La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2007 | FRANCE | N°06/1123

France | France, Cour d'appel de Paris, 21ème chambre c, 20 décembre 2007, 06/1123


COUR D'APPEL DE PARIS 21ème Chambre C

ARRET DU 20 Décembre 2007 (no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 01123
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Juin 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG no 04 / 08538
APPELANT
1o- Monsieur Guillaume X...... 75008 PARIS représenté par Me Florence ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 088,

INTIMEE
2o- S. A. BRYAN GARNIER FORECAST... 75017 PARIS représentée par Me Benoît GRUAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P077,

COMP

OSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédu...

COUR D'APPEL DE PARIS 21ème Chambre C

ARRET DU 20 Décembre 2007 (no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06 / 01123
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Juin 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG no 04 / 08538
APPELANT
1o- Monsieur Guillaume X...... 75008 PARIS représenté par Me Florence ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 088,

INTIMEE
2o- S. A. BRYAN GARNIER FORECAST... 75017 PARIS représentée par Me Benoît GRUAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P077,

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Novembre 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Pierre DE LIEGE, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Marie-Pierre DE LIEGE, président Mme Irène LEBE, conseiller Mme Hélène IMERGLIK, conseiller

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats,
ARRET :
- CONTRADICTOIRE-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.- signé par Mme Marie-Pierre DE LIEGE, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LES FAITS : M. Guillaume X... a été engagé par la société BRYAN GARNIER FORECAST en qualité d'analyste vendeur, statut de cadre, en date du 25 février 1999, pour une rémunération mensuelle brute, à l'époque, de 5 272, 20 euros. Selon son contrat de travail, cette rémunération mensuelle brute était complétée par une rémunération variable correspondant à une somme brute mensuelle égale à la différence entre le salaire fixe et 20 % du chiffre d'affaires réalisé par M. Guillaume X.... Du 1er juin 2001 jusqu'au 31 décembre de la même année, il a perçu en outre une rémunération complémentaire dite « intéressement sur secteur média ». La société BRYAN GARNIER FORECAST a pour activité principale le courtage, l'analyse financière et la gestion de portefeuille. M. Guillaume X... y était plus particulièrement chargé d'assurer la couverture de clients institutionnels français et étrangers, la production d'analyses financières et le suivi des marchés européens. À partir de l'année 2001 il s'est trouvé en outre chargé des fonctions de responsable du pôle média. Il a été élu délégué suppléant du personnel pour deux ans à compter du 7 mars 2002. Les relations se sont déroulées sans incident notable relaté de part ni d'autre, jusqu'au 5 février 2004. Ce jour là, M. Guillaume X... adressait à son supérieur M. Bertrand A..., une lettre recommandée dans laquelle il protestait contre l'attitude de celui-ci, après que le compte d'un certain Gilles Y..., de la banque San Paolo, qu'il connaissait depuis longtemps à titre personnel, ait été affecté, après le départ de la salariée qui le suivait, Mme Corinne C..., à un autre salarié M. David D.... M. Guillaume X..., qui précisait que depuis de nombreuses années les comptes San Paolo étaient partagés entre Corinne C... et lui-même, considérait cette décision comme « tout bonnement discriminatoire » à son égard, dans la mesure où il entretenait personnellement de très bonnes relations avec ledit Y..., et où cette décision aboutissant à « l'empêcher de faire du chiffre d'affaires » allait lui nuire. Il demandait à son responsable de " revenir sur cette décision arbitraire ". Le même 5 février, M. BERTRAND A... adressait à M. Guillaume X... un avertissement pour n'avoir pas « respecté une décision prise par (son) supérieur hiérarchique ". Cette décision étant de confier le suivi d'une personne gérante de la banque San Paolo (M. Gilles Y...) à David D.... M. A... ajoutait : « en raison de ta connaissance historique de ce compte (contact privilégié avec M. E...) je t'ai bien naturellement convoqué pour t'avertir de cette décision et après consultation de Mlle C..., sur la personne la plus apte, selon elle, à poursuivre ce contact, dans le même esprit qu'elle l'avait fait depuis plusieurs années. J'ai décidé de respecter son avis. Or, tu as dès le lendemain pris directement contact avec M. Gilles Y... pour un rendez-vous personnel, défiant ainsi ouvertement la décision de ton supérieur hiérarchique, et ignorant la personne désormais principalement en charge du suivi, alors qu'elle ne demande qu'à collaborer avec toi... ».

Le 2 mars 2004, M. Guillaume X... qui n'avait pas reçu de réponse à son courrier du 5 février adressait un nouveau courrier à M. BERTRAND A.... Il y décrivait l'accord intervenu entre Corinne C... et lui-même « pour aider (Corinne) à un moment où son chiffre d'affaires était notoirement insuffisant », accord aux termes duquel les deux salariés s'étaient entendus pour suivre chacun l'un des représentants de la banque San Paolo, Messieurs Y... et E..., en prévoyant une clé de répartition croisée de 2 / 3 – 1 / 3, pour les commissions perçues sur les ordres reçus de chacun d'eux. M. Guillaume X... disait « je conteste cet avertissement et je réitère mon refus de voir le suivi de mon ami Gilles Y... par un autre salarié, dont par ailleurs je ne conteste pas la compétence. Je refuse donc cette décision et la sanction corrélative, alors même que tu ne m'as jamais interdit de prendre rendez-vous avec Gilles Y..., que je connais à titre personnel ». M. Guillaume X... poursuivait en ces termes : « cette volonté de me retirer un compte client est dans la droite ligne des discriminations et des modifications salariales qui m'ont été imposées sans concertation malgré mes réclamations orales et que je ne peux pas accepter ". Il mentionnait ensuite la suppression, sans préavis ni discussion et sans acceptation de sa part, du 1 % média en janvier 2002 et la baisse de sa rémunération fixe de l'ordre de 3, 75 % en juin 2002, alors qu'il était délégué du personnel suppléant, sans respect de la procédure et sans avenant à son contrat de travail. Il rappelait ensuite que la société BRYAN GARNIER FORECAST n'avait commencé à tenir compte des heures supplémentaires effectuées qu'à partir de 2003 alors que les horaires n'avaient pas changé depuis son entrée dans l'entreprise et terminait en ces termes : « dans ces conditions, je n'ai d'autre possibilité que d'exiger d'être réintégré dans mes droits. En conséquence, je te demande de régulariser le 1 % média depuis janvier 2002, de remettre à niveau mon salaire fixe rétroactivement et de retirer l'avertissement ». Ce message est à nouveau resté sans réponse. Le 1er avril 2004 le conseil de M. Guillaume X... informait la société BRYAN GARNIER FORECAST, de ce que son client, faute de réponses à ces différents courriers, allait saisir le conseil de prud'hommes ; ce courrier restait sans plus de réactions. Faute, donc, d'avoir reçu la moindre réponse, M. Guillaume X... adressait le 21 avril 2004 à M. Bertrand A..., une lettre recommandée avec avis de réception, dans laquelle il prenait acte de la rupture de son contrat aux torts de la société en ces termes : « tu n'as pas répondu à mes demandes du 5 février et du 4 mars, tu m'as juste dit le matin du 14 avril dans la cuisine, « c'est dommage que tu vas devoir quitter la société »... Ma demande d'être rétabli dans mes droits est donc restée lettre morte c'est-à-dire :- l'annulation de la sanction du 5 février,- le rappel de salaire (1 % média de janvier 2001 à avril 2004, soit 28 mois + 3, 75 % de salaires fixe supprimés en juin 2002) et le rétablissement le plus rapidement possible de ma rémunération. Je rappelle que rien ne justifiait la suppression de cette augmentation de ma rémunération fixe qui m'avait été octroyée neuf mois plus tôt.

En outre, je remarque une volonté constante de me mettre à l'écart : ainsi en premier lieu tu tentes à plusieurs reprises de m'enlever des clients (voir mes mail et lettres) ; en second lieu alors que tu m'as demandé de ne pas parler des valeurs média, tu me demandes subitement de parler au « Morning meeting » d'un dossier, Thomson, dont tu sais pertinemment que je ne le maîtrise pas. En dernier lieu, alors que j'ai toujours joué le jeu et ouvert mes comptes-alors que cela représentait pour moi une baisse substantielle de ma rémunération-et que dans leur ensemble ces comptes fonctionnent plutôt bien, je ne peux que constater que depuis plusieurs mois, je ne suis admis sur aucun nouveau compte, toutes les répartitions ayant lieu sans moi, bien qu'au cours de notre entretien de décembre 2003 toi et Olivier avaient envisagé une répartition plus équitable. Enfin, je ne peux que constater que malgré mes remarques récurrentes, il y a une dérive dans le traitement des ordres de clients. Je ne peux pas continuer à accepter ces pratiques contraires aux règles de la profession et à l'intégrité du marché. En conséquence, face à ces graves manquements de nature à remettre en cause ma notoriété professionnelle, j'ai le regret de t'indiquer que je ne peux que prendre acte de la rupture de mon contrat de travail aux torts de BRYAN GARNIER. À compter de la première présentation de cette lettre je cesserai mon activité mais je demeure à votre disposition pour la passation des dossiers ». M. Guillaume X... quittait donc l'entreprise à la suite de cette lettre, sans que son employeur juge utile de lui répondre ou de le mettre en demeure de réintégrer son poste. Le 21 juin 2004 il saisissait le conseil de prud'hommes de Paris et aux fins de voir juger la rupture imputable à la société BRYAN GARNIER FORECAST. À la suite de cette saisine, M. Guillaume X... était convoqué, par lettre recommandée avec avis de réception du 20 juillet 2004 à un entretien préalable fixé le 27 juillet c'est-à-dire trois mois après la prise d'acte de rupture. Le 9 août 2004, M. Guillaume X... étant encore dans la période de protection jusqu'au 9 septembre du fait de son mandat de délégué du personnel suppléant, l'employeur saisissait l'inspection du travail pour solliciter l'autorisation de licencier. Par lettre recommandée avec avis de réception du 28 septembre 2004, après que l'inspection du travail ait dit n'y avoir lieu à autorisation, la société BRYAN GARNIER FORECAST notifiait à M. Guillaume X... un licenciement pour faute grave aux motifs suivants : «... Vous avez abandonné votre poste de travail depuis le 21 avril 2004, et ce, sans motif légitime. En raison de votre protection de votre statut d'ancien délégué du personnel, nous avons sollicité l'autorisation préalable de votre licenciement pour abandon de poste auprès des services de l'inspection du travail de Paris... Par décision du 9 septembre 2004, Monsieur l'inspecteur du travail s'est déclaré incompétent au motif que le délai de protection vous incombant avait expiré. Nous maintenons notre décision de vous licencier pour abandon de poste. En effet vous avez abandonné votre poste en prétendant à tort que votre rémunération aurait été modifiée sans votre accord, et en vous plaignant d'une prétendue volonté de vous mettre à l'écart. Curieusement votre courrier du 21 avril 2004 faisait suite à un avertissement précédent, dans lequel nous vous reprochions un certain nombre de fautes professionnelles. Votre courrier du 21 avril 2004 n'avait comme seul objectif que de vous défendre d'une situation disciplinaire extrêmement fâcheuse. À aucun moment votre contrat n'a été modifié sans votre accord. S'agissant de votre rémunération, je vous rappelle que depuis le 20 juin 2002, vous avez accepté contractuellement une nouvelle rémunération. Ainsi, vous n'aviez aucun motif pour abandonner votre poste. En revanche, il a fallu dans l'urgence, vous trouver un remplaçant temporaire pour répondre à nos clients qui n'ont évidemment pas compris une telle rupture. Votre abandon de poste nous a causé un grave préjudice commercial. Compte tenu de la gravité de ces faits, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible, et votre licenciement prend donc immédiatement effet... ». Le conseil de prud'hommes de Paris, section encadrement chambre 5, considérant qu'un accord salarial avait été conclu entre la société BRYAN GARNIER FORECAST et les vendeurs seniors en date du 20 juin 2002 et que cet accord avait été signé par M. Guillaume X..., et rappelant que l'intéressé quoiqu'il eût été délégué du personnel n'était en aucune façon intervenu dans le cadre de ses fonctions pour interpeller la direction sur cette décision pourtant présentée comme unilatérale et arbitraire, en a déduit que la prise d'acte de rupture formulée par M. Guillaume X... n'était pas justifiée, ce qui lui conférait le caractère d'une démission. Le conseil de prud'hommes déboutait en conséquence M. Guillaume X... de l'ensemble de ses demandes en annulation de l'avertissement, en paiement d'heures supplémentaires et d'indemnité compensatrice de préavis. M. Guillaume X... a régulièrement formé le présent appel contre cette décision. Soutenant le bien-fondé de la prise d'acte de rupture, il demande à la cour de la requalifier en licenciement, ledit licenciement étant nul comme intervenu pendant la période de protection. Il demande en conséquence de condamner la société BRYAN GARNIER FORECAST aux sommes suivantes :-15. 131, 88 Euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1513, 18 Euros pour congés payés afférents ;-2. 605, 74 euros à titre d'indemnité de licenciement,-60. 520, 68 Euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement.-15 709, 52 Euros à titre de rappel de salaire du 1er janvier 2002 à avril 2004 et 1570, 92 Euros pour congés payés afférents ;-79. 267 Euros à titre de paiement d'heures supplémentaires et 7. 926, 70 Euros à titre de congés payés afférents ;-30. 260, 34 Euros, pour travail dissimulé en application de l'article L. 324-11-1 du code du travail, le tout avec intérêt de droit à partir de la présente décision et capitalisation par année entière en application de l'article 1154 du Code civil. M. Guillaume X... sollicite en outre 2000 Euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. La société BRYAN GARNIER FORECAST a fait appel incident. Réfutant l'ensemble des motifs formulés à son encontre par le salarié dans sa lettre du 24 avril 2004, elle demande à la cour de confirmer la décision du conseil des prud'hommes de Paris en ce qu'il a qualifié la prise d'acte de rupture de démission et de débouter M. Guillaume X... de l'ensemble de ses demandes, mais d'infirmer ce jugement en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle qu'elle avait formée au titre de l'indemnité compensatrice pour préavis non effectué, soit 15. 131, 88 Euros.

À titre subsidiaire elle demande à la cour de juger que le licenciement intervenu le 28 septembre repose sur une cause réelle et sérieuse et de débouter en conséquence le salarié de l'ensemble de ses demandes. Elle sollicite en outre 1. 500 Euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
LES MOTIFS DE LA COUR : Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur l'interception et l'utilisation d'un certain nombre de mails de caractère, selon lui, privé de M. Guillaume X... : Dans le cadre de cette procédure, l'employeur a produit, à l'appui de ses dires, une cinquantaine de messages électroniques adressés ou reçus par M. Guillaume X..., pendant les premiers mois de l'année 2004. M. Guillaume X..., considérant qu'il s'agit là d'une violation d'une correspondance à caractère privé, demande à la cour d'écarter ces documents. L'employeur considère qu'il n'a pas violé une correspondance privée de son salarié dans la mesure où ces fichiers n'étaient pas identifiés comme " personnels ". Cependant, s'il est exact que ces fichiers n'apparaissent pas dans leur « objet » comme étant personnels, pour autant, à la lecture, leur contenu révèle rapidement la nature personnelle desdits messages, que ceux-ci concernent l'épouse du salarié ou un certain nombre de personnes avec qui il était amené à être en relation, de manière extra professionnelle, dans le cadre, notamment, des activités d'enseignement et d'écriture qu'il développait à l'extérieur de son travail. La cour est contrainte de relever, que la production en grand nombre et sur une même période, plus particulièrement de février mars et avril 2004, de toute une série de messages à caractère évidemment personnel, ne peut manifestement pas relever du hasard ni de " l'accident ", mais rapporte, de manière certaine la preuve de ce que, de manière systématique, délibérée et réitérée, l'employeur s'est octroyé le droit d'accéder à l'ordinateur utilisé personnellement M. Guillaume X... pour ouvrir, systématiquement ses messages, recherchant notamment, précisément, des messages à caractère personnel. Dès lors, ces pièces obtenues de manière irrégulière et en violation du principe du secret des correspondances privées, qui sont, en outre, sans grand intérêt sur le fond au regard du litige, seront écartées.

Sur la rupture du contrat de travail de M. Guillaume X... : La prise d'acte de rupture, par lettre de M. Guillaume X..., étant intervenue le 21 avril 2004, soit plus de cinq mois avant le licenciement, il convient d'examiner tout d'abord cette prise d'acte de rupture afin de dire quel impact elle a eu sur la relation de travail qui liait M. Guillaume X... à son employeur la société BRYAN GARNIER FORECAST.

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission. Le juge du fond peut, pour trancher la question de l'imputabilité, de la rupture, se fonder sur des présomptions. La rupture prend effet à la date à laquelle elle a été notifiée. L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à l'employeur ne fixe pas les limites du litige. Dès lors le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit. Le premier grief fait par le salarié à son employeur dans cette lettre est de ne lui avoir pas répondu à ses demandes du 5 février et du 4 mars 2004. Cette attitude de non-réponse de l'employeur, qui n'est pas utilement contestée par celui-ci, s'est poursuivie au-delà de la lettre du 21 avril 2004 dans la mesure où de cette date jusqu'au 20 Juillet, l'employeur n'a pas davantage cru devoir répondre, ni réagir à la lettre de prise d'acte de rupture. La cour considère qu'une telle attitude, qui ne peut s'analyser que comme une forme de mépris, a également pour conséquence de manière évidente d'empêcher tout dialogue et d'engendrer la méfiance entre les parties au contrat de travail, rendant la poursuite de celui-ci fort difficile. Ce grief est donc fondé. Quant au reproche fait à l'employeur d'avoir, en deux circonstances, réduit unilatéralement le salaire de M. Guillaume X..., celui-ci est également fondé. En effet, s'agissant du 1 % média, la cour considère que cet intéressement fixé à 1 % du chiffre d'affaires réalisé dans le secteur média, octroyé à M. Guillaume X... pendant sept mois de juin à décembre 2002 ne saurait s'analyser comme une gratification bénévole, mais constitue au contraire un élément contractuel du contrat de travail qui ne pouvait être supprimé de manière unilatérale. En effet, le fait d'avoir, pendant sept mois, de manière régulière, et selon un système de calcul identique et énoncé, versé une prime d'intéressement à M. Guillaume X..., confère à cette prime un caractère constant et fixe. En l'espèce, cependant, cette prime ne pouvait avoir un caractère général, dans la mesure où elle était spécifiquement attachée à l'activité média, dont M. Guillaume X... était le seul responsable, ce qui n'est pas contesté par l'employeur. Cette prime avait, de ce fait, à l'égard de celui-ci, un caractère contractuel et ne pouvait être subitement supprimée de manière unilatérale par l'employeur. S'agissant de l'accord conclu selon l'employeur le 20 juin 2002 avec les vendeurs seniors, accord qui réduisait la partie fixe de leur salaire brut de 5 272, 20 Euros par mois en ce qui concerne M. Guillaume X..., à 5 000 Euros, tout en modifiant quelque peu le mode de calcul de la partie variable, l'employeur fait valoir que cette décision a été prise pour éviter des licenciements dans une période économique tendue et qu'il a recueilli l'accord de tous les intéressés, y compris M. Guillaume X..., qui ont émargé le 20 juin 2004, en y portant la mention " bon pour accord ", une feuille sur laquelle était inscrite : « il a été convenu que le salaire des vendeurs seniors se décompose de la manière suivante... ». L'employeur en tire argument pour dire que cette modification du contrat de travail aurait dès lors été contractuelle.

La cour ne peut toutefois que rappeler la disposition d'ordre public posée par l'article L. 321-1-2 du code du travail, qui dispose que « lorsque l'employeur pour un des motifs énoncés à l'article L. 321-1 envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception. La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus. À défaut de réponse dans le délai d'un mois le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée ». Or la rémunération du salarié constituant un élément du contrat de travail, celle-ci quand bien même fût-ce à cause de difficultés économiques rencontrées par l'entreprise, ne pouvait être modifiée sans que l'employeur ne respecte cette procédure, ce qu'il n'a, évidemment, pas fait. Faute d'avoir respecté cette procédure, l'employeur ne pouvait se prévaloir d'une acceptation par le salarié de la modification du contrat de travail, sous une autre forme. En outre, M. Guillaume X... étant, à cette date du 20 juin 2002, salarié protégé, en l'absence d'accord en bonne et due forme de sa part, la rémunération ne pouvait être modifiée sans autorisation préalable de l'inspection du travail. Dès lors, ni le fait que M. Guillaume X... n'ait pas plus tôt contesté ces baisses de salaires, ni le fait qu'il n'ait pas, comme semble à plusieurs reprises le lui suggérer le conseil de prud'hommes, " usé " de son statut de salarié protégé pour s'élever contre de telles modifications, ne sont de nature à rendre les dites modifications contractuelles et régulières. La cour indique, en outre, que même si cette modification du 20 juin 2002 avait été régulière en la forme, elle n'aurait pas, pour autant, régularisé a posteriori la première modification concernant le salaire, intervenue de manière unilatérale, plusieurs mois auparavant. Ces faits évoqués dans la lettre de prise d'acte de rupture, l'étaient donc de manière appropriée. Ces deux premiers griefs, à eux seuls, justifiaient et suffisaient à fonder une prise d'acte de rupture aux torts de l'employeur. M. Guillaume X... formulait toutefois ensuite à l'encontre de son employeur deux autres motifs fondant selon lui la prise d'acte de rupture :- une " volonté constante de (le) mettre à l'écart "... toutes les répartitions ayant lieu depuis plusieurs mois sans lui ; sur ce point, et à l'exception de l'affaire sus mentionnée concernant M. Gilles Y..., les deux parties n'ont pas produit suffisamment d'éléments à la cour pour permettre à celle-ci d'apprécier de manière définitive le bien-fondé de ce reproche.- une dérive dans le traitement des ordres de clients... pratique contraire aux règles de la profession et à l'intégrité du marché qu'il ne pouvait continuer à accepter. Sur ce dernier grief, la cour ne peut que relever l'absence totale d'éléments de réponse de la part de l'employeur, alors que M. Guillaume X... produit un certain nombre d'éléments,- rapports de gestion présentés par le conseil d'administration de mars 2003, 2004, et 2005-, d'où il ressort que dans des circonstances que la cour n'est pas totalement en situation d'apprécier, le fonctionnement du conseil d'administration a été marqué successivement par plusieurs difficultés :

- absence puis démission de l'un des membres du conseil d'administration et rapport de gestion incomplet en 2003,- démission du commissaire aux comptes titulaire et du commissaire aux comptes suppléant en 2004,- note du nouveau commissaire aux comptes en date du 16 mars 2005 indiquant : « en notre qualité de commissaire aux comptes de la société BRYAN GARNIER FORECAST nous devons présenter, dans un rapport, nos observations sur le rapport établi par le président de votre société conformément aux dispositions de l'article L. 225-37 du code du commerce, au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2004 pour ce qui concerne les procédures de contrôle interne relatives à l'élaboration et au traitement de l'information comptable et financière. En application de l'article L. 225-240 du code du commerce, nous vous signalons que ledit rapport, prévu par les dispositions légales précitées, ne nous a pas été transmis. En raison des faits exposés ci-dessus, nous ne sommes pas en mesure de formuler nos observations conformément aux dispositions de l'article L. 225-235 quatrième alinéas du code du commerce ". Il est dès lors compréhensible et admissible que conscient de tels dysfonctionnements, un employé au statut de cadre de la société ait pu craindre de voir son image personnelle affectée par ceux-ci, dans le milieu professionnel dans lequel il entendait faire carrière. En conséquence de tous ces éléments, la cour considère, contrairement à ce qu'a jugé le conseil des prud'hommes, que la prise d'acte de rupture rédigée le 21 avril 2004 par M. Guillaume X..., peu important qu'il soit salarié protégé, et peu important le fait qu'il aurait immédiatement retrouvé un autre emploi, était fondée et a produit dès lors à cette date les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, imputable à l'employeur. Dès lors, la procédure de licenciement engagée ultérieurement a été sans incidence et ne sera donc pas examinée par la cour. En conséquence, ledit licenciement à la charge de l'employeur étant considéré comme intervenu le 21 avril 2004, il a eu lieu à un moment où M. Guillaume X... bénéficiait encore du statut de salarié protégé, sans que soit respectée l'obligation d'autorisation préalable de l'inspection du travail, ce qui en fait un licenciement nul. En conséquence de cette nullité, la cour fait droit, en application de l'article L. 122-14-4 du code du travail, à la demande d'indemnité formulée par M. Guillaume X... et justifiée à hauteur de 60. 520, 68 Euros correspondant à 12 mois de salaire.

Sur l'indemnité de préavis, les congés payés afférents et l'indemnité de licenciement : La rupture du contrat de travail de M. Guillaume X... produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, celui-ci ayant une ancienneté de cinq ans et deux mois et bénéficiant du statut cadre, la cour fait droit aux demandes du salarié, dans leur principe, comme dans leurs montants non utilement contestés par l'employeur, en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents ainsi que l'indemnité de licenciement.

Sur la demande de rappel de salaire au titre de la prime 1 % média : La moyenne mensuelle des primes versées à ce titre courant 2001 s'élevant à 561, 04 Euros l'employeur devra régler à M. Guillaume X... à ce titre pour la période du 1er janvier 2002 au 21 avril 2004, une somme globale de 15. 709, 22 Euros, outre 1570, 92 Euros pour congés payés

Sur la demande de paiement pour heures supplémentaires : En application de l'article L. 212-1-1 la charge de la preuve des heures supplémentaires n'incombe spécialement ni à l'une ni à l'autre partie. Si l'employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, ce dernier doit d'abord fournir des éléments pour étayer sa demande. Le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par chacune des parties. Contractuellement, M. Guillaume X... était supposé effectuer 39 heures puis à compter de janvier 2002, 35 heures par semaine. Il plaide, conforté en cela par une attestation circonstanciée, et régulière la forme, rédigée par M. Frank F..., que la pratique générale dans ces entreprises consiste à tenir tous les matins aux alentours de 8h30, un Morning meeting pour faire le point en équipe, sur l'ensemble des événements intervenus depuis la veille au soir et en tirer les conséquences en termes de stratégie pour la journée. Cette réunion à laquelle participent nécessairement les analystes comme M. Guillaume X..., suppose que ceux-ci aient tout d'abord collecté les informations utiles, ce qui leur impose, de manière incontestable, d'être de fait au travail dès 7h ou 7h30. Ceci, qui est par ailleurs confirmé par trois attestations d'anciens collègues de M. Guillaume X..., que la cour considère comme régulières en la forme, n'est pas utilement contesté par la société BRYAN GARNIER FORECAST. M. Guillaume X... établit par ailleurs en produisant un certain nombre de mails, que si certains jours il quittait son bureau, comme le soutient l'employeur aux alentours de 17h30, en revanche assez régulièrement, à certaines périodes, il travaillait encore jusqu'à 21 heures 21h 30. Ceci est par exemple établi pour les 22, 25 et 30 septembre, 2, 7, 9 et 14 octobre 2003, peu important le fait de savoir si ces mails ont été envoyés du bureau ou d'ailleurs, dans la mesure où, de manière indéniable, ils concernent les activités professionnelles de l'intéressé. M. Guillaume X... prétend en tout état de cause que ses horaires normaux et courants étaient régulièrement de 7h30 à 18 heures ou 18h30, ce qui représente, compte tenu du temps de pause, 9 h 30 à 10 heures de travail par jour, cinq jours par semaine. À partir de l'année 2003 toutefois M. Guillaume X... admet que, démotivé, il a quelque peu réduit ses heures de travail, son horaire hebdomadaire devenant alors le plus souvent de 47 heures. M. Guillaume X... réclame donc le paiement, à un taux majoré de 25 puis 50 %, de ces heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées, ainsi que des repos compensateurs non pris. Il chiffre en conséquence sa demande à 79. 267 Euros, plus les congés payés afférents.

En réponse l'employeur fait valoir qu'un planning des horaires collectifs était affiché prévoyant un temps de travail de 8 à 12 heures et de 14 à 17h30, heure de fermeture des marchés, avec une pause de deux heures, cinq jours par semaine. Il indique que les quelques heures supplémentaires, inévitables, effectuées par M. Guillaume X... ou par les autres analystes vendeurs ont été réglées avec une majoration de 10 %, ces heures expliquant le maintien, après le passage aux 35 heures, d'une rémunération sur la base de 169 heures par mois, les heures de la 35e à 39e heure par semaine étant rémunérées à un taux majoré de 10 %. Il soulève également le fait que M. Guillaume X..., bien que délégué du personnel suppléant, n'a jamais du temps de sa collaboration, réclamé le paiement desdites heures supplémentaires et conteste la validité des attestations produites. Enfin l'employeur indique que M. Guillaume X... a mené parallèlement un certain nombre d'activités d'enseignement, que celui-ci ne conteste d'ailleurs pas, mais pour lesquelles il dit avoir eu l'accord de son employeur, activités qui nécessairement s'imputaient, à tout le moins, pour partie sur ses horaires de travail, ce dont l'employeur conclut que M. Guillaume X... « n'effectuerait en réalité même pas ses horaires ». La cour considère au vu de l'ensemble de ces éléments, et en l'absence d'éléments plus précis rapportés par l'employeur quant aux horaires effectifs du salarié, que de manière évidente et irrégulière, M. Guillaume X..., était nécessairement amené à accomplir en fonction des événements professionnels qu'il devait gérer un certain nombre d'heures supplémentaires, au-delà des 169 heures rémunérées, mais bénéficiait, aussi, comme cela est d'usage dans de telles fonctions, d'une certaine latitude pour se consacrer à des tâches annexes, par ailleurs non totalement étrangères à son activité professionnelle. La cour a, en conséquence, les éléments pour dire que M. Guillaume X... a effectué, tout au long de sa collaboration au sein de la société BRYAN GARNIER FORECAST, mais de manière irrégulière, des heures supplémentaires en sus de celles portées sur les bulletins de salaire, éléments qui lui permettent de fixer à la somme de 33. 000 Euros, congés payés inclus, le rappel de salaires dus à ce titre.

Sur l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : Les circonstances de l'espèce, les aléas et la part individuelle qui, dans de telles fonctions, aboutissent nécessairement à des horaires d'une certaine variabilité, ne permettent pas de considérer que l'élément intentionnel, indispensable pour retenir un travail dissimulé, soit effectivement établi. La cour déboute donc M. Guillaume X... de sa demande à ce titre

Sur les dommages et intérêts au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile : La Cour considère que, compte tenu des circonstances de l'espèce, il apparaît inéquitable de faire supporter M. Guillaume X... la totalité des frais de procédure qu'il a été contraint d'exposer. Il sera donc alloué une somme de 2. 000 euros, à ce titre pour la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS, En conséquence, la Cour, Infirme la décision du Conseil de prud'hommes de Paris le 9 juin 2005, Et statuant à nouveau : Dit que la rupture du contrat de travail de M. Guillaume X... intervenue le 21 avril 2004, est fondée à l'encontre de la société BRYAN GARNIER FORECAST et produit les effets d'un licenciement à la charge de l'employeur à cette date ; Dit que ce licenciement est nul et de nul effet, Condamne la société BRYAN GARNIER FORECAST à payer, en conséquence, à M. Guillaume X... les sommes suivantes :-60. 520, 68 Euros, (SOIXANTE MILLE CINQ CENT VINGT EUROS et SOIXANTE HUIT CENTIMES) à titre d'indemnité pour licenciement nul ;-15. 131, 88 Euros (QUINZE MILLE CENT TRENTE ET UN EUROS et QUATRE VINGT HUIT CENTIMES) à titre d'indemnité de préavis et 1. 513, 18 Euros (MILLE CINQ CENT TREIZE EUROS et DIX HUIT CENTIMES) pour congés payés afférents ;-2. 605, 74 Euros (DEUX MILLE SIX CENT CINQ EUROS et SOIXANTE QUATORZE CENTIMES) à titre d'indemnité de licenciement ;-15 . 709, 22 Euros (QUINZE MILLE SEPT CENT NEUF EUROS et VINGT DEUX CENTIMES) à titre de rappel de salaires de janvier 2002 à avril 2004- et 1. 570, 92 Euros (MILLE CINQ CENT SOIXANTE DIX EUROS et QUATRE VINGT DOUZE CENTIMES) pour congés payés afférents ;-33. 000 Euros (TRENTE TROIS MILLE EUROS) pour rappel d'heures supplémentaires, congés payés inclus. Dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la présente décision et ordonne la capitalisation des intérêts par année entière en application de l'article 1154 du Code civil. Déboute M. Guillaume X... du surplus de ses demandes ; Déboute la société BRYAN GARNIER FORECAST de ses demandes reconventionnelles ; Condamne la société BRYAN GARNIER FORECAST à régler à M. Guillaume X... la somme de 2. 000 Euros (DEUX MILLE EUROS) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure. La condamne aux entiers dépens de l'instance. LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : 21ème chambre c
Numéro d'arrêt : 06/1123
Date de la décision : 20/12/2007

Références :

ARRET du 17 mars 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 mars 2010, 08-40.907, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 09 juin 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-12-20;06.1123 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award