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07/05/2008 | FRANCE | N°06/18032

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0162, 07 mai 2008, 06/18032


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

24ème Chambre - Section C

ARRET DU 07 MAI 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/18032

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 2 octobre 2006 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de PARIS - Section B / Cabinet 6

RG no 03/37116

APPELANT

Monsieur Alain Henri Paul X...

Né le 6 février 1950 à Paris 16ème arrondissement

demeurant

...

représenté par Me Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour

assisté de Me Christine GASCON, avocat au barreau des HAUTS de SEINE, t...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

24ème Chambre - Section C

ARRET DU 07 MAI 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/18032

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 2 octobre 2006 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de PARIS - Section B / Cabinet 6

RG no 03/37116

APPELANT

Monsieur Alain Henri Paul X...

Né le 6 février 1950 à Paris 16ème arrondissement

demeurant ...

représenté par Me Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour

assisté de Me Christine GASCON, avocat au barreau des HAUTS de SEINE, toque : PN 234,

INTIMÉE

Madame Lydie Claire A... épouse X...

Née le 15 janvier 1956 à Paris 16ème arrondissement

demeurant ...

représentée par la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avoués à la Cour

assistée de Me Françoise B... C..., avocat au barreau de PARIS, toque : C716,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Mars 2008, en chambre du conseil, en présence de M. X..., devant la Cour composée de :

Marie-Laure ROBINEAU, présidente

Claire BARBIER, conseillère chargée du rapport

Annick FELTZ, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Nathalie GALVEZ

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé en audience publique par Marie-Laure ROBINEAU, présidente.

- signé par Marie-Laure ROBINEAU, présidente et par Nathalie GALVEZ, greffière présente lors du prononcé.

****

LA COUR,

M. Alain X..., né le 6 février 1950 à Paris 16ème, et Mme Lydie A..., née le 15 janvier 1956 à Paris 16ème se sont mariés le 9 septembre 1988 devant l'officier d'état civil de Garnay (Eure et Loir), après contrat conclu le 5 septembre 1988 par devant Me D..., Notaire à Paris 8ème, instaurant le régime de la séparation de biens.

De cette union, est née Valentine, le 27 août 1991.

Le 27 mai 2003, Mme Lydie A... a déposé une requête en divorce.

Par ordonnance de non conciliation en date du 5 août 2003, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris a, notamment :

-autorisé les époux à résider séparément,

- attribué la jouissance du domicile conjugal à M. Alain X... (bien propre),

- rappelé que l'autorité parentale est exercée en commun par les parents,

- fixé la résidence de l'enfant chez la mère,

- accordé au père un droit de visite et d'hébergement usuel,

- mis à la charge du père une contribution de 50 € par mois.

Mme Lydie A... a interjeté appel de cette ordonnance.

Par arrêt du 30 octobre 2003, la cour d'appel de Paris a partiellement réformé l'ordonnance, attribué à titre gratuit la jouissance de l'appartement du 4ème étage de l'immeuble ... à M. Alain X... et la jouissance de l'appartement du 5ème étage à Mme Lydie A..., qui a été autorisée à rétablir une séparation entre cet appartement et celui du 4ème étage, lesquels constituaient ensemble le domicile conjugal et porté à 400 € par mois la contribution à l'entretien et l'éducation due par le père, frais de scolarité inclus.

Pendant le cours de l'instance, M. X... a été assigné par sa propre mère en résolution de la vente du 12 décembre 1990 de l'appartement dont Mme A... avait la jouissance gratuite. La résolution du contrat de vente a été prononcée par le tribunal et Mme A... a formé appel de cette décision.

Le 5 novembre 2003, Mme Lydie A... a assigné son conjoint en divorce sur le fondement de l'article 242 du Code civil.

Par jugement contradictoire dont appel, rendu le 2 octobre 2006, auquel la Cour se réfère pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris a :

- prononcé aux torts de l'époux le divorce avec toutes conséquences de droit,

- débouté l'épouse de sa demande tendant à se voir autoriser à conserver l'usage du nom marital,

- débouté l'épouse de sa demande de dommages et intérêts, tant sur le fondement de l'article 266 du code civil que sur celui du droit commun,

- constaté au détriment de Mme Lydie A... une disparité dans les conditions de vie respectives des époux et dit en conséquence bien fondée en son principe la demande de prestation compensatoire présentée par Mme Lydie A...,

- sursis à statuer sur le montant de la prestation compensatoire et ses modalités de paiement dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel de Paris sur appel de Mme Lydie A... à l'encontre du jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 18 mai 2006,

- dit que l'autorité parentale est exercée en commun par les parents,

- fixé la résidence de l'enfant chez sa mère,

- dit que le père hébergera sa fille librement et, à défaut de meilleur accord entre les parties :

- en dehors des vacances scolaires: les première, troisième et éventuellement cinquième fins de semaine de chaque mois du vendredi ou samedi sortie des classes au dimanche 19h,

- et pendant la première moitié des vacances scolaires les années paires et la seconde moitié les années impaires,

à charge pour lui et à ses frais d'aller chercher ou de faire chercher, reconduire ou faire reconduire l'enfant au lieu de sa résidence habituelle,

- fixé à 400 € avec indexation la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant due par le père,

- rejeté la demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. Alain X... aux dépens.

M. Alain X... a interjeté appel de ce jugement le13 mars 2007.

Par arrêt du 18 mai 2007, la cour d'appel a résolu la vente intervenue en décembre 1990 entre M. X... et sa mère pour non paiement du prix. Mme A... a formé un pourvoi en cassation.

Vu les dernières conclusions, auxquelles la Cour se réfère, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé des prétentions et moyens des parties, en date des 6 février 2008 pour M. Alain X..., appelant, et 6 février 2008 pour Mme Lydie A..., intimée, qui demandent, essentiellement à la Cour de :

* M. Alain X...

- déclarer recevable et bien fondé son appel,

y faisant droit,

- réformer la décision entreprise et statuant à nouveau,

- débouter Mme Lydie A... de sa demande tendant à voir prononcer le divorce aux torts exclusifs du mari,

- prononcer le divorce aux torts exclusifs de l'épouse,

- la débouter de sa demande d'expertise et, subsidairement, la condamner aux frais de cette expertise,

- la condamner en revanche à lui verser une prestation compensatoire d'un montant de 100.000€ en capital,

- fixer à 50 € par mois sa contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant,

- confirmer la décision en ce qu'elle a débouté Mme Lydie A... de sa demande d'usage du nom marital et de sa demande de dommages et intérêts,

- confirmer la décision sur l'autorité parentale conjointe, la résidence et le droit de visite et d'hébergement du père,

- condamner Mme Lydie A... à lui payer la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens ;

* Mme Lydie A... :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et rejeter comme irrecevables et mal fondées l'intégralité des demandes de M. Alain X...,

ajoutant à la décision entreprise, tout en confirmant le principe de la prestation compensatoire,

- désigner tel expert aux fins de :

- convoquer les parties,

- se faire remettre tous documents notamment: titres notariés, justificatifs de charges de toutes sortes afférents au domicile respectif des époux et à la propriété des actifs immobiliers leur appartenant, tous documents notariés publiés sur la fortune immobilière de la famille de M. Alain X... et en particulier les titres et mutations concernant l'immeuble de Garnay où il réside, tous justificatifs concernant le fonctionnement de la société dont il est propriétaire et gérant,

- entendre tous sachants et en particulier la mère de M. Alain X..., son frère, et sa compagne, ainsi que les responsables de ses comptes et examiner au vu des pièces et déclarations des parties leur situation respective, leur train de vie

- déterminer les composants du patrimoine de M. Alain X... à ce jour et dans un avenir prévisible,

- mettre à sa charge la consignation sur les frais d'expertise fixée par la cour à ce que de droit,

- dire que l'expert, préalablement au dépôt de son rapport, communiquera l'essentiel de ses conclusions par écrit aux deux parties, quinze jours avant dépôt, afin que celles-ci puissent formuler leurs ultimes observations,

- en tout état de cause, confirmer le sursis à statuer sur le montant de la prestation compensatoire que ce soit à titre principal dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ou à titre subsidiaire dans l'attente d'une décision définitive quant à la résolution de la vente intervenue entre M. Alain X... et sa mère, soit dans l'attente de l'arrêt à intervenir devant la Cour de cassation,

- réformer en tout état de cause la pension alimentaire allouée pour l'entretien de Valentine, la porter à la somme de 1.400 € par mois eu égard à la précarité de logement de Mme Lydie A..., occupant du chef de son époux d'un bien que ce dernier devrait restituer à sa mère,

- le condamner à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 28 février 2008 ;

CELA ÉTANT EXPOSÉ,

Sur la procédure

Considérant que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée ; que les pièces du dossier ne font apparaître aucune fin de non recevoir susceptible d'être relevée d'office ;

Considérant, bien que l'appel soit général, que les parties ne remettent pas en cause les dispositions du jugement relatives à l'autorité parentale, à la résidence de Valentine chez sa mère, au droit de visite et d'hébergement du père, au rejet des demandes de dommages-intérêts et d'usage du nom marital lesquelles, reposant sur une analyse pertinente du premier juge au vu des documents probants produits, doivent être confirmées ;

Considérant que la loi du 26 mai 2004 relative au divorce est entrée en vigueur le 1er janvier 2005 ; que les dispositions transitoires prévoient que l'appel est formé, instruit et jugé selon les règles applicables lors du prononcé de la décision de première instance ; qu'en l'espèce, l'assignation ayant été délivrée antérieurement au 1er janvier 2005, ce sont les règles anciennes qui sont applicables ;

Sur le divorce

Considérant que, sur le fondement de l'article 242 du code civil, il appartient à chaque époux qui sollicite le divorce de prouver les faits imputables à l'autre qui constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérable le maintien de la vie commune ;

Considérant que Mme A... reproche à son mari son penchant pour l'alcool, qui engendrait un comportement agressif, injurieux et violent, le fait qu'il a la plupart du temps vécu désoeuvré, se refusant à toute démarche pour reprendre une activité professionnelle, malgré tous les efforts qu'elle a pu accomplir pour tenter de l'aider, avec pour corollaire une non contribution aux charges du mariage ainsi que le harcèlement qu'il lui a fait subir sur les lieux de son travail ;

Considérant que M. X..., qui ne conteste pas son alcoolisme, estime qu'il s'agit d'une maladie insusceptible de constituer un grief dès lors qu'il tentait de s'en soigner, souligne qu'il a connu des échecs dans sa vie professionnelle et reproche à son épouse d'avoir manqué à son devoir d'assistance et de solidarité, notamment au cours d'une cure de désintoxication et de n'avoir fait aucun effort pour adapter son train de vie à leur situation, dépensant de manière inconsidérée à son usage personnel ; que chacun des époux conteste les griefs allégués par l'autre ;

Considérant que le juge pour prononcer un divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil ne peut fonder sa décision sur des attestations dépeignant une atmosphère de mésentente ou faisant état de l'irritabilité du conjoint sans décrire de faits précis et significatifs constituant de la part d'un époux de fautes graves ou renouvelées ;

Considérant que l'alcoolisme récurrent de M. X..., non contesté en tant que tel puisque ce dernier admet avoir du subir deux hospitalisations volontaires pour ce motif, s'est, bien qu'il s'en défende, traduit par des débordements verbaux et comportementaux dont plusieurs tiers, amis de la famille, ont été les témoins directs ; que Dominique E... et Sylvie F... attestent de façon précise et circonstanciée de l'importante tension nerveuse que cette attitude générait tant vis-à-vis de sa famille que de l'entourage présent, notamment à l'occasion d'une fête de fin d'année, et de la difficulté d'entretenir en sa présence une vie sociale normale ; qu'une autre amie du couple, Mme G..., témoigne de l'agressivité et de l'alcoolisme de M. X... ayant rendu l'atmosphère irrespirable au bout de quelques jours de vacances communes ; que cet alcoolisme a été qualifié en 1998, lors d'une cure de désintoxication de deux mois, de "névrose arrosée consécutive à des difficultés professionnelles" ; que l'alcoolisme de M. X... a été durable, Mme Christiane H..., amie de la famille, l'ayant rencontré dans un centre de soins où il était accueilli au cours de l'année 2004 ; que Mme Patricia I... atteste avoir rompu toute relation avec les époux X... en raison de l'alcoolisme du mari générant une ambiance querelleuse, agressive et malveillante, ce lors des années 1998 et 1999, relations qu'elle a reprises avec l'épouse postérieurement à la séparation conjugale ; qu'ainsi, les répercussions de l'alcoolisme du mari sur la vie familiale et sociale du couple sont largement démontrées ; que l'inactivité professionnelle du mari à compter des années 1991-1992 en est un corollaire manifeste ;

Considérant que le grief que formule le mari contre son épouse selon lequel elle ne lui aurait pas prêté l'assistance due par une épouse à son conjoint se trouve contredit par l'attestation de M. Dinh J... K..., qui, sur l'insistance de Mme A... soucieuse de voir son mari se ressaisir, a fait travailler M. Alain X... courant 2002, collaboration jugée non fructueuse en raison de son manque de suivi et de sérieux dans son travail ; que les pièces produites par le mari, attestant de sa conscience professionnelle et de son sérieux, ont trait à une période antérieure de la vie professionnelle de M.Pradal, dont il n'est pas contesté qu'elle fut initialement brillante et prometteuse ; qu'au regard de la durée de la problématique rencontrée par le mari, il ne peut être reproché à l'épouse d'avoir subi une situation de détresse et de découragement attestée par M. Jean-Claude L..., auquel elle s'est également adressée pour qu'il procure des activités ponctuelles à son mari, sans succès faute d'efforts de ce dernier (pièce no 27), ou par son frère Richard A... (pièce no 125), médecin, qui atteste de ce que sa soeur a beaucoup souffert de l'état de son mari, était découragée et usée, de ce qu'il lui a conseillé de ne pas lui rendre visite, mais de ce qu'elle prenait de ses nouvelles quotidiennement lors de sa cure de désintoxication de 1998, étant rappelé que la vie commune a ensuite repris durant plusieurs années ;

Considérant que Mme A... établit par ailleurs que le mari a eu un comportement harcelant et injurieux à son égard, au travers de diverses correspondances que ce dernier lui a adressées, la qualifiant de schizophrène ou de vénale, lettres adressées sans nécessité sur son lieu de travail, alors qu'ils vivaient dans le même immeuble, l'un au quatrième, l'autre au cinquième étage ;

Considérant que M. X... n'établit pas le caractère outrancièrement dépensier de l'épouse à des fins uniquement personnelles, alors que lui-même se faisait aider par sa mère et que nombre des dépenses visées concernaient aussi l'enfant commun ; qu'il ne prouve pas davantage l'indifférence ou le délaissement de Mme A... et ne rapporte aucune preuve d'une attitude déloyale ou indifférente de cette dernière, ni un quelconque comportement fautif de l'épouse qui serait de nature à justifier et expliciter son propre alcoolisme et, par voie de conséquence, n'établit contre elle aucun fait de nature à constituer une faute au sens de l'article 242 du code civil ;

Considérant, en conséquence, nonobstant les griefs non suffisamment démontrés, non pertinents ou surabondants, que sont ainsi établis, à l'encontre du seul mari les faits ci-dessus visés, constituant une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune et justifiant le prononcé du divorce à ses torts exclusifs ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer de ce chef le jugement entrepris ;

Sur la prestation compensatoire

Considérant que l'époux aux torts exclusifs duquel le divorce est prononcé n'a droit à aucune prestation compensatoire ; qu'il n'y a donc pas lieu d'examiner la demande que formule M. X... ; qu'il y a lieu en revanche d'examiner la demande que formule Mme A... ;

Considérant, que le divorce met fin au devoir de secours mais que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives ; que cette prestation, qui a un caractère forfaitaire, est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle ci dans un avenir prévisible ;

Considérant que, dans la détermination des besoins et des ressources, le juge prend en considération, notamment, l'âge et l'état de santé des époux, la durée du mariage, le temps déjà consacré ou qu'il leur faudra consacrer à l'éducation des enfants, leur qualification et leur situation professionnelle au regard du marché du travail, leur situation respective en matière de pension de retraite et leur patrimoine tant en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial ;

Considérant que cette prestation prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge qui décide des modalités selon lesquelles elle s'exécutera, attribution ou l'affectation de biens en capital, versement d'une somme d'argent, abandon de biens en nature, meubles ou immeubles en propriété, en usufruit, pour l'usage ou l'habitation, dépôt de valeurs productives de revenus entre les mains d'un tiers chargé de verser les revenus à l'époux créancier ;

Considérant que le mariage a duré 19 années et demi à ce jour ; que les époux sont âgés respectivement de 58 ans pour le mari et de 52 ans pour la femme ; qu'ils ont eu une enfant, actuellement âgée de 17 ans et demi, laquelle suit des études secondaires et engagera vraisemblablement une formation universitaire ; qu'ils ne font pas état de problèmes de santé particuliers ;

Considérant que les époux sont mariés sous un régime de séparation de biens et n'ont pas constitué de patrimoine indivis ;

Considérant que le premier juge a, après avoir analysé les situations matérielles des parties, arrêté le principe de l'octroi d'une prestation compensatoire à l'épouse ; qu'il y a lieu de se référer à l'analyse ainsi faite tout en l'actualisant ;

Considérant que Mme A..., qui exerce toujours la profession de secrétaire au sein de la société Camus et Camus Productions, et qui percevait en 2005 un revenu mensuel de 4.725€ primes comprises, justifie que son revenu au 30 septembre 2007 s'établissait à la somme de 54.827,62 €, soit 6.091 € par mois, montant qu'elle qualifie d'exceptionnel en lien direct avec une tournée exceptionnelle de Johnny M... en 2006, soulignant que son salaire fixe net mensuel habituel est de 4.218 € ; qu'elle émet des doutes sur la pérennité de son emploi en faisant valoir qu'elle est sans formation particulière et que son employeur, âgé de 69 ans, envisage une prochaine retraite ; qu'il n'en demeure pas moins qu'elle travaille non pas pour une personne en particulier mais pour une société de production, vendue sans que son emploi soit actuellement en question ;

Considérant que Mme A... a, en cours de procédure, hérité de ses parents et a recueilli dans leur succession la moitié des parts d'une SCI portant sur un appartement de trois pièces situé ..., parts évaluées à 137.500€ pour chacun ; que ce bien serait selon elle actuellement indisponible à la vente, faute d'immatriculation de la SCI ; qu'elle déclare dans son attestation sur l'honneur actualisée au 25 octobre 2007 ne posséder aucun autre patrimoine ; que les prêts auprès de son employeur ou de la BNP dont elle justifie par ses pièces sont tous achevés à ce jour, ayant pris fin en février 2008 ; qu'elle déclare, sans justifier des droits correspondants, ne cotiser pour sa retraite que depuis 1985 ;

Considérant que Mme A... occupe pour le moment à titre gratuit un bien immobilier appartenant en propre à son mari par suite d'une vente de la mère de M. X... à son fils ; que cependant la résolution judiciaire a été prononcée pour défaut de paiement du prix ; que l'arrêt rendu en ce sens le 18 mai 2007 fait l'objet d'un pourvoi en cassation ; que Mme A... devra en tout état de cause se reloger ;

Considérant que M. X... était journaliste et a travaillé pour Playboy et le Figaro Magazine ; qu'il n'exerçe plus sa profession depuis de nombreuses années ; qu'il exerce actuellement une activité de courtage d'assurances selon l'épouse, de rénovation de maisons et appartements selon lui sous l'enseigne Alpra et invoque dans sa déclaration sur l'honneur un bénéfice de 16.779 € en 2006 et de 10.487 € en 2007 ; qu'il fait également état à titre patrimonial :

- de valeurs mobilières à hauteur de 981 € au 31 décembre 2007,

- d'un bien indivis situé à Garches, estimé 415.000 €,

- d'un appartement au 4ème étage ... évalué 300.000 €,

et ne mentionne plus dans sa dernière déclaration sur l'honneur l'appartement situé au 5ème étage du même immeuble, évalué également 300.000 €, objet de la procédure de résolution de vente actuellement en cassation ;

Considérant que M. X... fait valoir qu'il a cotisé 105 trimestres mais ne fournit pas d'estimation de ses droits futurs ;

Considérant que Mme A... revendique quant à la situation réelle de M. X... et de sa famille en son ensemble la mise en oeuvre d'une expertise ; qu'elle conteste la réalité du patrimoine invoqué par M. X... et les valeurs qu'il indique; que Mme A... soutient, en outre, que M. X... dispose d'une vocation successorale importante de la part de ses deux parents qui sont toujours en vie et qu'il a de tout temps bénéficié d'importantes largesses de sa mère ; qu'elle invoque le fait que la mère de M. X... lui avait fait donation de valeurs mobilières pour 149.996 francs en 1994 et de147.830 francs en1997, avec droit de retour, et émet en conséquence des doutes sur la crédibilité des pièces et déclarations produites à cet égard par le mari quant à son portefeuille mobilier actuel; que cependant le droit de retour n'était stipulé qu'en cas de décès du bénéficiaire, sans faire obstacle à l'aliénation des biens en cause ;

Considérant, en tout état de cause, que la prestation compensatoire n'est pas destinée à égaliser les fortunes, ni à corriger les conséquences du régime matrimonial adopté par les époux ; qu'elle doit permettre d'éviter que l'un des époux soit plus atteint que l'autre par le divorce ; que les espérances successorales, par définition incertaines, n'ont pas à être prises en compte pour l'appréciation de la prestation compensatoire ; que l'expertise sollicitée n'apparaît nullement indispensable pour cerner les situations respectives des parties et d'elles seules, les autres membres de la famille ne pouvant être concernés ;

Considérant que, s'agissant du bien indivis situé à Garches, il y a lieu de relever que ce bien est occupé par le frère de M. X..., que la part indivise de chacun des frères est évaluée à la somme de 415.000 €, que l'acte notarié du 3 juin 1985 portant sur l'acquisition de ce bien stipule pour M. Jean-François X... la confusion de ses qualités de propriétaire et d'occupant et pour M. Alain X... la vocation à percevoir des loyers ou indemnité d'occupation ; que Mme A... estime d'autre part ce bien à une valeur supérieure à celle reconnue par M. X..., évoquant, pièces à l'appui, une valeur plus proche de 1.200.000€ pour le tout ;

Considérant que Mme A... soutient que M. X... possèderait aux Seychelles une maison en indivision avec son père et son frère, mais n'en établit aucune preuve concrète, en dehors du témoignage d'une personne rapportant ses dires mais qui ne l'a jamais vue ; qu'il en va de même pour un bateau dont il a fait état auprès de Mme N... ;

Considérant qu'il résulte des propres écritures de Mme A... que la maison de Garnay dans l'Eure et Loir qu'occupe régulièrement M. X... appartient à sa mère Mme O... et n'a pas vocation à être prise en compte pour l'appréciation de la prestation compensatoire susceptible d'être due à Mme A... ; que, de même, il importe peu que Mme O..., mère de M. X..., possède un immeuble à La Garenne Colombes, un appartement dans le 16ème à Paris ou un appartement à Arcachon ;

Considérant que les éléments connus de la situation de M. X... personnellement sont suffisants pour arrêter, comme l'a fait le premier juge, l'existence d'une réelle disparité dans les situations respectives des parties au détriment de l'épouse ; qu'il est manifeste que si l'épouse a des revenus et que le mari invoque son absence d'activité professionnelle ou celle réduite qu'il développe actuellement, cette situation relève en ce qui le concerne d'un choix personnel arrêté de longue date au regard de la situation patrimoniale de sa propre famille ; qu'il n'en demeure pas moins qu'il dispose d'un capital immobilier qui lui est propre, qu'il a vocation à le faire fructifier, que ce patrimoine est nettement plus important que celui de l'épouse ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer de ce chef le jugement entrepris ;

Considérant que Mme A... n'ayant pas chiffré sa demande de prestation compensatoire en raison des aléas procéduraux pesant sur une partie du patrimoine du mari, il y a lieu d'ordonner la réouverture des débats et de l'inviter à le faire ;

Sur la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant

Considérant que chaque parent doit participer en fonction de ses capacités contributives à l'entretien des enfants ; que cette obligation subsiste tant que l'enfant n'est pas capable de subvenir seul à ses besoins ; que le parent qui assume à titre principal la charge d'enfants majeurs peut demander à son conjoint de lui verser une contribution ;

Considérant que les situations respectives des parties ont été ci-dessus évoquées ; que les revenus du père à prendre en compte ne sont pas seulement ceux qu'il reconnaît mais aussi ceux dont il se prive volontairement, tel le loyer de sa part de la maison de Garches ou celui de son appartement du 17ème qu'il admet lui-même n'occuper qu'épisodiquement ; que ses relevés de banque révèlent par ailleurs des entrées régulières, de l'ordre de 2.000€ en septembre 2007, 3.538 € en octobre 2007 ; qu'en fonction de ces éléments, il y a lieu, comme l'a justement estimé le premier juge, de mettre à sa charge une contribution de 400€ à l'entretien et l'éducation de l'enfant Valentine, dont les besoins sont ceux d'une jeune-fille presque majeure, scolarisée en établissement privé ;

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile

Considérant qu'il sera statué sur les frais et dépens de la procédure dans le cadre de l'arrêt final à intervenir ;

PREND LA DÉCISION SUIVANTE,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Dit irrecevable la demande de prestation compensatoire de M. X... ;

Déboute Mme A... de sa demande d'expertise ;

Ordonne la réouverture des débats quant au montant de la prestation compensatoire et fait injonction à Mme A... de conclure et chiffrer sa demande de prestation compensatoire avant le 6 juin 2008 et à M. X... de répondre avant le 30 juin 2008 ;

Renvoie la cause et les parties à l'audience de plaidoiries du vendredi 4 juillet 2008 à 9h30 ;

Réserve à statuer sur surplus.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0162
Numéro d'arrêt : 06/18032
Date de la décision : 07/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 02 octobre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-05-07;06.18032 ?
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