Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
19ème Chambre - Section A
ARRET DU 19 DECEMBRE 2007
(no , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 06/17817
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Septembre 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS 7ème chambre 2ème section - RG no 06/07347
APPELANTE
S.A.S. AIRBUS FRANCE, venant aux droits de la société AEROSPATIALE
prise en la personne de son gérant
ayant son siège 316 route de Bayonne 31060 TOULOUSE
représentée par Me Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour
assistée de Maître LE GUILLOU ( SCP BIRD et BIRD) avocat
INTIMEES
SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCES DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS - SMABTP
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 114, avenue Emile Zola 75739 PARIS CEDEX 15
représentée par Me Jean-Yves CARETO, avoué à la Cour
assistée de Maître BOYVINEAU (SCP NABA) avocat
SOCIETE AREAS DOMMAGES, venant aux droits de la CAISSE MUTUELLE D'ASSURANCES ET DE PREVOYANCE( CMA)
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 45-47 rue de Miromesnil 75008 PARIS
représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour
assistée de Maître CHARLIE avocat
SOCIETE GTB CONSTRUCTION (GTB BOUYER DUCHEMIN)
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 6 rue Alain Colas 44202 NANTES
représentée par la SCP VERDUN - SEVENO, avoués à la Cour
assistée de Maître SCHNEIDER (selarl GRIFFITHS DUTEIL) avocat au barreau de Lisieux
S.N.C. CERA INGENIERIE
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 23 rue de Cronstadt 75015 PARIS
SOCIETE MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF
Agissant en la personne de son Directeur Général
ayant son siège 9 rue Hamelin 75783 PARIS CEDEX 16
représentées par la SCP Anne-Marie OUDINOTet Pascale FLAURAUD, avoués à la Cour
assistées de Maître LIVORY avocat au barreau de Nantes (dépôt du dossier)
S.A.R.L. CUNHA
prise en la personne de son gérant
ayant son siège 7 impasse du Forgeron Zone Industrielle 44806 SAINT HERBLAIN CEDEX
représentée par Me Lionel MELUN, avoué à la Cour
assistée de Maître REVEAU avocat au barreau de Nantes (dépôt du dossier)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 6 novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-France FARINA, présidente
Monsieur Jean DUSSARD, conseiller
Madame Agnès FOSSAERT-SABATIER, conseillère
qui en ont délibéré.
rapport fait conformément aux dispositions de l'article 785 du nouveau code de procédure civile
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Hélène ROULLET
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par Madame Marie-France FARINA, présidente
- signé par Madame Marie-France FARINA, présidente et par Madame Marie-Hélène ROULLET, greffier présent lors du prononcé.
La société AIRBUS, venant aux droits de la société AEROSPATIALE a fait réaliser début 1997 des travaux de modification d'un bâtiment industriel sur son site de Nantes. Des désordres de la dalle de l'atelier flexible étant survenus, la société AIRBUS, après expertise, a assigné en réparation les constructeurs et assureurs, notamment:
• la société CERA INGENIERIE maître d'oeuvre avec mission complète, assurée auprès de la MAF
• la société GTB CONSTRUCTION venant aux droits de GTB BOUYER DUCHEMIN, entreprise chargée du lot gros oeuvre, assurée par la SMABTP
• la société CUNHA sous-traitante de la société GTB CONSTRUCTION pour le lot dallage béton, assurée par la société AREAS DOMMAGES venant aux droits de CMA
Par jugement du 6 avril 2006, aujourd'hui irrévocable, le Tribunal de Grande Instance de Paris a, notamment:
- condamné in solidum la société CERA INGENIERIE, la MAF, la société GTB CONSTRUCTION, la SMABTP, la société CUNHA et la société AREAS DOMMAGES à payer à la société AIRBUS la somme de 740 000 €, outre intérêts au taux légal à compter du jugement, au titre du préjudice subi par cette société en conséquence des dommages ayant affecté le dallage de l'atelier flexible
- dit n'y avoir lieu à capitalisation
- dit que dans les rapports entre co-responsables cette condamnation sera répartie à proportion de 45% pur la société CERA INGENIERIE, 15% pour la société GTB CONSTRUCTION et 40% pour la société CUNHA
- dit la société AREAS DOMMAGES fondée à opposer ses limites contractuelles
Par requête du 16 mai 2006, la société AIRBUS a demandé la rectification d'une erreur matérielle ayant conduit au rejet de sa demande formée au titre des travaux de réfection du dallage du bâtiment.
Par jugement du 14 septembre 2006, frappé d'appel par la société AIRBUS, le Tribunal de Grande Instance de Paris a rejeté la requête en rectification d'erreur matérielle.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, procédures, prétentions et moyens des parties, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux conclusions d'appel dont les dernières ont été signifiées:
• le 14 février 2007 pour la société CUNHA
• le 2 octobre 2007 pour la société GTB CONSTRUCTION
• le 9 octobre 2007 pour la SMABTP
• le 9 octobre 2007 pour la société AIRBUS
• le 26 octobre 2007 pour la société CERA INGENIERIE et la MAF
• le 26 octobre 2007 pour la société AREAS DOMMAGES venant aux droits de CMA
La clôture a été prononcée le 6 novembre 2007.
Cela étant exposé, la Cour:
Considérant que pour rejeter la demande formée par la société AIRBUS au titre des travaux et prestations engagés, le jugement du 6 avril 2006, après avoir rappelé que l'expert avait noté page 125 de son rapport qu'aucune facture n'était présentée, relève que "le tribunal n'a pas trouvé au dossier davantage de justificatifs de ces demandes dont le quantum n'est pourtant pas négligeable. Ce poste de réclamation ne saurait donc être pris en considération" ;
Considérant qu'il résulte de ce motif que le tribunal a fondé son rejet sur l'absence matérielle au dossier des pièces justifiant la demande ;
Considérant que pour rejeter la requête en rectification présentée par la société AIRBUS au motif qu'il ne s'agissait pas d'une erreur matérielle mais d'une erreur d'appréciation des pièces produites, le jugement entrepris énonce notamment que "cette motivation pêche par une maladresse manifeste ... . En effet la société AIRBUS avait, comme elle l'observe à juste titre, effectivement produit les pièces qu'elle jugeait nécessaires à appuyer sa prétention et qu'elle énumère dans sa requête et le tribunal les avait étudiées dans son délibéré: il était donc erroné de la part du rédacteur de la décision d'avoir écrit de manière trop hâtive une phrase qui a pu être comprise comme signifiant que les pièces ne se trouvaient pas au dossier, alors qu'il entendait dire qu'il n'avait pas su les interpréter et y trouver les justificatifs des dépenses exposées et qu'il lui apparaissait que sauf erreur (qu'il semble en fait avoir commise) ces pièces étaient les mêmes que celles que l'expert n'avaient pas retenues comme probantes ... " ;
Mais considérant que ce faisant, le tribunal s'est livré à une interprétation du jugement du 6 avril 2006 qui ne lui était pas demandée et qu'aucune ambiguïté ou obscurité dudit jugement ne justifiait ; que l'interprétation proposée, en ce qu'elle dit que le tribunal a examiné les pièces produites et les a estimées insuffisantes, est de surcroît radicalement contraire aux motifs précités de la décision ;
Considérant que c'est dès lors à tort que le jugement entrepris a rejeté la demande en rectification alors que le jugement du 6 avril 2006 révélait que le juge n'avait écarté la demande que sur la croyance erronée que les pièces justificatives n'étaient pas au dossier ;
Considérant que la société AIRBUS réclame le remboursement des débours exposés (investigation et travaux) pour mettre fin aux désordres, dont chacun des postes est justifié par la production des bons de commande et factures, pour un montant 349 093 € HT, soit le montant total des dépenses engagées (432 102 €) déduction faite de l'indemnité de 83 009 € reçue de l'assureur dommages ouvrage ;
Considérant que le jugement entrepris indique que ce poste de demande "n'était plus contesté en défense" ; que seule la société AREAS DOMMAGES soutient qu'elle avait contesté ledit poste mais que la lecture de ses conclusions de première instance (p. 15) montre qu'elle s'était bornée à invoquer l'absence de justificatifs et le versement d'une indemnité par l'assureur dommages ouvrage ;
Qu'il y a lieu d'accueillir la requête en ajoutant à la condamnation prononcée par le jugement du 6 avril 2006 au titre du dommage immatériel, une condamnation à payer la somme de 349 093 € HT au titre du dommage matériel ;
Considérant que la réparation de l'erreur commise ne peut modifier les droits et obligations reconnus aux parties par cette décision ; qu'en conséquence les intérêts au taux légal sur la condamnation ajoutée courront à compter du jugement rectifié ;
Qu'il sera rappelé, en réponse à l'objection de la société AREAS DOMMAGES, que le jugement rectifié l'a déclarée fondée à opposer ses limites contractuelles ;
Qu'enfin le jugement rectifié a précisé (p.17) que le moyen de non garantie du dommage matériel, tiré par la SMABTP de ce qu'elle n'est pas l'assureur décennal de la société GTB CONSTRUCTION, était fondé ; qu'il s'ensuit que cet assureur ne peut être condamné au titre de la demande formée par la société AIRBUS et que la Cour en tient compte dans la rectification ordonnée ;
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement et publiquement ;
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
Vu l'article 462 du nouveau Code de procédure civile,
Accueille la requête en rectification d'erreur matérielle présentée par la société AIRBUS ;
Dit que le chef de dispositif du jugement du 6 avril 2006 ainsi libellé "Fixe à la somme de 740 000 € l'indemnisation du préjudice subi par la société AIRBUS en conséquence des dommages ayant affecté le dallage de l'atelier flexible du site de Bougenais" est remplacé par :
"Fixe à la somme de 740 000 € l'indemnisation du préjudice subi par la société AIRBUS en conséquence des dommages ayant affecté le dallage de l'atelier flexible du site de Bougenais et à la somme de 349 093 € HT le coût des travaux d'investigation et de réparation exposé par la société AIRBUS du fait des désordres affectant le dallage" ;
Complète le dispositif du jugement du 6 avril 2006 par le chef suivant:
"Condamne in solidum la société BET CERA, la MAF, la société GTB CONSTRUCTION, la société CUNHA et la société AREAS DOMMAGES à payer à la société AIRBUS la somme de 349 093 € HT (TROIS CENT QUARANTE NEUF MILLE QUATRE VINGT TREIZE euros)";
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne in solidum la société BET CERA, la MAF, la société GTB CONSTRUCTION, la société CUNHA et la société AREAS DOMMAGES aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE