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08/11/2007 | FRANCE | N°06/7417

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0051, 08 novembre 2007, 06/7417


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre - Section C

ARRET DU 8 NOVEMBRE 2007

(no , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/07417

Décision déférée à la Cour : Ordonnance d'exequatur rendue le

20 février 2006 par le délégataire du Président du T.G.I. de PARIS

sur requête présentée le 14 février 2006, déclarant exécutoire en France

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de M. G.H.TOFFER, Président, M. S. O'MAHONY et M. DUNCAN

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Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre - Section C

ARRET DU 8 NOVEMBRE 2007

(no , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/07417

Décision déférée à la Cour : Ordonnance d'exequatur rendue le

20 février 2006 par le délégataire du Président du T.G.I. de PARIS

sur requête présentée le 14 février 2006, déclarant exécutoire en France

la sentence arbitrale no2188 rendue par le Tribunal Arbitral, statuant

à Londres sous l'égide de la Refined Sugar Association et composé

de M. G.H.TOFFER, Président, M. S. O'MAHONY et M. DUNCAN

en date du 9 février 2004

APPELANTE

La SELAFA MJA agissant en la personne

de Maître Brigitte PENET-WEILLER

demeurant : ...

75648 PARIS CEDEX 13

agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire

à la liquidation judiciaire de la S.A. JEAN LION

ET COMPAGNIE

représentée par la SCP PETIT-LESENECHAL,

avoués à la Cour

assistée de Maître Kristell QUELENNEC,

avocat plaidant pour Maître Jean-Paul PETRESCHI,

avocat au barreau de Paris

INTIMEE

La Société INTERNATIONAL COMPANY

FOR COMMERCIAL EXCHANGES INCOME,

ayant son siège : 18 Nawal Street Elagouza

12311 LE CAIRE (EGYPTE)

prise en la personne de ses représentants légaux

représentée par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN,

avoués à la Cour

assistée de Maître Philippe LEBOULANGER,

avocat Toque E 1157

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 octobre 2007

en audience publique, le rapport entendu, devant la Cour composée de :

Monsieur PÉRIÉ, président

Monsieur MATET, conseiller

Monsieur HASCHER, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme FALIGAND

Ministère public :

représenté lors des débats par Madame ROUCHEREAU, avocat général,

ARRÊT :

- Contradictoire

- prononcé en audience publique par Monsieur PÉRIÉ, Président,

- signé par Monsieur PÉRIÉ, Président, et par Mme FALIGAND

greffier présent lors du prononcé.

*******

Le 21 avril 2006, la Selafa MJA agissant en la personne de Me Penet-Weiller, ès qualités de mandataire judiciaire de la SA Jean-Lion et Cie, a interjeté appel d'une décision d'exequatur rendue le 20 février 2006 par le président du tribunal de grande instance de Paris d'une sentence arbitrale prononcée à Londres le 9 février 2004 sous le no 2188 par un tribunal arbitral siégeant sous les auspices de la Refined Sugar Association. Les arbitres M.M. O'Mahony et Duncan, et, Toffer, président, statuant sur la base de la clause compromissoire de trois contrats de vente de sucre cristallisé blanc passés en mars-avril 2001 entre la société Jean G... et la société International Compagny for Commercial Exchange ("Income"), ont, selon la traduction de la sentence effectuée par un traducteur assermenté :

- ordonné à Jean G... de verser immédiatement à Income la somme de 4.662.000,00 USD de dommages-intérêts résultant de l'achat par Income de sucre de remplacement ainsi que la somme de 325.736,00 USD à titre d'intérêts, calculés sans capitalisation au taux de 3 % par an, conformément au calendrier ci-joint.

- ordonné également à Jean G... de verser immédiatement à Income la somme de 271.765,33 USD correspondant aux frais inutiles de lettres de crédit ouvertes en sa faveur, ainsi que la somme de 18.820,00 USD à titre d'intérêts, calculés sans capitalisation au taux de 3 % par an, à compter du 1er novembre 2001 inclus et jusqu'à la date de la présente sentence inclus (831 jours).

- ordonné également à Jean G... de payer des intérêts sur la somme de 5.278.321,33 USD, calculés sans capitalisation au taux de 3 % par an, à compter du lendemain de la date de la présente sentence et jusqu'à complet paiement.

- ordonné également à Jean G... de payer les frais de l'Association du Sucre

Raffiné relatifs à la présente sentence que nous avons fixés à la somme de 44.700,00 . hors TVA, sachant que si Income a initialement pris à sa charge tout ou partie desdits frais, elle sera en droit d'en obtenir immédiatement le remboursement auprès de Jean G....

- ordonné enfin à Jean G... de payer à Income les frais d'arbitrage, lesquels devront être calculés selon les modalités habituelles et fixés par la High Court, en cas de désaccord, les arbitres ayant dit qu'ils n'exerceraient pas le pouvoir qui leur est conféré de fixer eux-mêmes les dits frais.

Me Penet-Weiller, ès qualités, demande de rejeter des débats les pièces no 52 et 53 de l'intimée qui n'ont pas été traduites en français, conclut à la nullité de l'ordonnance d'exequatur pour deux moyens, le non-respect du principe de la contradiction (art.1502-4o NCPC) et la contrariété de la reconnaissance ou de l'exécution à l'ordre public international (art. 1502-5o NCPC). Elle demande de condamner la société Income à lui payer une somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à supporter les dépens.

La société Income demande qu'on lui donne acte, qu'en déclarant sa créance au passif de la société Jean G..., elle a renoncé à poursuivre l'exécution de la sentence et conclut à la confirmation de l'ordonnance d'exequatur, à la condamnation de Me Penet-Weiller à lui payer une somme de 150.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, à payer une amende sur la base de l'article 559 du nouveau code de procédure civile, une somme de 50.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en appliquant l'article 698 de ce même code.

SUR CE LA COUR :

===============

Considérant qu'il revient de rejeter des débats les pièces 52 et 53 non traduites qui ont été versées par la société Income ;

Sur le non respect du principe de la contradiction et la contrariété de la reconnaissance et de l'exécution de la sentence à l'ordre public international (article 1502-4o et 5o du nouveau code de procédure civile) :

Me Penet-Weiller, ès qualités, soutient que l'ordre public international a été

contrarié par la violation de deux principes :

- le principe de la suspension des poursuites individuelles pour défaut de mise en cause des organes de la procédure collective et violation de la règle relative à l'interdiction de prononcer une condamnation à l'encontre

d'une personne morale faisant l'objet d'une procédure collective.

- le principe du contradictoire qui s'il se rattache incontestablement à la notion d'ordre public international, constitue également une cause distincte de refus d'exécution au visa de l'article 1502-4o du NCPC.

Considérant que la Refined Sugar Association, devant qui la procédure d'arbitrage était ouverte depuis le 5 octobre 2001, a été informée le 23 mai 2003 par les conseils de la société Income de la nomination par la justice consulaire à Paris le 20 précédent, de Me Penet-Weiller en tant que représentant des créanciers de la société Jean G... et de la déclaration de créance effectuée ce même jour, la procédure d'arbitrage pouvant donc se poursuivre ; que le 2 juillet suivant, la Refined Sugar Association a été informée de la nomination de Me Penet-Weiller en qualité cette fois de liquidateur de la société Jean G... ;

Considérant que Me Penet-Weiller en tant qu'associé de la Selafa MJA a été destinataire des correspondances échangées entre le conseil de la société Income et Me H... l'administrateur judiciaire de la société Jean G..., le 23 mai 2003 pour s'assurer de la continuité de la défense des intérêts de la société à l'audience du 16 juin suivant, et de la réponse du 28 mai 2003, où Me H... écrivait :

"il importe que mon administrée soit bien représentée dans le cadre de la procédure d'arbitrage qui débute lundi 16 juin 2003 (...) Je demande à Me Lucheux, avocat de la société, de veiller à sa représentation" ;

et puis, après la nomination de celle-ci en tant que liquidateur, des documents relatifs à la procédure d'arbitrage expédiés le 27 août 2003 à la Selafa MJA et de toute information sur les étapes de la procédure, une lettre du 20 octobre 2003 de la Refined Sugar Association invitant même Me Penet-Weiller expressément à prendre contact et se mettant à sa disposition pour obtenir toute information ou tout document ;

Que la sentence rappelle d'ailleurs ses différentes étapes de la procédure :

" 10. Le 20 octobre 2003, l'Association a adressé un fax à Slaughter et May

le conseil à l'arbitrage de la société Income ainsi qu'à Me Penet-Weiller

les informant que l'affaire serait examinée le 20 novembre 2003 sur la base de documents écrits uniquement et mentionnant les noms des arbitres nommés par le Conseil ainsi que ceux de leurs avocats. Dans son fax, l'Association a clairement indiqué à Me I... que si elle souhaitait obtenir toute information relative à l'arbitrage ou la copie de tout document, elle devait contacter le secrétaire qui l'assisterait dans toute la mesure du possible. Aucune demande d'assistance, ni même aucune réponse n'a été reçue de Me I....

11. Nous sommes certains, au vu de l'ensemble de la correspondance, que Mme Penet-Weiller et Me H..., antérieurement ont été tenus pleinement informés de l'avancement de la procédure d'arbitrage, ont reçu copie de l'ensemble des mémoires, moyens de preuve et autres documents produits par Income dans le cadre du présent arbitrage et ont eu la possibilité d'y prendre part. Dans ces circonstances, nous estimons qu'il était légitime de tenir audience le 20 novembre 2003 et de rendre une sentence sur le fondement des documents mise à notre disposition" ;

Considérant que si Me Penet-Weiller n'a pas l'obligation de comparaître dans la procédure d'arbitrage, elle ne peut en revanche se tenir en embuscade pour soutenir, une fois la sentence rendue et notifiée, que sa reconnaissance et son exécution sont impossibles parce que la Selafa MJA, en sa personne ès qualités, n'a jamais été dûment mise en cause, et qu'aucune citation, assignation en intervention forcée par exploit d'huissier ne lui a été adressé depuis Londres dans les conditions des articles 68 ou 373 du nouveau code de procédure civile française, que si elle croyait en la force de conviction de tels arguments, il lui aurait d'ailleurs appartenu de le dire pendant la procédure arbitrale, la règle de l'estoppel s'opposant à ce qu'elle puisse se découvrir pour la première fois devant le juge de l'exequatur ; que Me Penet-Weiller ne peut ainsi faire aucune démonstration d'un quelconque rapport entre les griefs qu'elle propose et la violation du principe de suspension des poursuites individuelles ;

Considérant que l'appelante se réfugie ensuite pour faire échec à l'insertion de la sentence dans l'ordre juridique français derrière la mention du dispositif de la sentence où les arbitres ont "ordonné" à la société Jean G... de verser certaines sommes à titre de dommages et intérêts et de frais à la société Income, mais que pour réaliser une violation de l'ordre public international, la reconnaissance ou l'exécution de la sentence doit y contrevenir de manière notamment effective et concrète, ce qui n'est pas le cas ici d'une violation purement formelle de l'impossibilité de prononcer une condamnation à l'encontre d'une personne morale liquidée ; qu'en l'espèce la règle de l'égalité des créanciers n'est pas méconnue puisque la société Income a produit à la liquidation de la société Jean G... et demande de lui donner acte de ce qu'elle ne reprend pas l'exécution de la sentence ;

Considérant que les mentions récapitulatives de la procédure dans la sentence indiquent encore, qu'après report de l'audience initialement prévue le 16 juin 2003 à la demande de Jean G... en raison du jugement d'ouverture ,

" 8. Le 5 juin 2003, le conseil de la société Income a adressé un fax à l'Association indiquant clairement qu'étant donné les frais associés à la tenue de débats contradictoires, il ne voyait aucun inconvénient à ce que le tribunal tranche le litige sur la base de documents écrits uniquement.En adressant copie de leur fax à l'administrateur judiciaire, le conseil de la société Income a sollicité l'accord de Jean G... sur ce point. L' Association a répondu le même jour par fax en confirmant que le tribunal procéderait à l'examen de cette affaire sans organiser de débats contradictoires à moins qu'elle ne reçoive, au plus tard le 12 juin 2003, un avis contraire de la part de Jean G... ou de ses représentants. Aucun avis contraire n'a été reçu par l'Association avant l'expiration du délai ainsi fixé";

Que les courriers échangés au sujet du report de l'audience de plaidoiries initialement prévue le 16 juin 2003 et dont Me Penet-Weiller était, comme toujours, destinataire, notamment le courrier du 5 juin 2003 de la société Income mentionné dans la sentence, démontrent à l'évidence que les parties ont renoncé à la phase orale de la procédure, la décision étant prise par les arbitres au vu des pièces produites et écritures échangées, la société Income ayant renoncé à conclure pour l'examen de l'affaire sur pièces par les arbitres le 20 novembre suivant, et Me Penet-Weiller, à qui cette information avait été communiquée, n'ayant pas plus réagi quant il avait été demandé de produire pour le compte de la société Jean G... ;

Que la règle de l'estoppel s'oppose ici encore à ce que Me Penet-Weiller qui n'a rien trouvé à dire pendant l'arbitrage tire désormais pour s'opposer à l'exécution de la sentence, des conséquences au plan des grands principes du procès d'événements dont elle était parfaitement informée en s'appuyant sur le passage de la sentence traduit par "sans organiser de débats contradictoires" ;

Considérant que l'appel est rejeté, les moyens de Me Penet-Weiller étant ou irrecevables ou infondés, aucune violation de l'ordre public international ou du principe de la contradiction n'étant établie ;

Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive et l'article 559 du nouveau code de procédure civile :

Considérant que la plupart des arguments déployés dans cette procédure par Me Penet-Weiller ont été suscités par les maladresses commises par le cabinet Slaughter et May qui intervenait dans l'arbitrage pour la société Income et par les arbitres, ou encore en raison de la qualité de la traduction de la sentence qui a été effectuée ; que la société Income, eu égard à ces circonstances, ne rapporte pas la preuve d'une faute de Me Penet J... lui ouvrant le droit à des dommages intérêts ou justifiant le prononcé d'une amende civile ;

Sur les dépens et l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

Considérant que Me Penet-Weiller qui succombe, supporte les dépens ès qualités sans qu'il y ait lieu de faire jouer l'article 698 du nouveau code de procédure civile, que l'équité commande, par application des dispositions de l'article 700 de ce même code, de la condamner à verser à la société Income une somme de 50.000 € ;

PAR CES MOTIFS :

==============

Rejette des débats les pièces 52 et 53 déposées par la société Income,

Confirme l'ordonnance d'exequatur de la sentence arbitrale no 2188 rendue à Londres le 9 février 2004 sous les auspices de la Refined Sugar Association ;

Condamne la Selafa MJA agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Jean G... en la personne de Me Penet-Weiller à verser à la société International Compagnie Commercial Exchange une somme de 50.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande,

Condamne la Selafa MJA agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Jean G... en la personne de Me Penet-Weiller aux dépens et accorde à la Scp Duboscq et Pellerin, avoué, le bénéfice du droit prévu à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT

R. FALIGAND J.F. PERIE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0051
Numéro d'arrêt : 06/7417
Date de la décision : 08/11/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 20 février 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-11-08;06.7417 ?
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