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16/09/2008 | FRANCE | N°06/13044

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0135, 16 septembre 2008, 06/13044


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
21ème Chambre C

ARRET DU 16 Septembre 2008
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 13044

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Octobre 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG no 05 / 9873

APPELANTE

1o- Mademoiselle Amena X...
...
93340 LE RAINCY
représentée par Me Arnaud DUQUESNOY, avocat au barreau de PARIS, toque : J. 143, substitué par Me Elise DANGLETERRE, avocat au barreau

de PARIS,

INTIMEE

2o- SAS O. G. F.
31, rue de Cambrai
75946 PARIS CEDEX 19
représentée par Me Olivier KHATCHIK...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
21ème Chambre C

ARRET DU 16 Septembre 2008
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 13044

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Octobre 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG no 05 / 9873

APPELANTE

1o- Mademoiselle Amena X...
...
93340 LE RAINCY
représentée par Me Arnaud DUQUESNOY, avocat au barreau de PARIS, toque : J. 143, substitué par Me Elise DANGLETERRE, avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE

2o- SAS O. G. F.
31, rue de Cambrai
75946 PARIS CEDEX 19
représentée par Me Olivier KHATCHIKIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0619,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Juin 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Marie-Pierre DE LIEGE, Présidente
Mme Irène LEBE, Conseillère
Mme Hélène IMERGLIK, Conseillère
qui en ont délibéré

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats,

ARRET :

- CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par Mme Marie-Pierre DE LIEGE, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LES FAITS :
Mlle Amena X... a été engagée par la SA OGF, le 12 septembre 2003, en qualité d'assistante de direction, rattachée à direction des ressources humaines, suivant contrat à durée déterminée jusqu'au 14 septembre 2004.
Elle a ensuite été reconduite dans ses fonctions, statut cadre, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, daté du 13 septembre 2004.
Le 6 juillet 2005, elle a été convoquée à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 18 juillet, avec mise à pied à titre conservatoire. L'entretien préalable a ensuite été reporté au 27 juillet 2005.
Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 3 août 2005, elle a été licenciée pour faute grave.
La salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 9 août 2005, contestant son licenciement, réclamant diverses indemnités à ce titre ainsi que des dommages et intérêts pour violation du principe d'égalité de rémunération entre CDD et contrat à durée indéterminée.
Par jugement du 17 octobre 2006, section encadrement, chambre 6, le conseil de prud'hommes a débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes ainsi que son employeur de sa demande reconventionnelle.
Mlle Amena X... a régulièrement fait appel de cette décision. Elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de dire son licenciement abusif, de dire que l'article 5 alinéa 4 du titre II du règlement intérieur de la SA OGFest nul en application de l'article L. 122-49 alinéa 3 du code du travail et ne saurait lui être opposable, ou à tout le moins doit être écarté comme contraire à l'article L. 122-35 alinéa un du code du travail.
Elle demande à la cour de condamner la SA OGF. aux sommes suivantes :
-2. 369, 66 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied ;
-7. 101, 98 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 710, 89 euros, pour congés payés afférents ;
-473, 93 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
-35. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.
Elle demande en outre à la cour de juger que la SA OGF a violé le principe légal d'égalité de rémunération entre CDD et CDI et de condamner en conséquence son ancien employeur à lui verser la somme de 3. 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Elle sollicite enfin 5. 000 euros pour frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SA OGF a fait appel incident. Elle demande à la cour de confirmer la décision du conseil de prud'hommes sur les deux chefs de demandes essentiels, licenciement abusif et violation du principe de parité de rémunération entre contrats à durée déterminée et indéterminée.

Elle sollicite 3. 000 euros pour frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'entreprise compte plus de 11 salariés.
Le salaire brut moyen mensuel de Mlle Amena X... est de 2. 369, 66 euros sur 13 mois soit, une moyenne brute sur l'année de 2. 566 euros.
La convention collective applicable est celle des pompes funèbres.

LES MOTIFS DE LA COUR :
Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur les circonstances dans lesquelles est intervenu le licenciement pour faute grave de Mlle Amena X... :
Les relations de travail se sont tout d'abord développées de manière satisfaisante entre Mlle Amena X... et M. S..., à telle enseigne, que celui-ci a fait en sorte de transformer le contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail indéterminé avec une augmentation de salaire à ce moment de l'ordre de 7 %.
Selon la salariée, M. S... aurait changé d'attitude à son égard au cours du quatrième trimestre de 2004, ce qui aurait amené cette dernière à s'en ouvrir une première fois par oral, ce qui n'est pas utilement contesté par l'employeur, auprès du président-directeur général M. Q... en janvier 2005.
Mlle Amena X... soutient qu'en l'absence de toute réaction de ce dernier, sa situation professionnelle a continué de se dégrader, se voyant progressivement cantonner à des tâches exclusivement matérielles de secrétariat. Mlle Amena X..., a ensuite fait l'objet d'un arrêt maladie du 20 juin 2005 au 3 juillet 2005, arrêt dont elle dit qu'il était lié à « l'animosité de M. S... à son égard », celui-ci ayant, d'ailleurs, déclenché une contre visite médicale le 28 juin 2005, d'où il est ressorti que l'arrêt de travail était justifié dans sa totalité.
Le 1er juillet 2005, Mlle Amena X... a alors rédigé une lettre à l'intention de M. Le rouge, lettre qui lui a été adressée le 5 juillet et dans laquelle elle dénonçait, la situation de dénigrement dont elle prétend qu'elle faisait l'objet. M. Q..., le PDG de l'entreprise, n'a pas répondu à cette lettre.
En revanche, dès le 6 juillet elle était convoquée dans le bureau de M. S..., qui selon ses dires l'aurait incitée à démissionner, ce qui n'est ni établi, ni clairement contesté. Le même jour, il lui a été notifié une mise à pied conservatoire « en raison de faits graves portés à notre connaissance et troublant profondément l'organisation de nos services ».

Le même jour également lui était adressée une lettre recommandée la convoquant à un entretien préalable fixé le 18 juillet, en présence de M. QA..., directeur du personnel placé sous l'autorité de M. S..., lettre signée de M. S... lui-même au motif « d'une atteinte à l'honneur à la probité et à l'image d'un cadre dirigeant étant susceptible d'une faute grave » (article 5 titre II du règlement intérieur).
Le lendemain, 7 juillet 2005, Mlle Amena X... adressait une nouvelle lettre recommandée à M. S... avec copie à M. Q... dénonçant le « chantage " dont elle disait être l'objet.
M. QA... a renvoyé ensuite l'entretien préalable au 27 juillet 2005 « en compagnie de M. Denis S... ».
Le 3 août 2005, par lettre signée de M. QA..., la SA OGF notifiait à Mlle Amena X... son licenciement pour faute grave, licenciement dont l'intéressée a contesté l'ensemble des motifs par courrier recommandé du 10 août 2005 avant de saisir le conseil des prud'hommes.

Sur les reproches formulés à l'encontre de la salariée pour justifier son licenciement pour faute grave :
La lettre de licenciement datée du 3 août 2005 adressée par lettre recommandée avec avis de réception à la salariée, longue de cinq pages, articule les reproches faits à celle-ci autour de deux griefs principaux :
1) critiques malveillantes, excessives et dénigrantes :
- L'employeur, rappelle tout d'abord l'article 5 alinéa 4 du titre II du règlement intérieur d'OGF qui prévoit : « toute allégation, tout propos qui seraient de nature à porter atteinte à l'image et / ou à nuire aux intérêts du groupe OGF ou à l'un de ses dirigeants dans l'exercice de sa fonction sera considéré comme une faute grave, justiciable d'un licenciement sans préavis ni indemnité de rupture ».
Il vise ensuite une lettre datée du 1er juillet mais remise à son destinataire le 5 juillet 2005, rédigée par Mlle Amena X... et adressée à M. Q..., PDG de la SA OGF, dans laquelle celle-ci se plaint d'un retrait de missions et d'un harcèlement moral, mettant ceux-ci en perspective avec la vie privée de M S..., le directeur des ressources humaines auquel est rattachée Mlle Amena X....
L'employeur indique qu'il considère que par ses propos,- « je lie ce changement avec l'arrivée dans la société d'une personne avec laquelle M. Denis S... a eu préalablement des relations intimes et qu'il me semble vouloir protéger en tentant de me contraindre à la démission... Je vous précise être en possession d'éléments de preuve de l'ensemble des faits précités »-, Mlle Amena X... a porté atteinte à la vie privée d'un salarié en vue de lui nuire, de porter le discrédit auprès de son supérieur hiérarchique. Il indique : « que ce soit au regard de notre règlement intérieur qu'au regard de la jurisprudence portant de la Cour de Cassation (sic) ces propos malveillants et dénigrants, relatifs qui plus est à l'intimité de la vie privée et adressés dans une lettre au supérieur hiérarchique de M. Denis S... sont constitutifs, en eux-mêmes d'une faute grave ».

- en ce qui concerne le harcèlement moral dont la salariée se dit victime de la part de M. S..., l'employeur indique avoir conduit une enquête, suite au courrier du 5 juillet qui n'a pas permis de révéler l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral. Il indique « en conclusion nous considérons que vos propos sur l'existence d'un harcèlement moral sont calomnieux et constitutifs eux aussi d'un dénigrement d'un cadre dirigeant s'inscrivant dans le cadre de l'article 5 alinéa 4 du titre II du règlement intérieur et donc en eux-mêmes une faute grave ».
- à propos des retraits de missions, l'employeur indique que c'est à tort que la salariée se considère comme « l'assistante attitrée » de M. S..., rappelant qu'aux termes du contrat de travail, elle doit « assister le directeur des ressources humaines et ses équipes... » ; il indique l'enquête a permis de révéler qu'il lui a " toujours et sans interruption été confié des travaux " mais a fait « en outre surgir des comportements professionnels et relationnels fautifs comportant des fautes préalables, portées à votre connaissance après le courrier du 5 juillet 2005 ».
2) Les comportements professionnels et relationnels fautifs :
L'employeur indique qu'en raison de sa « croyance erronée » de ce qu'elle était l'assistante attitrée et exclusive de M. S..., Mlle Amena X... n'accomplissait plus les travaux pourtant dévolus à sa responsabilité mentionnée à l'article 2 de son contrat de travail, ajoutant « direction de l'administration du personnel, direction du personnel, service juridique social et des relations collectives, tous attestent lors de l'enquête que vous n'accomplissiez pas les tâches qu'ils pouvaient vous confier ou que vous auriez dû spontanément réaliser tel que, à titre de simple exemple, classement de documentation, photocopie... Alors même que ces taches sont prévues par votre contrat de travail. Il est patent que vous avez redéfini unilatéralement le contenu de vos missions en laissant de côté celles qui vous apparaissent les moins nobles. Ce comportement professionnel est constitutif d'une faute qui vous avait été oralement signalée ».
Enfin, l'employeur indique que l'enquête interne a révélé que le comportement de Mlle Amena X..., tant en interne qu'en externe, était sélectif et parfois méprisant, hautain et déplacé, disant que cette attitude est attestée par Mme G secrétaire à la direction des investissements et de l'immobilier, et en externe par « des prestataires extérieurs comme le cabinet d'avocats Barthélémy de Nantes », invoquant un courrier personnel et confidentiel daté du 26 mai 2005 adressé à M. S... « pour lui faire part du caractère désagréable des conversations téléphoniques que vous aviez avec son secrétariat ainsi qu'avec Me Ch. ", fait également constitutif selon l'employeur d'une faute grave. L'employeur ajoute enfin : « en réalité c'est dans les jours qui ont suivi votre transformation de CDD en contrat à durée indéterminée que votre attitude, tant professionnelle que relationnelle s'est dégradée ».
Pour qu'un licenciement soit fondé, il doit reposer sur un ou plusieurs griefs, imputables au salarié, qui doivent être objectifs, c'est-à-dire matériellement vérifiables, établis et exacts c'est-à-dire constituant effectivement la cause réelle de ce licenciement.
La cause doit également être sérieuse, en ce sens que les faits invoqués doivent être suffisamment pertinents pour fonder le licenciement.
Le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il estime utile.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits constituant une violation des obligations du contrat de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis. La preuve doit en être rapportée par l'employeur ; la lettre de licenciement circonscrit les limites du litige.
S'agissant de cette lettre de licenciement, il est remarquable que celle-ci se présente, dans son intégralité comme une réponse, argumentée par l'employeur, à la lettre datée du 1er juillet 2005 adressé par Mlle Amena X... à M. Q.... Un certain nombre de question qui y sont évoquées sont sans intérêt au regard des griefs fondant le licenciement comme le fait de savoir si Mlle Amena X... était l'assistante du directeur ou de la direction. Ils ne seront pas repris ici.
Au-delà, et bien que la lettre de licenciement soit longue de cinq pages, force est de constater, que si les griefs sont multiples, ils ne sont, dans leur quasi-totalité, formulés que dans des termes vagues, sans précision aucune quant à leurs circonstances, ce qui ne permet pas à la cour d'exercer son contrôle.
Seuls deux griefs sont évoquées avec une précision suffisante : celui concernant l'atteinte à la vie privée de M. S..., les phrases de la lettre du 1er juillet de la salariée, à ce sujet, étant reprises dans la lettre de licenciement et la référence au témoignage de Mme G et au courrier personnel de Me Ch.
S'agissant de l'atteinte à la vie privée, pour désagréables que soient toujours ce genre de propos, notamment quand ils mélangent vie privée et vie professionnelle, force est de constater, d'une part que les « révélations » ainsi faites par Mlle Amena X... ne sont que de portée très limitée quant à leur contenu, ne sont adressés qu'à une seule personne, le PDG de l'entreprise, et concernent un responsable de l'entreprise dont la salariée dit, sans être utilement contredite, qu'il ne faisait pas mystère de sa vie privée, qui l'avait d'ailleurs amené à avoir également des relations d'une nature personnelle avec la soeur même de Mlle Amena X....
Si le propos et la stratégie de la salariée quand elle développe ce genre de propos sont de manière certaine désagréable, pour autant, dans les circonstances de l'espèce, ils ne suffiraient pas à fonder à eux seuls une faute grave.
Quant aux deux témoignages invoqués à l'appui de l'autre grief, ces deux éléments, ne rendent compte que d'une attitude parfois désagréable, voire méprisante de la salariée incriminée, étant par ailleurs relevé que le témoignage de Mme G. a une portée probante limitée, celle-ci étant employée dans la même entreprise et que la lettre de Me Ch. ne constitue pas un témoignage en bonne et due forme. Ces faits, ne sauraient justifier sérieusement un licenciement.
Sur les autres reproches, formulés dans des termes vagues, c'est-à-dire qui ne sont pas matériellement vérifiables, l'employeur produit, dans le cadre du dossier, un certain nombre d'attestations, étant relevé que celles-ci sont toutes sujettes à caution dans la mesure où elles émanent de salariés de l'entreprise.
En dépit des griefs accumulés, aucun de ceux-ci ne caractérise une faute grave pouvant fonder un licenciement.
En réalité d'ailleurs, la lecture de la lettre de licenciement fait clairement apparaître que, pour retenir la faute grave, l'employeur, certainement conscient de l'imprécision et de la portée limitée de ses griefs, plus que les griefs eux-mêmes, invoque le fait que ceux-ci constitueraient autant d'atteintes à l'article 5 du règlement intérieur dont la violation est, selon ce règlement, constitutive de faute grave, faisant découler directement le licenciement pour faute grave de l'application de cet article du règlement intérieur.
Or, cet article qui prévoit que " toute allégation, tout propos qui serait de nature à porter atteinte à l'image et, ou à nuire aux intérêts du groupe OGM ou à l'un de ses dirigeants dans l'exercice de sa fonction sera considérée comme une faute grave justifiable d'un licenciement sans préavis ni indemnité de rupture " de par sa rédaction même, extrêmement large, porte manifestement atteinte, de manière non proportionnée avec le but recherché, au droit d'expression et de critiques dont tout salarié doit pouvoir bénéficier au sein de l'entreprise. L'atteinte est d'autant plus forte que la menace est précise et grave, sans aucune distinction selon les circonstances, les salariés ou les fonctions : un licenciement pour faute grave. Or, le type d'activité qui fait le quotidien de la SA OGF ne justifie en rien une telle restriction de la liberté d'expression et de critiques de ses salariés.
Cet article du règlement intérieur est donc illicite au regard de l'article L. 1321-3, al 2 du nouveau code du travail, comme limitant gravement, voire empêchant, toute interpellation, toute critique, en interne, vis-à-vis des responsables et du fonctionnement du groupe OGF.
La cour infirmera donc la décision du conseil de prud'hommes en ce qu'elle a retenu la violation de cet article du règlement intérieur pour considérer la faute grave établie, disant par ailleurs qu'aucun des reproches formulés n'apparaît suffisamment précis, grave et sérieux pour justifier un licenciement.

Sur la cause réelle de licenciement :
Au terme de la loi, aucun salarié ne peut être licencié pour avoir subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement moral ou avoir témoigné de tels agissements ou les avoirs relatés.
Or en l'espèce, l'enchaînement des circonstances relatées ci-dessus, l'absence de tous griefs formulés à l'encontre de la salariée par son employeur, avant le 1er juillet 2005, puis la mise à pied et l'envoi d'une convocation à entretien préalable en vue d'un licenciement le lendemain même de la réception de la lettre de Mlle Amena X... datée du 1er juillet et dans laquelle celle-ci se plaignait du traitement qui lui était réservé, démontre, sans aucun doute possible, la relation directe entre cette lettre et la procédure de licenciement engagée dès sa réception. La lettre de la salariée du 1er juillet 2005 constitue, en réalité, la cause de son licenciement.
Cette circonstance, fait que ledit licenciement est nul en application de l'article L. 1152-1 et suivants du nouveau code du travail, comme le soutient Mlle Amena X... sans en tirer davantage de conséquences.
Compte tenu de ce licenciement abusif, la cour fera droit aux demandes de la salariée qui en découlent dans les proportions suivantes :
- en ce qui concerne le rappel de salaire pour mise à pied du 6 juillet 2005 au 4 août 2005 la cour accordera la somme de 2. 369, 66 euros.
- en ce qui concerne le préavis, la convention collective applicable prévoyant trois mois de préavis, il sera fait droit à la demande de la salariée pour un montant de 7. 108, 98 euros outre 710, 89 euros pour congés payés afférents ;
- une indemnité de licenciement d'un montant de 473, 930 sera également accordée ;
- en ce qui concerne les dommages et intérêts dus en application de l'article L. 122-14-5 (ancien) du code du travail, compte tenu du préjudice qui en est résulté pour la salariée, la cour condamnera l'employeur à lui verser une somme de 20. 000 euros.
Sur le principe de l'égalité salariale entre CDD et CDI :
La cour considère que c'est après une analyse exacte des faits et en fonction de motifs justes et pertinents qu'elle reprend à son compte, que le conseil de prud'hommes a dit que la salariée, dans les circonstances de l'espèce, n'était pas fondée à porter réclamation sur le point et l'a déboutée de sa demande, étant relevé que l'augmentation de 7, 11 % accordée lors du passage en contrat à durée indéterminée relevait légitimement de la décision de l'employeur, qui, après une année de collaboration, a souhaité revaloriser le salaire de l'intéressée.
Mlle Amena X... sera donc déboutée de cette demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile :
Les circonstances de l'espèce justifient de faire droit aux demandes formulées par Mlle Amena X... relatives à des dommages et intérêts pour frais irrépétibles engagés dans le cadre de cette procédure, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il lui sera donc accordé une somme de 2. 000 euros à ce titre pour l'ensemble de la procédure.

PAR CES MOTIFS,
En conséquence, la Cour,
Infirme la décision du conseil de prud'hommes sauf en ce qu'il a débouté Mlle Amena X... de sa demande relative à des dommages et intérêts pour inégalités de salaires entre CDD et CDI,
Dit le licenciement de Mlle Amena X... dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Condamne la SA OGF à lui régler les sommes suivantes :
-20. 000euros (VINGT MILLE EUROS) en application de l'article L. 122-14-5 (ancien) du code du travail, avec intérêts de droit à compter de ce jour,
-7. 108, 98 euros (SEPT MILLE CENT HUIT EUROS et QUATRE VINGT DIX HUIT CENTIMES) à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 710, 89 euros pour congés payés afférents,
-473, 93 euros (QUATRE CENT SOIXANTE TREIZE EUROS et QUATRE VINGT TREIZE CENTIMES) à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
-2. 369, 66 euros (DEUX MILLE TROIS CENT SOIXANTE NEUF EUROS et SOIXANTE SIX CENTIMES) à titre de rappel de salaire,
ces sommes avec intérêts de droit à compter du jour de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes,
Déboute les parties du surplus de leur demandes,
Condamne la SA OGF à régler à Mlle Amena X... la somme de 2. 000 euros (DEUX MILLE EUROS) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure
La condamne aux entiers dépens de l'instance.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0135
Numéro d'arrêt : 06/13044
Date de la décision : 16/09/2008

Références :

ARRET du 24 mars 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 24 mars 2010, 08-44.994, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 17 octobre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-09-16;06.13044 ?
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