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06/06/2008 | FRANCE | N°06/5679

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0164, 06 juin 2008, 06/5679


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 6 JUIN 2008

(no , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/05679

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Février 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 04/18963

APPELANTE et INTIMEE

La SARL CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE,

agissant poursuites et diligences de son gérant,

dont le siège social est 22, rue Mouffetard

75005

PARIS

représentée par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour

assistée de Maître Sandrine BOUVIER -RAVON, avocat au Barreau de Paris,
...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 6 JUIN 2008

(no , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/05679

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Février 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 04/18963

APPELANTE et INTIMEE

La SARL CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE,

agissant poursuites et diligences de son gérant,

dont le siège social est 22, rue Mouffetard

75005 PARIS

représentée par la SCP NARRAT - PEYTAVI, avoués à la Cour

assistée de Maître Sandrine BOUVIER -RAVON, avocat au Barreau de Paris,

(ass HOLLIER LAROUSSE et a) P362.

INTIMÉES et APPELANTES

L'ASSOCIATION ECOLE CFJ

en la personne de ses représentants légaux,

dont le siège social est 35, rue du Louvre

75002 PARIS

représentée par la SCP TAZE-BERNARD - BELFAYOL-BROQUET, avoués à la Cour

assistée de Maître Estelle BENATTAR, avocat au Barreau de Paris,

(SCP GRANRUT) P14.

La société GRANDE ARMEE INVESTISSEMENTS

venant aux droits de la SA EDITION FORMATION ENTREPRISE

en la personne de ses représentants légaux,

dont le siège social est 50 bis, avenue de la Grande Armée

75017 PARIS

représentée par la SCP TAZE-BERNARD - BELFAYOL-BROQUET, avoués à la Cour

assistée de Maître Estelle BENATTAR, avocat au Barreau de Paris,

(SCP GRANRUT) P14.

La CFPJ,

en la personne de son représentant légal

dont le siège social est 35, rue du Louvre

75002 PARIS

représentée par la SCP TAZE-BERNARD - BELFAYOL-BROQUET, avoués à la Cour

assistée de Maître Estelle BENATTAR, avocat au Barreau de Paris,

(SCP GRANRUT) P14.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 avril 2008, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur GIRARDET, président,

Madame REGNIEZ , conseiller,

Monsieur MARCUS, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : L. MALTERRE-PAYARD

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur GIRARDET, président et par Madame L. MALTERRE PAYARD, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La cour est saisie d'appels interjetés, d'une part, par la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE SARL, d'autre part, par les sociétés EDITION FORMATION ENTREPRISE SARL en réalité SA (actuellement GRANDE ARMEE INVESTISSEMENTS ci-après GAI) et CENTRE DE FORMATION PERMANENTE DES JOURNALISTES (ci-après CFPJ) ainsi que l'association ECOLE CFJ, d'un jugement rendu le 22 février 2006 par le tribunal de grande instance de Paris.

Il sera rappelé que la société EFE SA est propriétaire de la marque CFJ déposée le 30 septembre 2003 sous le no 3 248 480 pour désigner des produits et services des classes 16, 38 et 41 dont notamment ; "... matériel d'instruction et d'enseignement (à l'exception des appareils), documents pédagogiques tels que polycopiés, carte graphiques, programmes de cours, dossiers ; Service d'éducation et de formation, service d'enseignement notamment pour la formation ou le perfectionnement dans le domaine du journalisme et des techniques de traitement de l'information, service de perfectionnement aux techniques de traitement de l'information, services de formation continue dans le domaine du journalisme et des techniques de traitement de l'information, service de formation permanente, service de perfectionnement dans le domaine de l'information et des relations avec la presse, pour les entreprises, administrations, collectivités et associations. services de perfectionnement en presse écrite, audiovisuelle, multimédia et en langues ; organisation et conduite d'ateliers de formation, de colloques, de conférences, de congrès, de séminaires, de symposiums notamment dans le domaine du journalisme et de la formation aux techniques de traitement de l'information."

La société par actions simplifiée CFPJ soutient être titulaire de l'enseigne et du nom commercial CFJ qui désigne une école de journalisme, rue du Louvre à Paris.

Les sociétés EFE SA et CFPJ, reprochant à la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE, d' avoir commis des actes de contrefaçon de la marque CFJ pour la première et d'usurper son nom commercial et son enseigne pour la seconde, ont assigné cette société devant le tribunal de grande instance, par acte d'huissier du 30 novembre 2004, sur le fondement de la contrefaçon, pour la première, et de concurrence déloyale, pour la seconde.

L'association ECOLE CFJ, qui exploite l'école de journalisme rue du Louvre à Paris, utilise la dénomination CFJ et est bénéficiaire de la licence de la marque ci-dessus mentionnée, est intervenue volontairement dans la procédure, agissant sur le fondement de la concurrence déloyale.

La société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE avait notamment opposé la nullité de la marque sur le fondement des articles L. 711-2 et L.711-3 du Code de la propriété intellectuelle.

Par le jugement entrepris, le tribunal a :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de l'association ECOLE CFJ,

- débouté la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE de sa demande de nullité de la marque CFJ,

- dit qu'en ayant acheté à la société GOOGLE l'adword CFJ et en ayant réservé et en utilisant le nom de domaine www.groupecfj.com, la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE a commis des actes de contrefaçon respectivement par reproduction et par imitation de la marque CFJ no 3 248 480 dont est titulaire la société EDITION FORMATION ENTREPRISE au préjudice de cette dernière,

- fait interdiction à la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE d'utiliser le nom de domaine www.groupecfj.com au delà d'un délai de 2 mois suivant la signification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai, le tribunal se réservant de pouvoir liquider l'astreinte,

- condamné la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE à payer à la société EDITION FORMATION ENTREPRISE la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- débouté les demanderesses pour le surplus,

- condamné la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE à payer à la société EDITION FORMATION ENTREPRISE la somme de 6.000 euros par application de l'article 700 du (nouveau) Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE aux dépens .

Par arrêt en date du 8 juin 2007, la présente cour a ordonné la réouverture des débats afin que notamment la société GAI, qui dit venir aux droits de la société EFE SA, donne toute précision sur sa forme juridique et produise tous documents utiles.

Après production de documents complémentaires, la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE a, par conclusions du 9 avril 2008, demandé à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris mais seulement en ce qu'il a refusé de reconnaître la contrefaçon du signe CFJ et en ce qu'il a débouté la société CFPJ et l'association ECOLE CFJ de leurs demandes fondées sur la concurrence déloyale,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté la commission d'actes de contrefaçon de la marque CFJ par la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE par la réservation du nom de domaine "groupecfj.com" et l'achat de l'adword CFJ et l'a condamnée de ce chef,

- dire que la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE dispose du droit à continuer d'utiliser le signe CFJ et le nom de domaine "groupecfj.com" à titre de nom commercial,

A titre reconventionnel :

- constater que la marque CFJ a été déposée en fraude des droits de la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE,

- outre une mesure de publication, prononcer l'annulation de la marque CFJ no 3 248 480 et ordonner la transcription de l'arrêt à intervenir sur le Registre National des Marques aux fins de radiation,

- annuler le contrat de licence entre la société EDITION FORMATION ENTREPRISE et la société ECOLE CFJ enregistré au Registre National des Marques sous le no 414 789,

- dire que la société EDITION FORMATION ENTREPRISE a porté atteinte au nom commercial de la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE en sélectionnant les mots-clefs "cfj" et "groupecfj" dans le cadre de campagnes publicitaires sur les moteurs de recherche GOOGLE et YAHOO,

- dire que la société EDITION FORMATION ENTREPRISE a porté atteinte au nom commercial et à la dénomination sociale de la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE en laissant apparaître sur le moteur de recherche www.google.fr un lien commercial dirigeant les internautes vers le site www.ipcj.fr à partir de la requête "centre de formation juridique",

- dire que la société EDITION FORMATION ENTREPRISE a commis des actes préjudiciables aux intérêts commerciaux et financiers de la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE, notamment en l'empêchant de se référencer sur le moteur de recherche GOOGLE sous le mot-clef "cfj",

- condamner la société EDITION FORMATION ENTREPRISE à payer à la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE la somme de 75 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner solidairement les sociétés intimées à lui payer la somme de 25 000 euros au titre de l'article 700 du (nouveau) Code de procédure civile,

- condamner la société EFE à lui rembourser les frais d'huissier supportés au titre des constats des 8, 11 décembre 2006 et 3,4 janvier et 6 février 2007,

- les condamner aux entiers dépens dont le recouvrement sera assuré par la SCP NARRAT PEYTAVI, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du (nouveau) Code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions du 11 avril 2008, la société GAI, l'association ECOLE CFJ et la société CFPJ demandent à la cour de :

- déclarer irrecevable la demande de la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE tendant à l'annulation de la marque CFJ no 3 248 480 pour dépôt frauduleux en tant qu'elle constitue une demande nouvelle,

- déclarer irrecevable la demande de la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE fondée sur l'article L. 713-6 du Code de la propriété intellectuelle,

- confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a refusé de considérer la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE comme auteur d'actes de contrefaçon par reproduction ou imitation du signe CFJ à titre de logo sur les pages de son site Internet et sur ses documents commerciaux, et comme auteur d'actes de concurrence déloyale à l'égard de la société CFPJ et de l'association ECOLE CFJ,

- outre des mesures de confiscation et de publication, condamner la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE à verser, d'une part, la somme de 50.000 euros à la société GAI à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de la contrefaçon, et, d'autre part, les somme de 50.000 euros à la société CFPJ et de 50.000 euros à l'association ECOLE CFJ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né des actes de concurrence déloyale, ainsi que la somme de 15 000 euros à chacune d'elles en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera directement poursuivi par la SCP TAZE BERNARD-BELFAYOL BROQUET, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR :

Considérant que selon la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE , les premiers juges l'ont à tort condamnée pour contrefaçon, en écartant les dispositions de l'article L. 713-6 du Code de la propriété intellectuelle, alors qu'elle fait usage, depuis 2002, soit avant le dépôt de la marque, du sigle "CFJ" à titre de nom commercial, comme en font foi, selon elle, les documents versés aux débats en appel ;

Considérant que les sociétés GAI et CFPJ, l'association Ecole CFJ estiment que les premiers juges ont à tort exclu de la contrefaçon, l'apposition du sigle CFJ sur les pages de son site internet et sur des documents commerciaux associé à sa dénomination CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE et ont, de manière injustifiée, rejeté les demandes en concurrence déloyale ;

Considérant qu'il sera au préalable observé que bien que les sociétés GAI, CFPJ et l'association Ecole CFJ aient des liens économiques certains, chacune de ces entités juridiques dispose de droits propres de telle sorte que ceux qui sont personnels à l'une ne sauraient du seul fait des intérêts qu'elles peuvent avoir avec la société mère (la société GAI) être étendus à cette dernière;

Qu'il doit être également rappelé que la société GAI revendique des droits sur la marque déposée le 30 septembre 2003 et agit en contrefaçon de sa marque, que la société CFPJ revendique des droits sur le nom commercial et l'enseigne CFJ de l'école de journalisme rue du Louvre à Paris exploitée par l'association ECOLE CFJ, que cette association en sa qualité de licenciée exclusive de la marque et d'exploitante de l'école excipe également de droits sur ce terme, la société CFPJ et l'association ECOLE CFJ agissant à l'encontre de la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE en concurrence déloyale ou à tout le moins parasitisme ;

Sur la concurrence déloyale ou le parasitisme du fait de l'atteinte portée au nom commercial et à l'enseigne CFJ revendiqués par la société CFPJ

Considérant que la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE demande la confirmation du jugement en invoquant les moyens suivants, étant reconnu par elle (puisqu'elle l'oppose à la marque), qu'elle-même fait usage du sigle CFJ à titre de nom commercial:

- ni la société CFPJ ni l'association ECOLE CFJ créées postérieurement à elle ne justifient faire un usage du nom commercial et disposer de l'enseigne CFJ antérieurement à elle ni avoir acquis un droit sur ce nom commercial lors de l'acquisition des fonds de commerce des sociétés et associations préexistantes (qui ont fait l'objet d'un redressement judiciaire puis d'un plan de cession), n'étant en outre pas démontré que ces sociétés et associations faisaient usage de ce nom commercial et de l'enseigne,

- il n'existe aucun risque de confusion en raison de leurs activités différentes, l'une relative à la formation de journalisme, et, elle, exerçant dans un secteur d'enseignement distinct, celui du droit;

Considérant qu'elle soutient encore qu'il ne saurait lui être reproché des actes de parasitisme tirés de la renommée du Centre de Formation des Journalistes dès lors que la preuve de la renommée du sigle CFJ n'est pas rapportée, qu'elle-même associe toujours le sigle à sa dénomination complète Centre de Formation Juridique et qu'il ne peut dès lors être fait de lien entre elle-même et le Centre de Formation des Journalistes ;

Considérant sur le premier moyen, qu'il est justifié par la société CFPJ immatriculée le 8 août 2003 qu'elle a acquis, en application du plan de cession décidé par jugement du 17 juillet 2003, par un acte non daté mais dont la date du 7 novembre 2003 est certaine (par référence à l'acte de cession daté du 7 novembre 2003, signé par l'association ECOLE CFJ, indiquant qu'il est du même jour que celui conclu avec la CFPJ), tous les éléments d'actifs corporels et incorporels notamment du fonds de commerce de l'association CFJ DEMAIN, cette dernière venant elle-même, ainsi que précisé dans l'acte, aux droits de l'association CFPJ fondée en 1946 ; que si le sigle constituant le nom commercial n'a pas été indiqué en page 4 de l'acte de cession, lors de la définition des éléments incorporels, il n'a été fait aucune réserve sur les éléments incorporels transmis et il a été précisé en page 9 que l'association CFJ DEMAIN avait acquis les éléments incorporels de l'association CFPJ, "soit nom, enseigne, clientèle, marque", en mentionnant notamment le sigle CFJ ; qu'ainsi, la chaîne des droits est établie et qu'il importe peu que la société CFPJ ait été constituée postérieurement à la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE ;

Considérant, par ailleurs, que l'ensemble des documents mis aux débats (notamment les publicités relatives au centre de formation de journalisme et les annuaires concernant la liste des anciens élèves de l'école, tous documents datés de 1992 à 2004) mettent en évidence que le sigle CFJ a été utilisé de manière constante à titre de nom commercial durant toute cette période pour identifier l'entreprise aux yeux des tiers, et à titre d'enseigne, pour désigner l'école dans sa localisation ;

Considérant sur le second moyen, que, contrairement à ce qu'ont dit les premiers juges, s'agissant d'activités d'enseignement s'adressant à une clientèle pour la plus grande part d'étudiants, qui n'ont pas encore de formation professionnelle, et malgré le contenu de l'enseignement qui est différent, l'usage du sigle "cfj" ou "groupecfj" peut laisser penser que ces organismes sont en relation et dépendent du même groupe ; que même si dans la présente instance, la renommée de l'école de la rue du Louvre connue sous le sigle cfj n'est pas démontrée, il subsiste qu'existant depuis 1946, elle est une des filières connue par les étudiants cherchant à poursuivre des études ; qu'il existe à tout le moins un risque de confusion par une association erronée des services proposés par la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE avec ceux proposés par la société CFPJ et l'association ECOLE CFJ, en croyant qu'ils ont une même provenance ;

Considérant encore que contrairement à ce qu'ont dit les premiers juges, la présentation dans les documents commerciaux et sur les pages du site internet du sigle cfj associé par des flèches à chacun des vocables composant sa dénomination sociale n'est pas suffisante pour éviter tout rattachement à l'école de journalisme connue sous ce sigle ; que la société CFPJ qui se prévaut du nom commercial CFJ et la société ECOLE CFJ qui exploite l'école sous ce sigle sont bien fondées dans leur action en concurrence déloyale ; que le jugement sera infirmé sur ce point ;

Sur la demande en nullité de la marque CFJ pour fraude

Considérant que les intimées, exposant que la fraude est invoquée pour la première fois en appel, ont soulevé l'irrecevabilité de cette demande ;

Mais considérant que la société GAI a agi en première instance, en se référant à la marque CFJ; que l'appelante avait soulevé la nullité de la marque sur le fondement des articles L. 711-2 et L. 711-3 du Code de la propriété intellectuelle ; qu'elle n'a pas repris ces fondements en appel mais oppose comme moyen de défense la nullité de la marque déposée en fraude de ses droits ; que dès lors, par application des dispositions de l'article 565 du Code de procédure civile, cette demande qui tend aux mêmes fins que celle formée en première instance n'est pas nouvelle, seul le fondement juridique étant différent ; que la demande en nullité pour fraude est donc recevable;

Considérant que la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE observe qu'alors que les sociétés adverses n'avaient déposé aucune marque, elle ne l'ont fait que dans la perspective de la lui opposer, ayant peu après acquis une société dénommée "LE COURS D'ASSAS" et créé une société, selon statuts du 20 septembre 2004, exerçant dans le domaine de la formation juridique ; qu'en outre, en continuant à opposer cette marque, la société GAI démontre par son comportement qu'elle entend évincer un concurrent du marché, le "groupe EFE" revendiquant détenir la société LE COURS D'ASSAS au titre des sociétés affiliées, société qui exploite une école connue sous la dénomination IPCJ dont l'objet est la préparation au CFRPA ; qu'elle en déduit que l'action a pour seul but de s'approprier le signe CFJ de façon exclusive :

- pour désigner un fonds de commerce relatif à des services de formation et d'enseignement dans le domaine juridique, alors que la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE dispose d'une antériorité dans ce domaine,

- pour ensuite mieux l'évincer en lui retirant le droit d'utiliser les initiales pour lesquelles elle est devenue réputée et permettre aux sociétés créées ou rachetées, de bénéficier indûment de la notoriété acquise sur le sigle "CFJ" ;

Mais considérant que dès lors que, comme il a été dit ci-dessus, la société CFPJ exploite le nom commercial CFJ depuis plusieurs années, antérieurement aux droits invoqués par la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE, (lesquels selon ce qu'elle soutient peuvent être datés de 2002), le dépôt de la marque CFJ par la société mère a été effectué pour renforcer les droits sur ce signe utilisé par ses filiales et non pas pour empêcher la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE d'exercer son activité dans le domaine juridique, cette dernière ne pouvant opposer des droits, comme il a été dit ci-dessus, sur le signe CFJ ; qu'en l'absence de preuve d'un comportement frauduleux, cette demande en nullité sera rejetée ;

Sur la contrefaçon de marque

Considérant que la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE fait grief au jugement d'avoir écarté l'application de l'article L. 713-6 du Code de la propriété intellectuelle alors qu'elle fait un usage antérieur au dépôt de la marque du sigle CFJ à titre de nom commercial ;

Que pour preuve de cette usage, elle verse aux débats des plaquettes publicitaires, des bulletins d'inscription relatives à l'année 2002/2003, des factures de fournisseurs (imprimeur, locations de salles en date de décembre 2002, février à juillet 2003), des notes d'honoraires en date d'avril, juillet et août 2003 adressées au nom de CFJ, la date de réservation du nom de domaine du 21 avril 2003, une publicité dans la revue DALLOZ du 22 mai 2003 portant la référence CFJ et l'adresse internet, des reçus d'avril 2003 d'étudiants pour des remboursements de cours non donnés se référant également au nom CFJ, une lettre de l'URSSAF du 18 avril 2003 au nom de CFJ ;

Considérant qu'au regard de ces documents et principalement des factures de fournisseurs, des reçus, des notes d'honoraires, de la lettre de l'URSSAF, de la publication DALLOZ et de la date de réservation du nom de domaine dont la date est certaine, il est établi que la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE a fait un usage à titre de nom commercial du signe CFJ antérieurement au dépôt de la marque effectuée le 30 septembre 2003 et qu'en conséquence, la société GAI qui ne dispose pas de droits antérieurs n'est pas fondée en son action en contrefaçon; que le jugement sera dès lors infirmé de ce chef ; qu'il sera ajouté qu'il ne peut davantage être valablement fait grief par l'association ECOLE CFJ (en sa qualité de licenciée de la marque) d'avoir commis des actes de concurrence déloyale (autres que ceux déjà retenus), par l'usage de la marque, ne pouvant sur ce fondement se prévaloir de droits sur la marque opposables à la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE ;

Sur les mesures réparatrices du fait de la concurrence déloyale

Considérant qu'eu égard aux circonstances dans lesquelles le signe litigieux a été utilisé, qui a en outre été supprimé des mots-clés internet, et aucun élément ne permettant d'établir que la société CFPJ et l'association ECOLE CFJ auraient subi un préjudice important, la cour estime que ce préjudice sera exactement réparé par l'allocation de la somme de 5000 euros à chacune d'elles, à titre de dommages et intérêts ;

Considérant que les mesures de publication et de confiscation ne sont pas nécessaires ; que le jugement sera sur ce point confirmé ; que les mesures d'interdiction ordonnées par les premiers juges seront également confirmées ;

Sur la demande en concurrence déloyale par atteinte portée à la dénomination CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE dirigée à l'encontre de la société EFE

Considérant que la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE fait grief à la société EFE d'avoir réservé les mots clés "cfj" et "groupecfj" en relation avec des services de formation juridique, hors de son activité (ce qui résulteraient de constats d'huissier de décembre 2006 et d'informations transmises par les moteurs de recherche GOOGLE et YAHOO) et de laisser apparaître sur le moteur de recherche "www.google.fr" un lien commercial dirigeant les internautes sur le site "www.ipcj.fr" à partir de la requête "centre de formation juridique" (selon l'impression d'écran en date du 13 mars 2007) ; qu'elle relève que selon les informations données par les moteurs de recherche, les mots clés "cfj" et groupecfj" ainsi que "capesud, iej, ipesup, jurisformatio et preBarreau" noms de sociétés concurrentes dans le domaine juridique ont, par la suite, été désactivées ; que cette réservation de mots clés apporte la preuve de ce que la société EFE a pour stratégie d'utiliser les signes distinctifs de ses concurrents pour servir son propre référencement sur internet ;

Considérant que la cour relève qu'il existe plusieurs sociétés EFE, l'une actuellement dans la procédure (société GAI qui vient aux droits de la société SA), une autre qui, au regard des documents mis aux débats est une SARL, et également une société EFE CURSUS qui ne sont pas présentes dans la procédure ; que si les constats ci-dessus mentionnés établissent l'existence de liens commerciaux à partir de la dénomination CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE vers les sites "cfj", "groupecfj" et les autres sites cités, ils ne permettent pas d'attribuer la responsabilité des actes incriminés à la société GAI ; qu'en effet, le moteur de recherche GOOGLE a indiqué que l'annonceur des mots clés litigieux était une personne physique, M. ou Mme A..., et YAHOO a, pour sa part, mentionné qu'il s'agissait de la EFE sans indiquer la forme juridique de cette société ; qu'en conséquence, la demande sera rejetée, les actes de concurrence déloyale étant insuffisamment caractérisés à l'égard de la société GAI ; que la demande en paiement des frais de constats d'huissier sera également rejetée ;

Considérant que la demande de dommages et intérêts pour le préjudice qui a été porté à la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE, en l'empêchant de se référencer sur le moteur de recherche GOOGLE sous le mot-clé "cfj" ne saurait prospérer dès lors que la mesure d'interdiction a été confirmée quant à l'utilisation de ce terme ;

Considérant que des raisons d'équité commandent d'allouer à la société CFPJ et à l'association ECOLE CFJ la somme globale de 5000 euros au titre des frais d'appel non compris dans les dépens ;

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a prononcé des mesures d'interdiction et rejeté les mesures de publication et de confiscation, sur la condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens ;

Statuant à nouveau,

Dit recevable la demande en nullité de la marque no 3 248 480 pour fraude ; la dit mal fondée ;

Rejette la demande en contrefaçon de la marque ;

Dit qu'en faisant usage des sigles "cfj", "groupecfj", seul ou associé à la dénomination CENTRE DE FORMATION, la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE a commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société CFPJ et de l'association ECOLE CFJ ;

La condamne à payer à la société CFPJ et à l'association ECOLE CFJ la somme de 5000 euros à chacune à titre de dommages et intérêts ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne la société CENTRE DE FORMATION JURIDIQUE aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SCP TAZE BERNARD, BELFAYOL BROQUET, avoués conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile et à payer la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0164
Numéro d'arrêt : 06/5679
Date de la décision : 06/06/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 22 février 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-06-06;06.5679 ?
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