RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
22ème Chambre B
ARRÊT DU 05 Février 2008
(no, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 04 / 38677 (BB)
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Octobre 2004 par le conseil de prud'hommes de ETAMPES RG no 03 / 00172
APPELANTE
S. A. POLY URBAINE
1 avenue Marcellin Berthelot
92390 VILLENEUVE LA GARENNE
représentée par Me Jérôme ARTZ, avocat au barreau de PARIS, toque : L97
INTIMÉS
Monsieur François X...
...
91180 ST GERMAIN LES ARPAJON
comparant en personne, assisté de Me Nathalie LEHOT, avocat au barreau de l'ESSONNE substitué par Me Sylvie CHATONNET-MONTEIRO, avocat au barreau de l'ESSONNE
Société COVED
7, rue Paul Dautier
BP 265
78147 VELIZY CEDEX
représentée par Me Patrice LE HEUZEY, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1390
PARTIE INTERVENANTE :
ASSEDIC DU SUD EST FRANCILIEN
Service Production Centralisée-Contentieux
77551 MOISSY CRAMAYEL CEDEX
représenté par Me Renée BOYER-CHAMMARD, avocat au barreau de PARIS, toque : T 10 substitué par Me Romain PIETRI, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 Décembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Brigitte BOITAUD, Présidente
Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller
Monsieur Daniel FONTANAUD, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffière : Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
-prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente
-signé par Madame Brigitte BOITAUD, présidente et par Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, greffière présente lors du prononcé.
Monsieur François X... engagé par la société POLY URBAINE à compter du 1er octobre 2000 en qualité de ripeur, élu délégué du personnel suppléant le 20 juin 2001, promu chauffeur le 11 juillet 2003, était affecté, comme il est mentionné sur le contrat de travail, sur l'établissement de Hurepoix sis à DOURDAN (91) dans le cadre du marché de collecte des ordures ménagères du Syndicat Intercommunal de Collecte et de Traitement des Ordures Ménagères de l'Hurepoix. Il a refusé le contrat de travail que lui proposait la société COVED dont l'offre de reprise du marché du SITCOM de l'HUREPOIX était préférée à celle de la société POLY URBAINE qui perdait ce marché à compter du 20 août 2003. La société POLY URBAINE informait M. X... qu'elle n'était plus son employeur.
Par jugement du 21 octobre 2004, le conseil de prud'hommes d'Etampes a notamment condamné la société POLY URBAINE à payer à M. X... des indemnités de rupture et mis hors de cause la société COVED.
La société POLY URBAINE en a relevé appel.
L'ASSEDIC du sud est francilien intervient pour obtenir le remboursement des indemnités de chômage.
Pour les prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions visées et reprises oralement le 18 décembre 2007.
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La société COVED fait valoir qu'il n'y a eu aucun transfert au sens de l'article L122-12 du code du travail, en l'absence de moyen d'exploitation transféré ; que seule l'annexe V de la convention collective est applicable ; qu'aux termes de cette annexe, la signature par le salarié du contrat de travail qu'elle lui a présenté est une condition conventionnelle du transfert à défaut de laquelle ce dernier reste salarié de l'ancien titulaire du marché ; que le contrat de travail qu'elle a proposé était conforme aux exigences de la convention collective ; que M. X... qui a manifesté sa décision de rester salarié de la société POLY URBAINE, ne s'est pas présenté à son poste de travail ; qu'elle a saisi l'inspection du travail d'une demande d'autorisation de licenciement et qu'il lui a été indiqué que la société POLY URBAINE était restée l'employeur, que sa demande d'autorisation de licenciement était donc sans objet ; qu'en s'opposant à la présence de M. X... à son travail, la société POLY URBAINE s'est rendue responsable de la rupture et doit seule en supporter les conséquences.
La société POLY URBAINE conteste être responsable de la rupture des relations contractuelles dés lors que le contrat de travail de M. X... a été transféré à la société COVED. Elle fait valoir que la décision administrative d'autorisation de transfert s'impose au juge judiciaire ; que les dispositions de l'article L 122-12 du code du travail sont applicables à l'espèce, les éléments d'actifs constituant l'entité économique au sens de cet article n'impliquant pas nécessairement qu'ils appartiennent à l'entreprise sortante ; que l'appréciation du transfert doit s'effectuer au regard de l'activité concernée ; que les dispositions de l'article L 122-12 du code du travail d'ordre public s'imposent au salarié concerné par le nouvel employeur attributaire du marché.
M. X... dirige principalement sa demande à l'encontre de la société POLY URBAINE et subsidiairement à l'encontre de la société COVED.
Décision
Il ressort des pièces du dossier et des explications des parties que la société POLY URBAINE ayant perdu le marché qui concernait M. X..., a obtenu de l'inspection du travail l'autorisation de transfert des contrats de travail de deux salariés protégés. Cette société a alors adressé à M. X... les documents de fin de contrat par lettre avec accusé de réception du 4 septembre 2003. Le transfert de l'ensemble du personnel affecté au marché était opéré au sein de la société COVED. Le Ministre saisi d'un recours par M. X..., autorisait son transfert.
L'autorisation de transfert du contrat de travail du salarié protégé, accordée par l'autorité administrative, n'a pas pour effet d'opérer le transfert. Elle en est une condition préalable de validité de ce transfert.
Il convient de rechercher si les conditions du transfert du contrat de travail de M. X..., hormis celle relative à l'autorisation nécessaire au transfert d'un salarié protégé, étaient remplies et s'il s'imposait à toutes les parties au litige.
Les deux sociétés concernées par le marché, se sont référées pour la mise en oeuvre des procédures relatives au transfert des salariés, aux dispositions de l'annexe V de la convention collective nationale des activités du déchet établi suivant protocole d'accord du 23 février 2000 alors en vigueur et fixant les " conditions de reprise des personnels ouvriers par les employeurs en cas de changement de titulaire d'un marché public ".
L'article 1er de cet accord, consacré aux obligations à la charge du nouveau titulaire, mentionne que celui-ci " doit reprendre à l'ancien titulaire, à tout le moins, les personnels ouvriers affectés antérieurement au marché concerné... il établira conformément à l'article 28 de la présente convention collective un contrat de travail... qui tiendra compte des dispositions suivantes... " Figurent parmi ces dispositions l'absence de période d'essai, la prise en compte de l'ancienneté, le maintien du salaire mensuel brut de base. Au titre de ces dispositions il est précisé :
" la signature, par le salarié, du contrat de travail proposé par le nouveau titulaire du marché public vaudra acceptation par le salarié des modalités de reprise. Cette signature entraînera la rupture du contrat vis-à-vis de son ancien employeur sans qu'elle puisse être analysée comme un licenciement ».
La société POLY URBAINE considère que l'annexe V organise seulement les modalités d'exécution du contrat de travail transféré par l'effet de l'article L122-12 du code du travail.
La société COVED soutient que la signature du contrat de travail avec le nouvel attributaire du marché est une condition de réalisation du transfert.
La présentation par l'entreprise entrante d'un contrat de travail à la signature du salarié concerné par le marché est une obligation conventionnelle mise à la charge de la société COVED par l'effet du transfert. Les " conditions de reprise " dont il est fait mention dans l'annexe V de la convention collective sont des modalités d'exécution du transfert. Le nouveau titulaire doit établir un contrat de travail conformes aux dispositions indiquées. La signature du nouveau contrat entraîne acceptation par le salarié des " modalités de reprise " et rupture du contrat de travail avec le précédent employeur. Mais pour autant le refus par le salarié de signer le nouveau contrat de travail n'a pas pour effet de faire échec au transfert dés lors que, comme en l'espèce, les personnels repris répondent aux conditions posées par l'article 1er de l'annexe V de la convention collective et que les obligations portées à la charge de la société sortante ont été remplies.
Or la société POLY URBAINE a rempli ses obligations conventionnelles en communiquant à la société COVED en temps voulu l'état du personnel à reprendre, en réglant à l'intéressé les sommes dues en fonction du temps passé dans son entreprise et en lui délivrant un certificat de travail. Le transfert du contrat de travail de M. X..., autorisé par l'autorité administrative, a été valablement opéré au sein de la société COVED.
Il s'ensuit que la société POLY URBAINE est mise hors de cause et le jugement infirmé en ce sens.
Sur la rupture des relations contractuelles
M. X... soutient que le contrat de travail proposé par la société COVED contenait des modifications qui l'autorisait à le refuser en indiquant notamment une modification de sa rémunération par suppression de primes sans illustrer plus avant son affirmation.
Il convient donc d'ouvrir à nouveau les débats pour entendre la société COVED et M. X... sur l'éventuelle modification du contrat de travail liée à la rémunération offerte par la société COVED.
PAR CES MOTIFS
INFIRME le jugement,
MET hors de cause la société POLY URBAINE,
REJETTE sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
ORDONNE la réouverture des débats à l'audience du mardi 24 juin 2008 à 9 heures,
DIT que la notification de cet arrêt vaut convocation à cette audience,
RESERVE les dépens.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE