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17/04/2008 | FRANCE | N°04/43720

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0130, 17 avril 2008, 04/43720


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

18ème Chambre B

ARRÊT DU 17 Avril 2008

(no , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 04/43720/BF

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Mars 2004 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY RG no 20102053/EV

APPELANTE

S.A.R.L. ACCO

Espace "Champs Elysées"

307 square des Champs Elysées

91026 EVRY CEDEX

représentée par Me Jean-Louis MAUCLAIR, avocat au barreau de TROYES
r>INTIMÉS

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS ET DE LA RÉGION PARISIENNE (URSSAF 75)

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

18ème Chambre B

ARRÊT DU 17 Avril 2008

(no , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 04/43720/BF

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Mars 2004 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY RG no 20102053/EV

APPELANTE

S.A.R.L. ACCO

Espace "Champs Elysées"

307 square des Champs Elysées

91026 EVRY CEDEX

représentée par Me Jean-Louis MAUCLAIR, avocat au barreau de TROYES

INTIMÉS

UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS ET DE LA RÉGION PARISIENNE (URSSAF 75)

Service 6012 - Recours Judiciaires

TSA 80028

93517 MONTREUIL CEDEX

représenté par Mme ROULET (PG) en vertu d'un pouvoir général

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE l'ESSONNE (CPAM 91)

Boulevard François Mitterrand

91039 EVRY

représentée par Mme EGUERRE en vertu d'un pouvoir général

CAISSE D'ASSURANCE MALADIE DES PROFESSIONS LIBÉRALES D'ILE DE FRANCE (CAMPLIF)

...

75730 PARIS CEDEX 15

non représentée

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PRÉVOYANCE ET D'ASSURANCE VIEILLESSE (CIPAV)

...

75384 PARIS CEDEX 08

non représentée

Monsieur Patrick X...

...

91450 SOISY SUR SEINE

non comparant

Monsieur Y... Régional des Affaires Sanitaires et Sociales - Région d'Ile-de-France (DRASSIF)

...

75935 PARIS CEDEX 19

Régulièrement avisé - non représenté.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 22 Juin 2007, en audience publique, les seules parties représentées ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bertrand FAURE, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Bertrand FAURE, Président

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseiller

Madame Marie-Hélène GUILGUET-PAUTHE, Conseiller

Greffier : Mademoiselle Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Bertrand FAURE, Président et par Madame Claire AUBIN- PANDELLÉ, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue ensuite de l'arrêt avant dire droit rendu le 12 Octobre 2006 par cette même Chambre sur appel régulièrement interjeté par la SARL ACCO d'un jugement rendu le 11 Mars 2004 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY dans un litige l'opposant à l'Union pour le Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales (URSSAF) de PARIS, avec mise en cause de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) de l'Essonne, de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Professions Libérales d'Ile de France (CAMPLIF), de la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Assurance Vieillesse (CIPAV) et de Patrick X... ;

Les faits, la procédure, les prétentions des parties :

Les faits de la cause ainsi que les prétentions des parties jusqu'au présent stade de la procédure ont été très précisément exposés dans l'arrêt susvisé auquel il est fait expressément référence à cet égard ;

Il suffit de rappeler que lors d'un contrôle de la Société ACCO effectué le

13 Mars 2000 un agent assermenté de l'URSSAF de PARIS a procédé à un redressement de cotisations au titre de la période du 1er Janvier 1997 au 31 Décembre 1998 ce redressement portant sur cinq chefs en l'espèce : Réduction des cotisations patronales sur rémunérations d'un salarié à temps partiel ; Rémunération versées à M. Patrick X... ; Frais professionnels ; Réductions des cotisations sur les bas salaires ; Avantages en nature ; en date du 5 Avril 2000 une mise en demeure a été adressée à la Société lui réclamant le paiement des cotisations soit 75.324,76 € (494 098 F) et les majorations s'élevant à 7.532,36 € (49 409 F) ; par lettre du 17 Avril 2000 cette même Société a saisi la Commission de Recours Amiable d'une contestation sur le bien fondé du redressement ; en sa séance du 31 Janvier 2001 ladite Commission a décidé que les cotisations avaient été chiffrées à juste titre et décidé d'en poursuivre le recouvrement ; en date du 11 Juin 2001 la Société ACCO a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY ; devant cette juridiction et observation faite que les cotisations réclamées ont été réglées, l'URSSAF de PARIS s'est portée demanderesse reconventionnelle de la somme de 7 532,36 € (49 409F) représentant les majorations de retard au titre de la période concernée ;

Par le jugement déféré les premiers juges ont statué comme suit :

"Dit la SARL ACCO recevable mais mal fondée en son recours ;

Rejette les exceptions d'irrecevabilité soulevées par les parties ;

Donne acte à la SARL ACCO de son désistement concernant

Monsieur X... ;

Déboute la SARL ACCO de sa demande d'annulation du redressement des cotisations pour la période du 1er Juillet 1997 au 31 Décembre 1998" ;

Dans son arrêt rendu le 12 Octobre 2006 la Cour a estimé qu'il convenait d'ordonner la réouverture des débats afin d'être débattu sur les mérites des notes échangées en délibéré concernant la portée de l'annulation du redressement le cas échéant encouru pour irrégularité des opérations de contrôle et, dans l'hypothèse d'un indû caractérisé et sujet à répétition, pour qu'un débat puisse aussi s'établir sur le montant exact de cet indû ainsi que sur le point de départ des intérêts moratoires susceptibles d'en résulter ;

L'affaire étant à nouveau évoquée dans ces conditions la SARL ACCO fait déposer et développer oralement par son conseil des conclusions où il est demandé à la Cour :

"Infirmer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau, procéder à l'annulation de l'ensemble des redressements pour irrégularité des opérations de contrôle ayant donné lieu à la présente instance ;

Subsidiairement annuler l'ensemble des chefs de redressements ;

En tout état de cause ordonner le remboursement par l'URSSAF des sommes versées à titre provisionnel par la Société du chef de ce contrôle, assorties de l'intérêt légal depuis le jour du versement jusqu'au jour du remboursement, savoir ;

30.489,80€ avec intérêts légaux à/c du 20 Décembre 2000 ;

44.834,95€ avec intérêts légaux à/c du 21 Mars 2001 ;

Condamner l'URSSAF à la somme de 1000€ au titre de l'article 700 du NCPC ;

Condamner l'URSSAF aux éventuels dépens" ;

L'URSSAF de PARIS fait déposer et soutenir oralement par son représentant des conclusions où il est sollicité ce qui suit :

"Dire et juger la Société ACCO recevable en son appel mais mal fondée ;

Adjuger à l'URSSAF le bénéfice de ses précédentes écritures et observations orales ;

A titre principal :

Débouter la Société ACCO de l'ensemble de ses moyens, fins et prétentions ;

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Condamner la Société ACCO dans les termes de la demande reconventionnelle en paiement, soit pour la somme de 7.532,36€ représentant les majorations de retard dues au titre de la période contrôlée du 01/01/97 au 31/12/98 ;

A titre subsidiaire sur la forme, et au visa de l'article R243-59 du Code de la Sécurité Sociale ;

Si par extraordinaire la Cour devait faire droit au moyen tiré de l'irrégularité de l'envoi des questionnaires aux entreprises clientes et de la nullité du contrôle en résultant ;

Dire et juger que ce moyen n'est susceptible d'affecter que le point du redressement litigieux (point no3 frais professionnels non justifiés) ;

En conséquence ;

Limiter la portée de ce moyen à la nullité dudit chef de redressement ;

Et partant de là ;

Dire et juger qu'il n'y a lieu à remboursement qu'à concurrence de la somme de 17.010,72€ représentant les cotisations réintégrées de ce chef - avec les intérêts légaux à compter de la date de notification de l'arrêt à venir ;

Confirmer le jugement déféré pour le surplus, notamment du chef des rémunérations allouées à M X... et régulièrement soumises à cotisations ;

Et enfin, à titre infiniment subsidiaire et en tout état de cause compte tenu de la bonne foi de l'organisme de recouvrement au sens de l'article 1153 du Code Civil ;

Dire et juger que le point de départ des intérêts moratoire ne peut courir qu'à compter de la sommation de payer, soit la date de notification de l'arrêt à venir" ;

Par observations simplement orales de son représentant la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) de l'Essonne demande sa mise hors de cause en rappelant que par arrêt du 28 Mars 2003 devenu définitif la Cour d'Appel de PARIS a confirmé l'assujettissement au régime général de Patrick X... ;

Malgré le renvoi en continuation ordonné lors de l'audience en réouverture des débats du 9 Mars 2007, la Caisse d'Assurance Maladie des Professions Libérales d'Ile de France (CAMPLIF), la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Assurance Vieillesse (CIPAV) et Patrick X... n'ont pas comparu et ne se sont pas fait représenter ;

Il est fait référence aux écritures déposées par la Société ACCO et par l'URSSAF de PARIS pour un plus ample exposé des moyens et arguments proposés par ces derniers au soutien de leurs prétentions ;

Sur quoi la Cour :

Considérant que de premier chef la Société ACCO sollicite l'annulation de l'ensemble des redressements pour irrégularités ; qu'en ce sens elle invoque des irrégularités liées aux modalités du contrôle, en l'espèce le refus de communication par l'URSSAF de PARIS des éléments lui permettant de vérifier utilement ces redressements ainsi que les vérifications faites par l'Inspecteur du recouvrement auprès de ses clients ; qu'elle se prévaut par ailleurs de la portée d'un précédent contrôle ;

Considérant que des dispositions de l'article R243-59 du Code de la Sécurité Sociale dans sa rédaction applicable à la période en cause, il résulte qu'à l'issue de la vérification l'Inspecteur du recouvrement doit communiquer ses observations à l'employeur en l'invitant à y répondre dans les trente jours, et qu'à l'issue du délai il transmet lesdites observations, accompagnées éventuellement d'une réponse, à l'organisme du recouvrement dont il relève ; que le texte n'exige pas la communication intégrale du rapport établi par l'Inspecteur et que les formalités requises sont remplies dès lors que l'intéressé est informé des omissions et erreurs qui lui sont reprochées ainsi que des bases du redressement ; qu'il ne prévoit pas davantage l'individualisation des chefs de redressement salarié par salarié ; qu'en d'autres termes la liste nominative des salariés concernés par les redressements envisagés ne peut être exigée par l'employeur dès lors que sont suffisamment détaillées les anomalies constatées ; que par ailleurs il ressort de la notification qu'une DADS additive était jointe en annexe, cette diligence, facultative, permettant a priori à la Société ACCO d'identifier les salariés concernés par le redressement ; que plus précisément encore on conçoit mal comment cette Société pouvait prétendre valablement ignorer le nom de ces salariés alors qu'elle a elle-même mis à disposition de l'Inspecteur du recouvrement les notes de frais et les feuilles de présence, documents comptables établis par ses soins ; qu'aussi bien les premiers juges ont-ils a bon droit retenu "qu'il n'est pas démontré par la SARL ACCO que le contrôle s'était opéré à son insu ; qu'au contraire il a eû lieu au siège de la société et sur la base de renseignements fournis par elle ; ...que la mise en demeure ainsi que le rapport de contrôle résultent des échanges de courriers et des rencontres entre l'Inspecteur et les responsables de la SARL ACCO ; que dès lors celle-ci ne saurait contester le résultat d'une enquête à laquelle elle a contribué" ; que la Cour observera enfin que d'après même ses écritures l'appelante a pu avoir connaissance, au stade de la procédure contentieuse, du rapport d'enquête ;

Considérant que s'agissant du point d'assiette relatif au remboursement par l'employeur des frais de déplacement non justifiés (frais kilométriques et allocations forfaitaires de repas : point no 3) il est constant que des questionnaires ont été envoyés par l'Inspecteur du recouvrement aux entreprises clientes ; que cette vérification est en contradiction avec les dispositions de l'article R243-59 du Code de la Sécurité Sociale, lesquelles n'autorisent les agents chargés du contrôle qu'à interroger les personnes rémunérées elles-mêmes, dans le but, notamment de connaître leur nom et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations et avantages afférents ; que le recueil d'informations ainsi opéré en violation du texte doit être sanctionné par une nullité, et ce sans qu'il y ait lieu de rechercher si l'exploitation des questionnaires a contribué ou non de manière directe à la proposition de redressement ; que par contre, s'il est exact que l'article R.243-59 du Code de la Sécurité Sociale ne vise que la procédure de contrôle dans son sens générique et non les chefs de redressement pris distinctement, rien n'interdit pour autant aux agents de contrôle d'adopter pour chaque point d'assiette vérifié les méthodes les plus appropriées pour asseoir au mieux leur redressement ; qu'il convient donc de distinguer entre la procédure de contrôle et les opérations de contrôle qui peuvent être déclinées sous des formes différentes selon les modalités mises en oeuvre et dont la régularité formelle doit s'apprécier au cas par cas ; qu'il s'agisse de la validité formelle des opérations de contrôle comme des modalités du chiffrage le texte n'interdit pas à la juridiction qui constate une irrégularité dans le cadre des opérations de contrôle d'en limiter la portée et la nullité subséquente au seul point d'assiette ou de chiffrage litigieux ; que si ce n'est en ce qui concerne les conséquences à tirer du questionnement relatif aux frais professionnels non justifiés la procédure prévue par l'article R243-59 du Code de la Sécurité Sociale appréciées distinctement pour chaque chef de redressement a bien été respectée ; qu'il est enfin parfaitement claire que ce questionnement n'intéressant que les frais de déplacements non justifiés, n'a pu avoir aucune incidence sur les chefs de redressement par ailleurs proposés par l'Inspecteur du recouvrement ; qu'il s'ensuit que cette irrégularité n'est pas de nature à affecter l'ensemble des opérations de contrôle, tous chefs de réintégration confondus, et à invalider de manière formelle la lettre d'observation du 13 Mars 2000 ainsi que la mise en demeure subséquente en tant que décision de redressement ;

Considérant que la Société ACCO expose pièces à l'appui et en toute hypothèse sans être démentie par l'URSSAF de PARIS, que suite au contrôle litigieux elle a effectué à titre conservatoire deux paiements, le premier en date du 18 Décembre 2000, pour un montant de 30.489,80 €, le second en date du 21 Mars 2001 pour un montant de

44.834,95 € ; que sa demande de remboursement est assortie d'une demande en paiement des intérêts au taux légal à compter du jour du paiement, jusqu'au jour du remboursement ;

Considérant que l'URSSAF de PARIS indique pour sa part, sans être démentie par la Société ACCO que le montant des cotisations correspondant aux frais de déplacement non justifiés s'élève à 17.010,72 € ; qu'elle fait valoir qu'étant de bonne foi, le point de départ des intérêts moratoires ne peut courir qu'à compter de la date de la notification de l'arrêt à intervenir, valant notification de payer ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles 1153 et 1378 du Code Civil que celui qui est condamné à restituer une somme indûment perçue doit les intérêts du jour de la demande s'il était de bonne foi et du jour du paiement s'il était de mauvaise foi ;

Considérant que la connaissance par l'URSSAF de PARIS du caractère contesté de sa créance est insuffisant à caractériser la mauvaise foi à l'encontre de cet organisme ; que c'est seulement après les opérations de contrôle que la jurisprudence de la Cour de Cassation (Sté des Hôtels CONCORDE / URSSAF DE PARIS 10/05/2005) a fixé des limites aux pouvoirs d'investigation des Inspecteurs du recouvrement en sanctionnant l'envoi des questionnaires au domicile des salariés ou des tiers rémunérés par l'employeur de sorte qu'à la date de clôture des opérations de contrôle, le 13 Mars 2000 les modalités mises en oeuvre par cet organisme étaient conformes au principe de la procédure contradictoire au sens de l'interprétation alors retenue par la juridiction suprême interprétation d'après laquelle seules les auditions des salariés ou tiers recueillies en dehors de l'entreprise ou lieu de travail étaient censurées et donnaient lieu à annulation de contrôle ;

Considérant en conséquence que le recouvrement opéré par l'URSSAF de PARIS du chef des cotisations réintégrées au titre des frais professionnels non justifiés sous l'empire de l'interprétation des dispositions de l'article R.253-59 du Code de la Sécurité Sociale alors dominante et de surcroît telle qu'elle a perduré bien au delà des paiements conservatoires n'est pas constitutif de mauvaise foi ; qu'il s'ensuit que cet organisme qui de bonne foi a reçu des sommes qui ne lui était pas dues, doit les intérêts moratoires sur ces sommes à compter de la demande en répétition formée par la Société ACCO, c'est-à-dire à compter de la date à laquelle cette Société a engagé l'instance contentieuse, soit le 11 Juin 2001.

Considérant que le silence gardé par un premier agent de contrôle fait obstacle à un redressement rétroactif à l'occasion d'un contrôle postérieur lorsqu'il existe des éléments prouvant l'identité des situations et permettant d'établir que le premier agent de contrôle a pris position en toute connaissance de cause ; que l'absence de toute observation de l'organisme sur une pratique en cause ne peut tenir lieu de décision implicite lorsqu'il n'est pas prouvé qu'au cours du précédent contrôle l'URSSAF a procédé à des vérifications sur les points objets du redressement ; que c'est à l'employeur qu'il appartient de prouver que le silence gardé par l'organisme lors d'un précédent contrôle constitue bien l'acceptation prise en toute connaissance de cause d'une pratique antérieure et ce, en démontrant notamment que ce silence ne résultait pas d'une simple tolérance excluant une décision implicite d'acceptation ;

Considérant que s'agissant de l'assujettissement de Monsieur X... au régime général, la Société ACCO qui sur ce point n'a abandonné sa contestation que quant au fond ne saurait sérieusement soutenir que lors d'un précédent contrôle l'Inspecteur du recouvrement a accepté la situation de l'intéressé en qualité de travailleur indépendant ; qu'en effet c'est à la suite d'un signalement effectué par le vérificateur de l'URSSAF que la CPAM de l'Essonne a après enquête reconnu à Monsieur X... la qualité d'assujetti au régime général avec effet au 2 Septembre 1996 date à laquelle il ne figurait plus comme salarié de l'entreprise ; que par ailleurs si lors du précédent contrôle aucun redressement n'a été opéré sur l'avantage en nature nourriture l'employeur n'en démontre pas pour autant, ainsi qu'il lui appartient, l'identité de situation ; que concernant enfin les frais professionnels sur lesquels il n'avait pas davantage été opéré de redressement, la Cour en tant que de besoin observera que d'après l'Inspecteur du recouvrement les frais de déplacement étaient remboursés sur justificatifs ou sur la base de forfaits conformes à l'arrêté du 26 Mai 1975 ; que celui-ci n'en avait pas moins formulé les observations suivantes : "l'employeur est tenu pour l'avenir de justifier tout remboursement de frais professionnels faute de quoi ces sommes feront l'objet d'une réintégration dans l'assiette des cotisations en application de l'article L.242-1 du Code de la Sécurité Sociale" ; que ces observations doivent s'interpréter comme des réserves sur ce point précis de la vérification (autre que les remboursements sur justificatifs ou dans les limites de l'arrêté du 26 Mai 1975), ces réserves ayant sans ambiguïté pour finalité de faire connaître à l'employeur que le vérificateur n'approuvait pas sur ce point donné et au moment du contrôle la pratique suivie ; qu'ainsi la Société ACCO n'apporte en définitive aucun justificatif démontant que le précédent contrôleur ait pu prendre position en toute connaissance de cause sur la légitimité de la pratique par lui suivie donnant lieu à une décision implicite ;

Considérant sur le fond que l'Inspecteur du recouvrement a constaté ce qui suit:

1) que la Société ACCO avait pratiqué la réduction des cotisations patronales de Sécurité Sociale sur les rémunérations versées à Annick Z..., salariée à temps partiel qui travaillait simultanément pour les Sociétés SIRECA et AACO (devenue ACCO en 1998) ;

2) que les rémunérations versées à Patrick X... n'avaient pas été soumises à cotisations, alors que la situation de l'intéressé avait fait l'objet d'une décision d'assujettissement au régime général par la CPAM de l'Essonne ;

3) que la Société ACCO remboursait des frais à ses salariés, frais qui en l'absence de justificatifs probants n'avaient pas le caractère de frais professionnels ;

4) Ayant réintégré dans l'assiette des cotisations ces frais non justifiés, l'Inspecteur du recouvrement a procédé à un nouveau calcul de la réduction des cotisations sur les bas salaires appliquée aux rémunérations de Monsieur A... DE LA CHEVROTIERE ;

5) Ayant enfin constaté que Monsieur X... était remboursé de ses frais de repas sur justificatifs mais qu'aucun avantage en nature nourriture n'avait été évalué il a réintégré l'avantage ainsi constitué dans l'assiette des cotisations ;

Considérant que la Société ACCO déclare abandonner sa contestation concernant les rémunérations versées à Patrick X... ;

Considérant que compte tenu de l'annulation décidée ainsi qu'il a été dit du redressement relatif aux frais de déplacement non justifiés (frais kilométriques et allocations forfaitaires de repas) ce point n'a pas lieu d'être examiné sur le fond ;

Considérant que l'URSSAF de Paris a procédé à un nouveau calcul des cotisations relatives aux rémunérations d'un salarié, Monsieur A... DE LA CHEVROTIERE lequel ouvrait droit à une réduction des cotisations sur les bas salaires (article L 241-13 du Code de la Sécurité Sociale) ; que ce nouveau calcul résultait de la réintégration de remboursement de frais ci-dessus visés ; que le redressement annulé sur le point des remboursements de frais, doit donc l'être aussi du chef de la réduction des cotisations sur les bas salaires ;

Considérant que les principes de l'abattement forfaitaire de cotisations patronales pour les salariés à temps partiel sont régis par l'article L.322-12 du Code du Travail, le décret 93-238 du 22 Février 1993 modifié par le décret 94-266 du 5 Avril 1994, la circulaire interministérielle 93-8 du 24 Février 1993 diffusée par circulaire ACOSS 93-30 du 5 Mars 1993 ainsi que par la circulaire interministérielle CDE/CRT 94-37 du 25 Août 1994 ; que cette dernière circulaire prévoit le refus d'abattement lorsque le salarié possède un second contrat de travail avec le même employeur ou avec une filiale, ou en cas de présomption de contrat fictif de travail à temps partiel, par exemple dans le cas où un même salariés voit son emploi transformé en emploi à temps partiel et où parallèlement il est embauché par une entreprise constituant une unité économique et sociale de la première entreprise ;

Considérant qu'en l'espèce l'employeur a pratiqué la réduction des cotisations patronales de Sécurité Sociale sur des rémunérations versées à Annick Z..., salariée à temps partiel qui travaillait simultanément pour les Sociétés SIRECA et AACO (devenue ACCO en 1998) ; que l'Inspecteur du recouvrement constatant que ces deux Sociétés qui ont le même objet social en l'occurrence l'expertise comptable, étaient liées, même si elles avaient des gérants différents, la Société SIRECA étant contrôlée par Alain Philippe B... qui est gérant de la Société ACCO, a estimé que les dispositions relatives à cet abattement forfaitaire n'étaient pas applicables ; il a en conséquence procédé à un redressement de cotisations en précisant que la situation était la même que celle constatée lors d'un précédent contrôle portant sur les années 1995 et 1996, laquelle avait donné lieu à redressement ;

Considérant concernant ce précédent redressement que la Commission de Recours Amiable saisie du litige avait rejeté la requête présentée après avoir relevé que les liens existants entre les deux Sociétés permettaient de conclure que la répartition du temps de travail en leur sein n'avait pour but que de profiter des dispositions de l'article L322-12 du Code du Travail, sans que pour autant la salariée effectue dans chacune des sociétés un travail réellement distinct ; que par jugement du 13 Avril 1999 le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY avait lui-même estimé qu'il existait des éléments établissant l'existence d'une unité économique et sociale des Sociétés gérées par Alain Philippe B... a fortiori puisque la Société AACO avait de manière paradoxale justifié économiquement la transformation de l'emploi à temps plein d'Annick Z... en emploi à temps partiel au sein de SIRCA et l'embauche de celle-ci au sein de AACO par l'objectif apparemment commun à ces deux sociétés d'éviter le licenciement de l'intéressée ; que cette appréciation peut s'étendre à l'ensemble des structures juridiques gérées par Alain Philippe B... ainsi qu'il ressort des constatations faites par les Inspecteurs du recouvrement à l'occasion de la vérification de l'ensemble des Sociétés concernées ; qu'au cas particulier du présent litige l'ensemble des éléments retenus par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY dans son jugement du 13 Avril 1999 et confirmé par arrêt de la Cour d'Appel de céans du 31 Mai 2001 fut-ce pour un motif de pure procédure constituent une présomption suffisante d'un contrat de travail fictif conclu par la Société ACCO avec sa salariée Annick Z... alors même que cette dernière était concomitamment embauchée par une autre entreprise (SIRECA) appartenant à une seule unité économique et sociale de la première entreprise (ACCO) et pour une activité de même nature ; que ces éléments résultent aussi des constatations des inspecteurs assermentés corroborées par les témoignages recueillis spontanément ou sur place, des salariés des différentes entreprises ; que s'il est par ailleurs exact que l'arrêt du 31 Mai 2001 n'a fait que constater l'irrecevabilité de l'appel formé à l'encontre du jugement du 13 Avril 1999 il n'en reste pas moins qu'il a aussi eû pour effet de conférer à cette décision un caractère définitif ; qu'au surplus le respect du principe de sécurité juridique ne saurait permettre de voir reconnaître à un même contrat de travail poursuivi dans le temps (cumul de deux contrats de travail à temps partiel en un contrat à plein temps) des effets juridiques différents ;

Considérant qu'enfin la Société ACCO ne saurait être suivie en ce qu'elle entend tirer argument du renvoi fait à la notion d'unité économique et sociale par le droit du travail et plus spécialement par les dispositions de l'article L 431- 1 al 6 du Code du Travail pour soutenir que l'existence d'une unité économique et sociale n'ayant été ni reconnue par convention ni décidée par le Tribunal d'Instance seul compétent en la matière aucune des parties ne peut s'appuyer sur cette notion ;

Considérant en effet que les décisions prises et les qualifications retenues par les autres administrations ne lient pas les organismes de recouvrement, lesquels déterminent l'assiette des cotisations de Sécurité Sociale et les charges déductibles en fonction de règles qui leurs sont propres, ce en vertu du principe d'autonomie des législations de Sécurité Sociale par rapport aux autres règlementations, sauf renvoi express ; que par ailleurs même à supposer qu'il soit fait référence à ces dispositions spécifiques du droit du travail pour appréhender la notion très générale d'unité économique et sociale rien ne permet d'établir d'une part que les sociétés du "groupe" B... occupent tout effectif confondu 50 salariés ou plus pour prétendre entrer dans ce dispositif, d'autre part, si ce seuil est atteint, d'établir que ces mêmes Sociétés n'avaient pas en fait vocation à créer entre elles un comité d'entreprise commun pour tenir compte de la répartition des salariés et des garanties en matière de représentation du personnel (permutations systématiques d'une Société sur l'autre pour un même travail, refacturation des heures travaillées entre elles avec maintien de l'ancienneté, réunions communes régulières, implantations géographiques du poste de travail à l'identique malgré les mouvements de personnel); que dans ces conditions la Société ACCO, en la personne de son dirigeant, Alain Philippe B... ne saurait tirer argument de ses propres inobservation des règles du droit du travail en matière de représentation du personnel pour faire échec au redressement opéré ;

Considérant qu'en cas de remboursement intégral des frais de repas, la salarié fait l'économie de dépenses de nourriture, économie qui constitue un avantage en nature qui doit être soumis à cotisations pour la valeur fixée par l'arrêté du 9 Janvier 1975 ; que ce principe doit recevoir application y compris s'agissant des repas liés à l'activité professionnelle du salarié ; qu'il est toutefois admis par mesure de tolérance qu'aucune réintégration n'a lieu d'être pratiquée si le nombre de repas remboursés n'excède pas cinq par mois ou cinquante sur l'année ; qu'en l'espèce il résulte des constatations de l'Inspecteur du recouvrement que le nombre de repas remboursés à Patrick X... était de 70 en 1997 et de 91 en 1998 ; que la part incombant à l'intéressé a été calculée en fonction du nombre de personnes figurant sur les notes de restaurant fournies par la Société ACCO ; qu'un avantage en nature a été évalué dès lors que le montant de repas remboursé à Patrick X... était supérieur aux limites fixées par l'arrêté du 26 Mai 1975 ; qu'en conséquence et observation faite en tant que de besoin que l'employeur disposant des notes de frais établies pour ce seul salarié était en mesure de calculer pour celui-ci le dépassement des limites d'exonération fixées par référence au montant du minimum garanti et de vérifier le chiffrage retenu par l'Inspecteur du recouvrement, c'est à bon droit que, sans remettre en cause le caractère professionnel de ces frais, celui-ci a réintégré dans l'assiette des cotisations l'avantage en nature en résultant ;

Considérant qu'il est constant que le montant en cotisations des chefs de redressements annulés par le présent arrêt s'élève à 17.010,92€ (115583F) au titre des frais de déplacement non justifiés et à 1310,76€ (8598F) au titre de la réduction des cotisations patronales sur les bas salaires, soit au total 18.321,68€ ;

Considérant qu'en conséquence la décision déférée doit être partiellement infirmée dans les termes du dispositif ci-après ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce l'équité ne commande pas de faire bénéficier la Société ACCO des dispositions de l'article 700 du CPC ;

PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt rendu le 12 Octobre 2006 ;

Infirmant partiellement et statuant de nouveau :

Annule le redressement opéré le 13 Mars 2000 au titre des années 1997 et 1998 en tant que concernant les frais professionnels non justifiés et la réduction des cotisations patronales sur les bas salaires ;

Confirme, pour le surplus, le jugement entrepris ;

Condamne l'Union pour le Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales de PARIS à rembourser à la SARL ACCO la somme de 18.321,68€, avec intérêts au taux légal à compter du 11 Juin 2001 ;

Déboute les parties de toutes autres demandes fins ou conclusions déclarées contraires inutiles ou mal fondées.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0130
Numéro d'arrêt : 04/43720
Date de la décision : 17/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry, 11 mars 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-04-17;04.43720 ?
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