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18/12/2007 | FRANCE | N°29

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0138, 18 décembre 2007, 29


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre B

ARRET DU 18 Décembre 2007

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/00961

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 4 Janvier 2007 par le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE SAINT GEORGES RG no 06/00307

APPELANTE

SARL INTRABUS ORLY

Bureau 5557 - Aérogare Sud

BP 257

94543 ORLY

représentée par Me Catherine PEYRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D 182

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75015 PARIS

représentée par Me Raymond DEHORS, avocat au barreau de PARIS, toque : P 375

COMPOSITION DE LA COUR :

L'aff...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre B

ARRET DU 18 Décembre 2007

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/00961

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 4 Janvier 2007 par le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE SAINT GEORGES RG no 06/00307

APPELANTE

SARL INTRABUS ORLY

Bureau 5557 - Aérogare Sud

BP 257

94543 ORLY

représentée par Me Catherine PEYRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D 182

INTIMÉE

Mademoiselle Badia X...

...

75015 PARIS

représentée par Me Raymond DEHORS, avocat au barreau de PARIS, toque : P 375

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller

Monsieur Daniel FONTANAUD, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffière : Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente et par Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, greffière présente lors du prononcé.

Exposé des faits et de la procédure

Mlle Badia X... a été engagée par la SARL INTRABUS ORLY à compter du 7 mars 2005, en qualité de conductrice de cars par contrat de travail à durée déterminée d'un an. L'intéressée a été victime d'un accident du travail en novembre 2005 et est restée en arrêt de travail jusqu'au 30 septembre 2006. Le 14 mars 2006, la société INTRABUS ORLY a mis fin au contrat. Le dernier salaire mensuel brut de Mlle X... s'élevait à 1 550 euros.

Par jugement du 4 janvier 2007, le Conseil de prud'hommes de VILLENEUVE ST GEORGES a requalifié le contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et a condamné la société INTRABUS ORLY au paiement de sommes à titre de requalification de contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, d'indemnité de préavis et congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société INTRABUS ORLY en a relevé appel.

Il est expressément fait référence au jugement pour l'exposé des faits et de la procédure ainsi que, pour les prétentions et moyens des parties, aux conclusions visées et soutenues oralement et contradictoirement le 12 novembre 2007.

* *

*

Discussion

Sur la rupture

Argumentation de Mlle X...

Mlle X... soutient qu'elle est entrée au service d'INTRABUS en qualité de conductrice de car, chargée à ce titre de conduire les navettes sur l'ensemble du tarmac de l'aéroport d'ORLY, navettes acheminant les passagers des salles d'embarquement vers les avions en partance.

Elle fait valoir qu'il s'agit là de l'activité normale et durable de l'entreprise et que son embauche ne correspondait pas à un surcroît temporaire d'activité, ni même au remplacement d'un quelconque salarié absent. Elle expose à cet égard qu'elle ne voit pas en quoi la suppression d'un hall et des travaux de réaménagement créeraient un surcroît temporaire d'activité pour l'entreprise.

Elle ajoute qu'elle a travaillé sur l'ensemble de l'aéroport d'ORLY, aussi bien sur ORLY SUD que ORLY OUEST et pour l'ensemble des halls alors que le contrat à durée déterminée doit être conclu pour l'exécution d'une tâche précise.

De plus, la salariée invoque le fait que l'employeur a rompu le contrat sans motif par lettre datée du 14 mars 2006, à une date postérieure à l'échéance prévue pour le contrat à durée déterminée qui expirait le 7 mars 2006. Elle estime que, dès lors, le contrat de travail s'est poursuivi pendant une période de huit jours sans avoir été rompu, la salariée étant, pendant cette période, toujours placée en arrêt de travail jusqu'au 5 avril 2006. Elle estime que la relation contractuelle de travail s'est ainsi poursuivie après l'échéance du terme du contrat à durée déterminée et que celui-ci est devenu un contrat à durée indéterminée.

Enfin la salariée souligne que, dès l'origine de la procédure, elle a fait sommation de communiquer le livre d'entrées et de sorties du personnel, les contrats de travail à durée indéterminée conclus avec des salariés au même moment que celui conclu avec elle ainsi que les contrats à durée déterminés conclus à cette même période et qui ont été renouvelés en avril 2006 sans période de carence. Elle indique que la société INTRABUS ORLY n'a jamais répondu à la sommation de communiquer au motif que les éléments demandés seraient confidentiels, alors que ces éléments auraient pu permettre de montrer qu'il n'y avait aucun accroissement temporaire d'activité.

Argumentation de la société INTRABUS ORLY

La société INTRABUS ORLY fait valoir que l'article L.122-1-1 2 du code du travail autorise la conclusion d'un contrat à durée déterminée pour faire face à un accroissement temporaire d'activité qui s'entend comme une augmentation temporaire de l'activité normale de l'entreprise. Elle relève que cet accroissement d'activité s'apprécie à la date de conclusion du contrat et précise que le motif doit être précis et vérifiable mais qu'il suffit que le motif mentionné permette de vérifier que l'emploi présente un caractère temporaire justifiant le recours à un contrat à durée déterminée.

La société INTRABUS ORLY expose que les pièces versées aux débats établissent tant la réalité de l'accroissement d'activité que le caractère temporaire des travaux de réaménagement des salles d'embarquement d'Orly Ouest et de la suppression du Hall 2.

L'employeur indique que les travaux ont pris fin en avril 2006. Il estime que cet événement justifiait l'embauche en CDD de Mlle X... pendant un an, correspondant à la durée des travaux et à la fermeture des accès directs.

La société souligne que l'employeur n'est pas tenu d'affecter le salarié aux tâches directement liées au surcroît temporaire d'activité et admet que la salariée, qui a été engagée pour faire face au surcroît de travail généré par la fermeture du Hall 2, a naturellement travaillé sur l'ensemble des pistes, aucune navette n'étant spécialement affectée au Hall 2. Selon lui, cette circonstance ne démontre pas que la salariée aurait été recrutée pour une activité permanente et durable.

Par ailleurs, l'employeur expose que la société n'était pas tenue d'adresser une lettre de rupture à la salariée, le contrat conclu à terme précis cessant de plein droit à son terme sans que les parties aient à prendre une initiative.

Il ajoute que le fait que le solde de tout compte aurait été adressé à l'intéressée le 14 mars 2006 n'a pu avoir pour effet de poursuivre le contrat au delà du terme prévu.

Position de la Cour

Il résulte de l'ensemble des éléments versés aux débats que la société INTRABUS assure, pour le compte de l'établissement public Aéroports de Paris et essentiellement de la compagnie AIR FRANCE, le transport par autobus des passagers et équipages sur les pistes de l'aéroport d'Orly.

Il est par ailleurs constant que la société Aéroports de Paris (ADP) a fermé le Hall 2 pour effectuer des travaux de rénovation à compter du mois de mars 2005, ce qui a conduit la société INTRABUS à augmenter ses prestations pour transporter les passagers et équipages qui sont normalement embarqués dans le Hall 2 de l'aéroport qui permet en principe l'accès direct aux avions par des passerelles sans qu'il soit fait appel à un transport par un service de bus. Pour faire face à cette demande pendant la durée des travaux.

Dans ce contexte qui a conduit la société à renforcer son parc de véhicules et à recruter du personnel à titre temporaire, Mlle X... a été engagée le 7 mars 2005, en qualité de conductrice de cars, pour une durée déterminée d'un an expirant le 6 mars 2006.

Le motif de recours au contrat de travail à durée déterminée mentionné dans le contrat indique: " travaux de réaménagement des salles d' embarquement à Orly Ouest entraînant la suppression du hall 2".

Ce motif mentionné dans le contrat suffit à démontrer, alors même qu'il n'est pas fait une référence expresse au libellé de l'un des cas spécifiques de recours au contrat de travail à durée déterminée énumérés à l'article L. 122-1-1 du code du travail, que le contrat a été conclu en raison d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

Or, en l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que la société avait effectivement à faire face à un surcroît temporaire d'activité en raison des travaux précités : les comptes annuels de la société INTRABUS arrêtés au 31 décembre 2005 montrent un chiffre d'affaires en progression de 93 % durant l'année 2005 qui est expliqué dans le rapport de gestion à l'Assemblée générale ordinaire du 27 juin 2006 par "les travaux importants de rénovation sur les terminaux qui ont provoqué un nombre très important de vols à traiter au large".

Le rapport note à cet égard que "la principale difficulté a été l'adaptation rapide au surcroît important d'activité tant en terme de véhicules que d'effectif". Enfin, dans la rubrique "Evénements importants survenus depuis la clôture de l'exercice", le rapport de gestion note que "la fin des travaux et de la suractivité associée est effective depuis le début du mois d'avril 2006..."

De plus, il ressort clairement d'un compte-rendu d'une réunion du 24 février 2005 sous l'égide d'Air France qu'il fallait que la société INTRABUS ORLY prenne en compte l'impact des travaux du Hall 2 en ce qui concerne les vols au large et il y est mentionné l'embauche par la société INTRABUS ORLY de personnel en contrat de travail à durée déterminée ainsi que la mise en place de bus supplémentaires dés janvier 2005.

Enfin, cet accroissement d'activité temporaire résulte aussi d'une réponse ministérielle du Ministre des Transports à une question parlementaire publiée dans le JO Sénat le 15 juin 2006 aux termes de laquelle : "Depuis mars 2005, Aéroports de Paris a engagé à l'aéroport d'Orly d'importants travaux de rénovation du hall 2 de l'aérogare Ouest. Ces travaux, qui se sont achevés début avril 2006, ont entraîné une diminution temporaire des ressources aéroportuaires et plus précisément la suppression, pour le hall concerné, de 9 postes de stationnement d'avions au contact permettant l'utilisation de passerelles pour l'embarquement ou le débarquement des passagers... L'augmentation du nombre des avions stationnés en aires éloignées, consécutive à ces travaux, s'est accompagnée d'une adaptation des moyens de transport des passagers sur les aires : ainsi, 41 bus ont été mis en service alors que 31 l'étaient avant le lancement des travaux. Toutefois, ces moyens ont pu parfois s'avérer insuffisants au regard de l'accroissement plus important que prévu du trafic sur Orly, et conduire à une augmentation des temps d'attente des passagers à J'embarquement et au débarquement. La plupart des liaisons ont retrouvé une situation satisfaisante depuis la mise en service du hall 2 rénové le 3 avril dernier..."

L'ensemble des éléments versés aux débats établit ainsi que Mlle X... a bien été embauchée par contrat de travail à durée déterminée pour faire face à un surcroît temporaire d'activité pendant les travaux de réaménagement des salles d' embarquement à Orly Ouest entraînant la suppression du hall 2.

Cet accroissement d'activité consécutif aux travaux, qui nécessitait l'utilisation pendant une période limitée de bus à la place de passerelles pour l'embarquement et le débarquement des passagers, a précisément correspondu dans le temps à la période d'emploi de Mlle X..., et ne peut être assimilée en l'espèce à une activité normale et permanente de l'entreprise.

Enfin, le fait que la salariée ait travaillé pour l'ensemble des halls et non seulement pour effectuer des rotations liées directement aux travaux n'a pas pour effet de transformer la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée, l'employeur n'ayant pas l'obligation d'affecter la salariée exclusivement à des tâches directement liées au surcroît d'activité.

Par ailleurs, il résulte des pièces versées aux débats que, nonobstant les allégations de Mlle X..., l'employeur n'a pas notifié de lettre de rupture à la salariée. En effet, l'employeur a adressé une lettre recommandée avec accusé de réception émanant du service "paie" le 14 mars 2006 pour faire parvenir à la salariée, qui se trouvait alors en arrêt de travail, son bulletin de salaire pour la période du 1er au 6 mars 2006, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte établi en deux exemplaires, une attestation destinée à l'ASSEDIC et un chèque représentant son solde de tout compte. Ce courrier prend d'ailleurs expressément en compte la fin du contrat à la date du 6 mars.

Ainsi, le contrat, qui était conclu à terme précis, ne s'est pas poursuivi et a cessé à son terme sans que les parties aient eu à prendre une initiative.

Le jugement du Conseil de prud'hommes sera donc infirmé et Mlle X... sera déboutée de sa demande au titre de la requalification de son contrat de travail à durée déterminée ainsi que de ses demandes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité de licenciement, indemnité pour irrégularité de procédure, indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents.

Par ailleurs, il convient d'ordonner la restitution de la somme versée par la société INTRABUS ORLY au titre de l'exécution provisoire qui s'élève à 3 000 euros.

Argumentation de Mlle X...

Mlle X... demande l'indemnisation du coût de sa formation préalable à l'embauche pour un montant de 2 355 euros qui a été rejetée par le Conseil de prud'hommes, faute de justificatif.

Position de la Cour

Il résulte des pièces versées aux débats, en particulier d'une facture acquittée du centre de formation routière no 11, que Mlle X... a suivi une formation au permis D du 29 mars 2004 au 3 mai 2004 et qu'elle a payé cette formation pour un montant total de 2 355 euros. Cependant, il n'est produit aucun élément établissant que la SARL INTRABUS ORLY qui l'a embauchée à compter du 7 mars 2005, c'est-à-dire 10 mois après la fin de cette formation, avait pris l'engagement de la prendre en charge ou de lui rembourser.

Il en résulte que la demande n'est pas justifiée. En conséquence, Mlle X... sera déboutée de sa demande de ce chef et le jugement du Conseil de prud'hommes sera confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Il n'y a pas lieu en l'espèce de faire application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement,

DEBOUTE Mlle X... de ses demandes,

ORDONNE la restitution de la somme versée par la société INTRABUS ORLY à Mlle X... au titre de l'exécution provisoire,

LAISSE les dépens à la charge de Mlle X....

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0138
Numéro d'arrêt : 29
Date de la décision : 18/12/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Villeneuve-Saint-Georges, 04 janvier 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-12-18;29 ?
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