Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
1ère CHAMBRE - Section N
REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES
DECISION DU 21 NOVEMBRE 2007
No du répertoire général : 06/11583
Décision contradictoire en premier ressort
Nous, Sophie DARBOIS, Conseillère à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assistée de Benoit TRUET-CALLU, Greffier lors des débats et de Gilles DUPONT, Greffier lors du prononcé, avons rendu la décision suivante :
Statuant sur la requête déposée au greffe le 30 juin 2006 par Maître Julien SFEZ, avocat de Monsieur James X..., demeurant 39 rue Laëtitia et Henri Tredez 93440 DUGNY;
Vu les pièces jointes à cette requête ;
Vu les conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l'audience fixée au 17 octobre 2007 à 9 heures 30 ;
Vu la présence de Monsieur James X... ;
Ouï, Monsieur James X..., Maître Julien SFEZ, avocat assistant Monsieur James X..., Maître Diane MATTOUT, avocat plaidant pour Maître Fabienne DELECROIX, avocat représentant Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, ainsi que Madame Lydia GORGEN, avocat général, les débats ayant eu lieu en audience publique, le 17 octobre 2007, le requérant ayant eu la parole en dernier ;
Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R. 26 à R. 40-7 du code de procédure pénale ;
Attendu que Monsieur James X..., poursuivi pour vol aggravé par deux circonstances (réunion et violences n'ayant pas entraîné d'incapacité), a été placé sous mandat de dépôt le 18 février 2004 et mis en liberté sous contrôle judiciaire le 1er juin 2004 ;
Qu'il a été relaxé le 17 mars 2006 par le tribunal de grande instance de BOBIGNY ; que cette décision est définitive ;
Qu'il a ainsi été incarcéré pendant 3 mois et 13 jours ;
Attendu que Monsieur James X... sollicite une indemnité globale de 15.750 € (7. 000€ au titre de son préjudice matériel et 8.750 € au titre de son préjudice moral) ainsi qu'une somme de 2.000 € en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
Que l'Agent judiciaire du Trésor nous demande de rejeter la demande formée au titre du préjudice matériel ou, subsidiairement, de limiter à 1.500 € la réparation de ce chef et de limiter à 4.000 € la réparation de son préjudice moral ;
Attendu que la demande de Monsieur James X..., déposée dans les délais et formes de la loi, est recevable ;
Attendu qu'en vertu de l'article 149 du code de procédure pénale, seuls peuvent être réparés les préjudices de la personne détenue qui sont directement liés à la privation de liberté, à l'exclusion de ceux qui sont la conséquence des poursuites pénales elles-mêmes, des mesures d'instruction autres que la détention provisoire, du retentissement public de l'affaire ou qui ont été causés à des proches ou à des tiers ;
Sur le préjudice matériel :
Attendu qu'il ressort des pièces communiquées que Monsieur James X..., qui travaillait en intérim, venait de créer son propre commerce de vente sur les marchés de prêt-à-porter, bijoux fantaisie et accessoires de mode ; que, si les revenus tirés de cette activité très récente étaient de ce fait minimes lors de son placement en détention provisoire, il établit, cependant, l'existence d'un préjudice matériel directement imputable à cette détention du fait de la perte des investissements réalisés (notamment, des commandes importantes d'articles vestimentaires de saison d'hiver vendus à perte au cours de l'été pour rembourser les dettes) ; qu'il n'a pu préserver cette activité et a échoué dans sa tentative d'obtenir un emploi en contrat à durée indéterminée ;
Que la perte des investissements réalisés ainsi que la perte de chance pour Monsieur X... de réussir dans son projet d'activité autonome ou de retrouver un emploi stable est en lien direct avec la détention provisoire, justifiant qu'il lui soit versé une somme de 4.500 € à ce titre ;
Sur le préjudice moral :
Attendu que l'indemnisation du préjudice moral de la personne détenue est fonction, notamment, de sa personnalité, de son mode de vie, de son comportement au cours de l'instruction, de ses antécédents judiciaires et des périodes de détention effectuées en exécution de condamnations antérieures ;
Attendu que Monsieur James X..., né le 31 mai 1984, était âgé de 19 ans lors de sa mise en détention ; que, célibataire sans enfant, il vivait chez ses parents ;
Que son casier judiciaire ne porte trace d'aucune condamnation et qu'il s'agissait d'une première incarcération ;
Attendu que la détention qu'il a subie lui a causé un préjudice moral incontestable que, eu égard à sa durée et en considération des éléments susvisés, particulièrement de l'importance du choc carcéral et de son jeune âge, il y a lieu d'indemniser à hauteur de la somme de 6.300 € ;
Attendu que l'article 700 du nouveau code de procédure civile est applicable aux demandes d'indemnisation à raison d'une détention provisoire ; que l'équité commande, en requalifiant la demande présentée par le requérant sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale, de fixer l'indemnité due au titre des frais irrépétibles à la somme de 1.000 € ;
PAR CES MOTIFS,
ALLOUONS à Monsieur James X... une indemnité de DIX MILLE HUIT CENTS EUROS (10.800 €) en réparation de son préjudice matériel et moral outre la somme de MILLE EUROS (1.000 €) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Décision rendue le 21 novembre 2007 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE