Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
3ème Chambre - Section A
ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2007
(no , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/01670
Décisions déférées à la Cour : Jugements du 30 Septembre 2005 et du 15 Mai 2006 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2004053817
APPELANTE
S.A. LES EDITIONS MICHEL GUERIN
prise en la personne de son Directeur Général et tous représentants légaux
ayant son siège 26 Rue Moulins
74400 CHAMONIX
représentée par la SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour
assistée de Me Emmanuel BOUTTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P221,
(SCP DEPY DAN GUIGNOT)
INTIMES
S.A. VILO DISTRIBUTION
ayant son siège 25/27 Rue Ginoux
75015 PARIS
représentée par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour
assistée de Me Camille FROMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P346,
(LSK et Associés)
Maître Hubert A..., ès qualités d'administrateur judiciaire de la S.A. VILO DISTRIBUTION
demeurant ...
75009 PARIS
représenté par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour
assisté de Me Camille FROMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P346,
(LSK et Associés)
Maître Didier B..., ès qualités de représentant des créanciers et commissaire à l'exécution du plan de la S.A. VILO DISTRIBUTION
demeurant ...
75001 PARIS
représenté par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour
assisté de Me Camille FROMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P346,
(LSK et Associés)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 29 Octobre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Bernadette CHAGNY, Président
Monsieur Henri LE DAUPHIN, Conseiller
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Conseiller
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du nouveau code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claude HOUDIN
MINISTÈRE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au ministère public,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par Madame CHAGNY, président et par Madame HOUDIN, greffier présent lors du prononcé.
Vu le jugement en date du 30 septembre 2005 par lequel le tribunal de commerce de Paris a :
- déclaré la société Editions Michel Guérin recevable en son recours,
- réformé l'ordonnance du juge-commissaire du redressement judiciaire de la société Vilo Distribution ,
- constaté la résiliation du contrat conclu entre la société Vilo Distribution et la société Editions Michel Guérin,
- nommé M. Didier C... en qualité d'expert avec mission, notamment, de chiffrer le montant des sommes encaissées par la société Vilo Distribution et de déterminer la période des encaissements,
- fixé à 2.000 euros le montant de la provision devant être consignée avant le 10 novembre 2005 par la société Editions Michel Guérin, à peine de caducité de la désignation de l'expert,
- ordonné la consignation par les commissaires à l'exécution du plan de la société Vilo Distribution de la somme de 82.001,48 euros dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ;
Vu le jugement en date du 15 mai 2006 par lequel le tribunal de commerce de Paris a :
- levé l'obligation de consignation de la somme de 82.001,48 euros par Me A..., en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Vilo Distribution,
- condamné la société Editions Michel Guérin à payer à Me A..., en sa qualité d'administrateur et de commissaire à l'exécution du plan de la société Vilo Distribution, et à Me B..., en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de ladite société, la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu l'appel formé par la société Editions Michel Guérin à l'encontre de ces décisions ;
Vu les conclusions de l'appelante en date du 29 mai 2007 ;
Vu les conclusions de la société Vilo Distribution, de Me A..., pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Vilo Distribution, et de Me B..., pris en sa qualité de représentant des créanciers et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Vilo Distribution, en date du 4 septembre 2007 ;
Sur ce :
Considérant que les sociétés Vilo Distribution et Editions Michel Guérin ont, à une date non précisée, conclu un contrat de "diffusion-distribution" en vertu duquel la première était chargée, moyennant une commission sur les ventes réalisées, de commercialiser, auprès des librairies et rayons de librairies de tous magasins de ventes au détail, les livres ou articles de librairie constituant le fonds éditorial de la seconde ; qu'il était stipulé que les marchandises mises à la disposition de Vilo Distribution restaient la propriété de l'éditeur à qui le diffuseur devait reverser le chiffre d'affaires réalisé, diminué de la commission convenue, la charge financière des "retours" faisant l'objet d'avoirs aux libraires étant assumée par l'éditeur ;
Considérant que la société Vilo Distribution a été mise en redressement judiciaire par jugement du 13 janvier 2004 du tribunal de commerce de Paris, Me Hubert A... étant désigné en qualité d'administrateur et Me Didier B... en qualité de représentant des créanciers ;
Considérant que le 11 février 2004, la société Editions Michel Guérin a saisi Me A..., ès qualités, d'une requête aux fins de revendication du prix des ouvrages vendus par la société Vilo Distribution au cours des mois de septembre à décembre 2003 ; que Me A..., ès qualités, ayant refusé, le 27 février 2004, d'acquiescer à cette demande, la société Editions Michel Guérin a, dans le délai légal, saisi le juge-commissaire de sa demande en revendication ; qu'il était en outre demandé au juge-commissaire de constater la résiliation de plein droit du contrat de distribution susvisé au motif que des modifications aux modalités de règlement des sommes qui lui étaient dues lui avaient été imposées après que l'administrateur eut décidé de poursuivre l'exécution dudit contrat ;
Considérant que par ordonnance du 28 mai 2004, le juge-commissaire a rejeté les demandes de la société Editions Michel Guérin ;
Considérant que le jugement du 30 septembre 2005, à l'encontre duquel aucune critique n'est formulée en cause d'appel, a déclaré recevable le recours de la société Editions Michel Guérin, infirmé l'ordonnance du 28 mai 2004, constaté la résiliation du contrat liant les sociétés Editions Michel Guérin et Vilo Distribution, "tant en raison de l'accord des parties que du plan de cession" de cette dernière, arrêté par jugement du 20 juillet 2004, désigné un expert avec la mission ci-dessus mentionnée après avoir estimé qu'il convenait "de faire droit à la demande d'expertise de la société Editions Michel Guérin", et ordonné la consignation par la société Vilo Distribution de la somme de 82.001,48 euros ;
Considérant que la société Editions Michel Guérin n'ayant pas versé dans le délai imparti la provision de 2.000 euros mise à sa charge par le jugement du 30 septembre 2005, le juge chargé du contrôle des expertises a, par ordonnance du 25 novembre 2005, constaté la caducité de la mesure d'instruction ;
Considérant que le jugement du 15 mai 2006 a levé la consignation précédemment ordonnée et condamné la société Editions Michel Guérin à payer à Me A..., ès qualités, et à Me B..., ès qualités, la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, après avoir relevé, dans ses motifs, "qu'en raison de la chronologie des faits, de la procédure, de la caducité de la désignation de l'expert et du silence de la société Editions Michel Guérin depuis le jugement du 30 septembre 2005, il ne pourra qu'être fait droit aux demandes des défendeurs" ;
Considérant que la société Editions Michel Guérin demande à la cour de dire que le prix des biens vendus "de septembre à décembre 2003" (concl. p. 6) par les clients de la société Vilo Distribution et payés à cette dernière postérieurement au jugement d'ouverture doit lui être restitué sans délai, et ce pour une somme de 85.584,16 euros ;
Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les intimés, le défaut de mise en oeuvre de l'expertise ordonnée par le premier des jugements susvisés, imputable à la société Editions Michel Guérin, n'implique pas renonciation de cette dernière à l'exercice de son action en revendication ;
Mais considérant que, revendiquant entre les mains du débiteur le prix de biens visés à l'article L. 621-122 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005, applicable en la cause, la société Editions Michel Guérin doit prouver que le prix n'a été ni payé, ni réglé en valeur, ni compensé en compte courant entre le débiteur et l'acheteur à la date du jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire, soit le 13 janvier 2004 ;
Or considérant que la société Editions Michel Guérin, qui n'a pas jugé utile de poursuivre l'expertise ordonnée à cette fin par le jugement du 30 septembre 2005, et qui relève elle-même (concl. p. 7) qu'elle ne dispose pas des données comptables relatives aux ventes de son fonds éditorial par la société Vilo Distribution, ne produit aucun élément propre à constituer une telle preuve ; qu'elle ne peut, dès lors, qu'être déboutée de sa demande en revendication ;
Et considérant que la mission du juge est de trancher un litige né et actuel, existant entre les parties et non de procéder à de simples constatations ne correspondant pas à des prétentions au sens de l'article 4 du nouveau code de procédure civile ;
Qu'il n'y a donc pas lieu pour la cour de "constater", comme le voudrait la société Editions Michel Guérin, que celle-ci demeure créancière de la somme de 31.385,26 euros due au titre de la période postérieure au jugement d'ouverture pendant laquelle le contrat de distribution a été poursuivi, ce qui n'est pas autrement contesté par les parties adverses, et qu'elle a été admise à titre chirographaire au passif du redressement judiciaire pour un montant de 85.385,16 euros, non plus que de rappeler, comme le voudraient les intimés, que le paiement de cette dernière créance doit intervenir conformément à la loi ;
Considérant qu'il convient de rejeter les demandes réciproquement formées, en cause d'appel, au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Par ces motifs :
Confirme les jugements déférés ;
Ajoutant au jugement du 15 mai 2006,
Déboute la société Editions Michel Guérin de sa demande en revendication du prix correspondant aux ventes effectuées par la société Vilo Distribution de septembre à décembre 2003 ;
La condamne aux dépens lesquels pourront être recouvrés dans les conditions prévues à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande comme non fondée ou sans objet.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
M.C HOUDIN B. CHAGNY