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15/04/2008 | FRANCE | N°06/11087

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0135, 15 avril 2008, 06/11087


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre C

ARRET DU 15 Avril 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/11087

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 Mai 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG no 02/04952

APPELANT

1o - Monsieur Frédéric X...

...

92400 COURBEVOIE

représenté par Me Nathalie ATTIAS LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0448,

INTIMEES

2o - Société AGENC

Y.COM LTD

20 Exchange Place

New York, NY 10005

U.S.A

représentée par Me Harold BERRIER, avocat au barreau de PARIS, toque : M.1780 substitué par M...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre C

ARRET DU 15 Avril 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/11087

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 Mai 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG no 02/04952

APPELANT

1o - Monsieur Frédéric X...

...

92400 COURBEVOIE

représenté par Me Nathalie ATTIAS LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0448,

INTIMEES

2o - Société AGENCY.COM LTD

20 Exchange Place

New York, NY 10005

U.S.A

représentée par Me Harold BERRIER, avocat au barreau de PARIS, toque : M.1780 substitué par Me Franck Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : G0619,

3o - Me Marie-Hélène MONTRAVERS - Mandataire liquidateur de la SOCIETE AGENCY COM. SA

...

75003 PARIS

représentée par Me Eric LENARD, avocat au barreau de PARIS, toque G.823,

4o - UNEDIC AGS-CGEA IDF OUEST

...

92309 LEVALLOIS PERRET CEDEX

représentée par la SELARL LAFARGE, avocats associés au barreau de PARIS, toque : T.10 substitué par Me Romina Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : T 10

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Mars 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme A... DE LIEGE, Présidente

Mme Irène LEBE, Conseillère

Mme Hélène IMERGLIK, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats,

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Mme A... DE LIEGE, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. David Frédéric X..., dit Frédéric X..., du jugement rendu le 23 mai 2006 par le Conseil de Prud'hommes de Paris, section Encadrement, chambre 3, statuant en formation de départage, auquel il est renvoyé pour l'exposé des éléments du litige à cette date, qui a :

- donné acte à M. F. X... de son désistement d'instance et d'action envers la société Agency Commissions LTD, et à celle-ci de son acceptation,

- prononcé la nullité absolue de la transaction conclue entre M. F. X... et la SA Agency Com à la demande de l'employeur, pour défaut de contestation antérieure à la dite transaction et absence de concessions réciproques,

- dit que son licenciement était fondé sur une faute grave établie,

- débouté M. F. X... de l'ensemble de ses demandes,

- et l'a condamné à verser à Me M. H. Montravers, ès qualités de mandataire liquidateur de la SA Agency Commissions, la somme de 700 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et à régler les entiers dépens.

Pour un bref exposé des faits et de la procédure, il suffit de rappeler que M. F. X... a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée du 7 avril 2000, à effet au 29 mai 2000, par la société Pictoris Interactive, en qualité de directeur administratif et financier, moyennant un salaire mensuel brut s'élevant à 30.000 Francs pendant les six premiers mois, puis 31.700 Francs, outre un bonus annuel. Son contrat de travail a été transféré en 2000, en la même qualité à la SA Agency Com, employant plus de onze salariés, ayant pour activité la réalisation de logiciels informatiques.

Il percevait en dernier lieu un salaire mensuel brut de 7.345 Euros. Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective dite Syntec.

Le 23 mai 2001 M. F. X... et la SA Agency Com concluaient un avenant aux termes duquel la rémunération, la durée de son travail et les indemnités relatives à une éventuelle rupture de son contrat de travail, étaient modifiées.

M. F. X... a été licencié pour faute grave le 28 février 2002, aux motifs d'une "attitude négative constante" envers l'entreprise, perturbant les services, l'employeur faisant en outre état de l'avenant susvisé, en déclarant s'étonner d'un tel document, qu'il estimait établi sans approbation préalable du directeur compétent, et donc "en violation des règles de procédure en vigueur"dans l'entreprise.

La SA Agency Com a fait l'objet d'une procédure collective de liquidation judiciaire le 4 novembre 2002 par le tribunal de commerce de Paris, Me M. H. Montravers étant désigné en qualité de mandataire liquidateur.

M. F. X... a saisi le 15 avril 2002 le Conseil de Prud'hommes qui a rendu le jugement déféré de demandes tendant à voir dire, à titre principal, que l'avenant du 23 mai 2001 était une transaction valide, lui donnant droit à l'indemnité contractuelle de départ prévue par cet accord, ne pouvant être contestée que par lui dans le cadre d'une nullité relative.

A titre subsidiaire, il demandait à la Cour de dire que son licenciement pour faute grave était sans cause réelle et sérieuse et de condamner la SA Agency Com à lui verser diverses sommes à ce titre.

Par conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales, auxquelles il convient de se référer, M. F. X... demande à la Cour :

- d'infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau,

- à titre principal :

* de dire et juger que l'accord du 23 mai 2001 constitue une transaction au sens de l'article 2044 du Code Civil,

* de fixer sa moyenne mensuelle de salaire à la somme de 7.345 Euros,

* de fixer sa créance sur le passif de la SA Agency Com à la somme de 88.140 Euros, (montant de l'indemnité contractuellement prévue par cet accord, égale à 12 mois de son dernier salaire mensuel brut) ;

- à titre subsidiaire :

* de dire et juger que les faits qui lui sont reprochés par la lettre de licenciement ne sont pas constitutifs de faute grave,

* de dire et juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

* de fixer la moyenne mensuelle de son salaire à la somme de 7.345 Euros,

* de fixer sa créance sur le passif de la SA Agency Com aux sommes suivantes :

- 22.035 Euros à titre d'indemnité de préavis,

- 2.203 Euros au titre des congés payés incidents,

- 88.140 Euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

- 44.070 Euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant des conditions vexatoires de son licenciement,

* à l'intégralité des dépens de première instance et d'appel,

- en tout état de cause :

* de dire et juger que l'intégralité des sommes susvisées seront opposables à l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Ouest dans la limite du plafond 13,

* de dire et juger que l'intégralité des sommes qui lui seront allouées par l'arrêt à intervenir seront assorties des intérêts de droit à compter du jour de l'introduction de l'instance sur tous les chefs de demandes, au besoin à titre compensatoire et de complément de dédommagement, et ce, jusqu'au jour de la liquidation judiciaire,

* de dire et juger que ces intérêts produiront eux - même intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil.

Me M. H. Montravers, ès qualités de mandataire liquidateur de la SA Agency Com, demande à la Cour :

- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- de condamner M. F. X... à lui verser la somme de 1.500 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions régulièrement communiquées et complétées à la barre au soutien de ses observations orales, auxquelles il convient de se référer, l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Ouest, intervenante forcée à l'instance, demande à la Cour, au visa des articles L.143-11-1 du Code du Travail et 2044 du Code Civil :

- sur la demande formée à titre principal par M. F. X... :

de juger illicite, et donc nulle, la clause d'indemnité de rupture, prévue par l'accord du 23 mai 2001, comme conclu entre M. F. X... et la SA Agency Commissions avant tout litige et toute rupture,

- sur la désignation de l'employeur de M. F. X... :

de prendre acte du désistement de l'appelant de ses demandes formées contre la société Agency Com LTD, reconnaissant ainsi que la SA Agency Com était son employeur,

- à titre subsidiaire :

* de dire que la clause litigieuse est une clause pénale et de la réduire en conséquence à de plus justes proportions,

* sur la garantie de l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Ouest : de dire que sa garantie de la créance éventuelle de M. F. X... sur le passif de la SA Agency Commissions, en liquidation judiciaire, doit être limitée au plafond 4,montant du plafond de garantie de l'indemnité contractuelle de rupture, quand bien même les autres créances relèveraient du plafond 13 ;

* sur les demandes subsidiaires : de dire que son licenciement pour faute grave est justifié et de le débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail, ou, à titre subsidiaire, de dire qu'en l'absence de justification de son préjudice, en application des dispositions de l'article L.122-14- 5 du Code du Travail, il doit être débouté de ces demandes d'indemnisation de la rupture.

* sur les dommages-intérêts pour préjudice moral : de le débouter de sa demande, s'agissant d'une somme qui serait éventuellement due, non en exécution de son contrat de travail, mais du fait de la mise en oeuvre de la responsabilité civile de l'employeur, non couverte par la garantie de l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Ouest ;

- sur les autres demandes :

* de dire et juger que sa garantie ne s'étend qu'aux seules sommes dues en exécution du contrat de travail de M. F. X... et ne couvre en conséquence pas la remise de documents sociaux, a fortiori sous astreinte, ni l'indemnité au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, rappelant que les intérêts sont arrêtés en tout état de cause au jour d'ouverture de la procédure collective, en application des dispositions de l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985, sans avoir pu courir avant mise en demeure régulière au sens de l'article 1153 du Code Civil,

* de statuer ce que de droit quant aux frais d'instance sans qu'ils puissent être mis à sa charge.

SUR CE, LA COUR,

Vu le jugement déféré et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour de plus amples développements.

Aux termes de son contrat de travail en date du 7 avril 2000, M. F. X... avait en charge, en tant que directeur administratif et financier, "l'ensemble des missions liées à la gestion comptable et financière, à l'organisation des services généraux, à la gestion administrative des ressources humaines, le suivi des aspects juridiques ainsi qu'à l'administration générale de l'entreprise...".

Il n'est pas contesté qu'il a par la suite assuré la gestion des Ressources Humaines de mai à août 2000, puis à partir de juillet 2001, à la suite du départ du DRH, en juillet 2001 ;

L'appelant a déclaré devant le conseil de prud'hommes se désister de toute demande contre la Société Agency Com Ltd, ce qu'il confirme en cause d'appel. Il convient en conséquence de mettre cette société hors de cause.

Sur la qualification de l'accord du 23 mai 2001 :

Il ressort des pièces de la procédure que M. F. X... a conclu, le 23 mai 2001, un accord, intitulé "avenant au contrat de travail" avec la SA Agency Com, dont la nature juridique est contestée, accord signé par le PDG de la SA Agency Com.

Cet accord avait pour objet d'une part, dans ses articles 1 et 2 , de porter son coefficient hiérarchique à 270, position 3.3 de la convention collective dite Syntec alors qu'il avait été embauché au coefficient 210, position 3-2, et d'augmenter sa rémunération annuelle forfaitaire, qui passait alors à 540.000 Francs, et ce, à compter du 2 mai 2001.

D'autre part, l'article 3 de cet accord précisait que, compte tenu de ses fonctions de cadre disposant d'une large autonomie, il bénéficiait d'une durée annuelle de travail de 217 jours, lui ouvrant droit à 10 jours de temps disponible supplémentaire à prendre dans l'année.

Enfin, la disposition litigieuse contenue dans l'article 4 dudit accord, relatif "à la rupture de contrat / licenciement"stipulait qu'"en cas de rupture de contrat à l'initiative de la société, celle-ci vous versera à titre transactionnel, et à titre de dommages- intérêts, et afin d'éviter tout contentieux, une indemnité transactionnelle forfaitaire et définitive de 12 mois sur la base de votre dernière rémunération mensuelle".

Les parties soutiennent à titre principal que ce document constitue une transaction, valide pour M. F. X... et nulle pour le mandataire liquidateur et l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Ouest, celle-ci soutenant à titre subsidiaire qu'il s'agit d'une clause pénale, dont le montant est donc réductible.

Cependant, quand bien même les parties ont précisé dans l'avenant litigieux que la dite indemnité devait être versée à M. F. X... "à titre transactionnel" et qu'il s'agissait d'une "indemnité transactionnelle", il revient à la Cour, saisie du présent litige, de déterminer sa qualification juridique, dans la mesure où celle-ci est contestée entre les parties.

Mais, quand bien même ce document ne constitue pas une transaction au sens de l'article 2044 du Code Civil dans la mesure où aucun élément probant n'établit l'antériorité d'un litige entre les parties, en absence notamment de preuve d'une démission effective antérieure de M. X..., il a valeur d'engagement de la part de l'employeur de verser à M. F. X... une indemnité en cas de rupture de son contrat de travail.

Cependant, si la clause litigieuse indiquait de façon très générale que l'indemnité était versée à l'intéressé "afin d'éviter tout contentieux", lui interdisant de solliciter donc une indemnité supérieure auprès des juridictions compétentes, force est de constater que seul le salarié est recevable à en solliciter la nullité dans la mesure où elle a été instituée dans son intérêt.

C'est en conséquence en vain que l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Ouest en demande la nullité en soutenant qu'il s'agit d'une clause illicite comme concluant une transaction anticipée sur un licenciement non encore intervenu, de même que le mandataire liquidateur, aux moyens dès lors inopérants d'absence de litige préalable et de concessions réciproques.

En l‘absence de demande de nullité de la part de M. F. X..., il y a lieu d'en faire application et de fixer sa créance sur le passif de la SA Agency Com, représentée par Me M. H. Montravers, ès qualités de mandataire liquidateur, à la somme fixée à titre d'indemnité forfaitaire par la dite clause, à savoir 88.140 Euros, aucun élément probant n'établissant le caractère excessif de cette indemnisation contractuellement prévue entre les parties.

Il n'y a pas lieu de statuer sur les autres demandes de M. F. X..., celles -ci étant formées à titre subsidiaire.

Le jugement déféré est infirmé de ce chef.

La somme allouée à M. F. X..., à titre de fixation de créance sur le passif de la SA Agency Com, représentée par Me M. H. Montravers, ès qualités de mandataire liquidateur, sera garantie par l'Unedic Délégation AGS-CGEA IDF Ouest dans les limites du plafond 13, s'agissant d'une somme due au salarié en exécution d'une disposition de son contrat de travail et en suite de la rupture de celui-ci.

Les circonstances de la cause et l'équité ne justifient pas l'application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile. Les parties sont en conséquence déboutées de leurs demandes de ce chef.

PAR CES MOTIFS,

Donne acte à M. F. X... de son désistement contre la Société Agency Com Ltd,

Mets hors de cause la Société Agency Com Ltd,

Infirme le jugement déféré,

Fixe la créance de M. F. X... sur le passif de la SA Agency Com, représentée par Me M. H. Montravers, ès qualités de mandataire liquidateur, à la somme de 88.400 Euros (QUATRE VINGT HUIT MILLE QUATRE CENTS EUROS) à titre de dommages-intérêts en application de la clause contractuelle de rupture,

Dit que cette somme sera garantie dans les limites du plafond 13 applicable à la date de la rupture,

Dit que les intérêts seront arrêtés au jour d'ouverture de la procédure collective,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0135
Numéro d'arrêt : 06/11087
Date de la décision : 15/04/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 23 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-04-15;06.11087 ?
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