas que le réseau PRODIM aurait été désorganisé, que s'agissant de CSF, sa réclamation qui porte sur la période de novembre 1996 à novembre 2001, alors que la sentence arbitrale a fixé la fin du contrat au 6 novembre 2006, ne peut qu'être rejetée, d'autant que le contrat ne prévoyait pas d'approvisionnement exclusif et qu'une telle clause serait illicite en l'absence de spécificité des marchandises vendues ;
Qu'elle qualifie de particulièrement téméraire et d'acharnement judiciaire l'action engagée contre elle et demande, en conséquence, que des dommages et intérêts pour procédure abusive lui soient alloués ;
Considérant que force est de constater que pas plus qu'en première instance, les sociétés PRODIM et CSF n'établissent les griefs qu'elles formulent à l'encontre de DIAPAR ;
Que, comme l'a relevé, le tribunal il y a une probabilité de contacts pré-contractuels entre DIAPAR et la Sarl Volant avant la dénonciation du contrat de franchise, mais pas de preuve de ceux-ci ;
Que la sentence rendue par les arbitres a considéré que la rupture des contrats avait été effective au 5 novembre 1996 ;
Qu'au moment où DIAPAR a établi des relations avec la Sarl Volant, les anciens liens contractuels avec les sociétés PRODIM et CSF avaient été rompus sans son aide ;
Que DIAPAR est un grossiste et il n'y avait pas de clause d'approvisionnement exclusif, ce dont il résulte que le fait pour DIAPAR d'honorer les commandes de la Sarl Volant après cette date n'est pas fautif ;
Qu'enfin, la sentence a accordé à PRODIM l'indemnisation de la rupture des contrats de franchise et d'approvisionnement ;
Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement sur le rejet des demandes des sociétés PRODIM et CSF ;
Sur les autres demandes :
Considérant que la circonstance que DIAPAR a succédé aux appelantes pour approvisionner la Sarl Volant a pu les conduire à se méprendre sur leurs droits et qu'il n'y a pas d'abus de procédure caractérisé ;
Que le jugement sera confirmé sur le rejet de la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par DIAPAR ;
Considérant que l'équité commande en appel de condamner les sociétés PRODIM et CSF à payer à DIAPAR une indemnité de 8000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter leur demande ;
PAR CES MOTIFS,
Déclare l'appel recevable,
Confirme le jugement, sauf sur le rejet de la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive de la société FRANCAP DISTRIBUTION,
Statuant à nouveau
Condamne les sociétés PRODIM et CSF à payer à la société FRANCAP DISTRIBUTION 10.000 € à titre de dommages et intérêts et une indemnité de 8000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne les sociétés PRODIM et CSF à payer à la société DIAPAR une indemnité de 8000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande des sociétés PRODIM et CSF au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne les sociétés PRODIM et CSF aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT