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04/04/2008 | FRANCE | N°07/02342

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0164, 04 avril 2008, 07/02342


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre-Section B

ARRÊT DU 4 AVRIL 2008

(no, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 02342

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Décembre 2006- Tribunal de Commerce de PARIS-RG no 2006008709

APPELANTS

BUMP PRODUCTION
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
entreprise individuelle dont le siège est
Halfdansgade 28
...
2300 COPENHAGUE


DANEMARK

représentée par la SCP Anne-Marie OUDINOTet Pascale FLAURAUD, avoués à la Cour
assisté de Maître LEDRU Olivier avocat a...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre-Section B

ARRÊT DU 4 AVRIL 2008

(no, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 02342

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Décembre 2006- Tribunal de Commerce de PARIS-RG no 2006008709

APPELANTS

BUMP PRODUCTION
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
entreprise individuelle dont le siège est
Halfdansgade 28
...
2300 COPENHAGUE
DANEMARK

représentée par la SCP Anne-Marie OUDINOTet Pascale FLAURAUD, avoués à la Cour
assisté de Maître LEDRU Olivier avocat au Barreau de Paris, toque G663
(Cabinet MOYERSOEN toque B609)

Monsieur Derek AA...
demeurant ...
...
2300 COPENHAGUE
DANEMARK

représenté par la SCP Anne-Marie OUDINOTet Pascale FLAURAUD, avoués à la Cour
assisté de Maître LEDRU Olivier avocat au Barreau de Paris, toque G663
(Cabinet MOYERSOEN toque B609)

INTIMEES

La SAS SO NICE PRODUCTION
prise en la personne de son Président,
ayant son siège 10, Rue de Torricelli
75017 PARIS

représentée par la SCP BAUFUME-GALLAND-VIGNES, avoués à la Cour
assistée de Maître Brigitte DA COSTA avocat au Barreau de Paris,
(KETCHEDJIAN / BAYLE avocats, toque P398)

La SA TELEVISION FRANCAISE 1- TF1
prise en la personne de son président du conseil d'administration,
ayant son siège 1, quai du Point du Jour
92100 BOULOGNE BILLANCOURT

représentée par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour
assistée de Maître Benoît PILLOT avocat au Barreau de Paris,
(Cabinet Louis BOUSQUET) toque B481

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Février 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Alain GIRARDET, Président
Madame Geneviève REGNIEZ, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre MARCUS, Conseiller
qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Marie-Claude GOUGE

ARRET :

- contradictoire

-rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Alain GIRARDET, président et par L MALTERRE-PAYART, greffière.

***.

Monsieur Derek AA...expose qu'il a conçu plusieurs documents dont l'objet est de décrire le contenu et le déroulement d'émissions de télé-réalité destinées à être cédées à des producteurs de télévision, qu'afin de gérer au mieux les aspects matériels liés à ses activités, il a créé la société de droit danois, BUMP PRODUCTION, à laquelle il a cédé le 1er novembre 2002 les droits relatifs au format d'émission intitulé STATE OF THE UNION qu'il a lui-même défini comme consistant en " un programme de télévision représentant les quinze Etats de l'Union européenne dont les candidats seront choisis dans chaque Etat et occuperont une chambre correspondant à leur nationalité ".

Il indique qu'à compter du 3 septembre 2001, il a adressé le scénario d'émission STATE OF THE UNION à plusieurs diffuseurs ou producteurs européens, dont la société TF1, en la personne de Monsieur Franck E..., par e-mail daté du 10 février 2003. La société TF1 n'a cependant pas donné suite au projet ainsi proposé.
Il déclare qu'en avril 2003, il a découvert que la société TF1 diffusait une émission intitulée NICE PEOPLE, produite par la société SO NICE PRODUCTION. Estimant qu'il s'agissait là d'une mise en œ uvre servile du scénario THE STATE OF UNION, il a, avec la société BUMP PRODUCTION et Monsieur Derek AA..., par acte en date du 13 octobre 2003, fait assigner les sociétés TF1 et SO NICE PRODUCTION devant le Tribunal de commerce de Lille. Par jugement en date du 21 septembre 2005, celui-ci a fait droit à l'exception d'incompétence soulevée par les sociétés TF1 et SO NICE PRODUCTION au profit du Tribunal de commerce de Paris.

Ce dernier, aux termes du jugement contradictoire rendu le 8 décembre 2006, aujourd'hui entrepris, a :

- dit que la diffusion de l'émission de télévision NICE PEOPLE ne constitue pas un acte de contrefaçon du projet intitulé STATE OF UNION revendiqué par la société BUMP PRODUCTION de Monsieur Derek AA...,

- condamné in solidum la société BUMP PRODUCTION et Monsieur Derek AA...à payer à la société TELEVISION FRANÇAISE 1 (TFl) et à la société SO NICE PRODUCTION une indemnité de 10 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples, autres, ou contraires aux présentes dispositions,

- condamné in solidum la société BUMP PRODUCTION et Monsieur Derek AA...aux dépens.

*

Par leurs dernières conclusions signifiées le 21 janvier 2008, la société BUMP PRODUCTION et Monsieur Derek AA..., appelants, invitent la Cour à :

- infirmer le jugement entrepris,

- constater que l'émission NICE PEOPLE est une contrefaçon du format dont Monsieur Derek AA...est l'auteur,

- condamner solidairement les sociétés SO NICE PEOPLE et TF1 à leur payer la somme de 2. 000. 000 d'euros en réparation de leur préjudice financier et 20. 000 euros en réparation de leur préjudice moral, au titre des actes de contrefaçon,

à titre subsidiaire :

- constater que la diffusion de l'émission NICE PEOPLE, mise en œ uvre servile du concept conçu, élaboré et mis en forme par Monsieur Derek AA..., constitue un acte de concurrence déloyale,

- condamner solidairement les sociétés SO NICE PEOPLE et TF1 à leur payer la somme de 2. 000. 000 d'euros en réparation de leur préjudice financier et 20. 000 euros en réparation de leur préjudice moral, au titre des actes de concurrence déloyale.

*

Dans ses dernières conclusions signifiées en date du 14 février 2008, la société SO NICE PRODUCTION, intimée, demande à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la diffusion de l'émission de télévision NICE PEOPLE ne constituait ni un acte de contrefaçon du projet STATE OF UNION, ni un acte de concurrence déloyale ou de parasitisme,

- condamner solidairement la société BUMP PRODUCTION et Monsieur Derek AA...au paiement de 30. 000 euros au profit de la société SO NICE PRODUCTION pour abus de leur droit d'ester en justice.

*

Suivant ses dernières conclusions en date du 6 novembre 2007, la société TF1, intimée, demande à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande reconventionnelle de TF1,

- condamner in solidum Monsieur Derek AA...et la société BUMP PRODUCTION à lui payer la somme de 7 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- déclarer irrecevable comme nouvelle, la demande de Monsieur Derek AA...et de la société BUMP PRODUCTION tendant à la condamnation des sociétés intimées à leur payer une somme de 20. 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu'ils allèguent,

à titre subsidiaire :

- condamner la société SO NICE PRODUCTION à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre au profit de Monsieur Derek AA...et de la société BUMP PRODUCTION.

SUR CE, LA COUR

Sur la contrefaçon

Considérant que les appelants soutiennent que le projet d'émission sur lequel ils disposent de droits et qui a été selon eux contrefait était antérieur à l'émission contrefaisante ; qu'à cet égard, ils reprochent aux premiers juges d'avoir commis une erreur d'appréciation en retenant comme date de première divulgation de leur oeuvre le 10 février 2003, sans rechercher la date de sa création ;

Qu'ils soutiennent qu'elle avait été créée au plus tard le 3 septembre 2001, date de sa communication à la société GDP au Danemark ; que le " format " dont la paternité est revendiquée avait été ensuite communiqué, dans une forme aboutie, à la société NORDISK FILM, dès le 10 décembre 2002, puis à la société MEDIADESK le 9 janvier 2003, à la société britannique CHANEL 4 et aux sociétés METRONOME et TF1 le 10 février 2003, à la société danoise ZDF et à la société RUV TV le 11 février 2003 ;

Que Monsieur AA...estime que même s'il ne peut justifier d'un dépôt ou d'un enregistrement de son oeuvre, il prouve l'avoir créée bien avant la première diffusion de l'émission litigieuse et soutient qu'il établit donc l'antériorité de son oeuvre ;

Considérant toutefois qu'il ne justifie pas du contenu de ce qu'il a pu transmettre à la société GDP ;

Considérant qu'en ce qui concerne la société NORDISK FILM, il verse aux débats une déclaration dactylographiée, rédigée en langue anglaise, présentée comme émanant de Lars G..., directeur général de cette société et auquel sont joints trois documents ayant respectivement pour titre " confidentiality register ", " letter of agreement " et " Celebrity birthday " ; que la traduction en français de ces pièces a été communiquée ;

Que la " déclaration " précitée ne constitue pas une attestation régulière en la forme au sens de l'article 202 du Code de procédure civile, faute d'avoir été écrite de la main de son auteur et d'être accompagnée d'un document officiel justifiant de l'identité de celui-ci ;

Que si cette situation ne fait en soi pas obstacle à ce que l'écrit en question, dont la valeur probante est contestée par les sociétés SO NICE PRODUCTION et TF1, puisse néanmoins être utilisé dans le cadre de cette instance, il apparaît qu'il ne renferme pas de description du contenu du projet, le déclarant ayant seulement indiqué avoir reçu le 10 décembre 2002 la proposition de programme intitulée " L'état de l'Union " envoyée par Derek AA.../ BUMP PRODUCTIONS, " les traits distinctifs de cette proposition de programme ayant été : les faits ou les mythes, le synopsis, le groupe cible, l'éditorial, le casting, les tâches, le test en forme de jeu de questions-réponses et la visite surprise " ; qu'il a ajouté " qu'il avait signé antérieurement un contrat de confidentialité, servant par la même de preuve de sa réception des documents à la date susmentionnée " ;

Que cependant le document ayant pour titre " confidentiality register " auquel il est renvoyé est postérieur comme étant daté du 16 novembre 2004 et que celui ayant pour titre " letter of agreement " n'est pas daté et qu'il y est fait référence à des actions prévues au cours de l'année 2006 ; que le projet " Celebrity birthday " ne comporte quant à lui ni date, ni signature ;

Qu'en définitive il ne peut être tiré de cet ensemble de documents aucune certitude relative à la date de transmission du projet invoqué et qu'il n'en résulte en tout cas pas qu'il ait été créé antérieurement au 10 décembre 2002, comme cela est prétendu ;

Considérant que les appelants, même s'ils font mention de cette société dans leurs dernières conclusions, n'apparaissent plus se prévaloir de la pièce communiquées en première instance et tendant à établir la transmission de leur projet à MEDIADESK le 9 janvier 2003 qu'en tout état de cause la pièce supposée émaner de MEDIADESK ne comporte pas de mentions suffisantes pour que, en l'absence de documents complémentaires, son origine puisse être contrôlée ;

Considérant que les appelants invoquent l'envoi de leur " format ", le 10 février 2003, à la société TFI, en la personne de Monsieur Franck E..., alors responsable des programmes de flux et du secteur " jeux et divertissements ", lequel, le 26 février suivant, par l'intermédiaire de sa collaboratrice, en a accusé réception ;

Que ce " format " concerne un jeu dans le cadre duquel des Européens, enfermés dans une villa participent à diverses épreuves (danse, musique et chant, préparations culinaires) ce qui donne lieu à un vote de la part des télespectateurs ;

Qu'il apparaît que les appelants justifient du dépôt auprès de la SACD, les 16 janvier et 24 janvier 2003 d'un projet d'émission ayant pour titre l'Auberge espagnole, dans lequel des ressortissants de divers pays d'Europe sont enfermés dans un local comportant plusieurs pièces (salon, salle à manger, salle d'études, médiathèque, cuisine, chambres) et soumis à des épreuves ou situations variées, ayant en particulier pour thèmes la danse (piste de danse, sirtaki), la musique et le chant (disco, accordéon, flon-flon, musette etc...), la cuisine (fromages, vins, préparations caractéristiques des différents pays), avec vote des télespectateurs ;

Qu'à la date du 10 février 2003 dont ils font état, des projets présentant des caractéristiques pour l'essentiel identiques à celles qu'ils revendiquent avaient donc déjà été déposés ;

Que les autres divulgations qu'ils prétendent avoir opérées les 10 et 11 février 2003 se révèlent partant inopérantes ;

Considérant qu'ils n'établissent en conséquence pas l'antériorité de leurs droits et que leurs demandes au titre de la contrefaçon ne sauraient être admises ;

Que le jugement attaqué doit être sur ce point confirmé ;

Sur la concurrence déloyale

Considérant que la société TF1 invoque l'irrecevabilité de la demande des appelants au titre de la concurrence déloyale qui est selon elle nouvelle, au sens des dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile, comme n'ayant pas été soumise aux premiers juges ;

Que cette prétention, quoique reposant sur un fondement juridique différent, tend néanmoins aux mêmes fins et est donc recevable ;

Considérant toutefois qu'à son soutien il est seulement invoqué la transmission du projet à la société TF1 et la reprise quasi servile de celui-ci, alors que compte tenu en particulier des dépôts opérés les 16 et 24 janvier 2003, aucune faute ne se trouve établie, étant également observé que les faits allégués au titre de la concurrence déloyale ne sont pas distincts de ceux invoqués relativement à la contrefaçon ;

Que la demande doit dans ces conditions être rejetée ;

Sur les autres demandes

Considérant que'il n'est pas démontré que Monsieur Derek AA...et la société BUMP PRODUCTION aient fait dégénérer en abus la faculté dont ils disposent d'ester en justice ; que les prétentions soumises à ce titre doivent être rejetées et que le jugement attaqué doit être confirmé en ce qu'il a refusé de faire droit aux demandes reconventionnelles tendant à l'allocation de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Considérant que la société SO NICE PRODUCTION n'est pas recevable à réclamer le paiement d'une amende civile, étant ajouté qu'une telle sanction ne s'impose pas en l'espèce ;

Considérant que le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne le sort des dépens et l'application, qui y a été équitablement faite, des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, sur le fondement desquelles, les appelantes qui succombent étant condamnées aux dépens d'appel, il convient de mettre à leur charge la somme de 5. 000 euros au profit de chacune des intimées ;

Par ces motifs,

La cour :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Rejetant toute autre prétention, condamne in solidum Monsieur Derek AA...et la société BUMP PRODUCTION aux dépens d'appel, dont le recouvrement pourra être poursuivi par la SCP BAUFUME GALLAND VIGNES et Maître OLIVIER, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, ainsi qu'à payer, en application de l'article 700 du même code, la somme de 5. 000 euros à la société TF1 et celle de 5. 000 euros à la société SO NICE PRODUCTION.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0164
Numéro d'arrêt : 07/02342
Date de la décision : 04/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 08 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-04-04;07.02342 ?
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