La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2008 | FRANCE | N°06/02695

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0135, 06 mai 2008, 06/02695


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
21ème Chambre C

ARRET DU 06 Mai 2008
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 02695

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Janvier 2006 par le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE- SAINT- GEORGES section activités diverses RG no 03 / 00212

APPELANTE

1o- ADCRO
2, rue du Parc
94460 VALENTON
représentée par Me Sylvia FORME, avocat au barreau de PARIS, toque : C1079,

INTIME

2o- Monsieur Philipp

e X...
...
77550 LIMOGES FOURCHES
comparant en personne, assisté de Me Nathalie AOUINE, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toqu...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
21ème Chambre C

ARRET DU 06 Mai 2008
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 02695

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Janvier 2006 par le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE- SAINT- GEORGES section activités diverses RG no 03 / 00212

APPELANTE

1o- ADCRO
2, rue du Parc
94460 VALENTON
représentée par Me Sylvia FORME, avocat au barreau de PARIS, toque : C1079,

INTIME

2o- Monsieur Philippe X...
...
77550 LIMOGES FOURCHES
comparant en personne, assisté de Me Nathalie AOUINE, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC379,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mars 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Hélène IMERGLIK, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie- Pierre DE LIEGE, président
Mme Irène LEBE, conseiller
Mme Hélène IMERGLIK, conseiller

Greffier : Mme Anne- Marie CHEVTZOFF, lors des débats,

ARRET :

- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par Mme Marie- Pierre DE LIEGE, présidente et par Mme Anne- Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. Philippe X...a été engagé le 8 octobre 1978en qualité de mécanicien monteur spécialisé en prothèses par l'Association pour le développement de la chirurgie réparatrice et orthopédique (ADCRO).
En 1990, il a intégré le magasin général où il a géré le matériel et les fournitures liés aux prothèses et au déplacement des personnes appareillées.
Au début de l'année 1999 M. A..., engagé en 1991 en qualité de technicien de surface, a été muté au magasin pour effectuer les mêmes tâches que M. X....
Dès cette arrivée les relations entre les deux salariés ont été difficiles et la hiérarchie en a été informée.
A compter d'octobre 2001 M. X...a été en arrêt de travail pour maladie et a dénoncé le comportement de M. A...à son égard.
L'enquête diligentée par la direction n'a pas confirmé les accusations de M. X...et les propositions de réorganisation du service avancées par le CHSCT ont été refusées par l'ADCRO
De mars à septembre 2002 M. X...a travaillé à mi- temps thérapeutique.
A sa reprise le service a été partiellement réorganisé pour limiter à quelques heures par jour le travail en commun des deux salariés.
Après avoir dénoncé plusieurs incidents M. X...a déposé le 29 janvier 2003 auprès du Procureur de la République de Melun une plainte pour harcèlement moral qui a été classée sans suite le 19 février 2004 après une enquête confiée à la gendarmerie.
M. X...qui avait de nouveau été à plusieurs reprises arrêté pour maladie s'est vu reconnaître le 17 mars 2004 le statut de travailleur handicapé catégorie A par la Cotorep.
Le 29 octobre 2004 le médecin du travail l'a déclaré temporairement inapte.
A compter du 1er novembre 2005 son état de santé justifié l'attribution d'une pension d'invalidité en catégorie 1.
Le 16 novembre 2005 le médecin du travail a rendu l'avis suivant : " inaptitude définitive au poste. Poste présentant un danger immédiat pour sa santé. Pas de 2ème avis conformément à al. 1 de R. 241-51-1 du Code du Travail. Inaptitude définitive à tous les postes de l'entreprise ".
Après un entretien préalable le 13 décembre 2005 l'ADCRO a licencié M. X...pour inaptitude, le 16 décembre 2005.
Dès le 8 avril 2003 M. X...avait saisi le conseil de prud'hommes de Villeneuve- Saint- Georges pour obtenir des dommages- intérêts pour préjudice matériel et moral.
L'affaire a été plaidée et mise en délibéré le 25 novembre 2005, avant le licenciement.
Par jugement rendu le 6 janvier 2006, sous la présidence du juge départiteur, le conseil de prud'hommes a condamné l'ADCRO à verser à M. X...13. 000 euros de dommages- intérêts, toutes causes confondues, avec exécution provisoire.

L'ADCRO a fait appel et sollicite le rejet des demandes de M. X..., la restitution de la somme versée en exécution du jugement et l'octroi de 2. 000 euros de dommages- intérêts et de 1. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
M. X...demande à la Cour :
de condamner l'ADCRO à lui verser :
-20. 000 euros de dommages- intérêts pour préjudice moral,
-8. 431, 63 euros au titre de son préjudice matériel,
subsidiairement d'ordonner une expertise médico- psychologique avant dire droit sur ces deux postes de préjudice,
de dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner l'ADCRO à lui verser :
-50. 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-4. 145, 44 euros d'indemnité de préavis,
-414, 54 euros de congés payés afférents,
-2. 000 euros en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées à l'audience du 4 mars 2008.

MOTIVATION :
Sur la demande de dommages- intérêts pour préjudice matériel et moral :
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges, retenant que l'ADCRO avait failli à son obligation de sécurité résultant des dispositions de l'article L. 230-2 du Code du Travail malgré la connaissance qu'elle avait de la situation et de la dégradation de l'état de santé de M. X..., a condamné cette association à verser des dommages- intérêts à son salarié.
Les premiers juges ont notamment souligné à juste titre que, même si le harcèlement moral allégué à l'encontre de M. A...n'était pas établi, la nécessité de séparer les deux salariés était patente et que l'ADCRO ne justifiait pas de l'impossibilité d'une mutation de l'un ou l'autre.
L'avis du responsable du service qui estimait en octobre 2001 que M. X...avait seul la connaissance du matériel et la compétence nécessaire est à cet égard insuffisant dès lors que M. A...dont les qualités sont reconnues et qui a géré seul le magasin lors des arrêts maladie de l'intimé était à même, au besoin après une courte formation, d'assurer l'ensemble des tâches de ce service.
L'ADCRO ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'était pas informée de l'état de dépression de M. X..., de son lien avec sa situation professionnelle et du danger généré par le maintien de la situation alors que l'enquête de gendarmerie à laquelle ses représentants ont participé, les avis médicaux, les courriers du salarié depuis octobre 2001 et les recommandations du CHSCT démontrent le contraire.
Les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice de M. X...en lui allouant une indemnité de 13. 000 euros toutes causes confondues.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur le licenciement :
Le lettre de licenciement est ainsi motivée : " Nous vous confirmons que notre médecin du travail a rendu, vous concernant, un avis d'inaptitude définitive au poste que vous occupiez dans notre établissement, poste jugé dangereux, pour votre santé et qu'il a assorti cet avis de l'impossibilité d'un reclassement au sein de l'établissement.
En conséquence, et conformément à la réglementation en vigueur, nous sommes conduits à vous signifier la rupture de votre contrat de travail, qui prend effet à la date de ce jour ".
Contrairement à ce que soutient l'ADCRO, le médecin du travail ne fait pas état dans son avis du 26novembre 2005 de l'impossibilité d'un reclassement et aucun avis postérieur de ce médecin n'est produit aux débats.
En application de l'article L. 122-24-4 du Code du Travail, l'avis du médecin concluant à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise ne dispense pas l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail.
L'ADCRO ne justifie d'aucune demande de préconisation du médecin du travail ni d'aucune recherche effective des possibilités de reclassement alors qu'elle employait plus de 200 salariés et que M. X..., précédemment ouvrier qualifié, avait une compétence technique qui aurait pu être utilisée dans d'autres fonctions, au besoin après les mesures d'adaptation également imposées par l'article 15. 02. 15 de la convention collective des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif applicable dans l'entreprise.
Le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement.
M. X...percevait un salaire mensuel brut de 2. 072, 72 euros.
L'ADCRO devra lui verser 4. 145, 44 euros d'indemnité de préavis et 414, 54 euros de congés payés afférents.
M. X...est né en 1959, il avait 27 ans d'ancienneté dans l'entreprise, il n'a pas retrouvé d'emploi et se trouve en situation de surendettement.
Le montant de son indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être fixé à 40. 000 euros.

Sur la demande de l'ADCRO :
L'ADCRO qui a failli à ses obligations d'employeur, ne démontre pas l'existence d'un préjudice sur lequel elle ne s'explique pas plus avant.
Sa demande de dommages- intérêts sera donc rejetée.

Sur les frais non répétibles :
Il y a lieu de faire application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et d'allouer 2. 000 euros à M. X...dont distraction au profit de Me Nathalie Aouine.

PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne l'ADCRO à verser à M. X...:
-40. 000 euros (QUARANTE MILLE EUROS) d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-4. 145, 44 euros (QUATRE MILLE CENT QUARANTE CINQ EUROS et QUARANTE QUATRE CENTIMES) d'indemnité de préavis,
-414, 54 euros (QUATRE CENT QUATORZE EUROS et CINQUANTE QUATRE CENTIMES) de congés payés afférents,
-2. 000 euros (DEUX MILLE EUROS) en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 dont distraction au profit de Me Nathalie Aouine,
Rejette le surplus des demandes,
Condamne l'ADCRO aux dépens.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0135
Numéro d'arrêt : 06/02695
Date de la décision : 06/05/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Villeneuve-Saint-Georges, 06 janvier 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-05-06;06.02695 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award