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06/05/2008 | FRANCE | N°05/02891

France | France, Cour d'appel de Paris, 06 mai 2008, 05/02891


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre B



ARRET DU 06 Mai 2008

(no , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/02891



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2004 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU RG no 03/00507





APPELANT

Monsieur Philippe X...


...


91140 VILLEBON SUR YVETTE

représenté par Me Roland ZERAH, avocat au barreau de PARIS, toque : D 164







INTIMÉE

SAS TIPAG

17 rue M. Dassault

44000 SAINTE LUCE SUR LOIRE

représentée par Me Denis RICHARD, avocat au barreau de BLOIS substitué par Me Stéphanie BERROYER, avocat au barre...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre B

ARRET DU 06 Mai 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/02891

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2004 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU RG no 03/00507

APPELANT

Monsieur Philippe X...

...

91140 VILLEBON SUR YVETTE

représenté par Me Roland ZERAH, avocat au barreau de PARIS, toque : D 164

INTIMÉE

SAS TIPAG

17 rue M. Dassault

44000 SAINTE LUCE SUR LOIRE

représentée par Me Denis RICHARD, avocat au barreau de BLOIS substitué par Me Stéphanie BERROYER, avocat au barreau de BLOIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mars 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller

Monsieur Daniel FONTANAUD, Conseiller

Greffière : Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller

- signé par Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller, par suite d'un empêchement de la Présidente, et par Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, greffière présente lors du prononcé.

LA COUR,

Statuant sur l'appel formé par Philippe X... d'un jugement contradictoire du Conseil de Prud'hommes de Longjumeau en date du 17 juin 2004 ayant condamné la société TIPAG à lui verser :14 268 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

1 426,80 euros au titre des congés payés y afférents

3 567 euros au titre du prorata du treizième mois

et débouté les parties du surplus de leur demande ;

Vu les dernières écritures et observations orales à la barre en date du 17 mars 2008 de Philippe X... appelant, qui sollicite de la Cour l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de l'intimée à lui verser :

- 50 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 60 000 euros pour non respect d'une clause de non concurrence nulle

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières écritures et observations orales à la barre en date du 17 mars 2008 de la société TIPAG intimée qui sollicite de la Cour la réformation du jugement entrepris et conclut au débouté de la demande et à la condamnation de l'appelant à lui verser 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à lui rembourser les sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire ;

SUR CE, LA COUR

Considérant qu'il est constant que Philippe X... a été embauché à compter du 16 janvier 2001 par la société intimée par contrat de travail à durée indéterminée en qualité de directeur commercial ; qu'il percevait une rémunération mensuelle brute de 4756 euros ; que l'entreprise employait de façon habituelle plus de dix salariés ;

Que l'appelant a été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception à un entretien préalable le 3 mai 2002 pour faute grave pour avoir pris du 18 au 23 avril 2002 un nombre de jours de congés supérieur à celui auquel il avait droit, sans en informer la société et pour avoir abandonné une installation en cours de réalisation chez un client le 18 avril 2002 ; qu'à la suite de cet entretien, il a été convoqué à nouveau par courrier en date du 24 mai 2002 à un entretien le 4 juin 2002 en vue de son licenciement avec mise à pied à titre conservatoire ; qu'à l'issue de cet entretien, son licenciement pour faute grave lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 juin 2002 ;

Que les motifs du licenciement tels qu'énoncés dans la lettre sont les suivants :

«1-Le 18 avril 2002 vous avez abandonné sans autorisation pour partir en congés une installation en cours chez un important client, la société Faguier, alors qu'il s'agissait de l'installation du premier Jet plate, matériel dont dépend peut-être l'avenir de notre société. Votre défection a obligé Messieurs Z... et A... à se débrouiller pour terminer seuls cette installation dont vous vous êtes totalement désintéressé. Ce comportement est d'autant plus inadmissible de la part d'un directeur commercial que l'importance de cette installation était une des raisons qui nous avait amené à vous refuser ces congés.

2-Vous avez pris des congés du jeudi 18 au mardi 23 avril congés qui vous avaient été refusés au motif d'une part de l'installation Faguier sur l'importance de laquelle nous avions attiré votre attention et que d'autre part vous ne disposiez pas d'un nombre de jours de congés suffisant pour partir comme vous l'envisagiez.

Il en résulte en passant outre à notre refus de vous accorder les congés demandés une acte d'insubordination manifeste, une absence injustifiée de plusieurs jours, une désinvolture et un désintérêt à l'égard de la clientèle et de vos responsabilités que nous ne pouvons tolérer. Le fait que vous nous ayez proposé de rembourser les jours d'absence à la société ne justifie ni n'excuse un tel comportement.

3-Vous avez été sollicité par un de nos plus gros clients, la société Tonnelier qui vous avait demandé le 16 avril une offre pour une intervention sur le matériel que nous lui avions livré. Cette offre ne lui étant pas parvenue la société Tonnelier vous a relancé et vous lui avez alors fait part du fait que "vous étiez en délicatesse avec votre employeur"et de vos doutes sur la pérennité de l'entreprise et ceci sans lui adresser la proposition demandée.

Début mai sans nouvelle de vous la société Tonnelier s'est résolue à faire appel directement à notre fournisseur allemand pour programmer une intervention qui a eu lieu le 22 mai. La société Sofroga, qui nous avait amené le client, informée par celui-ci a pu rassurer Monsieur B... directeur technique de Tonnelier quant à la continuité de TIPAG.

Ce n'est qu'à la réception du fax du 22 mai de la société Tonnelier vous informant de l'intervention de notre fournisseur que vous vous êtes décidé à lui adresser la proposition attendue depuis le 16 avril.

Nous vous reprochons donc d'avoir raconté à un client les difficultés que vous rencontrez avec votre employeur ce qui est inacceptable, de ne pas avoir donné suite pendant plusieurs semaines à une demande d'intervention de la part d'un de nos plus gros clients l'obligeant ainsi à s'adresser directement à notre fournisseur ce qui aurait pu amener celui-ci à s'interroger sur notre sérieux et sur notre capacité à être son agent pour la France, de n'avoir réagi enfin qu'au reçu du courrier du client vous annonçant que l'intervention avait été effectuée et ce, sans le moindre mot pour vous excuser et tenter de justifier votre retard. »

Que l'appelant a saisi le Conseil de Prud'hommes le 6 mai 2003 en vue de contester la légitimité du licenciement ;

Considérant que Philippe X... expose que les griefs relatifs à l'absence de congés et au fait qu'il n'a pas pu assurer un dépannage ont fait l'objet du premier entretien préalable et n'ont pas été sanctionnés dans un délai de trente jours ; qu'au surplus ils sont dépourvus de fondement ; que le troisième grief n'est pas conforme à la réalité ; que son licenciement est consécutif à la fermeture de l'agence d'Evry ; que l'appelant se trouve toujours au chômage ; qu'il a respecté la clause de non concurrence nulle ;

Considérant que la société TIPAG soutient que le licenciement est fondé sur des fautes graves inacceptables, à savoir un congé pris malgré le refus de sa hiérarchie, un abandon de poste en clientèle, une absence de réaction à une demande d'intervention de la part d'un client, un comportement indélicat ; que la demande en paiement de treizième mois n'est pas fondée ; que l'appelant ne démontre pas avoir subi un préjudice du fait de la clause de non concurrence ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L 122-6, L 122-14-2 (alinéa 1) et L 122-14-3 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ;

Considérant que le premier et le deuxième grief concernent des faits qui sont à l'origine de la convocation à l'entretien préalable fixé au 3 mai 2002 ; que la lettre de convocation à cet entretien en date du 24 avril 2002 expose précisément les faits à l'origine de la mise en oeuvre de la première procédure de licenciement ; qu'à la suite de l'entretien aucune sanction n'est intervenue dans le délai d'un mois exigé par l'article L122-41 du code du travail ; que de tels faits ne peuvent donc justifier le licenciement prononcé le 6 juin 2002 ;

Considérant que le dernier grief articulé dans la lettre de licenciement à l'encontre de l'appelant se réfère en réalité exclusivement au comportement de celui-ci à l'égard d'un client, la société Tonnelier ; qu'il est fondé sur des propos tenus sur son employeur et sur une absence de communication d'une offre pour une intervention sur du matériel livré par la société ; que toutefois pour justifier ce grief, la société ne s'appuie que sur un courrier de la société Tonnelier ; que cette correspondance en date du 22 mai 2002 émanant du dirigeant de la société a été adressée par fax à l'appelant et était destinée à dissiper des malentendus ; qu'elle ne contient pas les accusations articulées ; que Pierre B... ne précise nullement avoir été informé par l'appelant des difficultés que celui-ci aurait rencontrées avec son employeur ; qu'il ajoute avoir déduit de lui-même que la société TIPAG n'existait plus ou que l'appelant n'y était plus employé ; que cette erreur était à l'origine de sa démarche auprès de la société Basysprint destinée à substituer la société TIPAG pour l'intervention envisagée ; qu'il n'est nullement démontré que l'appelant ait manqué de réactivité ni qu'un tel manque ait occasionné un préjudice à la société ; qu'en effet le courrier de la société Tonnelier ne permet pas de démontrer que celle-ci ait sollicité une intervention de la société TIPAG dès le 16 avril 2002 ; que son dirigeant a exprimé dans le courrier précité son souhait de continuer à entretenir des relations commerciales avec la société TIPAG ; qu'aucune perte n'a été enregistrée puisque l'appelant a communiqué à Pierre B... le jour de la réception de son fax le prix de la proposition d'intervention d'un montant total d'environ 1800 euros hors taxe ; qu'il s'ensuit que ce dernier grief n'étant pas caractérisé, le licenciement de Philippe X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Considérant qu'il n'existe pas de contestation sur le montant des indemnités compensatrices de préavis et de congés payés allouées par les premiers juges ;

Considérant que l'appelant était âgé de 47 ans et bénéficiait d'une ancienneté de plus de deux années au sein de la société ; qu'il a dû solliciter le bénéfice d'allocations de chômage qui lui ont été versées par l'ASSEDIC du SUD EST FRANCILIEN jusqu'en novembre 2005 ; qu'en réparation du préjudice subi, il convient de lui allouer la somme de 32 000 euros sur le fondement de l'article L122-14-4 du code du travail ;

Considérant qu'il résulte du contrat de travail que le salaire de l'appelant était réparti sur treize mois ; qu'il n'a perçu, durant toute la relation de travail, que la somme de 1905,61 euros versée le 27 juin 2002 ; que le rappel de treizième mois auquel il pouvait prétendre n'est pas inférieur à la somme revendiquée et allouée par les premiers juges ; qu'il convient de confirmer le jugement entrepris ;

Considérant qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives ;

Considérant que l'article VII du contrat de travail imposait à l'appelant une obligation de non concurrence à caractère général et d'une durée de deux années ; qu'il n'était prévu aucune contrepartie financière ; qu'il n'est pas démontré que l'appelant n'ait pas respecté cette obligation pendant toute sa durée ; que cette obligation lui a occasionné un préjudice ; qu'il convient de lui allouer la somme de 27 440 euros en réparation de ce préjudice ;

Considérant en application de l'article L 122-14-4 alinéa 2 du code du travail que le remboursement des allocations de chômage peut être obtenu par l'ASSEDIC lorsque le salarié a plus de deux années d'ancienneté au sein de l'entreprise et que celle-ci occupe habituellement plus de dix salariés ;

Considérant que les conditions étant réunies en l'espèce, il convient d'ordonner le remboursement par celle-ci des allocations versées à l'appelant dans les conditions prévues à l'article précité ;

Considérant qu'il ne serait pas équitable de laisser à la charge de l'appelant les frais qu'il a dû exposer, tant devant le Conseil de Prud'hommes qu'en cause d'appel, et qui ne sont pas compris dans les dépens; qu'il convient de lui allouer une somme de 2500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

REFORME le jugement entrepris,

CONDAMNE la société TIPAG à verser à Philippe X... :

- 32 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 27 440 € en réparation du préjudice consécutif à l'illicéité de la clause de non concurrence

- 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que la société TIPAG remboursera à l'ASSEDIC concernée les indemnités de chômage versées à Philippe X... du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois,

CONFIRME pour le surplus le jugement entrepris,

CONDAMNE la société TIPAG aux dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 05/02891
Date de la décision : 06/05/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Longjumeau


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-05-06;05.02891 ?
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