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20/05/2008 | FRANCE | N°07/04265

France | France, Cour d'appel de Paris, 20 mai 2008, 07/04265


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre B



ARRET DU 20 Mai 2008

(no , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/11556

S 07/04265



Décisions déférées à la Cour : jugements rendus le 08 Mars 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG no 04/09833 et le 02 mai 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS (départage) RG no 04/09833





APPELANTE

Madame Nicole X...


...


95320 ST LEU LA

FORET

comparante en personne, assistée de Me Pascal WINTER, avocat au barreau de PARIS, toque : J09 substitué par Me Laurence Z..., avocat au barreau de PARIS





INTIMÉE

S.A. BA...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre B

ARRET DU 20 Mai 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/11556

S 07/04265

Décisions déférées à la Cour : jugements rendus le 08 Mars 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG no 04/09833 et le 02 mai 2007 par le conseil de prud'hommes de PARIS (départage) RG no 04/09833

APPELANTE

Madame Nicole X...

...

95320 ST LEU LA FORET

comparante en personne, assistée de Me Pascal WINTER, avocat au barreau de PARIS, toque : J09 substitué par Me Laurence Z..., avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

S.A. BAYARD PRESSE

3 & ...

75393 PARIS CEDEX 08

représentée par Me Pierre LUBET (SCP SALANS & Associés), avocat au barreau de PARIS, toque : P372

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Mars 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte BOITAUD, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller

Monsieur Daniel FONTANAUD, Conseiller

Greffière : Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, présidente et par Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, greffière présente lors du prononcé.

Madame Nicole X... travaillait depuis 1995 pour la société Bayard Presse en qualité de journaliste, pour la revue "Côté Femme" moyennant un salaire annuel en 2003 de 46 516 euros.

Le 19 juillet 2004 Mme X... saisissait le conseil de prud'hommes de Paris pour obtenir un rappel de salaire en raison d'une diminution de sa rémunération courant 2004 à laquelle elle n'aurait pas consentie.

Au cours de cette procédure, Mme X... était licenciée pour motif économique par lettre du 11 janvier 2005 en ces termes:

« Nous sommes contraints de cesser la collaboration qui existait avec vous, les raisons économiques, techniques et financières étant liées à la situation du magazine COTE FEMME et à son passage d'hebdomadaire en mensuel.

Vous trouverez ci-joint un document constituant une annexe à la présente lettre et reprenant l'ensemble des éléments économiques, techniques et financiers, document ayant fait l'objet d'une consultation du Comité d'Entreprise ».

Par jugement du 8 mars 2006 le conseil de prud'hommes de Paris jugeant le motif économique réel et sérieux, a débouté Mme X... de ses demandes relatives au licenciement et s'est déclaré en partage de voix sur le rappel de salaire et ses conséquences.

Par jugement du 2 Mai 2007 le conseil de prud'hommes de Paris en sa formation de départage, a partiellement fait droit à la demande de rappel de salaire de Mme X... et l'a déboutée de sa demande relative à la prime d'ancienneté.

Mme X... a relevé appel des deux jugements.

Pour les prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions visées et reprises oralement le 25 mars 2008.

Les deux déclarations d'appel de Mme X... ont donné lieu à l'ouverture de deux dossiers. Il existe entre les litiges un tel lien qu'il est d'une bonne justice de les juger ensemble. Il convient donc d'ordonner la jonction entre les instances no 06/11556 et 07/04265.

* *

*

Sur le statut de journaliste permanent et les rappels de salaire

Mme X... fait valoir qu'ayant régulièrement travaillé pour la société Bayard Presse en tant que journaliste depuis de nombreuses années, son employeur était tenu de lui garantir comme à tout journaliste permanent, un volume de travail ainsi que sa rémunération conformément à l'article L 761-2 du code du travail, peu important qu'elle ait été rémunérée par des piges. Elle en déduit qu'elle n'était pas soumise aux dispositions du protocole d'accord du 16 mars 2001 qui ne concerne que les journalistes non permanents; que d'ailleurs elle n'a pas signé l'avenant à son contrat de travail ; qu'ainsi la société Bayard Presse ne pouvait modifier unilatéralement sa rémunération par voie de diminution; qu'en tout état de cause, sa rémunération en 2004 étant diminuée de plus de 35% par rapport à celle de 2003, la société n'a pas même respecté ses propres règles; qu'il lui est dû un rappel de salaire égal à la différence entre ce qu'elle a perçu en 2003 ( 46 516 euros ) et celle qu'elle a perçue en 2004 ( 27 818 euros ) et en 2005 ( 4 881 euros ) soit la somme totale de 23 120 euros et les congés payés afférents. En conséquence de la requalification de son statut, Mme X... formule une demande en paiement d'un rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté sur la base du salaire minimum applicable au journaliste des hebdomadaires parisiens avec la qualification de chef de rubrique qui serait la sienne, soit une somme de 17 300 euros et les congés payés afférents, un rappel de salaire sur l'indemnité conventionnelle de licenciement et sur l'indemnité supplémentaire de licenciement lié au salaire manqué du fait de la diminution de son salaire.

Il ressort des pièces du dossier que le 16 mars 2001 un protocole d'accord syndical a été signé au sein de BAYARD PRESSE régissant les conditions d'emploi et de travail des journalistes rémunérés à la "pige" afin de "clarifier les règles de collaboration". Ce protocole rappelle les dispositions conventionnelles aux termes desquelles les journalistes-pigistes sont des journalistes professionnels "employés à titre occasionnel" qui, à ce titre "ne sont pas tenus de consacrer une partie déterminée de leurs temps à l'entreprise à laquelle ils collaborent, mais n'ont pour obligation que de fournir une production convenue dans les formes et les délais prévus par l'employeur" et qu'ils ont, conformément à l'article L 761-2 du code du travail "pour occupation principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou dans une ou plusieurs agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources". Le protocole rappelle encore que la collaboration d'un journaliste-pigiste dont les caractéristiques sont précisément décrites, est présumée être un contrat de travail. A ces principes ainsi rappelés, font suite les dispositions contractuelles " propres à BAYARD PRESSE" visant à une "contractualisation"de la collaboration pour les journalistes pigistes dits "réguliers" , catégorie déterminée par des conditions d'ancienneté et de régularité dans la collaboration, représentant en outre un certain volume d'activité donc de rémunération. Pour cette catégorie des journalistes-pigistes réguliers, il est prévu, entre autres dispositions, une rémunération mensuelle garantie, à hauteur de 80% de la rémunération mensuelle moyenne versée au cours de l'année civile de référence, voire au cours des 18 derniers mois si le calcul est plus favorable et en tenant compte de l'expérience des intéressés " dans la profession". Des modalités de dédommagement sont prévues si "sur une période de 6 mois" la baisse de la rémunération est "égale ou supérieure à 35% de la rémunération moyenne versée au cours des 12 mois précédents la période considérée". Il est par ailleurs indiqué que les journalistes-pigistes-réguliers bénéficient des mêmes droits sociaux que les journalistes permanents sous contrat à durée indéterminée à Bayard Presse SA.

Il n'est pas utilement contesté que la collaboration de Mme X... avec la société Bayard Presse répond bien aux caractéristiques de la collaboration du journaliste-pigiste au sens de l'article 3 du protocole: liberté d'organiser son activité professionnelle, notamment quant aux horaires et lieu de travail , rémunération à la tâche, souplesse des obligations réciproques dont il est fourni des exemples dans le protocole. De même sa collaboration répond bien à la catégorie des journalistes-pigistes réguliers tels que définie par le protocole d'accord. C'est d'ailleurs au vu de ces éléments que par courrier du 16 juillet 2001 la société Bayard Presse proposait à Mme X... une contractualisation de leur collaboration dans les conditions définies par le protocole. Contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, Mme X... a bien signé le 10 janvier 2002 un contrat dit " de Journaliste-Pigiste-Régulier" rappelant les engagements du protocole d'accord. Il n'est allégué aucun vice du consentement qui aurait altéré la volonté de Mme X... de conclure ce contrat de travail. D'ailleurs la signature de ce contrat était la reconnaissance mutuelle des caractéristiques effectives de la collaboration. Il s'ensuit que Mme X... n'est pas fondée à se prévaloir de la qualité de journaliste permanent. la société Bayard Presse n'avait donc pas l'obligation d'assurer à Mme X... un niveau de rémunération autre que celui résultant des engagements pris aux termes du protocole d'accord et du contrat de travail, à savoir une rémunération annuelle brute garantie de 23 372,94 euros et un dédommagement en cas de baisse, "sur un semestre civil", égale ou supérieure à 35% de la rémunération moyenne versée "au cours des 12 mois précédents la période concernée".

Alors qu'elle avait perçu en 2003 une rémunération annuelle de 46 516,50, Mme X... a perçu en 2004 une rémunération annuelle de 27 818,94 euros, soit une rémunération supérieure au minimum garanti et en 2005 une somme de 4 881 euros . Mais cette rémunération était en baisse de plus de 35% par rapport à celle de 2003. La société Bayard Presse était donc tenue, selon le contrat de travail, de lui proposer soit un "titre de substitution" soit de mettre fin à la collaboration moyennant un dédommagement, ce dont elle s'est abstenue. Faute par la société de mettre en oeuvre ses engagements, Mme X... est fondée à solliciter un dédommagement que la cour fixe à 2 500 euros.

Sur le bien fondé du licenciement

Mme X... soutient que faute de faire mention d' un quelconque élément économique qui justifierait de la suppression de son poste dont il n'est pas non plus fait mention, la lettre de licenciement ne répond pas aux exigences légales de motivation; que le chiffre d'affaires du groupe en 2005 est supérieur à celui de 2004; que le motif invoqué est fallacieux. Subsidiairement , Mme X... constate qu'aucune proposition de reclassement ne lui a été faite et que, compte tenu de son ancienneté de 10 années et de son âge (54 ans) l'ordre des licenciement n'a pas été respecté.

Mais la lettre se réfère à des éléments économique financiers et techniques sur lesquels le comité d'entreprise avait été consulté dans le cadre du passage du magazine d'hebdomadaire en mensuel. Par ailleurs le détail de la réduction des effectifs est mentionné dans le document annexé. Cette lettre répond donc aux exigences légales de motivation.

Il convient d'aborder le bien fondé de cette mesure.

Les pertes engendrées en 2005 par le magazine "Côté Femme" en hebdomadaire et le rapport de l'expert-comptable soumis à l'avis du comité d'entreprise sur les comptes 2004 et le prévisionnel 2005 au niveau du groupe dans le secteur de la presse, établissent la nécessité de sauvegarder sa compétitivité, expliquent le choix stratégique de la société Bayard Presse de faire de ce magazine un mensuel et justifient la réduction des effectifs. Le caractère réel et sérieux du motif économique est établi. Le jugement déboutant la salariée de ses demandes relatives au licenciement est confirmé.

La catégorie des journalistes pigistes, dans son ensemble, a été concernée par la plan de sauvegarde de l'emploi. Il s'ensuit que le contrôle du respect de l'ordre des licenciements est sans objet. Mme X... est déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur la prime d'ancienneté

Compte tenu de la décision sur le statut de l'intéressée, il n'est pas fait droit à sa demande en paiement de prime d'ancienneté fondée sur le statut de journaliste permanent.

PAR CES MOTIFS

ORDONNE la jonction entre les instances no 06/11556 et 07/04265,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du 8 mars 2006,

REFORME le jugement de départage du 2 mai 2007 sur les dispositions relatives au rappel de salaire et congés payés afférents,

CONDAMNE la société Bayard Presse à payer à Mme X... une somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour inobservation des engagements contractuels en cas de baisse de rémunération, avec intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt,

CONFIRME le jugement du 2 mai 2007 en ses autres dispositions,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la société Bayard Presse à payer à Mme X... une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

MET les dépens à la charge de la société Bayard Presse.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 07/04265
Date de la décision : 20/05/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-05-20;07.04265 ?
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