Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
15ème Chambre - Section B
ARRET DU 16 NOVEMBRE 2007
(no07/ , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 06/05585
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2002 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG no 2000/09536
PARTIE INTERVENANTE ET COMME TELLE APPELANTE
SOCIETE FINAMUR venant aux droits de la société SLIBAIL MURS prise en la personne de ses représentants légaux
...
92861 ISSY LES MOULINEAUX CEDEX 9
représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour
assistée de Me Françoise BELLEMARE, avocat au barreau de PARIS, toque : R092, de l'association BELLEMARE-MORTIER
INTIMES
Monsieur Louis Albert Y...
demeurant ...
94240 L'HAY LES ROSES
représenté par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour
assisté de Me Benjamin Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : C138
Madame Kathe A...
demeurant ...
92340 BOURG LA REINE
assignée le 14 mai 2007 par procès verbal de recherches infructueuses, n'ayant pas constitué avoué
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 07 Septembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Patrick HENRY-BONNIOT, Président
Madame Marie-Christine DEGRANDI, Conseiller
Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Conseiller
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du nouveau Code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Jacqueline B...
ARRET :
- PAR DEFAUT
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par M. Patrick HENRY-BONNIOT, président, et par Melle Sandrine KERVAREC, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
****
Le 6 janvier 1995 un contrat de crédit-bail immobilier, concernant divers locaux situés dans un immeuble sis à Champlan (Essonne), a été conclu par devant Maître C..., notaire associé à Paris, entre la société SLIBAIL MURS et la SCI CHAMPLENAISE. M. Y..., gérant de ladite SCI s'est porté caution solidaire des engagements de cette société envers la société SLIBAIL MURS à hauteur de 2.200.000 F (335.387,83 E), outre intérêts, taxes, frais et accessoires.
La SCI CHAMPLENAISE ayant cessé le paiement des loyers à compter du troisième trimestre 1997, le tribunal de commerce d'Evry, par jugement du 13 avril 1999, a constaté la résiliation du contrat de crédit-bail. La société SLIBAIL a repris les locaux objets de ce contrat et les a vendus le 11 mai 1999, moyennant le prix de 1.650.000 F.
Après avoir pris une hypothèque judiciaire définitive publiée le 9 juillet 1998 sur la part de M. Y... dans un immeuble sis à L'Hay-les-Roses, dont il est propriétaire indivis avec Mme A..., la société SLIBAILS MURS a saisi le tribunal de grande instance de Créteil afin de voir ordonner, sur le fondement de l'article 815-17 du Code civil, les opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision ayant existé entre ceux-ci, ainsi que la vente sur licitation de l'immeuble.
Par jugement contradictoire du 15 octobre 2002, le tribunal a déclaré valable l'engagement de caution solidaire de M. Y..., mais a débouté la société SLIBAIL MURS au motif qu'en l'état elle ne justifiait pas d'une créance certaine, liquide et exigible à l'encontre de M. Y.... Les premiers juges ont également débouté Mme A... de sa demande de dommages-intérêts et dit qu'il n'y avait pas lieu à application de l'article 700 nouveau Code de procédure civile. La société SLIBAIL MURS a été condamnée aux dépens. Elle a interjeté appel par déclaration déposée au greffe le 5 décembre 2002.
M. Y... a déposé plainte avec constitution de partie civile c/X.., du chef de faux et usage de faux devant le doyen des juges d'instruction de Paris, le 23 janvier 2004, en faisant notamment valoir qu'il ignorait qu'il s'était porté caution solidaire lors de la signature du contrat de crédit-bail, n'ayant pas eu lecture complète de l'acte notarié. La cour de céans a sursis à statuer par arrêt du 20 janvier 2005, dans l'attente de la décision pénale à intervenir.
Le 4 février 2005, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu à poursuivre, décision confirmée par arrêt de la cour d'appel de Paris le 7 octobre 2005.
La société SLIBAIL MURS a demandé la réinscription de l'affaire au rôle le 24 mars 2006.
Par conclusions du 11 mai 2007, la SA FINAMUR est intervenue volontairement dans la présente procédure, déclarant venir aux droits de la société SLIBAIL MURS par suite d'une opération de fusion absorption en date du 4 décembre 2006.
Dans ses conclusions récapitulatives déposées le 16 mai 2007, elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé que l'engagement de caution solidaire de M. Y... était valable et en ce qu'il a débouté Mme A... de sa demande de dommages-intérêts ;
- d'infirmer pour le surplus cette décision,
en conséquence,
- de fixer sa créance à l'encontre de M. Y... à 268.657,10 E (1.762.275,10 F) ;
- d'ordonner les opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. Y... et Mme A..., portant sur les biens sis ... à L'Hay les Roses ;
- d'ordonner la vente sur licitation en un seul lot desdits biens sur la base d'une mise à prix de 91.469,41 E (600.000 F) ;
- condamner M. Y... à lui régler la somme de 3.000 E par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
M. Y..., dans ses conclusions déposées le 21 juin 2007, demande à la cour :
- au principal :
. de débouter la société SLIBAIL MURS de ses demandes ;
. de déclarer inexistant l'engament de caution, sinon nul et de nul effet par application des articles 2015 et 1326 du Code civil et par voie de conséquence d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a jugé l'engagement de caution valable ;
- subsidiairement :
. de débouter la société appelante de ses demandes, faute pour elle d'en justifier par un compte détaillé ;
. de minorer le montant de l'indemnité d'occupation, en vertu de l'article 1152 du Code civil, si par extraordinaire la cour estimait la créance la créance fondée ;
- très subsidiairement :
. de déclarer éteinte l'obligation de caution par l'effet du paiement de la dette, à tout le moins à hauteur de l'obligation souscrite par la caution ;
. de constater la carence de la société crédit-bailleresse dans l'obligation d'information annuelle de la caution prévue par l'article L 313-22 du Code monétaire et financier ;
. de prononcer en conséquence la déchéance des intérêts ;
- en tout état de cause de condamner celle-ci à lui verser la somme de 2.500 E au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Un procès-verbal de recherches infructueuses de Mme A... a été dressé le 14 mai 2007, l'intimée, assignée par la société SLIBAIL MURS, étant sans domicile connu à ce jour.
CELA ETANT EXPOSE
LA COUR,
Sur la procédure
Considérant qu'il y a lieu de prendre acte de l'intervention volontaire à la procédure de la SA FINAMUR venant aux droits de la SA SLIBAIL MURS, ce qui n'est pas discuté.
Considérant que le présent arrêt est rendu par défaut, Mme A..., bien que régulièrement assignée, ne comparaissant pas en cause d'appel ;
Sur le fond
. Sur le cautionnement
Considérant que M. Y... maintient dans ses écritures d'appel n'avoir exprimé son consentement dans l'acte notarié du 6 janvier 1995 qu'en sa qualité d'associé pour le contrat principal de crédit-bail ; qu'il conteste s'être valablement engagé en sa qualité de caution au motif que la distinction existant dans le corps de l'acte entre ses deux qualités ne se retrouve pas lors de l'expression de son consentement puisqu'il n'a apposé qu'une seule fois sa signature en fin d'acte alors qu'il aurait dû l'apposer par deux fois, pour chacune de ses qualités d'associé et de caution ; qu'il soutient que ce défaut d'engagement exprès en qualité de caution équivaut à l'absence de consentement, en sorte qu'il est fondé à demander l'annulation de l'engagement de caution sur le fondement de l'article 2015 du Code civil ;
Considérant cependant, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, que le cautionnement solidaire de M. Y... est expressément défini au titre 4 des conditions générales du contrat de crédit-bail, sous le numéro 401, page 45 de l'acte notarié ; que ce texte énonce que "ce cautionnement solidaire s'applique au paiement ou remboursement de toutes les sommes que le preneur pourra devoir au bailleur en principal, intérêts, taxes frais et accessoires à un titre quelconque en vertu des dispositions du présent contrat de crédit-bail immobilier dont de convention expresse, la caution reconnaît qu'il forme, avec son propre engagement, un tout indissociable et dont elle accepte que lui soient appliquées toutes les conditions" ; qu'en page 4 de l'acte, laquelle ne contient qu'un seul paragraphe 4, intitulé "Caution", figure le nom de M. Y..., dont l'identité complète est par ailleurs énoncée, en sus de celle de M. D..., mentionné également comme caution ; que cette page, comme toutes celles du document litigieux, a été paraphée par l'intéressé ; que le montant de la somme garantie en principal est également clairement mentionné page 79, au titre des conditions particulières ;
Considérant dans ces conditions que M. Y..., qui a eu lecture complète de l'acte notarié, comme il ressort de l'arrêt rendu par la chambre de l'instruction, le 7 octobre 2005, n'a pu ignorer l'existence de son engagement personnel en tant que caution solidaire ni se méprendre sur la portée et l'étendue de cet engagement ;
Considérant que l'acte notarié précisant les deux qualités au titre desquelles M. Y... est intervenu, la double qualité de son intervention n'imposait pas une double signature dudit acte pour la validité de son engagement de caution solidaire ;
Considérant par ailleurs que l'article 1326 du Code civil n'est pas applicable aux cautionnements donnés par acte authentique ; que par suite M. Y... se prévaut en vain de l'absence de mention manuscrite du montant de la somme garantie par son cautionnement ;
Considérant que dès lors le jugement querellé doit être confirmé en ce qu'il a déclaré valable l'engagement de caution solidaire donné le 6 janvier 1995 par M. Y... ;
Sur la créance ;
Considérant que devant la cour, la SA FINAMUR poursuit la liquidation des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre les consorts Y... / A..., portant sur un immeuble sis à L'Hay-les-Roses, dont ils sont propriétaires indivis, ainsi que la licitation de ce bien ;
Considérant qu'elle fait valoir que M. Y... doit garantir le paiement des créances suivantes de la SCI CHAMPLENAISE :
- arriérés de loyers : 37.446,81 E (245.634,98 F) ;
- indemnité de résiliation : 464.017,91 E (3.043.758 F)
- indemnité d'occupation : 46.280,87 E (303.582,59 F),
dont à déduire le montant des règlements opérés par les cautions, soit 66.730,72 E à ce jour, ce qui, selon elle, porte à 268.657,10 E (1.762.275,10 F) la somme due par l'intimé ;
Considérant que M. Y... ne conteste pas utilement le nombre des loyers restés impayés figurant dans le décompte que l'appelante produit aux débats, savoir les loyers des 3ième et 4ième trimestre 1997, 1er et 2nd trimestre 1998, ni les impôts fonciers demeurés impayés également ;
Considérant que le paragraphe 703 du contrat de crédit-bail prévoit qu'en cas de résiliation anticipée et de retard dans l'évacuation des lieux, le preneur devra payer une indemnité d'occupation égale à trois fois le loyer du dernier terme TTC du bail, décomptée prorata temporis ; que l'engagement de la caution s'étendant, aux termes des dispositions contractuelles, à toutes les sommes dues par le preneur à un titre quelconque en vertu du contrat de crédit-bail, M. Y... s'est bien engagé à garantir le paiement de l'indemnité d'occupation due, le cas échéant, par la SCI CHAMPLENAISE ;
Considérant que la SA FINAMUR estime être créancière de la somme de 303.582,59 F au titre de cette indemnité représentant quatorze mois d'occupation entre le 19 mars 1998, date de la résiliation du contrat de crédit-bail, et la vente de l'immeuble ; que, cependant, il n'existe aucune pièce démontrant une occupation effective de l'immeuble par la SCI CHAMPLENAISE à la date de cette décision et partant ultérieurement ; qu'en l'absence d'élément de preuve d'un maintien dans les lieux de la crédit-bailleresse pour la période considérée, la créance n'est pas fondée ;
Considérant qu'il n'est pas discuté par la SA FINAMUR que l'indemnité de résiliation stipulée au paragraphe 209.2 est susceptible d'être minorée dans les termes de l'article 1152 du Code civil si elle se révèle manifestement abusive ; qu'il est prévu que le montant de ladite indemnité sera égal au prix de vente défini au §303.2 à la date d'effet de la résiliation, augmenté du reversement de taxes visées au §303.3 , le tout majoré de deux années de loyer calculées sur la base du dernier rappel de loyer périodique formulé auprès du preneur avant la résiliation, cette indemnité étant en outre augmentée de la TVA exigible ;
Considérant que le prix de vente théorique de l'immeuble à la date d'effet de la résiliation appliqué par la crédit-bailleresse, soit 1.854.859,34 FHT, n'est pas excessif ni sérieusement remis en cause par M. Y..., lequel ne fournit pas d'élément permettant de retenir que le prix appliqué ne correspondait pas à la valeur du bien eu égard au marché immobilier ;que de plus, la SA FINAMUR a procédé au calcul du coefficient et des taxes ci-dessus énoncées conformément aux dispositions contractuelles ;
Considérant dès lors qu'en l'absence de caractère manifestement excessif de l'indemnité de résiliation, il n'y a pas lieu de minorer le montant de celle-ci ;
Considérant, en outre, que l'article L 313-22 du Code monétaire et financier n'est pas applicable en faveur de la caution du crédit-preneur ;
Considérant que la créance de la SA FINAMUR s'élève ainsi à 501.464,72 E dont il convient de déduire en sus des règlements effectués par les cautions, (66.730,72 E), le prix qu'elle a retiré de la vente de l'immeuble objet du crédit-bail (251.540,88 E), en sorte que la dette de la SCI CHAMPLENAISE ne dépasse pas 183.193,12 E ; que la garantie de M. Y... étant limitée en principal à la somme de 335.387,83 E, celui-ci demeure redevable dudit montant envers la SA FINAMUR ;
Considérant en conséquence qu'il convient de fixer à 183.193,12 E la créance de cette société sur M. Y... et d'ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. Y... et Mme A..., portant sur l'immeuble dont ils sont propriétaires indivis à L'Hay-les-Roses, ainsi que d'ordonner la licitation de ce bien sur la mise à prix de 91.469,41 E ;
Considérant que les éléments de la cause et la disparité des situations économiques commandent de ne pas faire application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Considérant que M. Y..., qui succombe, doit supporter les entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS
Donne acte à la SA FINAMUR de son intervention volontaire aux débats, aux droits de la SA SLIBAIL MURS ;
Confirme la décision déférée en ce qu'elle a dit et jugé valable le cautionnement solidaire de M. Y... ;
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Fixe la créance de la SA FINAMUR, venant aux droits de la SA SLIBAIL MURS, à la somme de 183.193,12 E à l'encontre de M. Y...;
Vu les bordereaux d'inscription d'hypothèque judiciaire publiées le 7 mai 1998, volume 98 V no1713 et le 9 juillet 1998, volumes 1998 V no 2545,
Ordonne l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. Louis Albert Y..., né le 17 novembre 1939 à Paris 4o, et Mme Kathe A..., née le 22 mars 1948 à Dirinteln, portant sur les biens sis ..., L'hay-les-Roses (94), cadastré section 0, no de plan 81, pour une contenance de 2a 68ca, comprenant les lots :
- 104 : un appartement et les 306/1000ièmes des parties communes ;
- 103 : un garage et les 35/1000ièmes des parties communes ;
- 110 : une remise et les 23/1000ièmes des parties communes ;
- 114 : un parking extérieur et les 4/1000ièmes des parties communes ;
Ordonne la vente sur licitation en un seul lot desdits biens sur le cahier des charges dressé et déposé par Maître E..., avocat, sur une mise à prix de 91.469,41 E ;
Dit que les opérations de compte, liquidation et partage seront suivies par le magistrat qui sera désigné à cet effet par le Président du tribunal de grande instance de Créteil ;
Désigne Monsieur le Président de la chambre départementale des notaires avec pouvoirs de délégation pour procéder aux opérations de liquidation et de compte de l'indivision ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne M. Y... aux entiers dépens qui seront distraits pour ceux d'appel au profit de la SCP BERNABE-CHARDIN et CHEVILLER en application de l'article 699 dudit code.
LE GREFFIER LE PRESIDENT