La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/02/2008 | FRANCE | N°06/00352

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0135, 21 février 2008, 06/00352


21ème Chambre C
Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/00352

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Septembre 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS section activités diverses RG no 04/12845
APPELANTE

1o - FONDATION FRANCE LIBERTES22, rue de Milan75009 PARISreprésentée par Me Claude KATZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1423,

INTIMEE
2o - Mademoiselle Paola X... Y... Z......75012 PARIScomparant en personne, assistée de Me Véronica DE SOETE, avocat au barreau de PARIS, toque : R.193,

COMPOSITION DE LA COUR :>L'affaire a été débattue le 17 Janvier 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :Mm...

21ème Chambre C
Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/00352

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Septembre 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS section activités diverses RG no 04/12845
APPELANTE

1o - FONDATION FRANCE LIBERTES22, rue de Milan75009 PARISreprésentée par Me Claude KATZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1423,

INTIMEE
2o - Mademoiselle Paola X... Y... Z......75012 PARIScomparant en personne, assistée de Me Véronica DE SOETE, avocat au barreau de PARIS, toque : R.193,

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 Janvier 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :Mme Marie-Pierre DE LIEGE, PrésidenteMme Irène LEBE, Conseillère Mme Hélène IMERGLIK, Conseillèrequi en ont délibéré

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats,
ARRET :
- CONTRADICTOIRE- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile. - signé par Mme Marie-Pierre DE LIEGE, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LES FAITS :Mlle Paola X... Y... Z... a été engagée le 6 janvier 2003 par contrat écrit à durée indéterminée en qualité de chargée de projet sur l'Amérique latine par la Fondation France Libertés.Par LRAR du 30 juillet 2004 elle a été convoquée à un entretien préalable fixé au 1er septembre 2004, puis était licenciée par lettre recommandée avec avis de réception en date du 7 septembre 2004, quatre griefs différents étant visés.Mlle Paola X... Y... Z... saisissait alors le conseil de prud'hommes de Paris le 4 octobre 2004.Celui-ci par jugement du 9septembre 2005, section activités diverses chambre 5, disait que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamnait la Fondation France Libertés à payer à Mlle Paola X... Y... Z... la somme de 17.600 euros pour rupture abusive, ainsi que 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ordonnant l'exécution provisoire au titre de l'article 515 du code de procédure civile.La Fondation France Libertés a régulièrement fait appel de cette décision. Elle soutient que Mlle Paola X... Y... Z..., dans un contexte de réorganisation de la Fondation, engagé en août 2003 et qui avait amené, après un audit, à renouveler une partie de son personnel dont sa directrice, avait adopté, à plusieurs reprises, une attitude fautive justifiant son licenciement. Elle demande donc à la cour d'infirmer le jugement entrepris pour dire le licenciement fondé sur des causes réelles et sérieuses et d'ordonner le remboursement par la salariée des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire soit un montant de 18.563,73 euros.La Fondation comptait 11 salariés en juin 2004. Le salaire brut moyen mensuel de Mlle Paola X... Y... Z... est de 1.760 euros.

LES MOTIFS DE LA COUR :Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.Il ressort du dossier des débats, qu'au mois d'août 2003, la présidente de l'association, Mme Danielle C..., constatant une défaillance dans le fonctionnement de la Fondation France Libertés a décidé de confier un audit à l'association Star, dirigée par Mme Cristina D.... Cet audit a révélé deux problèmes majeurs : - une mauvaise communication interne et une incompréhension des objectifs de la fondation générant un manque de concertation, une divergence de point de vue au sein de l'équipe, dans la conduite des missions, des malentendus, des conflits et des tensions responsables d'un malaise général ; - la surcharge de travail de la plupart du personnel, pénalisant le suivi des projets leur mise en réseau la production de rapports.À la suite de ce rapport un certain nombre de réorganisations ont été décidées, entraînant en mars 2004, l'embauche de la responsable de l'audit elle-même, Mme Cristina D..., puis entraînant plusieurs changements de responsables, notamment par appel à candidatures internes. Cependant, ces réorganisations se sont heurtées à une certaine opposition d'une partie des salariés, parmi lesquels, selon l'employeur, Mlle Paola X... Y... Z.... C'est donc dans ce contexte qu'est intervenu le licenciement de cette dernière, suivie de peu par le licenciement de la directrice Mme E....

Sur la rupture du contrat de travail de Mlle Paola X... Y... Z... :La lettre de licenciement adressée à Mlle Paola X... Y... Z... est rédigée comme suit : "...Nous avons décidé de vous licencier à compter de la réception de ce courrier. Les motifs qui nous ont conduit à ces décisions sont :- initiative personnelle sans consultation de la hiérarchie, de se rendre au Venezuela (juillet 2004) pour surveiller les élections contrairement aux règles les plus fondamentales en matière d'observations électorales constituant une faute réelle et sérieuse incontestable.- insultes proférées au standardiste bénévole de la fondation le 5 juillet 2004.- non disponibilité pour travailler avec la nouvelle équipe.- attitude insolente et agressive répétée vis-à-vis de la direction.Certaines de ces fautes constituent des fautes graves. Toutefois et sans que cela puisse être interprété comme équivalent à une renonciation à ces qualifications, nous acceptons de procéder au règlement de votre indemnité de préavis que nous vous dispensons d'effectuer».Par les termes mêmes de cette lettre l'employeur invoquant «ces fautes» s'est placé sur le terrain disciplinaire, ce qui implique dès lors qu'il respecte les règles spécifiques aux licenciements disciplinaires.Pour qu'un licenciement soit fondé il doit reposer sur un ou plusieurs griefs, imputables au salarié, qui doivent être objectifs, c'est-à-dire matériellement vérifiables, établis, et exacts c'est-à-dire constituant effectivement la cause réelle de ce licenciement.La cause doit également être sérieuse, en ce sens que les faits invoqués doivent être suffisamment pertinents pour fonder le licenciement. Le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il estime utile.- S'agissant du premier grief, il est constant que les faits reprochés à la salariée n'ont pas eu lieu, comme la lettre l'indique par erreur en juillet 2004, mais dans la deuxième quinzaine du mois de mai 2004. Ayant été découverts le 25 mai 2004, ils ont donné lieu le jour même à un courrier signé de la présidente, Danielle C..., elle-même, interdisant à la chargée de mission de se rendre au Venezuela.

Dès lors, le délai de deux mois, prévues par l'article L.122-44 du code du travail, étant expiré lors de l'envoi, le 30 juillet 2004 de la lettre recommandée de convocation à l'entretien préalable, cette faute ne pouvait plus, à elle seule, motiver un licenciement.Pour autant, le reproche professionnel qui pouvait être fait à l'intéressée au sujet de cet incident est important dans la mesure où il révèle, une initiative personnelle de la salariée, fût-elle cautionnée par la directrice de la fondation, avec qui elle entretenait, ce qui n'est pas utilement contesté des relations amicales certaines, mais en l'absence de tout accord établi de la Présidente. Or, s'agissant d'une importante fondation, intervenant dans le domaine des droits de l'Homme, et ayant une image de marque à défendre, il est inadmissible qu'une chargée de mission, ne justifiant au surplus que d'une ancienneté de moins de 18 mois, dans un domaine aussi sensible que la participation au processus référendaire engagé au Venezuela, sous la conduite du président de la république de ce pays, puisse, de son propre chef, engager cette fondation, sans prendre les précautions qui bien évidemment s'imposaient ; la décision d'une implication de la fondation dans une telle opération relevant nécessairement de l'appréciation politique et stratégique de la Présidente et du comité de pilotage, n'ayant pourtant été découverte par la présidence que la veille du départ soit le 25 mai, et alors que tout était organisé ; ce départ, dont pourtant il n'a été trouvé aucune trace dans les documents internes à la fondation, donnant cependant lieu à une "attestation d'ordre de mission", sujette à caution, comme n'étant pas produite en original, datée également du 25 mars et signée par la directrice Anne E..., elle-même licenciée pour faute en septembre 2004. En outre, le 26 mai 2004 Mlle Paola X... Y... Z... a adressé à l'ambassade du Venezuela un mail pour annuler sa participation, dans des termes inadmissibles de la part d'une chargée de mission, se permettant notamment de dire, parlant de la présidente de la fondation, qu'elle accuse sans en rapporter la preuve d'avoir changé d'avis au sujet de cette mission : "Mme C... ne souhaite pas que France libertés participe aux changements qui se produisent au Venezuela", termes qui éclairent parfaitement l'état d'esprit développé par cette salariée à l'encontre de la fondation et de ses responsables.Ces seuls faits, pour graves qu'ils soient, dans une organisation comme la Fondation France Libertés, datant de plus de deux mois lors de l'envoi de la lettre à convocation pour entretien préalable n'auraient pu à eux seuls asseoir un licenciement.Il convient donc d'examiner les autres griefs formulés par la lettre de licenciement :- s'agissant de l'altercation et des insultes qui auraient été proférées à l'encontre du standardiste bénévole de la fondation en juillet 2004, M. F..., standardiste bénévole explique dans une attestation que cette altercation a eu lieu après que Mlle Paola X... Y... Z... ait refusé de prendre une communication qui lui était destinée sous prétexte qu'elle «n'était pas là pour se prendre la tête avec le premier venu». Le témoin indiquant qu'il avait rencontré à plusieurs reprises des difficultés lors des transmissions d'appels à Mlle Paola X... Y... Z..., qui n'en avait pourtant qu'un nombre très limité chaque jour, indique qu'après avoir fait le nécessaire avec la personne qui appelait, il a rappelé Mlle Paola X... Y... Z... pour lui indiquer qu'il n'admettait pas le ton incorrect qu'elle utilisait à son égard précisant "le ton a alors monté et elle m'a dit "vous êtes complètement fous"je lui ai répondu que je ne travaillerai pas avec elle dans ces conditions et que compte tenu de son comportement, je ne l'aurais pas engagé comme collaboratrice lorsque j'étais en activité».Cet incident n'est pas contesté, et le fait que quelques jours plus tard la directrice Anne E... après les avoir rencontré ait déclaré l'incident clos, n'empêche en rien qu'il est révélateur, à nouveau, de l'attitude négative, voire arrogante, de la salariée au sein de la fondation.- le troisième grief évoqué est relatif à la non disponibilité pour travailler avec la nouvelle équipe et fait référence selon l'employeur, d'une part à la réticence de la salariée de coopérer avec Mme C. G..., à la suite de son embauche en mars 2004 comme directrice du développement, mais aussi avec la nouvelle responsable de la communication, et à l'activité fort réduite déployée par l'intéressée dans les derniers mois de sa coopération. Celle-ci est établie, selon l'employeur, par très faible nombre de projets et idées soumis par l'intéressée lors des réunions d'équipe, son activité insuffisante étant confirmée également, par la découverte après le licenciement de Mlle Paola X... Y... Z..., des plaintes adressées par plusieurs partenaires qui pendant des mois étaient restés sans nouvelles concernant le conventionnement de leur projet alors que celui-ci avait été pour certains voté en avril 2003 (projet Pérou, projet Colombie, deux projets Argentine). La cour relève en outre à ce sujet que les copies de l'agenda personnel de la salariée qu'elle verse elle-même au dossier ne rendent pas compte d'une activité fort soutenue, alors qu'un tel travail de chargée de mission implique en principe de multiplier les contacts. Ce reproche, est étayé par les attestations de Mme H... et de Mme I..., dont la valeur probante est nécessairement réduite dans la mesure où elles participaient elles-mêmes au fonctionnement de la fondation, mais la cour relève que ces attestations sont en revanche confirmées par la production de mails émanant de partenaires se plaignant de l'absence de suivi de leur dossier, et des documents administratifs démontrant l'absence de mise en exécution des décisions des projets Amérique latine votés par le bureau financier en mai 2003.Les carences professionnelles, l'absence de concrétisation des projets, présentées dans la lettre de licenciement comme une «indisponibilité à travailler», ce qui ne dénature pas le grief, sont patentes, quand bien même la salariée fait état en réponse, fort heureusement, d'un certain nombre de contacts, malgré tout existant et relatifs à l'Amérique latine.- enfin, s'agissant du quatrième grief, l'"attitude insolente agressive répétée vis-à-vis de la direction", cette attitude, qui vise aussi bien les relations avec Mme Danielle C... que celles avec Mme G..., n'étant attestées que par des personnes appartenant à la fondation, ne peut être considérée comme suffisamment établie.Quant à la nécessaire réorganisation interne dont la salariée suggère qu'elle a été la véritable cause de son licenciement, cette réorganisation dont la nécessité est admise par l'employeur, et qui relève de ses pouvoirs de direction, ne s'est pas faite au détriment des salariés existants puisqu'au contraire, elle a donné lieu, à un "appel à candidatures" publié en interne le 18 août 2004.En revanche, il ressort nettement des éléments produits à la cause, que l'attitude de Mlle Paola X... Y... Z... s'explique par sa réticence face à une telle réorganisation. La cour considère en conséquence, tout en écartant le quatrième grief, que l'ensemble des autres reproches évoqués ci-dessus, est suffisant pour constituer la cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement de Mlle Paola X... Y... Z....

En conséquence elle infirme la décision du conseil des prud'hommes.
PAR CES MOTIFS, En conséquence, la Cour,Infirme la décision du Conseil de prud'hommes Et statuant à nouveau :Dit que le licenciement de Mlle Paola X... Y... Z... est fondé sur une cause réelle et sérieuse,Ordonne le remboursement par Mlle Paola X... Y... Z... des sommes perçues dans le cadre de l'exécution provisoire en application de la décision du conseil de prud'hommes, pour un montant de 18.563,73 euros (DIX HUIT MILLE CINQ CENT SOIXANTE TROIS EUROS et SOIXANTE TREIZE CENTIMES),Déboute les parties de leurs autres demandes Condamne Mlle Paola X... Y... Z... à régler les dépens.LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0135
Numéro d'arrêt : 06/00352
Date de la décision : 21/02/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 09 septembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-02-21;06.00352 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award