RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
18ème Chambre C
ARRET DU 30 Novembre 2007
(no 8, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/02139
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Novembre 2006 par le conseil de prud'hommes de Paris RG no 05/06428
APPELANTE
Madame Corinne X...
...
75014 PARIS
comparante en personne
INTIMÉE
EURL CENTRALE DES PEELINGS
60 rue Yves Klein
13100 AIX EN PROVENCE
représentée par Me Marianne COLLIGNON-TROCME, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 Octobre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Catherine TAILLANDIER, Présidente
Madame Catherine MÉTADIEU, Conseillère
Madame Catherine BÉZIO, Conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIÈRE : Mademoiselle Céline MASBOU, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par Madame Catherine TAILLANDIER, Présidente
- signé par Madame Catherine TAILLANDIER, Présidente et par Mademoiselle Céline MASBOU, Greffière présente lors du prononcé.
LA COUR,
Vu le jugement rendu le 6 novembre 2006 par le conseil de prud'hommes de PARIS, qui a :
- débouté Corinne X... de l'ensemble de ses demandes
- condamné l'EURL CENTRALE DES PEELINGS à lui verser
• 500 € au titre d'avance sur frais
• 1.400 € au titre d'avance sur salaire
avec intérêt au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation
• 207 € au titre d'amendes majorées pour stationnement ;
Vu l'appel formé par déclaration en date du 12 mars 2007 ;
Vu l'ordonnance en date 26 juin 2007 du délégué du Premier Président de la Cour d'Appel de PARIS autorisant la fixation de l'affaire par priorité ;
Vu les dernières écritures et observations orales en date du 25 octobre 2007 de Corinne X... qui demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris et de :
- dire son licenciement abusif
Par conséquent,
- condamner l'EURL CENTRALE DES PEELINGS à lui payer les sommes de :
• 2.650 € de salaire de mise à pied du 21 janvier au 10 février 2005
• 12.000 € d'indemnité compensatrice de préavis
• 1.200 € de congés payés afférents
• 28.000 € d'indemnité pour licenciement abusif
• 4.000 € de dommages-intérêts pour rupture dans des circonstances particulièrement vexatoires, brutales et humiliantes
• 2.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Vu les dernières écritures et observations orales en date du 25 octobre 2007 de l'EURL CENTRALE DES PEELINGS qui demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
- condamner Corinne X... au paiement des sommes suivantes sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la notification de la présente décision :
• 207 € de remboursement d'amendes de stationnement majorées
• 1.400 € de restitution d'avance de salaire
• 500 € de restitution d'avance sur frais
- la condamner en outre au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
SUR CE, LA COUR
Corinne X... a été engagée à compter du 14 juin 2004 par l'EURL CENTRALE DES PEELINGS en qualité de directrice commerciale France, statut cadre, niveau VIII, échelon 3, selon un contrat de travail à durée indéterminée en date du 24 juin 2004.
Le contrat est régi par la convention collective des commerces de gros.
Corinne X... a été convoquée le 20 janvier 2005 pour le 3 février 2003 à un entretien préalable à son éventuel licenciement et a fait, le même jour, l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire à effet immédiat.
Elle a reçu notification de son licenciement pour faute grave par lettre recommandée datée du 8 février 2005 pour les motifs suivants :
- pression démesurée et injustifiée sur son équipe, humeur inconstante
- dénigrement des visiteuses médicales, immixion dans leur vie privée
- attitude grossière
- dénigrement de la direction
- recherche du conflit, menaces de licenciement, abus d'autorité.
Sur le licenciement
L'employeur expose que le 14 janvier 2005, les visiteuses médicales ont dénoncé la pression démesurée et injustifiée qu'exerçait Corinne X... sur elles, se traduisant par leur déstabilisation, une perte de confiance en soi, des arrêts maladie dus au stress subi, voire même la démission de l'une d'entre elles, ce alors que Corinne X... avait, aux termes de son contrat de travail, la responsabilité de l'animation de l'équipe de visiteuses médicales.
Corinne X... réplique qu'elle était directrice régionale grand Ouest d'un grand laboratoire spécialisé en dermatologie lorsqu'elle a été engagée par l'EURL CENTRALE DES PEELINGS afin de mettre en place un réseau de visiteurs médicaux auprès des dermatologues et que c'est à sa demande que trois visiteuses, Mesdames Z..., A..., B... ont été embauchées, qu'elle a entretenu avec ces dernières comme avec les tous les collaborateurs de l'entreprise de très bonnes relations professionnelles, qu'elle a très vite obtenu de bons résultats, que le réseau comprenait six visiteuses début 2005 lors du déroulement du séminaire de rentrée qu'elle a organisé avec le plus grand soin.
Elle soutient n'avoir été informée d'aucune plainte et avoir eu la surprise d'apprendre sa mise à pied, une semaine plus tard.
Il est établi par la production des lettres en janvier 2005 envoyées à la direction de l'EURL CENTRALE DES PEELINGS, confirmée par des attestations postérieures, que Corinne X... a fait preuve d'un comportement qui, sans permettre de caractériser des faits de harcèlement moral, peut être qualifié d'excessif dans le cadre de la direction d'une équipe de travail, quand bien même ses anciens collègues du laboratoire dans lequel elle travaillait précédemment ainsi que son assistante louent ses qualités professionnelles.
C'est ainsi que Madame Z... évoque une attitude "chaotique", "un jour gentille, le lendemain hystérique".
Madame B... fait état de mots "très durs et démotivants" et précise que ce comportement s'est amplifié au mois de décembre, et qu'il était difficile de supporter les propos de dénigrement que Corinne X... tenait à l'égard de certains collègues.
Madame C... confirme que cette dernière dénigrait les autres déléguées commerciales comme la direction, et indique que son comportement variait d'un instant à l'autre "passant d'une attitude amicale à une agressivité excessive sans aucune raison apparente" et justifie avoir fait l'objet d'un arrêt de six jours, à compter du 18 janvier 2005, pour cause de maladie, son médecin traitant ayant alors constaté "un état de déstabilisation psychologique à caractère pré dépressif avec insomnie".
Madame D... évoque également l'humeur changeante de Corinne X... qui peut "passer du rire à la colère" et déclare avoir quitté l'entreprise, ainsi que cela résulte d'une lettre datée du 4 février 2005, pour les motifs suivants :
"Les raisons de mon départ sont imputables à ma supérieure Corinne X.... En effet il m'est apparu impossible de me projeter dans la société avec une personne ayant été aussi lunatique, inconstante, hystérique ; le harcèlement moral qu'ont pu subir de la part de cette personne mes collègues m'a enlevé toute ma motivation et mon ambition de travailler dans ce contexte".
Si aucun des autres griefs n'est établi par les pièces versées aux débats, force est de constater que Corinne X... a fait preuve d'une attitude incompatible avec le maintien de son contrat de travail, en raison notamment de son instabilité de caractère, de ses propos excessifs, et de son autoritarisme dans la gestion de son équipe, de telle sorte que trois des visiteuses qu'elle dirigeait, et dont rien ne permet de suspecter l'impartialité, ont dénoncé à la direction les conditions de travail qu'elle leur imposait.
Ce comportement ne présente toutefois pas le caractère d'une faute grave mais justifie néanmoins le prononcé du licenciement pour une cause réelle et sérieuse et la mesure de mise à pied prononcé par l'employeur.
Il convient par conséquent de condamner l'EURL CENTRALE DES PEELINGS à payer à Corinne X... les sommes suivantes :
- 12.000 € d'indemnité compensatrice de préavis
- 1.200 € de congés payés afférents.
Corinne X... sera en revanche déboutée du surplus de ses demandes.
Rien notamment ne permet d'établir que la rupture du contrat de travail soit intervenue dans des conditions particulièrement vexatoires, brutales et humiliantes.
Sur les demandes reconventionnelles de l'EURL CENTRALE DES PEELINGS
Selon l'avenant au contrat de travail de Corinne X..., le véhicule mis à sa disposition par son employeur était immatriculé 303 BGM 06 ;
Or trois des amendes concernent un véhicule 873 BEQ 06.
L'attestation établie par la dirigeante de l'entreprise selon laquelle Corinne X... utilisait ce véhicule sera écartée des débats comme établie par la partie elle-même, alors même qu'aucune élément ne permet de confirmer que ce véhicule était entre les mains de l'intéressée lorsqu'ont été constatées les contraventions.
Les trois autres amendes concernent le véhicule remis à Corinne X..., qui est, en vertu de ses obligations contractuelles, tenue d'en assurer le paiement.
Cette dernière devra donc rembourser la somme de 66 € à l'EURL CENTRALE DES PEELINGS.
Le jugement sera confirmé en ce qui concernant les avances sur frais et salaires que Corinne X... ne conteste pas avoir perçues.
L'équité ne commande pas qu'il soit fait application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
INFIRME partiellement le jugement entrepris
STATUANT à nouveau,
CONDAMNE l'EURL CENTRALE DES PEELINGS à payer à Corinne X... les sommes de :
- 12.000 € (douze mille euros) à titre d'indemnité compensatrice de préavis
- 1.200 € (mille deux cents euros) à titre de congés payés afférents.
CONDAMNE Corinne X... à payer à l'EURL CENTRALE DES PEELINGS la somme de 66 € (soixante six euros) au titre des amendes réglées en ses lieu et place par l'employeur
CONFIRME pour le surplus les dispositions du jugement qui ne sont pas contraires au présent arrêt
DÉBOUTE Corinne X... du surplus de ses demandes
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
CONDAMNE l'EURL CENTRALE DES PEELINGS aux dépens de première instance et d'appel
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE