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11/02/2008 | FRANCE | N°05/23827

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0242, 11 février 2008, 05/23827


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

17ème Chambre-Section A

ARRET DU 11 FEVRIER 2008

(no 32, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 05 / 23827

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Octobre 2005- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 04 / 17714

APPELANTS

Monsieur Mistafa X...
...
95800 CERGY SAINT CHRISTOPHE

représenté par la SCP GAULTIER-KISTNER, avoués à la Cour
assisté de Me Rémy Y... (Cabinet LE

BONNOIS), avocat au barreau de PARIS, toque : L 299

Madame Marie Z... A... Agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de r...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

17ème Chambre-Section A

ARRET DU 11 FEVRIER 2008

(no 32, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 05 / 23827

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Octobre 2005- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 04 / 17714

APPELANTS

Monsieur Mistafa X...
...
95800 CERGY SAINT CHRISTOPHE

représenté par la SCP GAULTIER-KISTNER, avoués à la Cour
assisté de Me Rémy Y... (Cabinet LE BONNOIS), avocat au barreau de PARIS, toque : L 299

Madame Marie Z... A... Agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentants légale de ses filles mineurs Yasmine X... née le 26. 01. 2000 et Inès X... née le 08. 03. 2003

...
95800 CERGY SAINT CHRISTOPHE

représentée par la SCP GAULTIER-KISTNER, avoués à la Cour
assistée de Me Rémy Y... (Cabinet LE BONNOIS), avocat au barreau de PARIS, toque : L 299

INTIMEES

S. A. AXA FRANCE IARD Venant aux droits d'AXA COURTAGE Agissant en la personne de ses représentants légaux
26 Rue Drouot
75009 PARIS

représentée par la SCP ARNAUDY-BAECHLIN, avoués à la Cour
assistée de Me Jérôme B..., (Cabinet B...), avocat au barreau de PARIS, toque : E 1216

CPAM DU VAL D'OISE Agissant en la personne de ses représentants légaux
2 Rue des Chauffours
95000 CERGY
non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Décembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Nathalie NEHER SCHRAUB, Présidente
Madame Régine BERTRAND-ROYER, Conseillère
Madame Dominique GUEGUEN, Conseillère
qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mlle Isabelle BACOU

ARRÊT :

- réputé contradictoire
-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Nathalie NEHER SCHRAUB, président et par Mlle Myriam BADAOUI, greffière présente lors du prononcé.

**********

Vu l'accident de la circulation dont Mistafa X... a été victime le 16 juillet 1994 dans lequel était impliqué un véhicule assuré auprès de la société AXA FRANCE IARD qui n'a pas contesté son droit à indemnisation ;

Vu la transaction conclue le 6 février 1996 entre les parties qui a liquidé le préjudice initial de la victime sur la base de l'examen médical effectué par le Docteur D... lequel avait retenu une ITT de 18 % ;

Vu le jugement du 19 novembre 1996 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PONTOISE, qui à la suite d'une aggravation de son état de santé invoquée par Mistafa X... a ordonné une expertise médicale confiée aux Docteurs G..., chirurgien orthopédiste, et E..., psychiatre ;

Vu le rapport de ces derniers daté du 20 janvier 1998 aux termes duquel ils concluaient essentiellement à un déficit fonctionnel de 27 %, soit une aggravation de 9 % et précisaient que le sujet n'est plus apte à reprendre son ancienne profession de rayonniste avec une gestion informatique en pharmacie mais pouvait bénéficier d'une reconversion et subissait un préjudice d'agrément pour la lecture et la vie en famille ;

Vu la nouvelle transaction conclue entre les parties le 6 août 1998, indemnisant l'aggravation du préjudice sur la base du rapport du 20 janvier 1998 pour une somme totale de 445   000 F comprenant l'ITT, l'IPP, le préjudice professionnel et le préjudice esthétique ;

Vu la seconde aggravation alléguée par Mistafa X... à la suite de laquelle le juge des référés a, par ordonnance du 13 janvier 2004, désigné à nouveau les Docteurs G... et E... lesquels ont déposé leur rapport le 4 octobre 2004 ;

Vu le jugement rendu le 3 octobre 2005 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS qui a condamné la société AXA FRANCE IARD à verser à Mistafa X... la somme de 277   663 € en réparation de la nouvelle aggravation de son préjudice et celle de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC, à Marie Z... A... en réparation de leurs préjudices moraux la somme de 5   000 € à titre personnel et celle de 3000 € pour chacune de ses filles Yasmine X... et Inès X... ainsi que les dépens ;

Vu l'appel du jugement interjeté par Mistafa X... et Marie Z... A... agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses filles mineures Yasmine X... et Inès X... ;

Vu les dernières conclusions signifiées par Mistafa X... et Marie Z... A... agissant tant personnellement qu'ès qualités, signifiées le 16 octobre 2007 par lesquelles ils font valoir que les indemnités allouées sont insuffisantes et demandent, en réparation de leurs préjudices, les montants mentionnés dans le tableau ci-dessous.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société AXA FRANCE IARD le 14 novembre 2007, laquelle estime les indemnités excessives et offre les montants ci-dessous récapitulés :
DEMANDES OFFRES
1) préjudice de Mistafa X... :
- préjudice professionnel (perte de gains prof. futurs) : 586. 105, 00 € débouté
subsid. 121. 939, 35 €
- déficit fonctionnel permanent : 13. 800, 00 € 5. 700, 00 €
- Préjudice d'agrément permanent : 30. 000, 00 € débouté
Article 700 du NCPC (procédure d'appel) : 3. 000, 00 € débouté
2) préjudices moraux des proches :
- Marie Z... A... : 20. 000, 00 € débouté
-Yasmine X... : 15. 000, 00 € débouté
-Inès X... : 15. 000, 00 € débouté

Vu l'assignation délivrée à la CPAM DU VAL-D'OISE, à personne habilitée, laquelle a écrit le 10 janvier 2005 qu'elle n'interviendra pas à l'instance et précisé qu'elle n'avait pas de prestation à faire valoir au titre de l'aggravation ;

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :

Sur le préjudice de Mistafa X... :

Il résulte du rapport d'expertise des docteurs G... et E... du 4 octobre 2004, que depuis leur précédent rapport du 20 janvier 1998 aux termes duquel ils avaient constaté qu'à la suite de l'accident Mistafa X... avait présenté essentiellement un traumatisme crânien sévère, suivi d'un syndrome frontal avec troubles du comportement :
- qu'en ce qui concerne la fonction de l'appareil locomoteur, la victime présente une nette amélioration ;
- qu'en ce qui concerne l'état neuropsychique, il y a eu une aggravation tant sur le plan du syndrome frontal post-commotionnel (aggravation des céphalées et chute de l'efficience intellectuelle et des performances cognitives), que sur celui du syndrome post-émotionnel et de la réaction face au constat de dévalorisation (évolution en aggravation de l'état anxio-dépressif provoqué par l'accident et en particulier de la dépression liée au constat que fait le patient de sa dévalorisation et de son incapacité et irritabilité caractérielle) ; que toutefois, cette aggravation aurait été réduite ou du moins atténuée si la victime avait suivi le traitement médicamenteux prescrit ;
qu'il y a eu, en cinq ans, aggravation des troubles caractériels, détérioration des relations familiales et sociales et répercussion néfaste sur les tentatives de réinsertion professionnelle ;
que l'aggravation imputable fait passer le taux d'IPP global de 27 à 30 % ; qu'il y a une aggravation du préjudice professionnel (que l'on constate qu'il a essayé avec constance de se réinsérer sur le plan professionnel, en se prêtant à l'établissement de bilans de compétences auprès d'organismes spécialisés et en effectuant divers stages ; que néanmoins, toutes ces tentatives ont abouti à des échecs, en raison de sa fatigabilité mentale, de son intolérance au stress et de ses difficultés dans la relation avec autrui) ; que son avenir social est donc plus compromis qu'il ne paraissait fin 1997 ; qu'il y a aggravation du préjudice d'agrément (diminution des capacités de divertissement intellectuel du fait de la détérioration intellectuelle, et rétrécissement du champ de la vie sociale consécutivement à l'aggravation des troubles caractériels) ; que compte-tenu de cette aggravation, la date de consolidation psychique doit être reportée au 20 juillet 2004 ;
que par contre, les comportements pseudo-paranoïaques de revendication, de projection, de menace et les comportements d'agressivité relèvent de la psychologie du patient et ne sont pas imputables à l'accident.

Interrogé par le conseil de la victime lequel s'étonnait de ce que le rapport ne mentionnait qu'une aggravation de 3 % alors que lors de l'expertise le Docteur E... avait conclu à une IPP de 6 %, ce dernier a répondu par lettre du 6 novembre 2004 : « que, lors de la discussion avec mes confrères, à l'issue de l'examen d'expertise, j'avais évoqué un taux d'aggravation de 6 % pour la partie psychiatrique. Je m'en souviens, effectivement. Mais, comme la partie somatique présentait une amélioration de 3 %, la globalisation des deux estimations a abouti à 3 % (ce qui représente 6 %-3 % égale 3 %). Cela peut paraître très peu, mais il y a quand même reconnaissance d'une aggravation, et cela correspond à la réalité. »

Au vu de l'ensemble de ces éléments et des pièces versées aux débats, l'aggravation du préjudice corporel de Mistafa X... postérieure à la transaction du 6 octobre 1998, sera indemnisée comme suit :

Préjudices économiques :

- perte de gains professionnels future et incidence professionnelle :
par leur précédent rapport ayant servi de base à la transaction du 6 octobre 1998, les experts avaient conclu que la victime n'était plus apte à reprendre son ancienne profession mais pouvait bénéficier d'une reconversion.
Dans leur rapport du 4 octobre 2004, ils concluent à une aggravation du préjudice professionnel, précisent que bien que la victime a essayé avec constance de se réinsérer sur le plan professionnel en se prêtant à l'établissement de bilans de compétences auprès d'organismes spécialisés et en effectuant divers stages, toutes ses tentatives ont échoué. Ils expliquent ces échecs par l'aggravation des troubles caractériels, la fatigabilité mentale, l'intolérance au stress et les difficultés dans la relation avec autrui.
S'ils ajoutent que " l'aggravation aurait été réduite, ou du moins atténuée si la victime avait suivi le traitement médicamenteux prescrit ", il ressort aussi de leur rapport que la victime n'a pas refusé ces traitements médicamenteux mais uniquement qu'elle les a suivis de manière irrégulière, qu'elle a également accepté de suivre une psychothérapie et a multiplié les tentatives de réinsertion professionnelle ainsi qu'il a été mentionné ci-dessus.
La société AXA FRANCE IARD se prévaut aussi des conclusions des experts pour soutenir que l'irritabilité et l'agressivité de Mistafa X... sont fondées sur des troubles caractériels qui ne sont pas imputables à l'accident.
Mais il convient de rappeler qu'au moment de l'accident la victime qui était âgée de 24 ans travaillait régulièrement, avait une vie " normale " et que les mêmes experts dans leur précédent rapport du 20 janvier 1998 indiquaient page 12 : " on ne retrouve à l'anamnèse ni antécédents neuropsychiques personnels ni antécédents neuropsychiques familiaux ".
Il convient de constater qu'aucun état antérieur n'est démontré alors que depuis l'accident les experts ont successivement conclu, le Docteur D... le 13 octobre 1995 que la reprise de son métier est compromise, les docteurs G... et E... le 20 janvier 1998 qu'il n'est plus apte à reprendre son ancienne profession et le 4 octobre 2004 que toutes ses tentatives de réinsertion professionnelle ont échoué en raison de sa fatigabilité mentale, de son intolérance au stress et de ses difficultés dans la relation avec autrui. Son préjudice professionnel est donc la conséquence de l'accident.
Il sera alloué, compte tenu de ces éléments, du salaire auquel il aurait pu prétendre, de sa qualification, de sa perte partielle de droits à la retraite et du barème de la gazette du palais, en réparation de l'aggravation du préjudice professionnel telle que reconnue par les experts dans leur rapport du 4 octobre 2004 laquelle n'a pas encore été indemnisée par les transactions antérieures, une indemnité de :

280. 000, 00 €
0, 00 €
Préjudices personnels0, 00 €
0, 00 €
- déficit fonctionnel permanent :
les séquelles liées à la deuxième aggravation telles que décrites et constatées par les experts dans leur rapport du 4 octobre 2004 complété par la lettre du 6 novembre 2004 du Docteur E..., seront justement indemnisées par l'indemnité sollicitée :

13. 800, 00 €
- préjudice d'agrément permanent :
les experts ont retenu une aggravation du préjudice d'agrément (diminution des capacités de divertissement intellectuel du fait de la détérioration intellectuelle et rétrécissement du champ de la vie sociale consécutivement à l'aggravation de troubles caractériels).
Il lui sera attribué de ce chef, une indemnité de :

6. 000, 00 €

TOTAL : 299   800, 00 €
Mistafa X... recevra ainsi, en réparation de son préjudice corporel consécutif à la seconde aggravation, une indemnité totale de 299   800, 00 € en deniers ou quittances.

Sur les préjudices moraux des proches

Les indemnités allouées au titre des préjudices moraux de l'épouse et des deux enfants de la victime ont été justement appréciées par les premiers juges. Elles seront confirmées.

Sur l'article 700 du NCPC

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la victime les frais et honoraires exposés par elle et non compris dans les dépens.

Il lui sera alloué, de ce chef, la somme complémentaire de 3000 €.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement à l'exception de ses dispositions relatives aux indemnités allouées à Marie Z... A... agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses filles mineures Yasmine X... et Inès X..., à l'article 700 du NCPC et aux dépens ;

Et statuant à nouveau, dans cette limite :

Condamne la société AXA FRANCE IARD à verser à Mistafa X... :

- la somme de 299   800, 00 € en réparation de la seconde aggravation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions et somme versée en vertu de l'exécution provisoire non déduites, ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par celui-ci et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

- la somme complémentaire de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC ;

Condamne la société AXA FRANCE IARD aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0242
Numéro d'arrêt : 05/23827
Date de la décision : 11/02/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 03 octobre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-02-11;05.23827 ?
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