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30/05/2008 | FRANCE | N°06/22333

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0164, 30 mai 2008, 06/22333


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre-Section B

ARRÊT DU 30 MAI 2008

(no, 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 22333

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Novembre 2002- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 96 / 21296

APPELANTE

La SARL SARA MUSIC PRODUCTIONS
agissant en la personne de son gérant
dont le siège social est 53, rue Boissière
75116 PARIS

représentée par la SCP OU

DINOT FLAURAUD, avoués à la Cour,
assistée de Maître Antoine WEIL, avocat au Barreau de Paris, A369.

INTIMES

Monsieur Daniel Z......

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre-Section B

ARRÊT DU 30 MAI 2008

(no, 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 22333

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Novembre 2002- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 96 / 21296

APPELANTE

La SARL SARA MUSIC PRODUCTIONS
agissant en la personne de son gérant
dont le siège social est 53, rue Boissière
75116 PARIS

représentée par la SCP OUDINOT FLAURAUD, avoués à la Cour,
assistée de Maître Antoine WEIL, avocat au Barreau de Paris, A369.

INTIMES

Monsieur Daniel Z...Z...dit CCC...Daniel
demeurant ...
MADRID
ESPAGNE,

représenté par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN, avoués à la Cour,
assisté de Maître Anne-Laure VALLUIS, avocat au Barreau de Paris,
(SCP ZYLBERSTEIN et a) P153.

Monsieur Jésus C...dit D...D...
...
...
MADRID
ESPAGNE,

représenté par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN, avoués à la Cour,
assisté de Maître Anne-Laure VALLUIS, avocat au Barreau de Paris,
(SCP ZYLBERSTEIN et a) P153.

La société CANCIONES DEL MUNDO
(WARNER CHAPPEL MUSIC ESPANA)
agissant en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 25 Magallanes
28015 MADRID
ESPAGNE

représentée par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN, avoués à la Cour,
assistée de Maître Anne-Laure VALLUIS, avocat au Barreau de Paris,
(SCP ZYLBERSTEIN et a) P153.

SOCIEDAD GENERAL DE AUTORES Y EDITORES
SGAE
agissant en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège VI rue Fernando
no 4 Apartado
28080 MADRID
ESPAGNE

représentée par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN, avoués à la Cour,
assisté de Maître Anne-Laure VALLUIS, avocat au Barreau de Paris,
(SCP ZYLBERSTEIN et a) P153.

Monsieur Maurice F...
...
34000 MONTPELLIER

représenté par Me Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour,
assisté de Maître Catherine G..., avocat au Barreau de Paris, P71,
(SCP FRENCH CORNUT-GENTILLE)

Monsieur Tonino F...
...
34000 MONTPELLIER

représenté par Me Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour,
assisté de Maître Catherine G..., avocat au Barreau de Paris, P71,
(SCP FRENCH CORNUT-GENTILLE)

Monsieur Bruno F...
...
...3ème étage G
34000 MONTPELLIER

représenté par Me Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour,
assisté de Maître Catherine G..., avocat au Barreau de Paris, P71,
(SCP FRENCH CORNUT-GENTILLE)

Monsieur H...dit I...I...
demeurant J......
...
13200 ARLES

représenté par la SCP VERDUN-SEVENO, avoués à la Cour,
assisté de la SCP d'avocats SCHMIDT GOLDGRAB. P391.

Monsieur Nicolas K...
demeurant chez Monsieur André K...
...,
13200 ARLES,

défaillant

Monsieur L...L...
demeurant ...
Villa Mi-Sol
13200 ARLES

défaillant

Monsieur Paul K...dit DDE...
demeurant J......
Route de Tarascon
13200 ARLES

défaillant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 avril 2008, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame REGNIEZ, conseiller, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 11 avril 2008 pour présider la cour en l'empêchement de M. M...,
Monsieur MARCUS, conseiller,
Monsieur Alain OSMONT, conseiller, désigné par la même ordonnance en l'empêchement de Madame REGNIEZ appelée à présider l'audience.
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : L. MALTERRE-PAYARD

ARRÊT :

- contradictoire

-rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame REGNIEZ, conseiller ayant présidé l'audience de plaidoiries et par Madame L. N...PAYARD, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La cour est saisie d'un appel interjeté par la société SARA MUSIC PRODUCTIONS SARL à l'encontre d'un jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 22 novembre 2002.

Il sera rappelé que Monsieur Daniel Z...Z..., dit Danny DANIEL, et Monsieur Jésus O..., dit Sonny D..., sont les auteurs d'une composition musicale intitulée " P...EL AMOR DE UNA Q..." dont ils déclarent avoir, par contrat du 3l mai 1974, cédé les droits d'édition (reproduction, représentation et diffusion) à la société OTILIA MUSIC aux droits de laquelle se trouve la société de droit espagnol CANCIONES DEL MUNDO (WARNER R...MUSIC ESPANA). Les auteurs et l'éditeur sont membres de la Sociedad General des Autores de Espana, ci-après dénommée SGAE, société espagnole de gestion collective des droits d'auteur.

Messieurs Maurice F..., dit GGG..., Tonino F..., Bruno F..., Nicolas K..., L...L..., Paul K..., dit GGH..., et H...I..., dit I..., sont les auteurs d'une oeuvre intitulée " LA DONA ". Ayant constitué le groupe GIPSY KJNGS LOS L..., ils ont, le 28 octobre 1982, conclu un contrat de cession et d'édition portant sur cette œ uvre avec la société SARA MUSIC PRODUCTIONS et, déclaré cette oeuvre à la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique (SACEM) selon bulletin daté du même jour et reçu par celle-ci le 2 décembre 1982.
Estimant que de nombreuses similitudes existaient entre ces deux œ uvres, la société CANCIONES DEL MUNDO a, par lettre de son conseil du 30 novembre 1994, avisé la société SARA MUSIC, et la SGAE a, courant 1995, alerté la SACEM dont les services ont procédé à la comparaison des deux oeuvres.

Puis, par acte des 30 septembre, 3 et 8 octobre 1996, Messieurs Z...Z...et O..., la société CANCIONES DEL MUNDO et la SGAE ont fait assigner Messieurs Maurice, Tonino et Bruno F..., Messieurs Nicolas, L...et Paul K..., Monsieur Jahloul I..., et la société SARA MUSIC afin qu'il soit jugé que l'œ uvre " LA DONA " constitue la contrefaçon de l'oeuvre musicale " P...EL AMOR DE UNA Q...".

Par jugement du 16 janvier 1998, le tribunal de grande instance de Paris a, avant-dire droit, ordonné une expertise confiée à Monsieur Gérard SP1ERS, avec pour mission de rechercher les éventuelles similitudes musicales existant entre les deux œ uvres, examiner les antériorités musicales éventuellement invoquées par les parties, entendre tous sachants et se faire communiquer tous documents utiles, et donner son avis sur le point de savoir si les ressemblances éventuellement constatées entres les deux œ uvres sont le fait d'un emprunt volontaire, d'une copie ou d'une rencontre fortuite.

Après dépôt du rapport de l'expert, et après plusieurs ordonnances du juge de la mise en état statuant sur des incidents de communication de pièces et de nullité de l'assignation, le tribunal a rendu la décision critiquée.

Par ce dernier jugement, le tribunal a :
- rejeté les fins de non-recevoir,
- dit n'y avoir lieu à la mise hors de cause de Monsieur Bruno F...et de la société SARA MUSIC,
- dit n'y avoir lieu à rejeter des débats la pièce communiquée sous le numéro 26 par les demandeurs,
- dit qu'il est justifié, par Messieurs Daniel Z...Z...et Jésus O..., la société CANCIONES DEL MUNDO et la S. G. A. E., de l'antériorité de l'oeuvre " P...EL AMOR DE U..." sur la version publiée de l'oeuvre " LA DONA ",
- annulé le rapport d'expertise judiciaire déposé le 8 juin 1999 par Monsieur Gérard V...,
En conséquence, et avant-dire droit au fond sur le surplus des demandes :
- ordonné une expertise et commis pour y procéder :
Monsieur Jean-Paul W..., expert près la cour d'appel de PARIS,
avec mission, en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées, de :
* recueillir les explications des parties et se faire communiquer les partitions manuscrites ou imprimées, les enregistrements et autres documents antérieurs au 2 décembre 1982 de l'oeuvre " P...EL AMOR DE UNA Q..." ainsi que les partitions manuscrites ou imprimées, les enregistrements et autres documents de l'oeuvre " LA DONA " telle que publiée le 2 décembre 1982,
*entendre tous sachants et se faire communiquer tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission,
* procéder à l'analyse musicale comparative des compositions respectivement intitulées " P...EL AMOR DE UNA Q...", telle que divulguée avant le 2 décembre 1982, et " LA DONA ", telle que publiée le 2 décembre 1982,
* rechercher les éventuelles similitudes musicales existant entre ces deux oeuvres,
* donner son avis sur le point de savoir si les ressemblances éventuellement constatées entre les deux œ uvres sont le fait d'un emprunt volontaire, d'une copie ou d'une rencontre fortuite,
* d'une façon générale, donner tous éléments techniques et de fait permettant à la juridiction saisie du litige de se prononcer sur la contrefaçon alléguée,
* dit que l'expert déposera son rapport dans les six mois de sa saisine,
- dit que les demandeurs devront consigner au service de la régie de ce tribunal la somme de 3 000 euros à valoir sur la rémunération de l'expert et ce, avant le 25 janvier 2003,
- dit qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera de plein droit caduque,
- renvoyé les parties à l'audience de mise en état du 7 mars 2003 pour vérification de la consignation et, à défaut, constatation de la caducité de la désignation de l'expert,
- sursis à statuer sur le surplus des demandes respectives des parties,
- réservé les dépens.

Dans ses dernières conclusions du 21 décembre 2006, la société SARA MUSIC PRODUCTIONS, appelante, invite la cour à :
- infirmer le jugement,
- dire l'action en contrefaçon prescrite,
- dire Messieurs Z...Z...et O..., ainsi que les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE, irrecevables, à tout le moins, mal fondés en leurs demandes, et les en débouter,
- dire que la nature et le comportement des intimés devant les autorités judiciaires engagent leur responsabilité civile solidaire et l'obligation de réparer le préjudice subi par la société SARA MUSIC par l'allocation d'une indemnité de 100 000 euros en application de l'article 1382 du Code civil et de l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile,
- ordonner à la société SGAE de communiquer, sous astreinte, tout document de nature à permettre de déterminer le montant des droits d'exécution publique et de reproduction mécanique qui aurait été perçus sur l'œ uvre musicale " LA DONA " depuis le 29 septembre 1994, date à laquelle " le comité exécutif de la SGAE a décidé de distribuer les redevances produites sur la chanson " LA DONA " conformément aux règles de distribution du titre " P...EL AMOR DE UNA Q...",
- ordonner à la société SGAE de donner, sous astreinte, mainlevée de la mesure de séquestre et de reverser la totalité des sommes séquestrées partout où elles l'ont été à la SACEM / SDRM, et dire que ces sommes porteront intérêt à compter du 29 septembre 1994,
- ordonner la capitalisation des intérêts,
- condamner solidairement Messieurs Z...Z...et O..., les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE à verser une indemnité de 100 000 euros au titre de l'article 700 du (nouveau) Code de procédure civile et aux dépens d'appel dont distraction au bénéfice de la SCP BOURDAIS-VIRENQUE-OUDINOT, avoué, dans les conditions de l'article 699 du (nouveau) Code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions du 27 avril 2007, Messieurs Z...Z...et C..., ainsi que les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE, intimés, demandent à la cour de :
- déclarer irrecevable en son appel la société SARA MUSIC,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a reconnu la qualité à agir de Messieurs Z...Z...et C..., ainsi que des sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE, en ce qu'il a maintenu Monsieur Bruno F...et la société SARA MUSIC en la cause, en ce qu'il a refusé de rejeter des débats la pièce no 26 des demandeurs, et en ce qu'il a dit que les demandeurs justifiaient de l'antériorité de l'œ uvre " P...EL AMOR DE UNA Q..." sur la version publiée de l'œ uvre " LA DONA ",

A titre subsidiaire, déclarer la société SARA MUSIC, Monsieur I..., les consorts F...et les consorts K...mal fondés, sinon irrecevables, en toutes leurs prétentions et les en débouter,

En tout état de cause :
- les recevoir en leur appel incident,
* dire que le rapport d'expertise de Monsieur V...n'encourt aucun des griefs admis à tort par le tribunal,
* dire en tant que de besoin que l'impact concret de ces mêmes griefs n'est pas de nature à justifier l'annulation du rapport,
* en conséquence, réformer le jugement de ce chef et renvoyer les parties à conclure devant le tribunal en ouverture de ce même rapport,
- vu l'article 559 du (nouveau) Code de procédure civile, condamner la société SARA MUSIC à payer à Messieurs Z...Z...et C...et aux sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE la somme de 50 000 euros chacun à titre de dommages et intérêts en réparation de l'appel abusif.
- condamner in solidum la société SARA MUSIC, Monsieur I..., les consorts F...et les consorts K...à payer à Messieurs Z...Z...et O...et aux sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE la somme de 15 000 euros chacun au titre de l'article 700 du (nouveau) Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du (nouveau) Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 7 mars 2008, Monsieur Jalhoul I..., intimé, et appelant incident, invite la cour à :
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu que l'œ uvre " P...EL AMOR DE UNA Q..." était antérieure à l'œ uvre " LA DONA ",
- le confirmer en ce qu'il a annulé le rapport d'expertise déposé par Monsieur V...,
- dire prescrite l'action de Messieurs Z...Z...et C..., ainsi que de la société CANCIONES DEL MUNDO et de la SGAE,
- subsidiairement, constater l'absence de preuve de l'antériorité de l'œ uvre " P...EL AMOR DE UNA Q..." par rapport à l'œ uvre " LA DONA ",
- très subsidiairement, dire et juger que Messieurs Z...Z...et C..., ainsi que la société CANCIONES DEL MUNDO et la SGAE n'établissent pas la notoriété de l'œ uvre " P...EL AMOR DE UNA Q..." qu'ils revendiquent,
- les débouter de l'intégralité de leurs moyens, fins et conclusions,
- les condamner à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, ainsi que celle de 35 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant pour ces derniers pourra être poursuivi par la SCP VERDUN-SEVENO selon l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions du 5 mars 2008, Messieurs Maurice, Tonino et Bruno F..., intimés et appelants incidents, invitent la cour à :
- infirmer le jugement déféré,
- déclarer prescrite l'action en contrefaçon engagée par Messieurs Z...Z...et C..., ainsi que par les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE,
Subsidiairement :
- mettre hors de cause Monsieur Bruno F...,
- constater que la preuve de l'antériorité de " P...EL AMOR DE UNA Q..." sur " LA DONA " n'est pas rapportée,
En conséquence :
- débouter Messieurs Z...Z...et C..., ainsi que les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE de l'ensemble de leurs demandes,
- leur ordonner de communiquer tous documents de nature à établir l'importance des droits d'auteur perçus et à répartir au titre de l'exploitation de l'oeuvre " LA DONA " et séquestrés et / ou versés sur le compte de la chanson " P...LE AMOR DE UNA Q...", ou versés à tous tiers, et les condamner à verser à la SACEM, aux fins de répartition entre les auteurs, toutes les sommes résultant de cette exploitation, avec intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 1994 et capitalisation des intérêts, sous astreinte,
Infiniment subsidiairement :
- confirmer le jugement en ce qu'il a annulé le rapport d'expertise de Monsieur V...,

En toutes hypothèses :
- condamner Messieurs Z...Z...et C..., ainsi que les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE, solidairement, à verser à Messieurs Maurice, Tonino et Bruno F...la somme de 50 000 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 35 000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- dire que l'ensemble des condamnations portera intérêts au taux légal et que les intérêts porteront eux-mêmes intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,
- les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par Maître HUYGHE, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Les consorts K...bien que régulièrement assignés et à qui les conclusions ont été dénoncées n'ont pas constitué avoué.

SUR CE, LA COUR :

Sur l'irrecevabilité de l'appel pour acquiescement au jugement

Considérant que Messieurs Z...Z..., O..., et les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE prétendent que la société SARA aurait acquiescé au jugement, en interjetant appel d'une ordonnance de remplacement d'expert en date du 15 septembre 2003 ; qu'en conséquence, son appel est irrecevable ;

Considérant que selon les dispositions de l'article 410 du Code de procédure civile " l'exécution sans réserve d'un jugement non exécutoire vaut acquiescement hors les cas où celui-ci n'est pas permis " ; qu'en l'espèce, contrairement à ce que prétendent les intimées (Messieurs Z...Z..., O..., les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE), l'appel de l'ordonnance de remplacement de l'expert désigné par le jugement entrepris ne peut être interprété comme la manifestation d'un acquiescement par exécution du jugement ; que la demande de changement du nom de l'expert n'a aucune incidence sur la décision rendue par le tribunal quant à l'antériorité des droits et à la nullité de l'expertise qui avait été précédemment ordonnée par le jugement du 16 janvier 1988, et ne saurait, en conséquence, être interprétée comme valant acquiescement tacite ; que ce moyen sera rejeté ;

Sur les fins de non-recevoir

* sur la qualité à agir de la SGAE

Considérant que la société SARA reprend ce moyen écarté par les premiers juges, faisant grief à ces derniers d'avoir retenu que la société SGAE intervenait, conformément à ses statuts, aux côtés des auteurs, afin d'obtenir la réparation du préjudice qui lui aurait été personnellement causé par la contrefaçon alléguée, alors que les statuts ne lui donnent pas mission d'ester en justice et que, par ailleurs, les documents versés aux débats ne démontrent pas que Monsieur Z...Z..., qui se dit auteur de la musique, aurait adhéré à la SGAE ou qu'en tous les cas, aucun document ne prouve qu'il y aurait adhéré avant 1990 et qu'il serait toujours adhérent, l'article 13 du contrat d'adhésion donnant toute liberté à ses membres de résilier le contrat tous les trois ans ;

Mais considérant que selon l'article 4d) des contrats d'adhésion versés aux débats, il est précisé que (dans la traduction libre non contestée, visée aux conclusions du 27 avril 2007 de Messieurs Z...Z..., O..., et des sociétés SGAE et CANCIONES) le " présent contrat autorise spécialement l'organisme (la SGAE) à exercer les actions qui procèdent tant d'un jugement que, en vertu de l'attribution conférée à l'organisme par l'article 135 de la loi sur la propriété intellectuelle, de la défense des droits confiés par le titulaire à ce même organisme, lequel pourra-s'agissant de telles actions-transiger ou se désister de son intervention au procès " ;

Que l'article 135 de la loi espagnole dispose que les " organismes de gestion qui ont reçu l'autorisation sont habilités, dans les conditions prévues par leurs propres statuts à exercer les droits dont la gestion leur est confiée et à les faire valoir dans tous les types de procédures administratives ou judiciaires " ;

Qu'au regard de ces textes et de l'article 5 des statuts qui avait été rappelé par les premiers juges, la SGAE est habilitée à ester en justice pour défendre les intérêts de ses adhérents ; que la société SARA ne peut être davantage suivie en ce qu'elle affirme que les fonctions de collecte et de gestion n'auraient été attribuées à cet organisme qu'à compter de 1989, date à laquelle de nouveaux statuts ont été adoptés (le 27 juin 1989) ; qu'en effet, ces nouveaux statuts ont été pris en application de la loi espagnole du 11 novembre 1987 qui faisait obligation aux organismes de gestion d'obtenir l'autorisation du Ministère de la culture, ce qui a été obtenu par la SGAE, qui a ensuite régularisé, avec ses différents membres, de nouveaux contrats réitérant ceux antérieurement conclus, mais que les précédentes attributions ont été reconduites ;

Que la société SARA ne peut davantage être suivie quand elle soutient que les contrats d'adhésion mis aux débats en date des 20 janvier 1990 pour Monsieur Z...Z...et du 15 mars 1990 pour Monsieur O...(ce dernier se référant à un précédent contrat du 7 février 1958) ne seraient pas pertinents alors qu'ils ont été certifiés conformes par un notaire et qu'il ne peut être tiré aucune conséquence sur la validité de ces contrats d'adhésion de l'absence de pièce d'identité de Monsieur XX...Z...et sur l'absence d'indication du surnom de Monsieur O...sur sa pièce d'identité ; que par ailleurs, Monsieur XX...Z...ne contestant pas sa qualité d'adhérent de la SGAE, rien ne démontre qu'il aurait dénoncé son adhésion ;

Considérant, en conséquence, que la SGAE a qualité pour agir pour la défense des droits des auteurs dont l'adhésion est certaine, à tout le moins à compter de 1990 pour Monsieur Z...Z...;

* sur la qualité à agir de Messieurs Z...Z...et GONZALEZ

Considérant que la société SARA prétend qu'ils ne pourraient bénéficier de la présomption de l'article L. 113-1 du Code de la propriété intellectuelle dès lors que " les pochettes qui sont en réalité des étiquettes n'établissent pas une corrélation entre le nom et le pseudonyme des auteurs " ;

Considérant toutefois que les documents mis aux débats (" certificat d'enregistrement supplémentaire de copyright " aux Etats Unis en date du 11 novembre 1974, contrat conclu entre les coauteurs et la société OTILIA en date du 31 mai 1974, déclaration de l'oeuvre " P...EL AMOR DE UNA Q..." à la SGAE du 3 avril 1974) montrent la corrélation entre les noms des auteurs et leurs pseudonymes ; que le moyen ainsi soutenu sera rejeté, étant constant que l'oeuvre en cause a été divulguée sous leur pseudonyme ainsi qu'il apparaît d'un phonogramme de " YY...DANIEL " portant mention de la date de 1974 et également du pseudonyme D...(POLYDOR référence 20 62 127 74 pièce 33) et du phonogramme de 1976 interprété par Julio ZZ...comportant mention pour la chanson " LA DONA " des noms de Daniel et Marti (DECCA no 13 051 / 02 pièce 32) ;

Que le jugement sera confirmé ;

* sur la prescription

Considérant qu'invoquant les dispositions de la loi espagnole selon laquelle l'action en contrefaçon se prescrit par 5 ans à compter du moment où la personne habilitée est en mesure d'agir et les dispositions de l'article 2270-1 du Code civil selon lesquelles les actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage, les auteurs et éditeur de la chanson " LA DONA " soutiennent que leurs adversaires reconnaissant que la première sortie commerciale de cette chanson remonte au 18 janvier 1983, le délai de prescription est acquis ; qu'ils ne peuvent, par ailleurs, prétendre que le point de départ du délai de prescription doit être retardé au jour du dernier acte de diffusion, ce que ne dit pas l'article susvisé qui ne proroge le délai qu'en cas d'aggravation du dommage, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

Considérant que la SGAE et les auteurs espagnols soutiennent, d'une part, que ce sont les dispositions de l'article 2270-1 du Code civil qui doivent s'appliquer, d'autre part, que le point de départ du délai court à partir du moment où ils ont eu connaissance de l'oeuvre et qu'il n'est pas démontré qu'ils en auraient eu connaissance plus de dix ans avant l'assignation, alors qu'il n'est nullement établi, contrairement à ce qui est prétendu, que l'oeuvre aurait été commercialisée en Espagne ; qu'ils font observer, à titre subsidiaire, que la date invoquée du 18 janvier 1983 est, en définitive, sans incidence ; qu'en effet, le délai de prescription décennal ne court, en tout état de cause, qu'à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation et que le délit de contrefaçon étant un délit continu, s'agissant de la chanson litigieuse qui était toujours commercialisée dans le courant des années 1990, la prescription n'est nullement acquise ;

Considérant, cela exposé, que, par application de l'article 5-2 de la Convention de Berne qui dispose que " l'étendue de la protection ainsi que les moyens de recours garantis à l'auteur pour sauvegarder ses droits se règlent exclusivement d'après la législation du pays où la protection est réclamée ", il y a lieu d'appliquer au présent litige la législation française et, en conséquence, de se référer aux dispositions de l'article 2270-1 du Code civil, s'agissant de faits de contrefaçon commis en France ;

Considérant que le délai de prescription commence à courir à compter du jour où celui qui poursuit en contrefaçon a eu connaissance des faits délictueux ; qu'en l'espèce, il n'est pas établi que la cassette reproduisant l'oeuvre " LA DONA " de janvier 1983 aurait été diffusée sur le territoire espagnol ; qu'à cette période, il n'est pas démontré, notamment par des versements de droits d'auteur provenant du territoire espagnol, que cette chanson avait acquis une grande renommée dépassant les frontières de la France ; que par ailleurs, la SGAE est certes un organisme qui, aux termes de l'article 4 de ses statuts, entretient des relations avec les sociétés de gestion collective étrangères, mais cela ne permet pas davantage d'affirmer qu'elle aurait eu connaissance par l'intermédiaire de la SACEM de l'existence de l'oeuvre " LA DONA " dès son inscription au répertoire de la SACEM ;

Qu'enfin, contrairement à ce qui est prétendu, la seule mention dans des conclusions de la date de janvier 1983 pour la diffusion de la chanson " LA DONA ", date dont se prévalent la société SARA, et les auteurs de la chanson " LA DONA " ne saurait être interprétée comme valant reconnaissance par Messieurs Z...Z..., O..., et par les sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE de l'existence de cette oeuvre à cette date, les conclusions en cause mentionnant seulement cette date comme un fait résultant des documents mis aux débats ;

Qu'il résulte, au contraire, de l'ensemble des éléments que la SGAE a pris connaissance de cette oeuvre, lors de l'exploitation d'un CD en 1990 portant sur les oeuvres interprétées par les GYPSY KINGS dont l'une a été à l'origine d'une autre procédure en contrefaçon ; qu'en conséquence, la procédure ayant été introduite par acte d'huissier de septembre et octobre 1996, le délai de 10 ans n'était pas encore écoulé ; que la fin de non-recevoir sera rejetée ;

Sur la mise hors de cause de Bruno F...

Considérant que par les conclusions d'appel, il est seulement dit que Bruno F...a quitté le groupe il y a une vingtaine d'année et doit en conséquence être mis hors de cause ;

Mais considérant que le tribunal a, par de justes motifs, rejeté en l'état cette demande de mise hors de cause dans la mesure où " l'ensemble des défendeurs s'était attaché à soutenir que la création et la divulgation publique de l'oeuvre " LA DONA " remontaient au début des années 1970, que Bruno AA...faisait partie du groupe lorsque le contrat de cession a été signé le 28 octobre 1982 avec la société SARA et l'oeuvre déclarée à la SACEM, et qu'une partie des demandes porte sur des droits perçus au titre de l'exploitation de l'oeuvre dès 1982 ; qu'aucun moyen n'étant développé à l'encontre de ces motifs, le jugement sera confirmé ;

Sur l'antériorité de l'oeuvre " P...EL AMOR DE UNA Q..." sur l'oeuvre " LA DONA "

Considérant que l'éditeur et les auteurs de la chanson " LA DONA " font essentiellement valoir que la preuve de la création de la chanson " P...EL AMOR DE UNA BB..." à la date du 3 avril 1974 est insuffisamment rapportée, du fait de la production aux débats de documents qui sont " sujets à caution " et de l'absence de toute justification de perception de droits d'auteur, malgré les nombreuses demandes formulées ;

Qu'ils relèvent que :
- le tribunal a retenu que " le certificat d'enregistrement d'une demande de copyright ", portant la mention du 11 novembre 1974 comme date de réception de la demande et du 21 octobre 1974 comme date de la publication de l'oeuvre constituerait un élément démontrant l'antériorité de l'oeuvre, dès lors que le document serait extrait d'un registre dont l'authenticité ne peut être mise en cause, alors que n'étaient pas jointes au certificat de copyright les paroles et la musique de l'oeuvre prétendument publiée en 1974 et qu'une demande de copyright ne saurait constituer une preuve de publication de l'oeuvre, mais seulement une preuve de son enregistrement et qu'aucun élément ne démontre que la chanson litigieuse correspondait à l'enregistrement demandé,
- les deux disques vinyle (l'un supportant une chanson interprétée par Danny DANIEL enregistrée par POLYDOR, l'autre comportant une compilation d'oeuvres dont la chanson litigieuse interprétée par Julio ZZ...et portant la date de 1976), ne sont pas davantage probants en l'absence de justification des redevances ou de contrat passé avec la société POLYDOR, ce qui rend ces documents non pertinents pour établir une exploitation,
- il n'existe pas davantage de preuve d'une exploitation graphique de l'oeuvre, la seule édition produite portant comme nom d'éditeur, celui de la société CANCIONES qui n'est devenue cessionnaire des droits qu'à compter du 20 décembre 1983 ;

Qu'ils ajoutent que :
- les contrats d'adhésion produits par la SGAE ne sont pas clairs ; qu'en effet, l'un concerne Monsieur O...et porte le no 7056, l'autre concerne Monsieur Z...et porte le no 24 585 alors que ces deux contrats ont été signés à cinq jours d'écart soit les 15 et 20 mars 1990 (ce qui signifierait qu'en cinq jours, la SGAE aurait enregistré environ 17 000 contrats), que la SGAE les a signés tous les deux le 2 octobre 1989 et que les numéros figurant sur la première page du contrat portent des numéros voisins soit 4C2976475 et 4C2976477,
- le contrat d'affiliation à la SGAE (pièce no 15) daté du 3 avril 1974 est également étrange, ce qu'avait relevé le tribunal, les pages produites sous le même numéro 15 n'ayant pas été extraites du même registre et les feuillets relatifs à la reproduction de l'oeuvre émanant d'un autre registre, l'attestation de la SGAE sur l'authenticité de ces documents ne pouvant être retenue, cette dernière n'étant pas fondée à se constituer une preuve à elle-même dans une procédure dans laquelle elle est partie ;

Considérant, cela étant exposé, que comme le fait exactement valoir la société SARA, Messieurs I...et les consorts F..., :
- le manuscrit de la musique mis aux débats présenté comme accompagnant le dépôt effectué le 3 avril 1974, ne saurait être retenu comme pertinent, le feuillet en cause (extrait du registre de la SGAE) comportant des anomalies qui ne sont pas levées par les explications données en appel sur le contenu de la déclaration à la SGAE,
- l'édition graphique portant mention du nom de la société CANCIONES est nécessairement postérieure à la cession des droits dont bénéficie cette société selon contrat signé avec la société OBILIA premier éditeur, le 20 décembre 1983 ;

Considérant, néanmoins, que la chanson " P...EL AMOR " a été déclarée le 3 avril 1974 à la SGAE sur un feuillet autre que celui relatif à la musique qui émane manifestement du registre, compte tenu des mentions portées en marge de la déclaration même ; que ce feuillet n'est nullement accompagné de la composition musicale mais mentionne la répartition des droits entre les auteurs du texte et de la musique, ce qui prouve qu'à cette date une musique avait été composée par Monsieur Z...Z...; qu'en outre, la déclaration de copyright aux Etats Unis en novembre 1974, reprend le nom de l'oeuvre et de ses auteurs ; que par ailleurs, selon les dispositions de l'article L. 113-1 du CPI la qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée ; que la société SARA, et les " GIPSY KINGS " ne peuvent être suivis quand ils soutiennent qu'il n'est pas rapporté la preuve d'une divulgation alors que plusieurs enregistrements de phonogrammes ont été effectués, (par POLYDOR en 1974 et par DECCA en 1976 pour l'interprétation par Julio ZZ...), en portant mention de leur pseudonyme (D...et DANIEL) ; que ces enregistrements ont été nécessairement exploités ; que l'absence de justification des redevances perçues ne saurait avoir d'incidence sur la présomption de droits d'auteur qui résulte d'une divulgation ;

Considérant qu'à tout le moins, compte tenu de ces éléments, il est possible d'identifier la musique composée par Monsieur XX...Z...à l'écoute des enregistrements précités de 1974 et 1976, soit à une date antérieure à celle à laquelle les GIPSY KIGS ont déclaré la chanson " LA DONA " à la SACEM, le 28 octobre 1982, enregistrée le 2 décembre 2002 ;

Considérant que l'argument de Monsieur I...selon lequel l'oeuvre qui lui est opposée est dénuée de toute notoriété est dénué de pertinence pour détruire la présomption susmentionnée de l'article L. 113-1 du CPI ;

Considérant que la société SARA, Monsieur I...et les consorts AA...ne rapportant pas la preuve de ce que la chanson contestée " LA DONA " a été créée antérieurement à la date de 1974, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que l'oeuvre espagnole était antérieure à celle de " LA DONA " ;

Sur la nullité du rapport d'expertise

Considérant que la SGAE, Messieurs Z...Z...et O...ainsi que la société CANCIONES au soutien de leur appel incident exposent que le tribunal a inexactement annulé le rapport effectué par Monsieur V..., désigné par jugement du 16 janvier 1998, estimant que rien ne permettait d'établir que cet expert avait travaillé sur une version de l'oeuvre " P...EL AMOR DE UNA Q..." antérieure à la publication de l'oeuvre " LA DONA " et que l'expert a violé les dispositions de l'article 160 du (nouveau) Code de procédure civile en portant atteinte au principe du contradictoire ;

Qu'ils font valoir principalement,
- sur le premier moyen que s'il est vrai que l'expert a travaillé sur une partition de l'oeuvre de 1983, cela n'ôte rien au fait qu'il s'agit de la partition d'origine, comme en atteste la mention de copyright qui se réfère à la date de 1974, que l'expert ne dit à aucun moment de son rapport que la chanson sur cassette radio et la partition qui lui ont été remises constitueraient deux oeuvres différentes, ce qu'il n'aurait pas manqué de faire si cela avait été le cas ; qu'en tout état de cause, les versions de l'oeuvre interprétée, d'une part, par Danny Daniel en 1974 et, d'autre part, par Julio ZZ...en 1976 à l'OLYMPIA sont identiques à la version sur laquelle Monsieur V...a travaillé,
- sur le second moyen, que l'expertise s'est déroulée de manière contradictoire dans la mesure où :
* le fait que les demandeurs aient fait parvenir leur documentation quelques semaines après la réunion contradictoire n'a pas d'importance, s'agissant de pièces régulièrement produites aux débats bien avant la nomination de l'expert,
* la mission d'expertise musicale revêt un caractère purement technique et scientifique, travail qui pouvait être effectué hors la présence des parties, aucune disposition légale n'imposant le dépôt d'un pré-rapport,
* l'expert n'a pas à convoquer les parties pour leur faire part du résultat de ses analyses, aucune disposition légale n'imposant le dépôt d'un pré-rapport ;

Qu'ils ajoutent que la seule " faute " de Monsieur V...aurait consisté à rejeter l'antériorité prétendument constituée par l'oeuvre " Cuando le amor " sans avoir au préalable provoqué la réaction des défendeurs mais que cette " imperfection " n'entraîne pas la nullité du rapport et qu'il ne peut être fait grief à l'expert de ne pas avoir répondu aux dires des parties qui n'exigeaient en réalité aucune réponse, ni de ne pas avoir procédé à des recherches d'antériorités alors que la mission de l'expert consistait à " examiner les antériorités musicales éventuellement invoquées par les parties " et non pas à effectuer lui-même à cette recherche ;

Considérant, toutefois, que l'argument selon lequel la transmission des documents postérieurement à la réunion contradictoire n'a aucune importance n'est pas pertinent ; qu'en effet, si l'expert peut procéder à des investigations sans avoir convoqué les parties et s'il peut procéder hors leur présence à des investigations à caractère purement matériel ou technique, c'est à la condition de leur donner connaissance des résultats de façon contradictoire et de leur permettre d'en discuter, lors d'une réunion ; que tel n'a pas été le cas en l'espèce ; qu'après la réunion contradictoire tenue le 10 mars 1998, il a été transmis de nouvelles pièces à l'expert, qui, certes, avaient été communiquées au cours de la procédure ; que néanmoins, n'ayant pas eu connaissance matériellement des documents transmis à l'expert, la société SARA et les GIPSYS KINGS n'ont pu faire, au préalable, des observations sur leur pertinence, alors que l'expert s'est appuyé sur ces éléments pour effectuer sa mission et déposer son rapport, sans avoir recueilli, au demeurant, après son analyse, de manière contradictoire les observations des défendeurs ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du rapport ; que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a ordonné la nomination d'un nouvel expert ;

Sur les autres demandes

Considérant qu'aucun élément du dossier n'établit que la société SARA aurait en interjetant appel eu un comportement fautif ; que la demande de dommages et intérêts formée sur ce fondement sera rejetée ;

Considérant que des raisons d'équité commandent d'allouer à Messieurs Z...Z..., O...et aux sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE la somme globale de 5000 euros au titre des frais d'appel non compris dans les dépens ;

PAR CES MOTIFS :

Dit recevable l'appel interjeté par la société SARA MUSIC PRODUCTIONS ;

Rejette la fin de non-recevoir fondée sur la prescription ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum les consorts F..., K..., Monsieur I..., la société SARA MUSIC PRODUCTIONS à payer aux sociétés CANCIONES DEL MUNDO et SGAE et Messieurs Z...Z...et O...la somme globale de 5000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés pour les dépens d'appel par la SCP DUBOSCQ PELLERIN, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0164
Numéro d'arrêt : 06/22333
Date de la décision : 30/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 22 novembre 2002


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-05-30;06.22333 ?
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