La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2008 | FRANCE | N°07/6977

France | France, Cour d'appel de Paris, 11 avril 2008, 07/6977


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS






COUR D'APPEL DE PARIS


1ère Chambre-Section B


ARRET DU 11 AVRIL 2008


(no 151, 6 pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 06977


Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Novembre 2006 rendu par la Chambre Civile du Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE-RG no 2005 / 00732




APPELANT


MONSIEUR LE CHEF DES SERVICES FISCAUX CHARGE DE LA DIRECTION DE CONTROLE FISCAL RHONE

ALPES BOURGOGNE
ayant ses bureaux 25 Rue de la Boudronnée-21000 DIJON, agissant sous l'autorité du Contentieux Administratif Juridictionnel et Législa...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre-Section B

ARRET DU 11 AVRIL 2008

(no 151, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 06977

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Novembre 2006 rendu par la Chambre Civile du Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE-RG no 2005 / 00732

APPELANT

MONSIEUR LE CHEF DES SERVICES FISCAUX CHARGE DE LA DIRECTION DE CONTROLE FISCAL RHONE ALPES BOURGOGNE
ayant ses bureaux 25 Rue de la Boudronnée-21000 DIJON, agissant sous l'autorité du Contentieux Administratif Juridictionnel et Législation DIRCOFI RHONE ALPES BOURGOGNE, 41 Cours de la Liberté-69422 LYON CEDEX 03 lui-même agissant sous l'autorité de Monsieur le Directeur Général des Impôts 92 Allée de Bercy-75012 PARIS

représenté par la SCP Pascale NABOUDET-VOGEL-Caroline HATET-SAUVAL, avoués à la Cour
et à l'audience, par Mme Rosaria CUSENZA, Inspectrice départementale dûment mandatée

INTIMEE

S. A. MICHEL X...

ayant son siège 22, rue Louis Bro
89800 CHABLIS

représentée par la SCP ARNAUDY-BAECHLIN, avoués à la Cour
assistée de Me Christophe RONCHEWSKI, avocat au barreau de PARIS, plaidant pour la SCP BENICHOU, toque : P 353

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 février 2008, le rapport préalablement entendu conformément à l'article 785 du Code de procédure civile, en audience publique, devant la Cour composée de :

Jacques BICHARD, Président
Marguerite-Marie MARION, Conseiller
Anne-Marie GABER, Conseiller
qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Régine TALABOULMA

ARRET :

- CONTRADICTOIRE
-prononcé en audience publique, par Jacques BICHARD, Président
-signé par Jacques BICHARD, Président
et par Régine TALABOULMA, greffière présente lors du prononcé.

* * *

La Société MICHEL X... S. A. a fait assigner Monsieur le Chef des Services Fiscaux chargé de la Direction de Contrôle Fiscal RHÔNE ALPES BOURGOGNE devant le Tribunal de grande instance d'AUXERRE par exploit d'huissier du 13 mai 2005 aux fins d'annulation de sa décision de rejet partiel de sa réclamation faite dans le cadre d'une procédure de redressement (proposition de rectification) ;

Par jugement contradictoire du 20 novembre 2006 signifié le 2 avril 2007, le Tribunal de grande instance d'AUXERRE a :
- déclaré non fondée l'action entreprise par l'Administration fiscale formulée au-delà du 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle l'exigibilité des droits ou taxes a été suffisamment révélée par l ‘ enregistrement le 25 février 1997 des actes d'apport et de constatation de réalisation de cet apport, sans qu'il soit nécessaire de recourir à des recherches ultérieures,
- accordé à la SA X... la décharge de la totalité des droits et pénalités contestées et demeurées à sa charge à la suite du rejet partiel de sa réclamation le 18 mars 2005,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- condamné le Trésor Public à payer à la SA X... la somme de 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,
- condamné le Trésor Public aux entiers dépens de la procédure ;

Par acte du 18 avril 2007, Monsieur le Chef des Services Fiscaux chargé de la Direction de Contrôle Fiscal RHÔNE ALPES BOURGOGNE a interjeté appel de ce jugement ;
Dans ses dernières conclusions déposées le 10 août 2007, il demande à la Cour de :
- le déclarer recevable et bien fondé en son appel et, y faisant droit,
- infirmer en toutes ses dispositions la décision entreprise,
- débouter la Société MICHEL X... de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- dire et juger irrecevable la demande de restitutions de la Société MICHEL X...,
- condamner la Société MICHEL X... en tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile ;

Dans ses seules conclusions déposées le 8 octobre 2007, la Société MICHEL X... S. A. demande à la Cour de :
- déclarer l'Administration fiscale recevable mais mal fondée en son appel et la débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- condamner, par application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, l'Administration fiscale à rembourser les frais irrépétibles que la Société MICHEL X... a exposés qui ne sauraient être inférieur à 3 000 €,
- condamner l'Administration fiscale aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile ;

L'ordonnance de clôture était rendue le 11 janvier 2008 ;
CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,

Considérant que la Société MICHEL X... S. A. (la Société MICHEL X...) a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 1999 au 31 mars 2002 qui ont abouti aux constatations qui suivent :
- par acte reçu le 24 décembre 1996 par Maître Jacky BANWARTH, notaire associé à Tonnerre (Yonne), Monsieur Michel X... (Monsieur X...), sous la condition suspensive d'approbation par les actionnaires de l'augmentation du capital de la Société MICHEL X... DÉVELOPPEMENT (devenue la Société MICHEL X... S. A. et désignée la Société MICHEL X...), a, en sa qualité de Directeur de sociétés, apporté à cette société divers biens immobiliers (parcelles de vignes hors plantations et matériel de palissage existant appartenant à la Société " Domaine Laroche ") d'une valeur de 15 000 francs moyennant l'attribution de 77 955 actions de celle-ci, les parties indiquant dans l'acte qu'elles entendaient bénéficier des dispositions de l'article 810 III du Code général des impôts ;
- par acte reçu le 24 janvier 1997 par le même notaire, a été constaté la réalisation de la condition suspensive de l'acte précédent, réalisation fixée au 24 décembre 1996, sous le même bénéfice des dispositions de l'article 810 III du Code général des impôts, le notaire étant chargé de procéder aux formalités ;
- le 11 janvier 1999, Monsieur Michel X... a apporté les 77 955 actions qu'il s'était engagé, en application de l'article 810 III précité, à conserver pendant 5 ans, à la Société LB HOLDING S. A. qu'il dirige et dont il détient 83 % des actions ;

Que l'Administration fiscale, estimant que Monsieur X... n'avait pas respecté son engagement de conserver les titres reçus pendant 5 ans, a remis en cause l'exonération des droits de mutation dont les parties avaient bénéficié et a adressé à la Société MICHEL X... une notification de redressements le 20 décembre 2002 (AR du 23 décembre) ;

Que suite aux observations du 17 janvier 2003 de la Société MICHEL X..., faisant valoir qu'à la relecture des actes elle constatait que les apports en cause ne pouvaient bénéficier du régime d'exonération en cause, l'Administration fiscale a adressé une nouvelle notification de redressements le 3 avril 2003 (AR du 4 avril) prévoyant une pénalité de 80 %, au motif que, selon elle, Monsieur X... avait en toute connaissance de cause rédigé de manière trompeuse un acte en se prévalant d'un régime dérogatoire auquel il savait ne pas avoir droit ;

Que les droits et pénalités en découlant ont fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement (no 2004 00066) le 22 octobre 2004 (AR 23 octobre) pour un montant de 699 904 € dont 297 199, 36 € de droits, 167 174, 53 € d'intérêts de retard et 237 759 € de majoration ;

Qu'à la suite de la réclamation de la Société MICHEL X... en date du 19 novembre 2004, l'Administration fiscale a rendu le 18 mars 2005 (AR 23 mars), une décision d'admission partielle en abandonnant les pénalités relatives aux manoeuvres frauduleuses ;

Que la Société MICHEL X... a alors fait assigner Monsieur le Chef des Services Fiscaux chargé de la Direction de Contrôle Fiscal RHÔNE ALPES BOURGOGNE devant le Tribunal de grande instance d'AUXERRE par exploit d'huissier du 13 mai 2005 aux fins d'annulation de cette décision de rejet partiel ;
***

Considérant qu'aux termes de l'article L 180 du Livre des procédures fiscales " Pour les droits d'enregistrement, la taxe de publicité foncière, les droits de timbre, ainsi que les taxes, redevances et autres impositions assimilables, le droit de reprise de l'Administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle de l'enregistrement d'un acte ou d'une déclaration ou de l'accomplissement de la formalité fusionnée définie à l'article 647 du Code général des impôts. Toutefois, ce délai n'est opposable à l'Administration que si l'exigibilité des droits et taxes est suffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité, sans qu'il soit nécessaire de procéder à des recherches ultérieures. " ;

Que cependant, comme elle l'indique elle-même dans son acceptation partielle de la réclamation de la Société MICHEL X... (pièce 8 de l'Administration) à propos des conditions d'application de la prescription abrégée de l'article 180 du Livre des procédures fiscales, l'Administration fiscale citant sa propre documentation, précise " si un doute subsiste quant à l'exigibilité des droits et s'il est nécessaire pour en apporter la preuve de procéder à des recherches quelconques, notamment par rapprochement de divers actes ou déclarations et examens de circonstance extrinsèques ", le délai abrégé ne s'applique pas ;

Considérant que l'Administration fiscale estime que la seule lecture de l'acte en cause ne permet pas de vérifier la véracité des affirmations des parties et de déterminer si les terres apportées pouvaient ou non être comprises dans l'apport d'un ensemble d'éléments d'actif immobilisé affecté à l'exercice d'une activité professionnelle, compte tenu de la spécificité des règles fiscales dont relèvent les exploitants agricoles ;

Qu'il résulte ainsi, tant de l'article 180 du Livre des procédures fiscales que de la documentation administrative précités, que c'est avec raison que la Société MICHEL X... souligne que le partage entre le champ d'application des prescriptions abrégée et décennale doit se faire en distinguant si des recherches extérieures à l'acte sont nécessaires et cela au regard des dispositions de l'article 810 du Code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de ce texte, dans sa rédaction applicable au moment des faits : " I-L'enregistrement des apports donne lieu au paiement d'un droit fixe de 500 francs (...) III-Le taux normal du droit d'enregistrement ou de la taxe de publicité foncière perçus sur les apports visés au 3o du I et au II de l'article 809 est fixé à 8, 6 %. A partir du 1er janvier 1999 ce taux est réduit de 1 % sur les apports de fonds de commerce de clientèle de droit au bail ou à une promesse de bail visé au 3o du I et au II de l'article 809 si l'apporteur en cas d'apport (...) s'engage à conserver pendant 5 ans les titres remis en contrepartie (...) Cette réduction de taux est applicable dans les mêmes conditions aux immeubles ou droits immobiliers compris dans l'apport de l'ensemble des éléments d'actif immobilisé affecté à l'exercice d'une activité professionnelle. A compter du 1er janvier 1992, l'enregistrement des apports réalisés dans les conditions prévues au 2ème alinéa donne lieu au paiement du seul droit fixe mentionné au I. " ;

Qu'il y a lieu de relever avant toute discussion, que l'acte d'apport et l'acte constatant la réalisation de cet apport ont :
- été enregistrés le même jour (25 février 1997),
- à la même Recette de Tonnerre,
- sous deux numéros consécutifs :
¤ no 82 / 1 / 156, volume 391, folio 61 pour la constatation de la réalisation de la condition suspensive,
¤ no 83 / 1 / 157, volume 391, folio 61 pour l'acte d'apport,
- été concomitamment publiés au Bureau des Hypothèques :
¤ dépôt 2553 du 28 mars 1997 volume 1997 P no 1734, formalité exécutée le 3 juillet 1997 no 4355, volume 97 P 3005 pour l'acte d'apport,
¤ dépôt 2554 du 28 mars 1997 volume 1997 P no 1735, formalité exécutée le 3 juillet 1997 no 4356 pour l'acte de constatation de la réalisation de la condition suspensive ;

Qu'en outre, il ressort clairement de la lecture de ces deux actes, que :
- l'apport portait sur un bien isolé, en l'espèce un terrain sous forme de plusieurs parcelles (p. 4 et 5 in fine de l'acte d'apport et p. 2 et 3 de l'acte de réalisation de la condition suspensive),
- que le matériel d'exploitation constitué des plantations et du matériel de palissage existant sur les parcelles appartiennent à la Société " DOMAINE X... ", exploitant des dites parcelles (p. 5 in fine de l'acte d'apport et p. 3 de l'acte de réalisation de la condition suspensive) ;

Que dès lors, comme le souligne avec justesse la Société MICHEL X..., l'Administration fiscale, par la simple lecture de ces 2 actes, était en mesure de constater que Monsieur X... n'a pas fait l'apport d'un ensemble de biens mais seulement de parcelles qu'il n'exploitait pas puisque les plantations et le matériel de palissage appartiennent à la société du DOMAINE X..., exploitant ces biens ;

Que par ailleurs, l'Administration fiscale qui ne conteste pas la validité des actes en cause, a également admis partiellement la réclamation de la Société MICHEL X... et prononcé le dégrèvement des pénalités sanctionnant la dissimulation relevée puis abandonnée (pièce no 8 idem) ;

Qu'il résulte de ce qui précède, que si Monsieur X... et la Société MICHEL X... ont bien commis une erreur dans la qualification de l'acte, l'Administration fiscale, par la seule lecture de ceux-ci, avait la possibilité de les requalifier correctement sans avoir à rechercher l'intention des parties ni avoir recours à des éléments extrinsèques et qu'ainsi, c'est bien la prescription triennale qui doit s'appliquer en l'espèce ;

Considérant que l'acte d'apport et l'acte relatif à la réalisation de la condition suspensive ayant été enregistrés le 25 février 1997, la prescription triennale était donc acquise quand l'Administration fiscale a procédé tant à la notification de redressements (proposition de rectification) du 20 décembre 2002 qu'à la notification d'un nouveau redressement (nouvelle proposition) le 3 avril 2003 ;

Qu'en conséquence, le jugement déféré doit être confirmé ;
***

Considérant que l'équité commande de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile dans les termes du dispositif du présent arrêt ;

Considérant que l'Administration fiscale succombant à l'instance, devra en supporter les dépens ;

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE Monsieur le Chef des Services Fiscaux chargé de la Direction de Contrôle Fiscal RHÔNE ALPES BOURGOGNE à payer à la Société MICHEL X... S. A. une somme de 3 000 (trois mille euros) en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

REJETTE toutes autres demandes des parties,

CONDAMNE Monsieur le Chef des Services Fiscaux chargé de la Direction de Contrôle Fiscal RHÔNE ALPES BOURGOGNE aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 07/6977
Date de la décision : 11/04/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Auxerre


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-04-11;07.6977 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award