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25/01/2008 | FRANCE | N°06/3714

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0203, 25 janvier 2008, 06/3714


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

25ème Chambre - Section A

ARRET DU 25 JANVIER 2008

(no , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/03714

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Janvier 2006 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG no 04/13408

APPELANT

Madame Muriel X... divorcée Y...

agissant en qualité d'héritière de Monsieur AMIOT

...

78400 CHATOU

représentés par la SCP BOMMART-FORS

TER - FROMANTIN, avoués à la Cour

assistés de Maître Z... Philippe avocat et associés, toque P218

INTIMEE

Madame Brigitte A...

...

93700...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

25ème Chambre - Section A

ARRET DU 25 JANVIER 2008

(no , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/03714

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Janvier 2006 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG no 04/13408

APPELANT

Madame Muriel X... divorcée Y...

agissant en qualité d'héritière de Monsieur AMIOT

...

78400 CHATOU

représentés par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour

assistés de Maître Z... Philippe avocat et associés, toque P218

INTIMEE

Madame Brigitte A...

...

93700 DRANCY

représenté par la SCP FANET - SERRA, avoués à la Cour

assisté de Maître B... Sylviane avocat au barreau de Bobigny, BOB116

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 7 décembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie Pascale GIROUD, Présidente

Mme Odile BLUM, Conseiller

Mme Marie-Hélène GUILGUET-PAUTHE, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Marie-Claude GOUGE

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie Pascale GIROUD, président et par Mme Marie-Claude GOUGE, greffière.

***

Vu le jugement rendu le 12 janvier 2006 par le tribunal de grande instance de Bobigny qui a débouté M.Jacques X... de l'ensemble de ses demandes , débouté pour le surplus et condamné M.Jacques X... aux dépens;

Vu l'appel de ce jugement relevé par M.Jacques X..., assisté et représenté par Mme Muriel Amiot en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire et par Mme Muriel Amiot agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire de M.Jacques X... et les dernières conclusions signifiées le 27 novembre 2007 par Mme Muriel Amiot , agissant en qualité d'héritière de Jacques Amiot, décédé le 27 février 2007, aux termes desquelles elle demande à la Cour de :

- juger Mme Muriel Amiot en qualité d'ayant droit et pour le compte de la succession de M.Jacques X... recevable en ses demandes,

-réformer le jugement en toutes ses dispositions,

-constater que Mme A... ne s'est pas acquittée de l'intégralité de la rente viagère mise à sa charge,

-constater que Mme A... a refusé d'exécuter par équivalent l'obligation de soin,

-prononcer la résolution du contrat de prêt signé entre M.Jacques X... et Mme A...,

-condamner Mme A... à lui rembourser, en qualité d'ayant droit et pour le compte de la succession de M.Jacques X... la somme de 400.000 francs , soit 60.979,61 euros, objet du contrat de prêt,

-dire que les arrérages perçus jusqu'alors par M.Jacques X... lui seront définitivement acquis à titre de dommages-intérêts,

-dire que la garantie prise par M.Jacques X... sur le bien immobilier acquis par Mme A... sis à Drancy aura pour objet le remboursement par Mme A... des 60.979,61 euros ainsi que de ses autres dettes à l'égard de M.Amiot,

-constater que le patrimoine de M.Jacques X... s'est appauvri de la somme de 29190 euros,

-constater que le patrimoine de Mme A... s'est corrélativement enrichi de la somme de 29.190 euros,

- juger Mme Muriel Amiot en qualité d'ayant droit et pour le compte de la succession de M.Jacques X... recevable et bien fondée à solliciter sur le fondement de l'action de in rem verso le remboursement de la somme de 29190 euros indûment perçue par Mme A...,

-condamner Mme A... à lui rembourser en qualité d'ayant droit et pour le compte de la succession de M.Jacques X... la somme de 29190 euros avec intérêts au taux légal à compter de la notification des conclusions ,

-débouter Mme A... de l'ensemble de ses demandes,

-condamner Mme A... au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens;

Vu les dernières conclusions signifiées le 28 novembre 2007 par Mme A... qui demande à la Cour de:

-constater que l'instance interrompue n'a pas été valablement reprise et n'est pas en état d'être jugée sur les seules écritures de Mme Amiot,

-vu l'article 122 du nouveau code de procédure civile , déclarer Mme Amiot irrecevable en toutes ses demandes,

subsidiairement,

-confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

-condamner l'appelante à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Sur ce, la Cour :

Considérant que Mme A... soutient que la Cour ne peut se prononcer en l'état sur le fond du dossier ; qu'en effet, Jacques Amiot , qui est décédé le 27 février 2007, a laissé pour lui succéder deux enfants, Mme Muriel Amiot et M.Claude X...; que si Mme Amiot est intervenue volontairement ès qualités d'héritière à la présente instance et a repris les conclusions de son père décédé, M.Claude X... n'est pas intervenu en reprise d'instance ;

Mais considérant que Mme Amiot étant saisie de plein droit des droits et actions de son père décédé est fondée, même sans le concours de son coïndivisaire , à reprendre l'instance engagée par Jacques Amiot ;

1) sur la résolution du contrat de prêt

Considérant que par acte sous seing privé du 7 septembre 2001, Jacques Amiot a consenti à Mme A... une offre de prêt que celle-ci a acceptée le 21 septembre 2001;

Considérant que par cet acte, Jacques Amiot , alors âgé de presque 84 ans ,a prêté à Mme A... la somme de 400.000 francs destinée au financement de l'acquisition d'un appartement ; que ce prêt était proposé moyennant l'obligation par Mme A... de servir une rente annuelle et viagère de 54.000 francs soit 4500 francs mensuel révisable en fonction de la variation de l'indice national du coût de la construction ; qu'il était prévu que la rente serait payable en deniers à concurrence de 1400 francs et le surplus, soit 3100 francs , "converti d'un commun accord entre M.Amiot et Mme A... de nourrir, entretenir, vêtir, blanchir, raccommoder et soigner, tant en santé qu'en maladie M.Amiot , en un mot lui fournir tout ce qui est nécessaire à l'existence, en ayant pour lui les meilleurs soins et de bons égards aussi. En cas de maladie, lui faire donner tous les soins médicaux et chirurgicaux nécessaires et de lui faire administrer tous les médicaments prescrits , dont le coût restera à la charge de M.Amiot"; qu'il était en outre précisé : "cette obligation courra à partir du jour de la réalisation de l'acquisition du bien objet du présent prêt";

Considérant que l'acte mentionnait encore que "par dérogation des dispositions de l'article 1978 du code civil, il est expressément convenu qu'à défaut de paiement à son exacte échéance d'un seul terme de la rente viagère présentement constituée, ledit prêt sera de plein droit et sans mise en demeure préalable, purement et simplement résolu et exigible , si bon semble au CREDIRENTIER et sans qu'il soit besoin de remplir aucune formalité judiciaire, un mois après un simple commandement de payer demeuré infructueux contenant déclaration par le CREDIRENTIER de son intention d'user du bénéfice de la présente clause. Dans ce cas, tous les arrérages perçus par le CREDIRENTIER seront de plein droit et définitivement acquis au CREDIRENTIER sans recours ni répétition de la part du DEBIRENTIER défaillant , et ce à titre de dommages et intérêts et d'indemnités forfaitairement fixés";

Considérant que Mme A... a fait l'acquisition du bien visé à l'acte le 27 novembre 2001;

Considérant que Mme Amiot faisant état de l'inexécution fautive de ses obligations par Mme A... sollicite la résolution du contrat de prêt ; qu'elle indique que si Mme A... s'est acquittée du paiement de la somme mensuelle de 213,43 euros, elle n'a pas exécuté son obligation de soin à l'égard du crédirentier ;

Considérant que la clause résolutoire stipulée dans le contrat de prêt n'est applicable qu'à défaut de paiement de la rente ; que cependant la résolution du contrat pour défaut d'exécution de l'obligation d'entretien et de soin peut être demandée sur le fondement de l'article 1184 du code civil;

Considérant que , pour s'opposer à la demande formée à son encontre, Mme A... soutient qu'elle a toujours respecté son engagement;

Considérant que l'obligation d'entretien et de soin mise à la charge de Mme A... supposait , comme l'a justement relevé le tribunal, une assistance presque quotidienne de la part de celle-ci ;

Considérant que Mme A... produit diverses attestations ;que plusieurs de celles-ci ne donnent aucun élément permettant de dater les faits relatés et de vérifier qu'ils sont postérieurs à la signature du contrat de prêt ; que les autres , si elles font état des bonnes relations qu'entretenait Jacques Amiot avec Mme A..., de ses brefs séjours au domicile de celle-ci, des voyages de quelques jours qu'ils effectuaient ensemble, n'établissent aucune continuité dans l'exécution par Mme A... de ses obligations ;

Considérant que d'autres pièces versées aux débats démontrent que l'état de santé de Jacques Amiot s'est progressivement dégradé; que selon ce qu'a déclaré le médecin gériatre l'ayant suivi entre janvier 2003 et décembre 2004 ,il présentait une perte d'autonomie, avait des difficultés dans la gestion de la prise de ses médicaments, la réalisation de ses courses, l'utilisation des transports en commun ; qu'un document relatant le suivi dont Jacques Amiot a fait l'objet de la part des services sociaux de la commune où il résidait mentionne également la dégradation de son état à la fin de l'année 2002 et la mise en place du service de portage des repas à compter du 23 janvier 2003, les démarches nécessaires à la constitution du dossier à cette fin étant entreprises par Mme Amiot ; que ce document mentionne encore l'isolement de Jacques Amiot à cette époque et la nécessité de l'intervention d'une aide à domicile , intervention qui est établie pour diverses périodes;

Considérant qu'il résulte de ceci qu'en raison notamment de l' état de santé de Jacques Amiot , l'exécution par Mme A... de ses obligations telles que contractuellement prévues , impliquait , au moins à compter de la fin de l'année 2002 et jusqu'au mois d'octobre 2004, époque à laquelle la procédure a été engagée et où les relations entre les parties ont cessé, des interventions régulières et présentant une certaine continuité , ce dont il n'est nullement justifié , le versement par Mme A... à compter du mois de septembre 2003 d'une somme au titre des frais de repas étant sans incidence à cet égard ; que Mme A... invoque l'éloignement géographique qui aurait été crée par Jacques Amiot, lequel, après avoir accepté de vivre dans l'appartement qu'elle avait acquis à Drancy , avait finalement décidé de ne pas quitter son domicile; que cet élément est toutefois inopérant en l'espèce , le contrat signé entre les parties , sur lequel figure les adresses, distinctes, de chacune d'elles, ne faisant nullement mention d'un hébergement de Jacques Amiot au domicile de Mme A...;

Considérant qu'eu égard à l'ensemble des éléments ci-dessus mentionnés, les manquements retenus à la charge de Mme A... justifient, en raison de leur gravité, la résolution de contrat de prêt ;

Considérant que le contrat n'étant pas résolu pour défaut de paiement de la rente, Mme Amiot ne peut se prévaloir de la clause prévoyant que les arrérages perçus par le crédirentier lui sont, en ce cas, définitivement acquis ; que ne justifiant pas d'un préjudice, sa demande tendant à ce que les arrérages perçus par Jacques Amiot lui soient acquis à titre de dommages-intérêts sera rejetée;

Considérant en conséquence que Mme A... sera condamnée à payer à Mme Amiot , en qualité d'ayant droit et pour le compte de la succession de Jacques Amiot , la somme de 60.979,61 euros, sous déduction de la somme versée au titre des arrérages de la rente payable en deniers et fixée à la somme mensuelle indexée de 213,43 euros;

Considérant que Mme Amiot demande à la Cour de dire que la garantie prise par Jacques Amiot sur le bien immobilier acquis par Mme A... aura pour objet le remboursement par Mme A... de ses dettes à l'égard de Jacques Amiot ;

Mais considérant si des sûretés ont été prises pour garantir le recouvrement des sommes mises à la charge de Mme A..., il appartient à Mme Amiot de les mettre en oeuvre , la Cour n'ayant pas , en l'état de la procédure, à se prononcer sur ce point ;

2) sur le remboursement de la somme de 29190 euros

Considérant que Mme Amiot indique que Jacques Amiot a réglé la somme de 5482 euros pour l'achat de meubles destinés à l'appartement de Mme Bloche; qu'elle indique également qu'au cours des années 2001, 2002 et 2003, Jacques Amiot a remis à Mme A... divers chèques pour la somme globale de 23708,13 euros; qu'elle soutient qu'elle est fondée à exercer l'action "de in rem verso", cette remise de fonds n'ayant aucune contrepartie et étant de ce fait indue;

Considérant qu'un bon de commande émanant de la société Les Meubles Prince et mentionnant une enfilade, une table et un lit -à livrer à Mme A... -est versé aux débats; qu'il est justifié qu' à ce titre , Jacques Amiot a réglé la somme globale de 3745,67 euros ; qu'il résulte cependant d'une lettre du 9 décembre 2001 émanant de Jacques Amiot que celui-ci a donné les meubles précités à Mme A...;

Considérant par ailleurs qu'il n'est pas démontré que deux chèques émis par Jacques Amiot les 22 décembre 2001 à l'ordre de "Arts Ménagers Drancy", d'un montant de 6500 francs soit 990,91 euros et 12 juin 2002 à l'ordre de"l'atelier du meuble peint", d'un montant de 136 euros , se rapportent à des objets acquis pour Mme A...;

Considérant enfin que s'il est justifié que Jacques Amiot a émis au cours des années 2001, 2002 et jusqu'au mois de février 2003, de nombreux chèques à l'ordre de Mme A... , celle-ci soutient que ces remises de fonds s'analysent en des dons manuels et que Mme Amiot ne rapporte pas la preuve de l'absence de tels dons ;

Considérant en conséquence que Mme Amiot , en qualité d'ayant droit et pour le compte de la succession de Jacques Amiot , n'est pas fondée à réclamer à Mme A... le remboursement des sommes ainsi versées; qu'elle sera déboutée de sa demande de ce chef;

Considérant, vu l'article 700 du code de procédure civile, qu'il y a lieu de rejeter la demande formée de ce chef par Mme A... et de la condamner à verser à Mme Amiot la somme de 2000 euros.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de Jacques Amiot fondée sur l'enrichissement sans cause,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Prononce la résolution du contrat de prêt conclu entre Jacques Amiot et Mme A... le 21 septembre 2001,

Condamne Mme A... à payer à Mme Amiot , en qualité d'ayant droit et pour le compte de la succession de Jacques Amiot , la somme de 60.979,61 euros, sous déduction de la somme versée au titre des arrérages de la rente payable en deniers et fixée à la somme mensuelle indexée de 213,43 euros;

Condamne Mme A... verser à Mme Amiot la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne Mme A... aux dépens de première instance et d'appel et dit que ces derniers pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0203
Numéro d'arrêt : 06/3714
Date de la décision : 25/01/2008

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-01-25;06.3714 ?
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