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09/01/2008 | FRANCE | N°11

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0133, 09 janvier 2008, 11


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre A

ARRET DU 09 Janvier 2008

(no 11 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/07319

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Juillet 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG no 04/10963

APPELANTE

ING BELGIUM SA venant aux droits de la Société ING SECURITIES BANK

90 A 102, Coeur Défense- Tour A- Place de la Défense

Avenue du Général De Gaulle

92400 COURBE

VOIE

siège social : situé à BRUXELLES (BELGIQUE) avenue Marnix 24 ;

représentée par Me Georges JOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre A

ARRET DU 09 Janvier 2008

(no 11 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/07319

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Juillet 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG no 04/10963

APPELANTE

ING BELGIUM SA venant aux droits de la Société ING SECURITIES BANK

90 A 102, Coeur Défense- Tour A- Place de la Défense

Avenue du Général De Gaulle

92400 COURBEVOIE

siège social : situé à BRUXELLES (BELGIQUE) avenue Marnix 24 ;

représentée par Me Georges JOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque : T 06 substitué par Me Corinne VALLERY-MASSON, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame Marie-Frédérique Y...

...

75016 PARIS

représentée par Me Elvire DE FRONDEVILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P19

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Octobre 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Claude TERREAUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Alain CHAUVET, Président

Monsieur Bernard SCHNEIDER, Conseiller

Monsieur Claude TERREAUX, Conseiller

Greffier : Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur Alain CHAUVET, Président

- signé par Monsieur Alain CHAUVET, Président et par Evelyne MUDRY, greffier présent lors du prononcé.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Madame Marie-Frédérique Y... a été engagée à compter du 20 octobre 1998 au sein de la Banque BRUXELLES LAMBERT France, aux droits de laquelle intervient aujourd'hui la société ING BELGIUM SA en qualité de gérant de portefeuille. Elle bénéficiait d'une ancienneté acquise depuis le 2 novembre 1988. Elle percevait une rémunération de 8.872,45 €.

Les parties sont en désaccord sur l'autonomie réelle dont disposait à ce poste Madame Marie-Frédérique Y....

Suite à une réorganisation de l'entreprise due à l'évolution des règles applicables selon elle, la société ING BELGIUM SA a distribué différemment les rôles de ses salariés.

Faisant valoir qu'elle avait vu pour ce motif ses fonctions perdre en intérêt et en autonomie, Madame Marie-Frédérique Y... a cessé de travailler le 30 juillet 2004, après avoir remis une lettre par laquelle elle indique prendre acte de la rupture de son contrat de travail.

Par jugement du 12 juillet 2005 auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le Conseil de Prud'hommes de PARIS (section encadrement) :

-Condamne la SA ING SECURITIES BANK FRANCE à verser à Madame Marie Frédérique Y... les sommes suivantes :

- 26.617,35 € au titre de l'indemnité de préavis

- 2.661,74 € au titre des congés payés sur préavis

- 99.638 € au titre de l'indemnité de licenciement

-Ordonne le règlement du solde de tout compte ;

-Ordonne la remise du certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC conformes ;

Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation ;

-Rappelle qu'en vertu de l'article R.516.37 du Code du Travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire ;

-Fixe cette moyenne à la somme de 8.872,45 euros.

- 53.235 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement.

- 500 € en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Déboute Madame Marie Frédérique Y... du surplus de ses demandes.

Déboute la SA ING SECURITIES BANK FRANCE de sa demande reconventionnelle et la condamne aux dépens.

Madame Marie-Frédérique Y... a interjeté appel par déclaration parvenue au greffe le 13 mars 2006.

La société ING BELGIUM SA, par conclusions déposées au Greffe le 29 octobre 2007, dont il a été requis oralement l'adjudication à l'audience et auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et arguments demande à la Cour de :

-Recevoir la société ING BELGIUM SA, venant aux droits de Ing Securities Bank (France) en son appel

et y faisant droit :

-Infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris;

-Constater la démission par Madame Y... de ses fonctions à la date du 31 juillet 2004 ;

-Débouter Madame Y... de l'ensemble de ses prétentions et de toutes fins qu'elles comportent ;

-Condamner Madame Y... à payer reconventionnellement à la société Ing Securities Bank (France) la somme de 200.000 € à titre de dommages intérêts ;

-La condamner en outre à payer la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 nouveau code de procédure civile.

Elle fait principalement valoir, outre les explications qui accompagnent ses demandes ci-dessus reproduites, que :

-le réaménagement opéré était la suite de l'évolution de la réglementation et que Madame Marie-Frédérique Y... devait s'y adapter ;

-contrairement à ses prétentions, Madame Marie-Frédérique Y... ne bénéficiait pas d'un « pouvoir discrétionnaire de gestion », la banque étant le seul mandant des clients qui définissait les profils de gestion et sa fonction était essentiellement technique ;

-dans ce mouvement fut créé un département, le « private banking », composé de personnes dotées d'une bonne capacité, d'un bon niveau et Madame Marie-Frédérique Y... s'est vu proposer un élargissement manifeste de ses compétences, ce qu'elle a reconnaît dans ses écritures ;

-certains de ses clients ne pouvant être sélectionnés pour ce service, ils lui furent retirés ;

-elle a abandonné son poste sans prévenir en période estivale alors qu'elle devait assurer la permanence du mois d'août ;

-elle s'est engagée au sein de la société REYL Cie, nouvellement créée et concurrente de la société ING BELGIUM SA ;

-elle a emporté avec elle dans cette société certains des clients dont elle avait la charge ;

-il s'est avéré qu'elle avait préparé les lettres de dénonciation de mandats pour les clients, avait noué de contacts avec la société REYL Cie dès le mois de janvier 2004 et avait sa place dans l'organigramme de cette société avant son départ ;

- la société ING BELGIUM SA a intenté une action en concurrence déloyale contre la société REYL Cie mais le Tribunal de commerce a sursis à statuer dans l'attente de la présente décision ;

- Madame Marie-Frédérique Y... ne rapporte pas la preuve du licenciement ;

-elle n'établit pas que son contrat a été modifié ;

-la rémunération était la même ;

-elle n'a jamais manifesté son désaccord antérieurement ;

-la modification intervenue au sein de l'entreprise a été faite de bonne foi ;

-la clientèle confiée à Madame Marie-Frédérique Y... ne lui appartient pas ;

-la rupture de son contrat était destinée à lui permettre de passer au service de son nouvel employeur ;

-subsidiairement, les sommes réclamées par Madame Marie-Frédérique Y... sont excessives.

Madame Marie-Frédérique Y..., par conclusions déposées au Greffe le 29 octobre 2007, dont il a été requis oralement l'adjudication à l'audience et auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et arguments demande à la Cour de :

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail du 30 juillet 2004 devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, compte tenu des modifications imposées au contrat de travail de Madame Marie-Frédérique Y....

En conséquence,

-confirmer la condamnation de la Société ING au paiement des sommes suivantes :

-26.617,35 Euros à titre d'indemnité de préavis ;

-2.661,74 Euros bruts à titre de congés payés y afférents ;

-99.638 Euros nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement;

-53.235 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (6 mois de salaires) ;

-500 Euros au titre de l'article 700 du NCPC ;

-et ayant ordonné le règlement du solde de tout compte, et la remise d'un certificat de travail et d'une attestation Assedic conforme.

-Recevant Madame Marie-Frédérique Y... en son appel incident, et l'y déclarant bien fondée, réformer la décision entreprise en ce qu'elle l'a débouté de ses demandes de dommages et intérêts supplémentaires.

En conséquence,

-condamner la Société ING BELGIUM au paiement des sommes supplémentaires suivantes :

-53.235 Euros, soit 6 mois de dommages et intérêts supplémentaires à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

-106.469,40 Euros au titre du préjudice supplémentaire subi (12 mois) ;

-3.000 Euros au titre de l'article 700 du NCPC.

-Débouter la Société ING de l'intégralité de ses prétentions.

Elle fait principalement valoir, outre les explications qui accompagnent ses demandes ci-dessus reproduites, que :

-l'employeur a modifié unilatéralement ses fonctions ;

-ces modifications sont réelles et importantes ;

-elle devrait cesser la gestion de ses actifs financiers de la clientèle ;

-elle était affectée par ce changement ;

-le bonus discrétionnaire au-delà des 14,5 mois de salaire qu'elle percevait a été transformé en une prime sur objectifs ;

-elle a subi un préjudice distinct et supplémentaire, la société ING BELGIUM SA n'ayant cessé de faire des recherches et de lui causer du tort après son départ ;

-son contrat de travail ne stipule pas de clause de non-concurrence ;

-elle a respecté son obligation de fidélité pendant le contrat de travail ;

-le manquement allégué à l'obligation de loyauté se serait produit après son départ ;

-le préavis a été inexécuté du fait de la société ING ;

-le fait que 19 clients aient résilié leur mandat n'est que la conséquence de la liberté de choix du client ;

-il n'y a pas eu de concurrence déloyale ;

- la société ING BELGIUM SA ne justifie pas du montant des sommes détournées et de la demande de 200.000€ qu'elle forme pour le détournement de clientèle.

*

SUR CE ;

Sur la prise d'acte ;

Considérant qu'il y a lieu de rechercher ici si la prise d'acte de la salariée fait suite à un simple aménagement des conditions de travail, ou si au contraire elle est la conséquence d'une modification des termes du contrat de travail ;

Considérant qu'en l'espèce la modification de la prime discrétionnaire qui a été transformée en une prime sur objectifs ne saurait constituer un changement des éléments du contrat de travail puisqu'il est établi et non contesté par la salariée que cette dernière a refusé ladite modification et est restée soumise à l'ancien mode de rémunération, ce qu'elle ne conteste pas ; que Madame Marie-Frédérique Y... n'établit donc pas ici l'existence d'une modification du contrat de travail ;

Considérant que la société ING BELGIUM SA explique que la modification des conditions de travail est due à une réorganisation rendue nécessaire par l'évolution de la législation et qu'elle se trouvait contrainte d'encadrer ses opérations par une équipe techniquement et juridiquement compétente, plutôt que par l'équipe à formation principalement commerciale (placement de produits) qui était en place ; qu'elle explique encore que cette création d'un service spécialisé l'a contrainte à déplacer Madame Marie-Frédérique Y..., et à lui retirer certains dossiers qui ne relevaient pas de ce service ;

Considérant qu'il n'est pas contesté par ailleurs que tous les clients dont avait à s'occuper Madame Marie-Frédérique Y... étaient les clients de la banque qui en était le seul mandataire, et ne constituaient pas des clients qui lui étaient personnels ;

Considérant que Madame Marie-Frédérique Y... n'allègue pas que la modification intervenue n'était pas conforme aux intérêts de l'entreprise ;

Considérant que Madame Marie-Frédérique Y... n'établit aucunement que le travail qui lui était confié était moins qualifié ou moins intéressant ; que ses explications relatives au « mandat discrétionnaire » dont elle disposait sont inopérantes, dès lors qu'il est constant qu'elle ne gérait que des opérations pour le compte de clients et au nom de l'entreprise dont elle était salariée ;

Considérant que la rémunération était la même, excepté la modification des modalités de calcul de la prime qu'elle avait refusée ;

Considérant que la Cour observe que la modification, entérinée par le comité d'entreprise, est intervenue le 7 février 2003, que Madame Marie-Frédérique Y... n'y a manifesté aucune hostilité et que ce n'est que le 30 juillet 2004 qu'elle a effectué sa prise d'acte ;

Considérant que pour toutes ces raisons la Cour estime que Madame Marie-Frédérique Y... a démissionné de son poste ; qu'il convient de réformer le jugement entrepris en ce sens ;

Sur la demande reconventionnelle de la société ING BELGIUM SA

Considérant que la société ING BELGIUM SA fait valoir que Madame Marie-Frédérique Y... a détourné la clientèle dont elle avait la charge et en a fait bénéficier son nouvel employeur, la société REYL Cie ; qu'elle explique que ces faits sont largement établis par les investigations qu'elle a effectuées et demande à ce titre la condamnation de Madame Marie-Frédérique Y... à lui payer 200.000€, correspondant selon ses explications à 2% des sommes détournées, de dommages et intérêts ;

Mais considérant que sans avoir à rechercher si ces allégations sont fondées, la Cour, constatant que la société ING BELGIUM SA ne produit aucun élément sur le montant desdites sommes détournées, et ne justifie en rien de la pertinence du pourcentage retenu, déboute la société ING BELGIUM SA de sa demande ;

Considérant que l'équité ne commande pas qu'il soit prononcé de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS ;

-Infirme en toutes ses dispositions le jugement du Conseil de Prud'hommes,

-Déboute Madame Marie-Frédérique Y... de toutes ses demandes ;

-Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

-Dit n'y avoir lieu de prononcer de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

-Condamne Madame Marie-Dominique Y... aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0133
Numéro d'arrêt : 11
Date de la décision : 09/01/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 12 juillet 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-01-09;11 ?
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