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11/04/2008 | FRANCE | N°06/19367

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0164, 11 avril 2008, 06/19367


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre- Section B

ARRÊT DU 11 AVRIL 2008

(no, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 19367

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Octobre 2006- Tribunal de Commerce de PARIS- RG no 2004046368

APPELANTE

La S. A. S. ETABLISSEMENTS MARC ROZIER ET CIE
agissant en la personne de ses représentants légaux
dont le siège est 14, rue de la Corderie
69009 LYON

repré

sentée par la SCP BOMMART- FORSTER- FROMANTIN, avoués à la Cour,
assistée de Maître Bérengère BRISSET, avocat au Barreau de Paris,
...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre- Section B

ARRÊT DU 11 AVRIL 2008

(no, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 19367

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Octobre 2006- Tribunal de Commerce de PARIS- RG no 2004046368

APPELANTE

La S. A. S. ETABLISSEMENTS MARC ROZIER ET CIE
agissant en la personne de ses représentants légaux
dont le siège est 14, rue de la Corderie
69009 LYON

représentée par la SCP BOMMART- FORSTER- FROMANTIN, avoués à la Cour,
assistée de Maître Bérengère BRISSET, avocat au Barreau de Paris,
(CHAMPAGNER Z...) C1864.

INTIMES

Maître Didier N...
en sa qualité de liquidateur de la société SOFT TEXTILES
demeurant 62, boulevard de Sébastopol
75003 PARIS

représenté par Maître François TEYTAUD, avoué à la Cour,
assisté de Maître Benoît HURET, avocat au Barreau de Paris, substituant Maître David KOUBBI, avocat.

La S. A. COPONOAT
en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 68, rue du Président Edouard C...
69002 Lyon,
ès- qualités d'agent commercial de la société
de droit chinois ZHEJIANG CATHAYA INTERNATIONAL
COMPANY LIMITED
dont le siège est à HANGZOU (CHINE)
117 D... Yu Chang E...

représenté par la SCP BAUFUME- GALLAND- VIGNES, avoués à la Cour,
assistée de Maître Valérie F..., avocat,

La S. A. R. L. J. T. C. ASSOCIÉS
agissant en la personne de son Gérant
dont le siège social est 29, rue du Caire
75002 PARIS

représentée par la SCP OUDINOT FLAURAUD, avoués à la Cour,
assistée de Maître Pierre G..., avocat au Barreau de Paris,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 février 2008, en audience publique les parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur GIRARDET, magistrat, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur GIRARDET, conseiller,
Madame REGNIEZ, conseiller,
Monsieur MARCUS, conseiller,

Greffier, lors des débats : L. H... PAYARD

ARRÊT :

- contradictoire.

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Monsieur GIRARDET, président et par Madame L. H... PAYARD, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La cour est saisie de l'appel interjeté par la société par actions simplifiée ETABLISSEMENTS MARC ROZIER ET CIE (ci- après la société MARC ROZIER) à l'encontre du jugement contradictoire rendu le 13 octobre 2006 par la quinzième chambre du tribunal de commerce de Paris.

Il convient de rappeler que la société MARC ROZIER exerce une activité de création, de fabrication et de commercialisation de tissus. Elle se dit titulaire des droits de création et d'exploitation d'un dessin référencé dans sa collection sous le no 999.

Ayant constaté que la société à responsabilité limitée JTC ASSOCIES commercialisait un modèle de robe reprenant, selon elle, les caractéristique de son tissu no 999, la société MARC ROZIER a fait procéder à deux saisies contrefaçon les 5 et 6 mai 2004, chez la société JTC ASSOCIES et la société en liquidation judiciaire SOFT TEXTIL, son fournisseur.

* *
*

La quinzième chambre du tribunal de commerce de Paris a, par jugement contradictoire du 13 octobre 2006 :

- dit l'assignation valide,

- dit valides les saisies contrefaçon,

- dit le modèle référencé no 999 de la société MARC ROZIER original,

- débouté la société MARC ROZIER de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société MARC ROZIER à verser à chacune des sociétés JTC ASSOCIES, SOFT TEXTILES et COPONAT la somme de 2. 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société MARC ROZIER aux dépens.

* *
*

Dans ses dernières conclusions signifiées le 14 février 2008, la société MARC ROZIER, appelante, prie la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a validé l'assignation, les saisies contrefaçon, et jugé original le modèle de dessin référencé 999,

- infirmer le jugement entrepris pour le surplus et statuant à nouveau,

- dire et juger que les sociétés JTC ASSOCIESS, SOFT TEXTILES et COPONAT se sont rendues coupable de contrefaçon,

- condamner la société JTC ASSOCIESS à lui verser la somme de 100. 000 euros, Maître Didier N..., es- qualité de liquidateur de la société SOFT TEXTILES, au paiement de la somme de 140. 000 euros la société COPONAT au paiement de la somme de 160. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour contrefaçon,

- prononcer les mesures d'interdiction, de confiscation, de destruction et de publication d'usage à l'encontre des sociétés JTC ASSOCIESS et COPONAT et à Maître Didier N..., es- qualité de liquidateur de la société SOFT TEXTILES,

- dire et juger que les sociétés J. C ASSOCIESS, SOFT TEXTILES, et COPONAT se sont rendues coupable d'actes de concurrence déloyale et parasitaires,

- les condamner solidairement à lui verser la somme de 300. 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis.

*

La société JTC ASSOCIES, intimée, demande à la cour, dans ses dernières conclusions signifiées le 12 février 2008, de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société MARC ROZIER de l'ensemble de ses demandes et en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société JTC ASSSOCIES la somme de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- dire et juger que la société MARC ROZIER est irrecevable en ses demandes en contrefaçon, en concurrence déloyale,

- constater que la société SOFT TEXTILES doit sa garantie à la société JTC. ASSOCIES pour toutes éventuelles condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.

*

Dans ses dernières conclusions signifiées le 14 février 2008, Maître N..., es qualité de liquidateur judiciaire de la société SOFT TEXTILES, intimé, demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société MARC ROZIER de l'ensemble de ses demandes et en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société SOFT TEXTILES la somme de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

- dire et juger que les opérations de saisies contrefaçon ainsi que la procédure y afférente sont nulles,

- déclarer la société MARC ROZIER irrecevable pour défaut de droit d'agir,

- débouter la société MARC ROZIER de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société MARC ROZTER ET CIE à verser à la société SOFT TEXTILES la somme de 15. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de droit d'agir,
Subsidiairement,

- dire et juger que les demandes indemnitaires de la société MARC ROZIER sont tout autant mal fondées que non chiffrées,

En tout état de cause,

- constater que la société COPONAT, professionnel du commerce de textiles en gros, a commandé le tissu litigieux auprès d'une société étrangère pour qu'il soit livré en France, alors qu'elle est en relation d'affaires avec la société MARC ROZIER et qu'elle ne pouvait ignorer que la société MARC ROZIER exploitait un tissu pouvant s'avérer, sous réserve, ressemblant,

- constater que la société COPONAT n'a pas permis à la concluante de jouir paisiblement des marchandises qu'elle a fait importer au nom et pour le compte de SOFT TEXTILES.

- juger que la société COPONAT relèvera et garantira la société SOFT TEXTILES de toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre.

*

La société COPONAT, intimée, sollicite la cour, dans ses dernières conclusions signifiées le 15 février 2008, de :

- dire et juger sans objet les demandes d'interdiction, confiscation et destruction formées par la société MARC ROZIER,

- mettre la société COPONAT hors de cause à tout le moins confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société MARC ROZIER de ses demandes,

A titre subsidiaire,

- dire que la société SOFT TEXTILE et, en tant que de besoin, la société JTC ASSOCIES seront tenues de garantir la concluante contre toutes les condamnations prononcées contre elle à quelque titre que ce soit,

- condamner la société MARC ROZIER à verser à la concluante la somme de 15. 000 euros à titre dommages et intérêts pour procédure abusive.

SUR CE, LA COUR
Sur la validité des procès verbaux :

Considérant que Maître Courtoux ès qualités, fait valoir que le procès verbal de saisie contrefaçon en date du 5 mai 2004, relatant les opérations diligentées dans les locaux de la société Soft Textiles et celui daté du lendemain relatant les opérations de saisie contrefaçon diligentées dans les locaux de la société JTC, bien que tous deux portent la mention selon laquelle Jean- Daniel I..., huissier, en a rédigé les termes, ne sont manifestement pas écrits de la même main, si bien qu'il est impossible de connaître qui est le rédacteur de chacun d'eux, ce qui les frappe d'une nullité absolue, laquelle affecte la procédure en son entier ;

Considérant toutefois, et comme le fait valoir l'appelante, qu'aucun texte n'impose à l'huissier instrumentaire d'écrire de sa propre main son procès verbal, dont les mentions peuvent d'ailleurs être dactylographiées ; qu'il incombe en revanche à l'huissier de procéder lui même aux opérations autorisées par l'ordonnance, de faire les constatations prescrites, d'en faire une relation personnelle et d'attester qu'il est l'auteur de l'ensemble de ces opérations en apposant sa signature au pied de l'acte ;

Qu'en l'espèce, maître I... dont Maître Courtoux ne soutient pas qu'il n'était pas présent lors des opérations conduites dans les locaux de la société Soft Textiles, précise sans être démenti, que le procès verbal dressé le 5 mai 2004 a été rédigé par une secrétaire de la SCP I... et Gouguet sous sa dictée, tandis que le procès verbal du 6 mai 2004 a été rédigé de sa main ;

Considérant que ni la présence de l'huissier pendant les opérations litigieuses, ni l'authenticité de sa signature figurant sur les procès verbaux étant contestées, la seule différence d'écriture manuscrite dans les deux actes est insusceptible d'affecter l'authenticité des opérations auxquelles l'huissier déclare avoir procédé ;

Sur la recevabilité à agir à de l'appelante

Considérant que la société JTC soutient que la société Marc Rozier n'a jamais fourni une définition précise du dessin qu'elle revendique et que tardivement devant la Cour, elle verse des nouvelles pièces (36 et 37) et reproduit dans ses écritures un dessin différent de celui invoqué en première instance ; qu'elle conclut à l'irrecevabilité des demandes de l'appelantes par application de l'article 564 du CPC ;

Mais considérant que la société Marc Rozier n'a nullement varié dans l'identification du dessin dont elle poursuit la contrefaçon ; que la reproduction de celui- ci dans ses écritures et la production de pièces complémentaires, ne font qu'en préciser les caractéristiques complexes et ont été rendues nécessaires par les contestations des intimées ;

Qu'il s'agit du dessin qu'elle a toujours déclaré avoir acquis de la société Robert J... le 10 avril 2002, référencé dans ses collections sous le no 999, lequel se présente sous la forme d'un patchwork composé notamment de différents motifs stylisés de fleurs, arabesques et dessins géométriques tels que des damiers, carreaux et formes ovales ; que ce dessin est reproduit dans différentes gammes de coloris et sur deux supports : en mousseline avec des bandes de satin alternées et en mousseline seule ;

Que la société Marc Rozier qui identifie suffisamment le dessin sur lequel elle fonde ses droits, ne soumet pas à la Cour des prétentions nouvelles qui commanderaient d'en prononcer l'irrecevabilité par application de l'article 564 du CPC ;

Considérant par ailleurs, que Maître Courtoux comme la société Coponat exposent que la société Marc Rozier ne justifie pas être titulaire des droits d'auteur sur le modèle de tissu revendiqué qu'elle déclare avoir acquis le 10 avril 2002, auprès de la société Robert J..., car la facture produite ne porterait que sur " une idée ", sans photo ni croquis, et que les attestations de Stéphane J... sont trop tardives et insuffisamment précises pour établir que l'appelante serait bien titulaire des droits patrimoniaux sur le modèle 999 dont la contrefaçon est alléguée ;

Mais considérant que la société marc Rozier qui agit sur le fondement du droit d'auteur et non sur celui du droit des dessins et modèles de sorte que les développements de Maître Courtoux à cet égard sont inopérants, verse aux débats un ensemble de pièce qui établissent le correspondance entre son modèle de tissu référencé dans sa collection sous le no999 et celui que lui a cédé la société J... ; qu'en effet, le dessin en cause est bien identifié par les pièces 7 (maquette de conception du dessin) 1et 36 (robrack et tirelle) et par la facture de la société Créations Robert J... du 10 avril 2002, qui au delà des terme " idée ", porte bien sur la cession de quatre dessins dont celui référencé DD5551 ; qu'en effet, selon l'attestation complémentaire de Stephane J... à laquelle est annexée une reproduction du dessin, cette référence correspond bien au modèle de tissu référencé sous le no999 dans les collections de l'appelante dont les droits lui furent cédés par la société J... ;

Que l'ensemble de ces documents justifient à l'envi à l'égard des parties poursuivies en contrefaçon, de la titularité des droits de la société Marc Rozier sur le modèle 999 qu'elle commercialise par ailleurs sous son nom dans deux matières et différents coloris ;

Sur l'originalité du dessin et sa contrefaçon

Considérant que l'oeuvre revendiquée est un patchwork composé de plusieurs motifs juxtaposés, très distincts entre eux, mais réunis en un ensemble aux couleurs contrastées ; que dans cet ensemble, figurent par exemple, des motifs géométriques de damiers caractérisés par un alternance non pas de carrés mais de rectangles allongés qui côtoient des motifs d'arabesques et de fleurs ;

Considérant que la société Coponat conteste l'originalité de ce patchwork car il ne serait que l'expression d'une tradition ancienne et que l'appelante ne dégagerait pas ce qui le rendrait reconnaissable ;

Mais considérant que la difficulté de décrire de façon exhaustive les éléments dissemblables composant ce patchwork, rend bien compte de la richesse et de la diversité de ceux- ci ; que la société Coponat ne produit aux débats aucun document établissant que tout ou partie de cette association de motifs décoratifs serait le fruit d'un tradition ancienne ; que l'originalité revendiquée réside ainsi dans la réunion des ces éléments dissemblables qui traduit les choix personnels effectués par l'auteur ;

Considérant que le tissu incriminé commercialisé par la société Soft Textiles, référencé Herzilia est celui avec lequel a été confectionné le modèle de robe Astrid lui même commercialisé par la société JTC comme l'établissent les opérations de saisie contrefaçon en date des 5 et 6 mai 2004 ; qu'il présente dans des coloris voisins, un patchwork composé du même ensemble de motifs alternant les formes géométriques sus- exposées, des motifs de fleurs et des arabesques pareillement dessinés ;

Que la reproduction des caractéristiques de l'oeuvre référencée no999 en constitue dès la lors la contrefaçon dont la société Marc Rozier, titulaire des droits patrimoniaux, est bien fondée à solliciter la réparation ;

Sur les actes de concurrence déloyale

Considérant que l'appelante incrimine sur ce fondement, la reprise de la gamme de couleurs, la vente à vil prix, le suivisme de la société JTC qui a déjà été condamnée pour avoir commis des faits similaires à son encontre et enfin la violation par la société Coponat des rapports de confiance qui s'étaient instaurés entre elles ;

Considérant que le premier moyen n'est pas fondé car la reprise des coloris de chacun des motifs litigieux relève de la contrefaçon de l'oeuvre laquelle ne se réduit pas à ses motifs ;

Que le second moyen ne l'est pas davantage car la vente du tissus contrefaisant a été faite à un prix plus faible (plus de 7 euros / mètre) sans pour autant être qualifié de vil ;

Considérant s'agissant du troisième moyen que la condamnation précédente de la société JTC n'a pas pour effet de caractériser à son égard une faute distincte de celle retenue au titre de la contrefaçon ;

Qu'enfin, les quatre factures produites datant d'octobre, novembre 2003 et février 2004, ne permettent pas de conclure à l'existence entre l'appelante et la société Coponat d'une relation de confiance qui aurait facilité l'accès de la société Coponat à des informations commerciales utiles à la réalisation de la contrefaçon ;

Sur les responsabilités et les mesures réparatrices

Considérant que lors des opérations de saisie contrefaçon en date du 5 mai 2004, l'huissier a pu constater dans les locaux de la société JTC la présence de 5 robes fabriquées dans le tissu contrefaisant ; que la gérante de la société lui a indiqué que le tissu avait été acheté auprès de la société Soft Textiles ; que la facture d'achat datée du 20 janvier 2004, remise à l'huissier fait état de l'achat de 727 mètres du tissu litigieux dénommé Herzilia, vendu par la société Soft au prix de 7, 62 euros HT le mètre ;

Que lors de la saisie- contrefaçon diligentée le 6 mai 2004 au sein de la société Soft textiles, le gérant de cette dernière précisa que la société n'était pas fabricant et que le tissu dénommé Herzilia avait été acheté à la société chinoise Zheyiang Cathaya international, par l'intermédiaire de l'agent commercial en France de cette société, la société Coponat ; que les factures produites font état de l'importation par Soft Textiles et de la revente du tissu contrefaisant à diverses sociétés dont la société JTC ;

Considérant que la société Coponat conteste avoir engagé sa responsabilité dans la commission des faites litigieux en relevant qu'elle n'a agi qu'en tant qu'agent commercial de la société de droit chinois CATHAYA et que son rôle s'est limité à prendre la commande que lui passa la société Soft et à la transmettre à la société Cathaya, étant observé que c'est la société Soft qui la mit en possession de l'oeuvre à reproduire ; qu'elle ajoute que la société Soft a directement payé la société Cathaya et que le tissu argué de contrefaçon fut directement livré à la société Soft laquelle, en sa qualité d'importateur, se chargea de toutes les formalités douanières ; qu'elle verse aux débats plusieurs attestations dont celle d'un de ses salariés, Jean Arthur K..., lequel déclare avoir reçu de la société Soft, le 13 novembre 2003, les dessins du tissu à reproduire et des bouts de tissu pour illustrer les coloris à reproduire ;

Considérant que la société Soft soutient au contraire qu'elle n'a jamais remis à la société Coponat un quelconque dessin ou une copie du tissu à réaliser et soutient que c'est au contraire la société Coponat qui lui proposa le dessin litigieux ; qu'elle conteste avoir la qualité de donneur d'ordre avant d'exposer que, soit la cour estime qu'il existait entre elle et la société Soft un contrat de mandat et dans ce cas la responsabilité contractuelle de cette dernière est engagée pour lui avoir fourni un dessin inexploitable, soit la cour ne retient pas l'existence d'un mandat ce qui devrait néanmoins la conduire à retenir la responsabilité délictuelle de la société Soft pour ne pas avoir vérifié que les produits livrés par sa seule entremise n'étaient pas contrefaisants ;

Considérant ceci étant rappelé, que les attestations contradictoires versés aux débats ne permettent pas de déterminer qui de la société Soft ou de la société Coponat proposa à l'autre la réalisation de la reproduction de l'oeuvre de la société Marc Rozier ; qu'il sera simplement observé que la société Coponat est très imprécise sur les conditions dans lesquelles elle a négocié avec la société chinoise la fabrication du tissu contrefaisant et sur la transmission du dessin que lui aurait remis la société Soft ;

Qu'en tout est de cause, il convient de relever que la société Coponat était l'agent de la société Cathaya et, comme elle le dit elle même, démarchait régulièrement, les commerçants pour recevoir leurs commandes de tissus à faire réaliser en Chine ; que si elle n'a perçu aucun règlement de la société Soft dont elle n'était pas la mandataire, il demeure qu'elle a reçu la commande de la société Soft après avoir négocié avec le façonnier de son choix la fabrication du tissu incriminé ; que la qualité de donneur d'ordre de la société Soft n'est nullement exclusive de sa responsabilité dès lors que c'est elle qui a négocié avec la société Chinoise la fabrication dudit tissu, c'est elle qui a reçu l'ordre de le fabriquer et c'est elle qui a ainsi permis l'importation en France de l'oeuvre contrefaisante ;

Que ni la société Coponat ni la société Soft, ni la société JTC, professionnelles dans le commerce des tissus, ne peuvent utilement exciper de leur prétendue bonne foi ;

Que leur responsabilité est engagée pour avoir porté atteinte ensemble aux droits de la société Marc Rozier, ce qui exclut d'accueillir la demande de garantie qu'elles forment respectivement les unes contre les autres et ce qui commande de les déclarer tenues in solidum à réparer le dommage causé par leur commune entreprise ;

Considérant que la société marc Rozier fait valoir que la contrefaçon de son modèle de patchwork porte atteinte aux lourds investissements qu'elle a exposés pour sa conception ainsi qu'à l'image de qualité qu'elle a acquise auprès de sa clientèle, et relève l'importance du métrage : 727 mètres vendus par SOFT à JTC, sur plus de 7000 mètres que cette dernière a importé ; que la Cour relève à cet égard que l'attestation précitée de M. K... fait état de 10000 mètres ;

Considérant qu'au vu de ces quantités et du prix de revente des marchandises contrefaisantes comme des frais de création et de promotion engagés par l'appelante, il convient de condamner in solidum les sociétés Coponat et JTC mais dans la limite de 13000 euros pour la société JTC, à verser la somme de 113 000 euros et de dire que la société Soft sera tenue in solidum au paiement de la somme de 113 000 euros, la créance de la société Marc Rozier à son égard étant fixée à ce montant ;

Considérant qu'il sera fait droit dans les termes du dispositif ci- après aux mesures d'interdiction et de publication sollicitées, suffisantes pour prévenir le renouvellement des actes litigieux sans qu'il soit nécessaire d'y ajouter les mesures requises de confiscation et de destruction ;

Considérant que l'accueil des demandes principales conduit au rejet des demandes reconventionnelles pour procédure abusive ;

Qu'au titre des frais irrépétibles, l'équité commande d'infirmer la décision entreprise et de fixer les sommes dues par chacune des intimées à la somme de 5000 euros ;

PAR CES MOTIFS

Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a rejeté les demandes d'annulation des opérations de saisie contrefaçon et déclaré originale l'oeuvre référencée 999 ;

Statuant à nouveau,

Déclare la société Marc ROZIER recevable en ses prétentions,

Dit qu'en important et en commercialisant un tissu reproduisant les caractéristiques du tissu référencé no999 dans les collections de la société Marc Rozier, titulaire des droits patrimoniaux d'auteur, la société Soft Textiles, la société Coponat et la société JTC Associés ont commis des actes de contrefaçon,

En conséquences interdit aux sociétés JTC et Coponat et à Maître Courtoux es qualité de liquidateur de la société Soft Textiles, la poursuite des actes précités, sous astreinte de 1000 euros par mètre de tissus ou article confectionné avec celui- ci, commercialisé,

Condamne la société Coponat in solidum avec la société JTC, mais pour celle- ci dans la limite de 13 000 euros, à verser à la société Marc Rozier la somme de 113 000 euros,

Déclare la société Soft Textiles représentée par Maître Courtoux son liquidateur, tenue in solidum avec la société Coponat au paiement de cette dernière somme et fixe la créance de la société Marc Rozier à ce montant,

Condamne la société JTC Associés in solidum avec la société Coponat à verser à la société Marc Rozier la somme de 10 000 euros,

Autorise la publication du présent dispositif dans quatre journaux ou publications au choix de l'appelante, sans que le coût de chaque insertion à la charge in solidum des intimées ne dépasse la somme de 4000 euros ;

Rejette toute autre demande,

Condamne la société Coponat et la société JTC Associés à verser, chacune, à la société Marc Rozier la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC et déclare en outre Maître Courtoux es qualité, tenu au paiement de la somme complémentaire de 5000 euros euros du même chef,

Condamne in solidum, les intimées aux dépens dont distraction au profit de la SCP Bommart Forster Fromatin conformément à l'article 699 du CPC ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0164
Numéro d'arrêt : 06/19367
Date de la décision : 11/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 13 octobre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-04-11;06.19367 ?
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