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07/12/2007 | FRANCE | N°05/22764

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0203, 07 décembre 2007, 05/22764


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

25ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 7 DÉCEMBRE 2007

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 05/22764

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Octobre 2005 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 03/18737

APPELANT

Maître Jean-Claude X...,

es qualité de liquidateur de la société AUDIT INFORMATIQUE SARL

105 rue H. Pauquet

BP 70329

60311 CREIL CEDEX

repré

senté par Me Véronique KIEFFER-JOLY, avoué à la Cour

assisté de Maître LEFEBVRE Grégory avocat, au barreau de Compiègne

INTIMÉE

BANQUE DE FRANCE, ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

25ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 7 DÉCEMBRE 2007

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 05/22764

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Octobre 2005 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 03/18737

APPELANT

Maître Jean-Claude X...,

es qualité de liquidateur de la société AUDIT INFORMATIQUE SARL

105 rue H. Pauquet

BP 70329

60311 CREIL CEDEX

représenté par Me Véronique KIEFFER-JOLY, avoué à la Cour

assisté de Maître LEFEBVRE Grégory avocat, au barreau de Compiègne

INTIMÉE

BANQUE DE FRANCE,

prise en la personne de ses représentants légaux

...

75001 PARIS

représentée par la SCP RIBAUT, avoués à la Cour

assistée de Maître Z... Jean marc, avocat, toque A82

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Octobre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie Pascale GIROUD, Présidente

Mme Odile BLUM, Conseiller

Mme Marie-Hélène GUILGUET-PAUTHE, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Marie-Claude GOUGE

ARRET :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie Pascale GIROUD, président et par Mme Marie-Claude GOUGE, greffière.

***

Vu le jugement rendu le 7 octobre 2005 par le tribunal de commerce de Paris qui après avoir, par un précédent jugement, ordonné une expertise a:

-dit bien fondée la demande de Maître X... , ès qualités de mandataire liquidateur de la société Audit Informatique, en ce qui concerne le règlement de la facture relative à la livraison du lot no1,

-condamné la Banque de France à lui payer la somme de 112168,92 euros TTC, intérêts de retard compris et celle de 10000 euros pour résistance abusive au paiement de cette facture,

-dit que la rupture du contrat est aussi bien imputable à Maître X..., ès qualités, qu'à la Banque de France,

-dit mal fondées toutes les autres demandes de Maître X..., ès qualités,

-condamné la Banque de France à payer à Maître X..., ès qualités la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ,

-ordonné l'exécution provisoire,

-condamné la Banque de France aux dépens;

Vu l'appel de ce jugement relevé par Maître X... ès qualités et ses dernières conclusions signifiées le 3 octobre 2007 par lesquelles il demande à la Cour de :

-confirmer le jugement en ce qu'il a dit bien fondée sa demande concernant le règlement de la facture relative à la livraison du lot no1 et ayant condamné de ce chef la Banque de France à payer les sommes de 112168,92 euros, intérêts de retard compris et 10000 euros pour résistance abusive au paiement de cette facture,

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la Banque de France à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

-infirmer le jugement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat conclu entre la société Audit Informatique et la Banque de France était aussi bien imputable à l'une qu'à l'autre des parties,

Et statuant à nouveau,

-prononcer la résolution du contrat conclu entre la Banque de France et la société Audit Informatique aux torts exclusifs de la Banque de France,

-condamner la Banque de France à lui payer les sommes de:

1676 euros TTC correspondant au préjudice subi par la société Audit Informatique suite au retard de règlement de sa facture no 0208006, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2002, date de la première mise en demeure,

110354,92 euros TTC en règlement de la facture de la société Audit Informatique no0211004 établie à la livraison du lot no1 majorée des intérêts au taux de 8,10% à compter de cette même date,

230675 euros HT au titre du préjudice résultant de l'absence de poursuite du contrat initial,

65600 euros HT résultant de l'absence des développements complémentaires ayant donné lieu à réservation,

99000 euros HT résultant de l'absence de réalisation des journées de formation prévues dans les locaux de la Banque de France,

632340 euros HT résultant de l'absence de réalisation du contrat de maintenance pendant huit années,

1300991,60 euros HT résultant de la liquidation judiciaire de la société Audit Informatique,

-condamner la Banque de France à lui payer la somme de 25000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

-condamner la Banque de France aux dépens comprenant notamment les frais de l'expertise judiciaire .

Vu les dernières conclusions signifiées par la Banque de France le 5 septembre 2007 aux termes desquelles elle demande à la Cour :

- de déclarer l'appel interjeté par Maître X... , es qualités de liquidateur de la société Audit Informatique mal fondé;

-de la recevoir en son appel incident;

-d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Audit Informatique les sommes des 112168,92 euros TTC, intérêts de retard compris , au titre de la facture no0211004 et celle de 10000 euros pour résistance abusive;

-de débouter Maître X..., ès qualités, de l'intégralité de ses prétentions;

Subsidiairement,

-de confirmer le jugement en toutes ses dispositions;

-de condamner Maître X..., ès qualités au paiement de la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Sur ce, la Cour :

Considérant que, la société Audit Informatique est une société de service éditrice de progiciels crées et développés par elle; qu'elle a notamment développé le progiciel "Sagai 3",destiné aux banques, système automatique de gestion des affaires internationales (3ème version);

Considérant que le 30 août 2002 la Banque de France et la société Audit Informatique ont signé un contrat d'acquisition du logiciel SAGAI-3 pour un montant total de 461350 euros H.T. ;

Considérant que la société Audit Informatique a livré un premier lot (lot no1) le 19 novembre 2002 et a émis la facture correspondante , d'un montant égal à 20% du prix ; que par lettre du 11 décembre 2002 la Banque de France a notifié à la société Audit Informatique son refus d'accepter la livraison du lot no1, son refus de régler les factures émises et à émettre et son refus de poursuivre le contrat ;

Considérant que les parties s'opposent sur la question de l'imputabilité de la rupture des relations contractuelles, la société Audit Informatique soutenant que la Banque de France a refusé de collaborer et de lui transmettre les éléments dont elle avait besoin pour poursuivre les développements entrepris, la Banque de France soutenant au contraire que la société Audit Informatique n'a pas été en mesure de procéder à une livraison conforme du progiciel et à des aménagements techniques et fonctionnels relevant du lot no1 du contrat;

Considérant que l'expert désigné par le tribunal de commerce a examiné les "écarts"(anomalies) dénoncés par la Banque de France et a recherché si l'état technique du produit livré (SAGAI lot 1) empêchait toute poursuite du projet en particulier sa mise en recette fonctionnelle ; qu'il a relevé que si des écarts étaient apparus lors de la recette technique du lot no1 par la Banque de France, seulement ceux relatifs à l'architecture "ORACLE" de la Banque de France et à la sécurité pouvaient être considérés comme bloquants;

Considérant que l'expert a précisé en outre que de nombreux écarts devaient être considérés comme une non-conformité à la lettre des termes du contrat mais s'expliquaient par l'insuffisance de précisions des spécificités et contraintes de l'architecture technique du système d'information de la Banque de France, certaines demandes de la société Audit Informatique à la Banque de France étant restées sans réponse et certaines exigences contractuelles ne pouvant être satisfaites qu'après la livraison de l'ensemble des lots et la connaissance par la société Audit Informatique de toutes les contraintes; qu'il a également mentionné qu'une meilleure communication client /fournisseur et l'application des procédures de résolution des écarts auraient permis de régler les difficultés ;

Considérant que l'expert a en effet relevé que la collaboration avait été insuffisante entre la Banque de France et la société Audit Informatique ;

Considérant que le préambule du contrat signé entre les parties mentionne que "le produit utilisé par le client est le produit standard proposé par la société Audit Informatique , complété d'aménagements fonctionnels et techniques permettant d'intégrer le progiciel dans l'architecture fonctionnelle et technique du client "; que l'expert a indiqué que la notion d'intégration dans l'architecture fonctionnelle était très importante car elle pouvait remettre en cause l'architecture technique ou certains mécanismes existant dans le progiciel et qu'en l'espèce, il s'agissait bien plus que d'adaptations; qu'il a indiqué que dans un tel contexte , l'étude des impacts techniques, les spécifications en résultant , leur formalisation, les tests d'intégration technique devaient être conduits en commun et avec beaucoup de réactivité , des échanges limités à des comités de suivi techniques étant insuffisants ;qu'il a relevé que la société Audit Informatique n'avait eu de cesse de solliciter les précisions et réponses techniques dont elle avait besoin et que la Banque de France, par son attitude, n'avait pas facilité cette indispensable collaboration technique, cette absence de collaboration étant un point clef ayant conduit à l'état du lot 1 et à la non-résolution des écarts trouvés par la Banque de France; que sur ce point, l'application par la Banque de France des procédures du plan qualité pendant la phase de recette technique aurait permis de résoudre, avant que la relation entre les parties ne se dégrade, la plupart des écarts signalés ;

Considérant que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que la rupture du contrat est imputable à la seule Banque de France ; que le jugement sera dès lors infirmé en ce qu'il a dit que cette rupture était aussi bien imputable à Maître X... ès qualités de mandataire liquidateur de la société Audit Informatique qu'à la Banque de France;

Considérant que Maître X... ès qualités réclame la somme de 110354,92 euros en règlement d'une facture du 19 novembre 2007 établie à la livraison du lot no1, majorée des intérêts au taux de 8,10% ; que la Banque de France s'oppose à cette demande en faisant valoir que , selon le contrat, la somme de 20% du prix n'est due qu'à la "livraison en recette" du progiciel et des aménagements techniques et fonctionnels relevant du lot no 1 ;

Considérant toutefois que la livraison a précédé une installation suivie d'une "recette technique" portant essentiellement sur la conformité à l'architecture technique; que le contrat ne subordonne pas le paiement à l'établissement du procès-verbal de recette définitive ; que dès lors la banque de France sera condamnée au paiement de la somme précitée , laquelle, conformément aux dispositions contractuelles, portera intérêts à un taux égal à une fois et demie le taux de l'intérêt légal à compter du 19 novembre 2002;

Considérant que Maître X... ès qualités, n'apporte pas la preuve d'un préjudice distinct de celui déjà réparé par ces intérêts; que le jugement sera dès lors infirmé en ce qu'il a condamné la Banque de France à payer à Maître X... ès-qualités, la somme de 10000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive au paiement de la facture concernant la livraison du lot no1;

Considérant que Maître X... ès qualités sollicite également le paiement d'une somme de 1676 euros correspondant au préjudice subi par la société suite au retard de règlement d'une première facture, no0208006 ;

Considérant qu'il expose que cette première facture du 19 août 2002, correspondant à 30% du montant de la commande a été payée avec un retard de 45 jours sur le délai contractuellement prévu , que compte tenu de ce retard, la société Audit Informatique a été contrainte de céder la facture à sa banque dans le cadre de la loi Dailly , qu'elle a donc subi un préjudice spécifique du fait de ce retard ;

Considérant que le contrat prévoit que les factures sont payables à réception et qu'il n'est pas contesté que la première facture a été payée avec retard; que la Banque de France sera condamnée au paiement des intérêts à un taux égal à une fois et demie le taux de l'intérêt légal , calculés sur la somme de 165532,38 euros ,montant de la première facture, et sur une durée de 45 jours ;

Considérant qu'en rompant unilatéralement le contrat la liant à la société Audit Informatique, sans mettre cette société en mesure de résoudre les anomalies qu'elle avait constatées, la Banque de France a engagé sa responsabilité ;

Considérant que Maître X... ès qualités soutient que la perte subie par la société Audit Informatique à la suite de la rupture du contrat est équivalente à la perte de sa marge commerciale ;que dans une société qui assure une production intellectuelle et qui ne vend que sa production, la marge commerciale est pratiquement identique au chiffre d'affaires; qu'il réclame donc, à titre de dommages-intérêts, les sommes correspondant aux engagements pris que la société Audit Informatique aurait dû facturer jusqu'à leur totale réalisation soit :

-230675 euros HT correspondant au solde du prix du contrat,

-65600 euros HT correspondant au montant des développements complémentaires que la Banque de France lui avait demandé de réaliser sur le progiciel,

-99000 euros HT correspondant au coût de la formation qui aurait dû être dispensée aux utilisateurs ,

-632340 euros HT correspondant au chiffre d'affaires qu'aurait généré le contrat de maintenance du progiciel;

Considérant que Maître X... ès qualités, soutient en outre que la rupture du contrat par la Banque de France a directement provoqué la mise en redressement judiciaire et la liquidation judiciaire de la société Audit Informatique et réclame une somme de 1300991,60 euros en réparation de ce préjudice ;

Mais considérant que les éléments comptables versés aux débats , notamment les comptes annuels établis pour la période du 1er avril 2002 au 31 mars 2003 au cours de laquelle la société Audit Informatique aurait dû percevoir partie des sommes prévues au contrat si celui-ci s'était poursuivi, ne permettent nullement de retenir que la liquidation judiciaire soit directement liée à la rupture du contrat par la Banque de France ;

Considérant que Maître X... ès qualités n'est dès lors fondé à demander que l'indemnisation du préjudice résultant de la rupture unilatérale des relations contractuelles;

Considérant qu'eu égard au montant global des prestations qui devaient être fournies et tenant compte des difficultés engendrées par la nécessité dans laquelle la société Audit Informatique s'est trouvée de réaffecter sur d'autres contrats le personnel qui devait participer pendant plusieurs mois à la mise en place du progiciel, la Cour estime que son préjudice sera justement réparé par le versement d'une somme de 50 000 euros;

Considérant que la Banque de France sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile et qu'elle sera condamnée à verser à ce titre à Maître X..., ès qualités, la somme de 2000 euros pour ses frais irrépétibles exposés en appel, en sus de celle de 2000 euros qui lui a été allouée pour ses frais irrépétibles de première instance.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en ce qu'il a dit bien fondée la demande de Maître X... , ès qualités de mandataire liquidateur de la société Audit Informatique en ce qui concerne le règlement de la facture relative à la livraison du lot no1, et condamné la Banque de France à payer à Maître X..., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Audit Informatique la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ,

L'infirme pour le surplus ,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la rupture du contrat passé entre la société Audit Informatique et la Banque de France est exclusivement imputable à la Banque de France ,

Condamne la Banque de France à payer à Maître X... ès qualités :

-la somme de 110354,92 euros en règlement de la facture établie à la livraison du lot no1, avec intérêts à un taux égal à une fois et demie le taux de l'intérêt légal à compter du 19 novembre 2002,

-les intérêts à un taux égal à une fois et demie le taux de l'intérêt légal , calculés sur la somme de 165532,38 euros ,montant de la première facture, et sur une durée de 45 jours, -la somme de 50000 euros à titre de dommages-intérêts ,

-la somme de 2000 euros pour ses frais irrépétibles exposés en appel,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la Banque de France aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais d'expertise et dit que les dépens d'appel pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile .

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0203
Numéro d'arrêt : 05/22764
Date de la décision : 07/12/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 07 octobre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-12-07;05.22764 ?
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