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11/04/2008 | FRANCE | N°06/14920

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0164, 11 avril 2008, 06/14920


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 11 AVRIL 2008

(no , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/14920

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Juin 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 04/03204

APPELANTE

La S.A. DELTA OHM,

prise en la personne de son Président du Conseil d'administration

dont le siège social est 211, rue d'Herblay

95150 TAVERNY

représentée par la SCP GERIGNY-FRENEAUX, avoués à la Cour,

assistée de Maître Julien FRENEAUX, avocat au Barreau de Paris, P390.

INTIMEE

La...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 11 AVRIL 2008

(no , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/14920

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Juin 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 04/03204

APPELANTE

La S.A. DELTA OHM,

prise en la personne de son Président du Conseil d'administration

dont le siège social est 211, rue d'Herblay

95150 TAVERNY

représentée par la SCP GERIGNY-FRENEAUX, avoués à la Cour,

assistée de Maître Julien FRENEAUX, avocat au Barreau de Paris, P390.

INTIMEE

La SPINNER GMBH ELEKTROTECHNISCH FABRIK,

société de droit allemand,

agissant en la personne de son représentant légal

dont le siège est Erzgiessereistrasse 33,

D-80335 MUNICH, ALLEMAGNE

représentée par Maître Dominique OLIVIER, avoué à la Cour,

assistée de Maître Arnaud CASALONGA, avocat au Barreau de Paris,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 8 février 2008, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur GIRARDET, président,

Madame REGNIEZ , conseiller,

Monsieur MARCUS, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : L. MALTERRE-PAYARD

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur GIRARDET, président et par Madame L. Z... PAYARD, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK est titulaire d'un brevet d'invention français ayant pour titre CONNECTEUR COAXIAL 7/16, déposé le 5 janvier 1994, publié sous le no 2 700 223 et délivré sous le no 94 00055, sous priorité allemande DE 4300243 du 7 janvier 1993.

La société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK ayant appris que la société DELTA-OHMM fabriquait et assurait la vente d'un connecteur mâle, a fait procéder par huissier et sur ordonnance à deux saisies contrefaçon simultanées, l'une au siège social de la société DELTA-OHM à Taverny, et l'autre dans son usine de fabrication à Coulanges sur Yonne.

Arguant d'une contrefaçon des revendications 3, 4 et 5 de son brevet FR 94 00055, la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK, par exploit du 17 février 2004, a assigné la société DELTA-OHM devant le Tribunal de grande instance de Paris.

C'est ainsi qu'est né le présent litige.

* *

*

Par un jugement contradictoire du 14 juin 2006, le Tribunal de grande instance de Paris à :

- déclaré la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK recevable à agir,

- rejeté le moyen tiré de la nullité du procès verbal de saisie contrefaçon dressé le 4 février 2004 à Coulanges-sur Yonne,

- débouté la société DELTA-OHM de sa demande de nullité des revendications 3, 4 et 5 du brevet FR94 00055 de la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK,

- rejeté l'exception de possession personnelle antérieure soulevée par la société DELTA-OHM,

- dit que le connecteur axial référence 08 100 047 de la société DELTA-OHM contrefait les revendications 3, 4 et 5 du brevet FR 94 00055 de la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK,

- interdit en conséquence à la société DELTA-OHM de fabriquer et de mettre en vente ledit connecteur contrefaisant, sous astreinte de 50 euros par infraction constatée, astreinte commençant à courir deux mois après la signification de la décision,

- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,

- désigné en qualité d'expert :

Monsieur Alain A...

...

Tel : 01 42 88 29 32

Fax : 01 42 88 28 27

avec mission de :

- se communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission,

- entendre tous sachants,

- fournir tous éléments de nature à permettre au Tribunal de déterminer l'étendue du préjudice commercial subi par la société DELTA-OHM du fait de la fabrication et de la commercialisation des connecteurs contrefaisants référencés 08 100 047 (ou 20 500 090 avec le cordon),

- dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du nouveau Code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport au greffe de la 3ème chambre 1ère section de ce Tribunal avant le 28 février 2007, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile auprès du juge du contrôle,

- fixé à la somme de 5 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, somme qui devra être consignée par la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK à la Régie du Tribunal de grande instance de Paris avant le 15 août 2006,

- dit que faute de consignation de la provision dans le délai imparti, la désignation de l'expert sera caduque et privée de tout effet,

- condamné la société DELTA-OHM à verser à titre provisionnel à la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice,

- autorisé la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK à faire publier le dispositif de la décision devenue définitive dans deux journaux ou revues de son choix et aux frais de la société DELTA-OHM, dans la limite de 3 000 euros hors taxes par insertion,

- condamné d'ores et déjà la société DELTA-OHM à verser à la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- rejeté le surplus des demandes,

- réservé les dépens.

* *

*

Dans ses dernières conclusions en date du 6 février 2008, la société DELTA-OHM, appelante, demande à la Cour de :

- infirmer le jugement déféré,

- prononcer la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 4 février 2004,

- condamner la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK à payer à la société DELTA-OHM la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- prononcer la nullité des revendications 3, 4 et 5 du brevet FR 94 00055,

- déclarer irrecevables, et en tout cas infondées, l'ensemble des demandes de la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK, l'en débouter.

*

Dans ses dernières conclusions communiquées le 7 février 2008, la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK, intimée, demande à la Cour de :

- confirmer le jugement déféré,

- recevoir la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK en son appel incident,

- dire et juger que le connecteur coaxial monté sur un cordon portant notamment la référence 20-500-178 constitue une contrefaçon des revendications 3, 4 et 5 du brevet FR94 00055,

- outre des mesures d'interdiction sous astreinte et de publication, condamner la société DELTA-OHM à payer à la société SPINNER GmbH ELEKTROTECHNISCHE FABRIK une provision complémentaire de 100 000 euros à valoir sur les dommages et intérêts,

- étendre la mesure d'expertise confiée à Monsieur Alain A... à l'évaluation du préjudice jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir.

SUR CE, LA COUR

Sur la qualité à agir de la société Spinner Gmbh Elektrotechnische Fabrik

Considérant que la société Delta - Ohm soutient que la société précitée serait irrecevable en ses prétentions car le brevet a été inscrit au nom de la société Spinner Gmbh et non pas à celui de la société Spinner Gmbh Elektrotechnische Fabrik ;

Que la société Spinner Gmbh Elektrotechnische Fabrik fait valoir en réponse qu'il s'agit d'une seule et même société, la dénomination Spinner Gmbh n'étant autre que la forme réduite de la dénomination précédente et qui a été mentionnée dans la requête en délivrance du brevet français ;

Considérant en effet, ainsi que les premiers juges l'ont pertinemment relevé par des motifs propres et adoptés, que ces deux dénominations couvrent la même personne morale comme en attestent notamment le certificat de priorité relatif à la demande de brevet allemand établi au nom de la société Spinner Gmbh Elektrotechnische Fabrik dont les références et la date sont les mêmes que celles portées sur le brevet français, le brevet anglais déposé sous la priorité allemande avec les mêmes dates de référence ou encore les factures produites établies indifféremment sous les dénominations en cause avec dans les deux cas le même no de TVA ;

Que la société Spinner Gmbh Elektrotechnische Fabrik, ci- après Spinner, justifie ainsi de sa qualité à agir sur le fondement du brevet français no 94 / 00055 ;

Sur la validité du procès verbal de saisie-contrefaçon en date du 4 février 2004

Considérant que la société Delta-Ohm conclut à la nullité du procès verbal de saisie- contrefaçon motif pris de ce que, d'une part, des informations ont été dissimulées à la connaissance du président du tribunal qui a autorisé les opérations, notamment le fait que la requérante détenait déjà des connecteurs litigieux, d'autre part que les termes de son ordonnance n'ont pas été respectés, enfin qu'elle n'a pas été informée des voies de recours dont elle disposait ;

Considérant sur le premier moyen, qu'il sera rappelé qu'aux termes de l'article L615-5 (ancien)du CPI, le titulaire du brevet est « en droit de faire procéder sur ordonnance du président du tribunal de grande instance ....à la description détaillée avec ou sans saisie réelle des produits (argués de contrefaçon) ...» ; qu'il s'agit d'un droit dont est investi le titulaire du titre, les dispositions suivantes du même article précisant simplement que le président du tribunal peut prescrire en outre toute constatation utile à la détermination de l'origine et de l'étendue de la contrefaçon ;

Que si, selon l'appelante, certaines informations n'ont pas été données au président, cette circonstance à la supposer établie, n'était donc pas de nature à remettre en cause la saisie en elle même, mais l'étendue des opérations d'investigation ;

Qu'au demeurant la teneur des informations considérées est sans incidence sur la portée des mesures autorisées par l'ordonnance car la requérante nonobstant le fait qu'elle détenait déjà des exemplaires du connecteur incriminé se devait, pour éviter toute contestation sur l'origine de ceux-ci, de faire saisir sur ordonnance des exemplaires du connecteur litigieux ; que pareillement, l'absence de révélation de prétendues discussions engagées entre les parties pendant plus d'un an est dénuée de toute portée sur l'opportunité des mesures ordonnées ; que la société Delta-Ohm n'a donc pas abusé du droit que lui conférait l'article L615-5 précité ;

Considérant que l'appelante prétend par ailleurs que les termes de l'ordonnance n'auraient pas été respectés dans la mesure où l'huissier est intervenu le 4 février 2004 avec des gendarmes de la brigade locale ce qui a été perçu par le personnel comme un déploiement de forces incompréhensible et perturbateur, alors qu'il n'était autorisé à se faire assister, si nécessaire, que d'un représentant de la force publique ;

Considérant toutefois qu'il était loisible à l'huissier de requérir l'assistance de la force publique avant même de signifier l'ordonnance au représentant de la partie saisie ;que cette assistance peut se manifester par la présence de plusieurs représentants de la force publique si les circonstances l'exigent ; qu'en tout cas, rien ne vient établir en l'espèce que l'huissier est intervenu avec le déploiement de forces que conteste l'appelante, la mention figurant au procès verbal étant :"des gendarmes de la brigade de Coulanges La Vineuse préalablement requis en la personne de l'adjudant B..." ;

Qu'aucune violation des termes de l'ordonnance n'est donc caractérisée ;

Considérant par ailleurs que l'acte de signification de l'ordonnance du président que l'huissier remit au responsable des achats de la société Delta-Ohm ne mentionnant pas les voies de recours offertes au saisi, l'appelante conclut à la nullité du procès verbal pour violation des dispositions de l'article 680 du CPC ;

Que l'intimée fait valoir en réplique que les mentions relatives au recours dont pouvait être frappée l'ordonnance étaient mentionnées dans le corps de celle-ci et qu'elles étaient suffisantes à l'information du saisi qui, ayant toute latitude pour agir en rétractation de l'ordonnance sur le fondement des articles 496 et 497 du CPC, ne peut exciper d'aucun grief ;

Considérant toutefois que l'article 680 précité énonce que l'acte de notification «doit indiquer de manière apparente le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l'une de ces voies de recours est ouverte...etc » ;

Que s'agissant en l'espèce d'une ordonnance sur requête, la référence à l'alinéa 2 de l'article 496 du même code, selon lequel «tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l'ordonnance » s'imposait pour informer le saisi de cette voie de recours particulière qui lui était offerte d'agir en référé rétractation ;

Que cette exigence n'a nullement était satisfaite puis que la seule référence à des voies de recours figure au pied de l'ordonnance elle même, dans les termes suivants : "la requérante offrant de nous en saisir en cas de difficultés, mais seulement après les opérations de saisie effectuées et les visas apposés" formule lapidaire qui laissait la partie saisie dans l'ignorance des voies procédurales dont elle disposait ;

Considérant cependant que cette irrégularité de forme ne peut affecter la validité des opérations litigieuses que si le saisi justifie d'un grief, ce que ne fait pas l'appelante qui se borne à exciper, en termes généraux, des conditions tapageuses de l'exécution de la saisie et des informations sus mentionnées prétendument dissimulées , moyens qu'il lui était en effet loisible de soulever à tout moment devant le magistrat compétent en application des articles 496 et 497 du dit code, ce qu'elle ne fit pas ;

Que les premiers juges ont donc à bon droit rejeté la demande d'annulation des opérations de saisie-contrefaçon ;

Sur la portée du brevet français no 94 00055

Considérant que ce brevet a pour objet un connecteur coaxial 7/16 tant sous sa forme femelle que sous sa forme mâle, ce connecteur7/16 faisant l'objet d'une normalisation très précise, selon la norme DIN 47 223 et d'autres normes internationales ; que pour obtenir la compatibilité mécanique et les propriétés électriques d'une connexion 7/16, ces normes précisent presque toutes les cotes essentielles, y compris leurs tolérances ;

Qu'il est ainsi acquis que, pour la partie mâle du connecteur, le chiffrer 7 correspond au diamètre extérieur du conducteur intérieur et le nombre 16 correspond au diamètre intérieur du conducteur extérieur, ces caractéristiques dimensionnelles permettant d'assurer une impédance de 50 ohms ;

Que selon la description, l'invention a pour objet un connecteur 7/16, qui tout en présentant une compatibilité totale avec les connecteurs 7/16 normalisés, serait plus facile à fabriquer et à monter et permettrait d'obtenir une plus haute fréquence limite ;

Que pour ce faire, il est préconisé de réduire de 7mm à 5mm le diamètre extérieur du conducteur intérieur et, pour maintenir la même valeur d'impédance, de remplir l'espace entre les deux conducteurs (extérieur et intérieur) du connecteur mâle avec du matériau diélectrique, tel que du PTFE ;

Que la surface frontale côté connexion de ce matériau isolant doit déborder au - delà du plan de référence d'une distance 2 qui est choisie de manière à compenser sur le plan électrique le saut de diamètre (de 7 à 5mm) qui est présent après l'accouplement avec le connecteur femelle ;

Considérant que la revendication no3 reprend dans les termes suivants ces caractéristiques :

«connecteur mâle coaxial 7/16, composé d'un boîtier (34), de connecteur qui forme le conducteur extérieur, dont la surface frontale de contact est le plan de référence mécanique et électrique (E), et d'un conducteur intérieur (35)qui forme, au moins sur le côté connexion, un téton (35a) soutenu par une rondelle (36) en matière isolante, caractérisé en ce que le conducteur intérieur mâle (35a) a un diamètre extérieur (d5) d'environ 5mm et en ce que l'espace entre le conducteur extérieur (34) et le conducteur intérieur mâle (35a)est rempli d'un diélectrique, de préférence du PTFE, dont la surface frontale côté connexion déborde au-delà du plan de référence (E) d'une distance 2 qui est choisie de manière à compenser exactement, sur le plan électrique, le saut de diamètre, d'environ 5mm à 7mm, qui est présent après l'accouplement avec un connecteur femelle normalisé 7/16 ».

Considérant que la revendication dépendante no4 porte sur la préconisation selon laquelle le diélectrique entourant le conducteur intérieur mâle (35a) et la rondelle (36) en matière isolante forment un composant d'une seule pièce, tandis que la revendication 5 également dépendante, porte sur le diamètre maximum du conducteur intérieur( d2) qui doit être inférieur ou égal au diamètre (d6) de la section frontale du côté connexion de la liaison coaxiale à raccorder ;

Sur la validité des revendications opposées

Considérant que l'appelante, au soutien de sa demande d'annulation des revendications précitées, oppose leur insuffisance de description, leur défaut de nouveauté et, subsidiairement, de leur activité inventive ;

A ) sur l'insuffisance de description

Considérant que la société Delta-Ohm expose que rien dans le brevet ne permet à l'homme du métier de savoir comment déterminer précisément ce que doit être la distance 2 ; que le brevet n'est pas plus explicite lorsque le matériau utilisé est précisé comme étant du PTFE, aucune indication n'étant fournie sur le calcul de cette valeur ; que ce faisant, le brevet n'indique qu'un résultat auquel devrait aboutir l'homme du métier - à savoir la compensation électrique du saut de diamètre - mais n'indique pas comment y parvenir ;

Considérant toutefois, que l'homme du métier peut être défini en l'espèce, comme étant un technicien spécialisé dans la réalisation et le montage des câbles coaxiaux et disposant de connaissances précises tant en électricité que sur les exigences fixées par les normes applicables ; qu'il était tout à fait en mesure de procéder aux calculs d'impédance et devait nécessairement savoir que les dimensions des différents éléments d'un connecteur coaxial et l'isolant choisi interférent dans la détermination de l'impédance, ce que d'ailleurs illustre l'ouvrage en langue allemande produit par l'intimée, intitulé "Taschenbuch der Hochfrequenztechnik"pages K 4 et L11 ;

Que s'agissant du calcul de la valeur 2 que l'appelante considère, non sans raison, qu'aucun des documents produits ne révèlent expressément, il convient d'indiquer tout d'abord que la description du brevet donne cependant un exemple partiel de cette valeur en indiquant qu'elle "est à peu près égale à 0,5 mm" ; que certes aucune précision n'est apportée sur le diélectrique en cause ;

Que par ailleurs, l'intimée expose, sans être précisément démentie, que les caractéristiques électriques recherchées renvoient au taux d'ondes stationnaires, également appelé rapport des tensions des ondes stationnaires, désigné et connu par les techniciens sous le sigle "VSWR" ; Que l'objectif recherché est de faire tendre ce rapport à la valeur "1", plus on se rapproche de cette valeur et plus l'impédance caractéristique est correcte ;

Que ces éléments qui étaient dans le champ des connaissances de l'homme du métier devaient le conduire à calculer la valeur 2, l'appelante ne soutenant d'ailleurs pas que ce calcul soit infaisable ;

B) Sur le défaut de nouveauté

Considérant que la société Delta-Ohm affirme qu'en 1987, soit avant la date de priorité du brevet en cause, elle commercialisait un connecteur de type 3,5 /12 dont elle produit un plan d'exécution sous les références 08 400 009, qui contenait l'ensemble des moyens objets de la revendication no 3 et notamment une discontinuité dimensionnelle compensée par une bague diélectrique destinée à maintenir l'impédance ;

Considérant en premier lieu qu'aucun élément ne permet de mettre en doute l'exactitude de la date (20 janvier 1987) portée sur le plan d'exécution et corroborée par des factures des connecteurs (du 5 juin 1988) qui portent la référence de ce plan ;

Que le plan du connecteur 3,5 / 12 de l'appelante est donc opposable au brevet de la société Spinner demandé sous priorité allemande du 7 janvier 1993 ;

Considérant cependant que ce plan ne révèle pas la structure de l'invention et notamment le débordement de la surface frontale de l'isolant, au delà du plan de référence, d'une distance précise calculée pour compenser le saut de diamètre de 5à7mm ;

Qu'en effet, si, comme le soutient l'appelante, le plan comporte une bague diélectrique, sous référence 14, rien n'établit que l'effet technique procuré par cette bague soit le maintien de l'impédance caractéristique à une valeur uniforme en dépit de la réduction de diamètre du conducteur central dans la région de la broche 12 ; que l'appelante qui procède par affirmations, ne produit aucun document complémentaire propre à attester que dans ce connecteur aux dimensions d'ailleurs distinctes de celles du connecteur visé par le brevet Spinner, elle a entendu créer un débordement du diélectrique au delà du plan de référence pour compenser exactement sur le plan électrique, le saut de diamètre ;

Que cette antériorité ne peut donc ruiner la nouveauté du brevet Spinner ;

C) Sur le défaut d'activité inventive

Considérant que l'appelante avance qu'il était en tous cas évident pour l'homme du métier de transposer à un connecteur 7/16 des caractéristiques structurelles du connecteur précité 08400 009 à l'aide des fascicules des normes internationales CEI 169-4 et CEI 169-14 qui lui donnaient toute indication utile pour réaliser cette transposition ;

Mais considérant que comme l'ont relevé les premiers juges, l'appréciation de l'activité inventive ne porte pas sur la transposition du connecteur de l'appelante aux dimensions de celui couvert par le brevet Spinner, mais porte principalement sur la question de savoir si l'homme du métier pouvait, au vu des enseignements du plan d'exécution précité, parvenir à la combinaison des moyens objet de la revendication No3 ;

Qu'à cet égard et comme indiqué plus haut, ce plan d'exécution ne renseigne pas l'homme du métier sur la structure de l'invention et notamment sur le recours à un diélectrique dont la surface frontale déborde du plan de référence pour compenser exactement le saut de diamètre sus décrit ;

Que l'homme du métier ne pouvait donc à partir de ce schéma parvenir aux moyens de l'invention ;

Que les premiers juges ont à bon droit rejeté la demande d'annulation de la revendication no3 et avec elle, celle des revendications no4 et 5 qui sont placées dans la dépendance directe ou indirecte de la revendication no1;

Sur la contrefaçon

Considérant que la société Delta - Ohm invoque en premier lieu, au visa de l'article L613-7 du CPI, l'exception de possession personnelle de l'invention, tirée du plan d'exécution précité ; que ce moyen sera rejeté dès lors qu'il a été dit que ce document n' enseignait pas

la combinaison des moyens caractérisant l'invention ;

Considérant en second lieu qu'elle soutient que le connecteur incriminé tel que décrit par les plans 08 100 047 et D 325 305 annexés au procès verbal de saisie - contrefaçon adopte une toute autre configuration ; que notamment le diélectrique que l'huissier a désigné comme étant une pastille de téflon, présente côté connexion, non pas une mais trois surfaces frontales annulaire ( externe, centrale et interne ), dont deux sont situées au delà du plan de référence ; qu'il n'existe dans le connecteur incriminé 08 100 047 aucune distance qui puisse être assimilée à la distance 2 ;

Considérant que la société Spinner lui oppose qu'il est constant que non seulement l'espace entre le conducteur extérieur et le conducteur intérieur est totalement rempli d'un diélectrique dont la surface frontale, côté connexion, déborde au-delà du plan de référence, mais encore que le connecteur saisi présente un corps principal dans lequel est inséré une pastille blanche sur laquelle on remarque une gorge périphérique dont la profondeur est de 2,65 mm ; que le téton constitutif du conducteur central présente un diamètre de 5mm ; qu'elle en déduit que la gorge périphérique correspond à la distance 2 et qu'elle est destinée à compenser exactement le saut de diamètre présent après l'accouplement avec le connecteur femelle normalisé ;

Mais considérant que ce faisant, la société Spinner procède par affirmation et non par démonstration, fût-elle déductive ;

Qu'en effet, la surface frontale du diélectrique, qui serait du téflon, déborde du plan de référence, étant observé que la partie externe qui forme une gorge est en deçà de ce plan ; que la partie caractérisante de la revendication énonce que la distance de débordement par rapport au plan de référence doit être choisie de manière à compenser exactement le saut de diamètre..»; que la société Spinner qui fait l'analyse de la distance de la gorge par rapport au plan de référence, ne fournit cependant aucun calcul et ne démontre donc pas, que cette distance correspond, au regard de la configuration particulière du connecteur et de la matière du diélectrique choisie, à la compensation exacte du saut de diamètre présent après l'accouplement avec un connecteur femelle 7 / 16 normalisé ;

Qu'en l'absence de preuve de la reproduction de ce moyen essentiel de l'invention, l'action en contrefaçon de la revendication no3 comme celle des autres revendications placées dans sa dépendance doit être rejetée ;

Que le rejet de cette demande principale conduit au rejet des prétentions nouvelles de la société Spinner fondées sur l'allégation de la poursuite, en cours de procédure, des actes de contrefaçon ;

Sur l'article 700 du CPC

Considérant que l'équité commande d'infirmer la décision des premiers juges au titre des frais irrépétibles et de condamner la société Spinner à verser la société Delta- Ohm la somme de 15000 euros pour l'ensemble des frais de procédure exposés en première instance comme en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande d'annulation du procès verbal de saisie - contrefaçon en date du 4 février 2004 et celle des revendications no 3, 4 et 5 du brevet français no FR 94 00055,

L'infirmant en toutes ses autres dispositions et statuant à nouveau,

Dit que la preuve n'est pas rapportée que le connecteur commercialisé par la société Delta-Ohm reproduit les revendications précitées,

En conséquence rejette l'ensemble des demandes formées par la société Spinner gmbh Elektrotechnische Fabrik et la condamne à verser à la société Delta-Ohm la somme de 15000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC et à supporter les entiers dépens qui seront recouvrés dans les formes de l'article 699 du même code par la SCP Gérigny - Fréneaux, avoué .

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0164
Numéro d'arrêt : 06/14920
Date de la décision : 11/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 14 juin 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-04-11;06.14920 ?
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