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14/04/2008 | FRANCE | N°06/1918

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0242, 14 avril 2008, 06/1918


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

17ème Chambre-Section A

ARRÊT DU 14 AVRIL 2008

(no 91, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 01918

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Décembre 2005- Tribunal de Grande Instance de MELUN-RG no 00 / 03786

APPELANT

Monsieur Paul Y...
...
59770 MARLY LEZ VALENCIENNES
représenté par la SCP GARNIER, avoués à la Cour
assisté de Me Karine VICENTINI, avocat au barreau de

VALENCIENNES

INTIMES

Monsieur Patrick X...
...
77390 COURTOMER
représenté par Me Luc COUTURIER, avoué à la Cour
assisté d...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

17ème Chambre-Section A

ARRÊT DU 14 AVRIL 2008

(no 91, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 01918

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Décembre 2005- Tribunal de Grande Instance de MELUN-RG no 00 / 03786

APPELANT

Monsieur Paul Y...
...
59770 MARLY LEZ VALENCIENNES
représenté par la SCP GARNIER, avoués à la Cour
assisté de Me Karine VICENTINI, avocat au barreau de VALENCIENNES

INTIMES

Monsieur Patrick X...
...
77390 COURTOMER
représenté par Me Luc COUTURIER, avoué à la Cour
assisté de Me Michel TUBIANA, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1657

Madame Micheline B...épouse X...
...
77390 COURTOMER
représentée par Me Luc COUTURIER, avoué à la Cour
assistée de Me Michel TUBIANA, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1657

Mademoiselle Estelle X...
...
77390 COURTOMER
représentée par Me Luc COUTURIER, avoué à la Cour
assistée de Me Michel TUBIANA, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1657

Monsieur Alexandre X...
...
77390 COURTOMER
représenté par Me Luc COUTURIER, avoué à la Cour
assisté de Me Michel TUBIANA, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1657

Société ITT COMPOSANTS ET INSTRUMENTS
Zone Industrielle Rue Ampère
77220 GRETZ ARMAINVILLIERS
représentée par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour
assistée de Me Alain DUMAS, avocat au barreau de LYON

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MELUN
Rubelles
77951 MAINCY CEDEX
représentée par la SCP BASKAL-CHALUT-NATAL, avoués à la Cour

Compagnie LES ASSURANCES GENERALES DE FRANCE
87 rue de Richelieu
Case Postale A 204
75113 PARIS CEDEX 02
représentée par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour
assistée de Me Alain DUMAS, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Mars 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, Présidente
Madame Sylvie NEROT, Conseillère
Madame Marie-Christine LAGRANGE, Conseiller
qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mlle Myriam BADAOUI

ARRÊT :

- contradictoire
-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, président et par Mlle Myriam BADAOUI, greffière présente lors du prononcé.

**********

Le 06 février 1997, une altercation a opposé deux employés de la Société ITT Composants et Instruments (devenue ITT Industrie), Monsieur Paul Y... et Monsieur Patrick X... dans les locaux de cette dernière et durant le temps de travail.
A l'occasion de cette altercation, Monsieur X... a subi des blessures consistant en un traumatisme du coude droit avec douleur olécrane et un traumatisme indirect du rachis cervical.

Il n'a pas été donné de suites pénales à ces faits, le ministère public ayant classé l'affaire sans suite et le tribunal correctionnel de Melun, sur citation directe, ayant constaté la prescription et l'extinction de l'action publique.

Selon un premier jugement rendu le 21 mai 2002 (et à ce jour définitif), le tribunal de grande instance de Melun a déclaré Monsieur Y... responsable de ces blessures et l'a condamné, in solidum avec la Société ITT Industrie (prise en sa qualité de commettant) à réparer son entier préjudice en ordonnant, avant dire droit, une expertise médicale.

Le docteur Dano commis (qui s'est adjoint comme sapiteur un psychiatre, le docteur C...) a établi un rapport daté du 17 avril 2003 ; ils ne retiennent, notamment, pas d'imputabilité de la symptomatologie psychiatrique et des troubles en découlant apparus à la fin de l'année 1999 qui ont nécessité plusieurs hospitalisations et une prise en charge psychiatrique avec traitement adapté.

Selon un deuxième jugement rendu le 09 mars 2004, le tribunal de grande instance de Melun a ordonné, avant dire droit sur la réparation du préjudice corporel, une contre-expertise psychiatrique.

Le docteur Forissier, médecin psychiatre commis, a établi un rapport à la date du 18 février 2005 qui retient, notamment, l'existence d'un lien direct entre l'apparition des troubles névrotiques et dépressifs comprenant des symptômes de conversion et l'agression subie le 06 février 1997.

Par jugement rendu le 13 décembre 2005, le tribunal de grande instance de Melun a, avec exécution provisoire :
- donné acte de leur intervention volontaire à la Société AGF (assureur de la SAS ITT Industrie), à Madame Micheline Labarbe épouse Montel, à Mademoiselle Estelle Montel et à Monsieur Alexandre Montel (épouse et enfants majeurs de la victime),
- déclaré irrecevable la demande de la CPAM de Seine-et-Marne à l'encontre de Monsieur Paul Y... et de la Société SAS ITT Industrie,
- dit que le lien de causalité est établi entre les faits du 06 février 1997 et la pathologie de Monsieur Patrick X... et qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une contre-expertise,
- condamné in solidum Monsieur Y..., la SAS ITT Industrie et la Société AGF à payer, avec intérêts au taux légal à compter du jugement :
* à Madame Labarbe épouse Montel la somme de 20. 000 euros (réparant, à hauteur de 5. 000 euros, son préjudice sexuel et, à hauteur de 15. 000 euros, son préjudice moral),
* à Mademoiselle Estelle Montel et à Monsieur Alexandre Montel la somme, au profit de chacun, de 10. 000 euros (réparant leur préjudice moral propre),
- accueilli l'action récursoire de la SAS ITT Industrie à l'encontre de Monsieur Paul Y... et l'a condamné à garantir cette Société des condamnations prononcées contre elle, à titre principal ou annexe,
- sursis à statuer sur le surplus des demandes d'indemnisation formées par Monsieur Patrick X... et ordonné un complément d'expertise aux frais avancés de la victime en désignant à nouveau le docteur Forissier avec mission de se prononcer sur l'étendue des préjudices subis,
- condamné in solidum Monsieur Y..., la SAS ITT Industrie et la Société AGF à verser aux consorts X... une somme de 4. 000 euros au titre de leurs frais non répétibles et à supporter les dépens,
- condamné la CPAM de Seine-et-Marne à payer à la SAS ITT Industrie et à la Société AGF une somme de 1. 000 euros au titre de leurs frais irrépétibles.

Monsieur Paul Y... a relevé appel de cette décision et, par dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2007, il demande à la cour :
- de réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de contre-expertise et en ce qu'il a, à nouveau, désigné le docteur Forissier pour procéder à l'évaluation du préjudice subi,
- d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise en la confiant à un expert qui ne sera ni le docteur C... ni le docteur Forissier avec mission de se prononcer sur le lien de causalité entre l'apparition des troubles névrotiques et l'agression subie et, dans l'affirmative, d'évaluer le préjudice subi,
- subsidiairement, de débouter les consorts X..., la SAS ITT Composants et Instruments et la CPAM de Seine-et-Marne de l'intégralité de leurs demandes,
- de condamner " solidairement " les consorts X... et la CPAM de Seine-et-Marne à lui verser une somme de 1. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à supporter les frais et dépens.

Par dernières conclusions signifiées le 11 janvier 2008 Monsieur Patrick X..., Madame Micheline B...épouse X..., Mademoiselle Estelle X... et Monsieur Alexandre X... demandent à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise des défendeurs en considérant que l'état actuel de Monsieur X... est la conséquence directe de l'agression subie et que Monsieur Y..., la Société ITT Composants et Instruments et la Société AGF sont " solidairement responsables " de la totalité du préjudice subi,

- d'infirmer partiellement le jugement, de condamner " conjointement et solidairement " Monsieur Y..., la Société ITT Composants et Instruments à payer à Monsieur X..., à titre provisionnel, la somme de 130. 224, 34 euros au titre de sa perte de revenus arrêtée au 31 décembre 2007 (avec intérêts à compter de l'assignation délivrée le 31 octobre 2000 et anatocisme) outre une provision de 20. 000 euros au titre de ses " autres préjudices ",
- de confirmer le désignation de Monsieur Forissier en qualité d'expert et la mission qui lui a été confiée,
- de confirmer le jugement en ses dispositions relatives à l'indemnisation des préjudices de l'épouse et des enfants,
- de condamner " conjointement et solidairement " Monsieur Y..., la Société ITT Composants et Instruments et la Société AGF à verser, au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, une somme de 7. 000 euros au profit de Monsieur Patrick X... et une somme de 1. 000 euros au profit, et pour chacun, de son épouse et de ses deux enfants,
- de condamner " les appelants " aux dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions signifiées le 15 janvier 2008, la Société C et K COMPONENTS SAS, se présentant comme venant aux droits de la Société ITT INDUSTRIE, laquelle venait aux droits de la Société ITT COMPOSANTS et INSTRUMENTS et son assureur, la Société Anonyme Assurances Générales de France (AGF) demandent à la cour :
- de donner acte à la Société C et K COMPONENTS de ce qu'elle vient aux droits de la Société ITT INDUSTRIE,
- de leur donner acte de ce qu'elles ne s'opposent pas à la contre-expertise sollicitée par Monsieur Y... qui devra être exécutée à ses frais avancés,
- de surseoir à statuer dans ce cas sur le fond et de réserver en ce cas les dépens,
- très subsidiairement, en cas d'infirmation du jugement, de réduire au préjudice démontré les demandes indemnitaires des consorts X...,
- de condamner les consorts X... à rembourser à l'assureur les sommes versées en exécution du jugement avec intérêts de droit à compter de leur versement,
- de condamner Monsieur Y... à payer à la Société C et K COMPONENTS la somme de 4. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne, par dernières conclusions signifiées le 28 janvier 2008, demande enfin à la cour, au visa de l'article L 452-5 du code de la sécurité sociale, de la loi du 21 décembre 2006 et des avis de la cour de cassation du 29 octobre 2007 :
- de confirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en ses demandes,
- de la recevoir en son appel incident et, statuant à nouveau :
* de la déclarer recevable en sa demande de remboursement de ses débours exposés au profit de Monsieur X... à la suite de l'agression pour laquelle Monsieur Y... a été déclaré responsable pour faute intentionnelle,
* de dire que l'expertise ordonnée par les premiers juges devra se poursuivre, qu'elle devra être invitée à y participer et que si les opérations d'expertise se terminaient avant le prononcé de l'arrêt à intervenir, soit ordonnée une nouvelle expertise par tel expert désigné par la cour contradictoirement à son égard,
* de renvoyer, en tout état de cause, l'examen de sa créance devant le tribunal dans le cadre de la discussion qui s'instaurera sur le préjudice corporel de Monsieur X...,
* de lui allouer en tout état de cause une provision de 32. 602, 33 euros et de condamner Monsieur Y... au paiement de cette somme,
* de condamner Monsieur Y... à lui verser une somme de 2. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à supporter les dépens d'appel.

SUR CE, LA COUR :

Sur le lien de causalité entre l'apparition de troubles névrotiques et l'altercation

Considérant qu'il résulte de l'expertise médicale effectuée par le docteur DANO le 18 avril 2003 qu'à la suite de l'altercation litigieuse, Monsieur X... a subi un traumatisme indirect du rachis cervical, un traumatisme du coude droit et une douleur olécrane et qu'à cette date, il subsistait, au titre des séquelles fonctionnelles imputables, des douleurs épicondyliennes droites persistantes et des douleurs cervicales résiduelles ;

Considérant que les deux experts psychiatres qui ont été appelés à donner leur avis sur l'origine des troubles psychiatriques dont souffre, par ailleurs, Monsieur A..., le docteur C... (en février 2003) puis le docteur Paul Forissier (en février 2005) s'accordent à fixer à la fin de l'année 1999 l'apparition de ces troubles ;

Qu'ils indiquent, l'un et l'autre, en exposant la chronologie des éléments du registre médical qui leur ont été soumis, qu'au cours de l'année 1999, Monsieur A... a subi une intervention chirurgicale portant sur le coude atteint de lésion et a dû suivre un traitement nécessité par la persistance d'une impotence fonctionnelle qui n'a pas connu l'amélioration escomptée ;

Que de la même manière, ils précisent que Monsieur A... a fait l'objet d'une hospitalisation à la demande d'un tiers, du 03 au 09 décembre 1999 à la suite d'une tentative de suicide par pendaison, puis d'une hospitalisation libre du 29 janvier au 03 février 2000, dans les suites d'un geste suicidaire par automédication ; que, depuis le 12 janvier 2000, il est régulièrement suivi par un psychiatre d'un centre médico-psychologique et que lui est prescrit un traitement psychotrope à base d'antidépresseurs ;

Que le contexte clinique dont il s'agit est décrit par le docteur C... comme celui d'une régression affective majeure, avec une tonalité puérile du discours, d'un rétrécissement du champ existentiel, avec évitement phobique, bégaiement émotionnel, anxiété, discours régressif centré sur la peur ; qu'à deux ans de ce premier examen, le docteur Forissier indique qu'il développe un syndrome dépressif caractérisé, avec évolution depuis vers une involution thymique, avec retrait socio-affectif, repli et apragmatisme majeur sur lesquels viennent se greffer des symptômes de type phobies sociales, ajoutant que ces troubles psychiatriques d'apparition rapide entrent dans le cadre d'un trouble névrotique de révélation tardive, le sujet étant conscient du trouble ;

Qu'il y a lieu de considérer que si le docteur C... évoque une névrose infantile et des événements de vie antérieurs à l'accident alors que le docteur Forissier évoque une névrose post traumatique qui ne constitue pas en soi une structuration névrotique de personnalité constante, tous deux s'accordent à dire que Monsieur A... ne présentait pas de tels troubles avant l'altercation du 06 février 1997 ;

Que le docteur C... précise, en particulier, que le tableau du coude fléchi, inclus dans une symptomatologie psychiatrique, est secondaire à l'intervention chirurgicale, au plan de la simple chronologie, et qu'il s'agit là d'un symptôme conversif ; que le docteur Forissier indique, quant à lui, que l'agression traumatique subie par Monsieur A... est à l'origine d'une réaction névrotique de type post-traumatique dont la révélation clinique ne s'est faite qu'à distance du traumatisme lui-même, au décours d'une " réactivation " du traumatisme, par la négation subjective du préjudice qu'a constituée l'intervention chirurgicale de 1999, pour Monsieur MONTIEL ;

Que seul le docteur Forissier conclut à l'existence d'un lien de causalité entre l'apparition des troubles névrotiques et l'agression du 06 février 1997 ;

Qu'en toute hypothèse, il est constant que l'intervention chirurgicale pratiquée en 1999 est une conséquence de l'accident, qu'elle se trouve à l'origine de l'apparition de troubles n'engendrant jusque là aucune incapacité et non traités jusqu'en 1999, le docteur C... relevant, à cet égard, qu'entre l'agression et l'intervention chirurgicale, aucun médecin certificateur ne fait état d'une quelconque pathologie psychiatrique ;

Qu'il est tout aussi constant que le droit de la victime à obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est issue n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable ;

Qu'ainsi, il convient de confirmer le jugement qui a retenu l'existence d'un lien de causalité entre l'altercation litigieuse et la pathologie développée par la victime, a rejeté, partant, la demande de contre-expertise formée par Monsieur Y... et son assureur et désigné à nouveau le second expert avec une unique mission d'évaluation des postes de préjudice ;

Sur la demande de provision formée par Monsieur X...

Considérant que Monsieur X... expose dans ses dernières écritures que le rapport d'expertise qui doit être établi par le docteur Forissier en exécution du jugement rendu le 13 décembre 2005 par le tribunal de grande instance de Melun (dont appel), n'a toujours pas été déposé et qu'il s'estime fondé à solliciter, à titre de provision, les sommes de 130. 224, 34 euros et de 20. 000 euros au titre, respectivement, de ses pertes de revenus et de ses " autres préjudices " ;

Qu'il y a lieu de considérer que la cour n'est pas saisie d'une demande de liquidation du préjudice, que le tribunal a expressément désigné un juge de la mise état en le chargeant du suivi du déroulement des opérations d'expertise et que celles-ci sont toujours en cours ; qu'il convient de renvoyer Monsieur A... à saisir, si bon lui semble, le magistrat de la mise en état, seul compétent pour connaître de cette demande, conformément aux dispositions de l'article 771, 3) du code de procédure civile ;

Sur l'action récursoire du commettant contre le préposé

Considérant que Monsieur Y... sollicite l'infirmation du jugement déféré qui l'a condamné à garantir la Société ITT de toutes condamnations prononcées et se prévaut du fait que le tribunal a rejeté l'argument de cette Société qui " aurait tenté d'échapper à sa responsabilité en invoquant la faute intentionnelle de son préposé ", que ce même tribunal a toutefois précisé que rien n'interdisait au commettant d'exercer une action récursoire contre son préposé, et que son conseil en cause d'appel n'ayant pas été rendu destinataire des conclusions de première instance, il convient que la Société ITT fasse connaître le fondement juridique de son action ;

Que la Société C et K COMPONENTS se borne, sur ce point, à solliciter la confirmation du jugement ;

Considérant que le tribunal qui a fait une juste application des dispositions de l'article 1384 alinéa 5 du code civil en condamnant in solidum, le préposé, le commettant (civilement responsable) et son assureur à réparer le préjudice de la victime a, à bon droit, jugé que le commettant disposait d'un recours contre son préposé ;

Sur les prétentions de la CPAM de Seine et Marne

Considérant que cet organisme social, se prévalant d'une créance d'un montant total de 62. 830 euros (en ce compris la rente accident du travail) selon décompte définitif du 07 décembre 2006, reproche au tribunal de l'avoir déclaré irrecevable en ses demandes au motif qu'il ne disposait pas du recours de droit commun prévu à l'article L 454-1 du code de la sécurité sociale, ouvert à une victime assurée sociale dont les lésions sont imputables à une personne autre que l'employeur ou ses préposés ;

Que c'est, toutefois, à bon droit qu'elle se prévaut des dispositions de l'article L 452-5 du code de la sécurité sociale dans la mesure où la faute commise par Monsieur Y... a eu pour effet de porter atteinte à l'intégrité physique de Monsieur X... et qu'aux termes de l'alinéa 2 de ces dispositions " Les caisses primaires d'assurance maladies sont tenues de servir à la victime ou à ses ayants droit les prestations et indemnités mentionnées par le présent livre. Elles sont admises de plein droit à intenter contre l'auteur de l'accident une action en remboursement des sommes payées par elles. " ;

Qu'elle est, par conséquent, fondée à solliciter l'infirmation du jugement sur ce point et à demander à la cour de la déclarer recevable et fondée en ses demandes à l'encontre de Monsieur Y..., son recours subrogatoire s'exerçant désormais poste par poste, conformément aux dispositions de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 ;

Qu'il ne saurait, cependant, être fait droit à sa demande tendant à voir ordonner par la cour que les opérations d'expertise lui soient déclarées communes comme à sa demande tendant à obtenir une provision, par mêmes motifs que précédemment ;

Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Considérant que l'équité conduit à faire droit à la demande, à ce titre, des consorts X... et à condamner in solidum Monsieur Y..., la Société C et K COMPONENTS et la Société AGF à payer à Monsieur X..., à Madame B...épouse X..., à Mademoiselle Estelle X... et à Monsieur Alexandre X... une somme complémentaire de 1. 000 euros au profit de chacun ;

Qu'elle conduit à condamner Monsieur Y... à verser à la CPAM de Seine et Marne une somme de 1. 000 euros sur ce même fondement ;

Qu'elle ne commande pas d'accueillir les prétentions de Monsieur Y..., de la Société C et K COMPONENTS et de la Société AGF à ce titre ;

Que Monsieur Y... qui succombe supportera les dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions à l'exclusion de celles relatives à la recevablité de la demande de la CPAM de Seine et Marne et à la condamnation de l'organisme social aux frais non compris dans les dépens ;

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :

Déclare la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine et Marne, subrogée dans les droits de son assuré social, recevable en son action à l'encontre de Monsieur Paul Y... ;

Dit n'y avoir lieu à statuer sur les demandes de provision présentées par Monsieur Patrick X... et par la CPAM de Seine et Marne ;

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de la CPAM de Seine et Marne portant sur les opérations d'expertise en cours contrôlées par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Melun désigné ;

Condamne in solidum Monsieur Paul Y..., la Société C et K COMPONENTS et la Société AGF à verser à Monsieur Patrick X..., à Madame Micheline B...épouse X..., à Mademoiselle Estelle X... et à Monsieur Alexandre X... une somme complémentaire de 1. 000 euros, au profit de chacun, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur Paul Y... à verser à la CPAM de Seine et Marne une somme de 1. 000 euros au titre de ses frais non répétibles ;

Déboute Monsieur Paul Y..., La Société C et K COMPONENTS et la Société AGF de leurs prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur Paul Y... aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0242
Numéro d'arrêt : 06/1918
Date de la décision : 14/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Melun, 13 décembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-04-14;06.1918 ?
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