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08/11/2007 | FRANCE | N°04/30663

France | France, Cour d'appel de Paris, 08 novembre 2007, 04/30663


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre B



ARRÊT DU 08 Novembre 2007

(no 2 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 04/30633



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Novembre 2003 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG no 02/11625









APPELANTE



SA EUROPE 1 TELECOMPAGNIE

...


75008 PARIS

représentée par Me Pierre LUBET, a

vocat au barreau de PARIS, toque : P 0134 substitué par Me Sylvie X..., avocat au barreau de PARIS, toque : P.0134







INTIMÉE



Madame Brigitte Y...


...


75016 PARIS

représentée par Me Anne-Judit...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre B

ARRÊT DU 08 Novembre 2007

(no 2 , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 04/30633

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Novembre 2003 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG no 02/11625

APPELANTE

SA EUROPE 1 TELECOMPAGNIE

...

75008 PARIS

représentée par Me Pierre LUBET, avocat au barreau de PARIS, toque : P 0134 substitué par Me Sylvie X..., avocat au barreau de PARIS, toque : P.0134

INTIMÉE

Madame Brigitte Y...

...

75016 PARIS

représentée par Me Anne-Judith LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : L15

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Septembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Mary VEILLE, PRESIDENT

M. Thierry PERROT, Conseiller

Madame Edith SUDRE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Nadine LAVILLE, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur Jean-Mary VEILLE, PRESIDENT

- signé par Monsieur Jean-Mary VEILLE, président et par Madame Nadine LAVILLE, greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCÉDURE

Madame Brigitte Y... a été embauchée le 27 juin 2001 par la société Europe 1 Télécompagnie en qualité d'animatrice d'une émission relative aux questions de société, de famille et de psychologie diffusée du lundi au vendredi de 10 Heures 30 à 12 Heures, dans le cadre d'un contrat à durée déterminée du 30 juillet au 2 septembre 2001.

Un second contrat à durée déterminée était signé entre les parties le 20 août 2001 pour la période du 3 septembre 2001 au 30 juin 2002, puis un troisième le 16 juin 2002 pour la période du 1er juillet au 19 juillet 2002.

A l'issue de ce dernier contrat la S.A. Europe 1 Télécompagnie a fait savoir à Mme Y... qu'elle n'entendait pas poursuivre la diffusion de cette émission pour la prochaine saison radiophonique 2002-2003.

Par requête reçue le 17 septembre 2002 Mme Y... a saisi le Conseil des Prud'hommes de Paris d'une demande tendant :

- à se voir appliquer la Convention Collective des Journalistes Professionnels et le statut de cadre,

- à voir requalifier ses contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée,

- à voir qualifier la rupture de son contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ,

- à voir en conséquence condamner avec exécution provisoire et intérêts au taux légal, la S.A. Europe 1 Télécompagnie à lui verser les sommes suivantes :

- 6 097,96 € à titre d'indemnité de requalification,

- 8 130,61 € à titre d'indemnités de congés payés liés à son statut de journaliste,

- 18 293,88 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1 829,38 € à titre congés payés sur ce préavis,

- 6 606,12 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 73 175,52 € à titre dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et procédure vexatoire ,

- 10 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour violation des droits de la personnalité,

- 2 000,00 € par application de l'article 700 du NCPC ,

- à voir ordonner la remise des documents sociaux ( attestation ASSEDIC et certificat de travail )

Par jugement en date du 6 novembre 2003 le Conseil des Prud'hommes de Paris statuant en formation de départage a :

- dit que Mme Y... ne peut prétendre au statut de journaliste professionnel cadre,

- requalifié la relation de travail en un contrat à durée indéterminée à compter du 30 juillet 2001,

- dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamné en conséquence la S.A. Europe 1 Télécompagnie à lui verser les sommes suivantes

- 6 097,96 € à titre d'indemnité de requalification,

- 6 097,96 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 609,79 € à titre de congés payés afférents,

avec intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2002 et exécution provisoire ,

- 30 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ,

- 2 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour violation des droits de la personnalité, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ,

- ordonné l'exécution provisoire pour les condamnations qui n'en bénéficient pas de droits,

- ordonné la remise des documents sociaux conformes,

- condamné la S.A. Europe 1 Télécompagnie à payer à Mme Y... la somme de 1 000,00 € par application l'article 700 du NCPC ,

- débouté Mme Y... du surplus de ses demandes ,

- condamné la S.A. Europe 1 Télécompagnie aux entiers dépens de la procédure.

Le 5 décembre 2003 cette dernière a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 28 novembre 2003.

Elle demande à la Cour :

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme Y... de sa demande relative à la qualification de journaliste cadre, et de sa demande en dommages et intérêts pour procédure vexatoire,

- de la débouter pour le surplus de l'ensemble de ses prétentions,

- de la condamner à lui rembourser la somme de 43 999,00 € réglée au titre de l'exécution provisoire du jugement du Conseil des Prud'hommes de Paris outre les intérêts au taux légal à compter de leur règlement intervenu le 20 janvier 2004 pour la somme de 12 805,71 € et pour 31 193,29 € le 22 mars 2004 ,

- de condamner Mme Y... à lui verser la somme de 1 500,00 € par application de l'article 700 du NCPC , ainsi qu'aux dépens.

Mme Y... a maintenu de son côté l'intégralité de ses demandes initiales.

Elle sollicite par ailleurs que les condamnations prononcées interviennent avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 septembre 2002 et la condamnation de la S.A. Europe 1 Télécompagnie à lui verser la somme de 1 914,00 € au titre des frais occasionnés par la procédure d'exécution forcée du jugement outre celle de 9 000,00 € par application de l'article 700 du NCPC.

La cour se réfère aux conclusions des parties visées par le greffier le 20 septembre 2007 dont elles ont repris les termes à l'audience des débats.

Sur ce

Motivation

Sur la qualité de journaliste cadre

Attendu qu'en application de l'article L 761-2 du Code du Travail " est un journaliste professionnel celui qui a pour occupation principale, régulière et rétribuée l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou dans une ou plusieurs agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources ".

Attendu qu'il ressort des pièces de la procédure que de 1994 à 2001 Mme Y... a travaillé en qualité de salariée intermittent au sein de la société France Télévision totalisant en sept ans 1283 jours de travail.

Attendu que les trois contrat à durée déterminée signés les 27 juin 2001, 20 août 2001 et 16 juin 2002 entre Mme Y... et la S.A. Europe 1 Télécompagnie précisent que l'intéressée est embauchée en qualité d'animatrice et que ses fonctions relèvent du régime des intermittents du spectacle.

Attendu que la mission de Mme Y... consistait à animer une émission interactive relative aux questions de société, de famille et de psychologie.

Attendu que Mme Y... qui a été embauchée pour exercer des fonctions spécifiques d'animatrice dans le cadre d'une émission précise, limitée dans le temps et non pour effectuer de manière constante et générale l'ensemble des émissions de la S.A. Europe 1 Télécompagnie ne justifie d'aucune activité de collaboratrice chargée de la rédaction et de la mise en forme d'informations.

Attendu que Mme Y... dont les bulletins de salaire mentionnent sa seule qualité d'animatrice sans même faire référence à un quelconque coefficient de rémunération ne produit aucune pièce permettant d'établir qu'elle exerçait des fonctions d'encadrement ou de direction relevant du statut de cadre,

Qu'il convient dès lors de confirmer le jugement déféré quia débouté Mme Y... de sa demande tendant à se voir attribuer la qualification de journaliste cadre et de sa demande en paiement de congés payés liés à ce statut.

Sur la requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée

Attendu que l'article L 122-1-1 du Code du Travail dispose que " le contrat de travail ne peut être conclu pour une durée déterminée que dans les cas suivants :

3o) emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels dans certains secteurs définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ".

Attendu que des contrats à durée déterminée successifs peuvent être conclus avec le même salarié ,

Que l'office du juge saisi d'une demande de requalification d'un contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée est seulement de rechercher par une appréciation souveraine si pour l'emploi concerné et, sauf si une Convention Collective prévoit en ce cas le recours au contrat à durée indéterminée , il est effectivement d'usage de ne pas recourir à un tel contrat, l'existence de l'usage devant être vérifié au niveau du secteur d'activité défini par l'article D 121-2 du Code du Travail ou par une convention ou un accord collectif étendu.

Attendu en l'espèce que l'article D121-2 du Code du Travail définit le secteur de l'audio-visuel comme l'un des secteurs d'activité où il est d'usage de ne pas recourir aux contrats à durée indéterminée.

Attendu que l'accord inter branche du 2 octobre 1998 définit l'activité radio , et dans l'activité radio celle d'animateur, comme une activité dans laquelle peuvent être mis en place des contrats à durée déterminée d'usage.

Attendu qu'il s'ensuit que l'emploi occupé par Mme Y... , par nature temporaire du fait qu'il concerne une émission déterminée, se déroulant à certaines heures sur un sujet précis relatif à la santé ou la famille sur lequel elle intervenait en sa qualité de médecin, s'inscrit dans un secteur d'activité où il est d'usage constant de ne pas recourir à des contrat à durée indéterminée,

Qu'il convient dès lors d'infirmer le jugement déféré et de débouter Mme Y... de sa demande en requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée et de sa demande d'indemnité de ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail

Attendu que le contrat de travail à durée déterminée conclu entre les parties a été rompu par l'arrivée du terme ,

Qu'il convient dès lors de constater qu'en l'absence de faute grave ou de force majeure, cette rupture ne saurait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de débouter Mme Y... de ses demandes en paiement d'une indemnité conventionnelle de licenciement, indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et procédure vexatoire et remise de documents sociaux conformes.

Sur la demande en dommages et intérêts pour préjudice lié à l'image

Attendu qu'il est établi que postérieurement à la fin du contrat de travail et alors même que l'émission à laquelle participait Mme Y... avait été supprimée , la S.A. Europe 1 Télécompagnie a continué à faire figurer son patronyme sur le site internet comme intervenant aux côtés de la nouvelle animatrice.

Attendu qu'une telle situation, de nature à laisser croire aux employeurs potentiels de Mme Y... qu'elle continuait à travailler pour la S.A. Europe 1 Télécompagnie, lui a manifestement causé un préjudice qu'il convient de réparer en lui allouant la somme de 2 000,00 € à titre de dommages et intérêts,

Qu'ainsi le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur la demande en remboursement des frais de procédure d'exécution

Attendu que la décision du Conseil des Prud'hommes de Paris assortie de l'exécution provisoire a été notifiée à la S.A. Europe 1 Télécompagnie le 28 novembre 2003.

Attendu que dès le 17 décembre 2003 Mme Y... a fait délivrer à la S.A. Europe 1 Télécompagnie un commandement aux fins de saisie-vente, puis le 22 décembre une saisie-attribution sur son compte bancaire.

Attendu que la demande de la S.A. Europe 1 Télécompagnie tendant à voir subordonner les effets de l'exécution provisoire d'une garantie bancaire de Mme Y... ne saurait en l'absence d'autre élément constituer une résistance abusive de sa part et correspond à un souci légitime de préserver ses droits en cas d'infirmation du jugement ,

Qu'en tout état de cause la S.A. Europe 1 Télécompagnie justifie avoir le 12 janvier 2004 procédé au règlement des condamnations assorties de l'exécution provisoire de droit puis le 22 mars 2004 au solde.

Qu'il y a lieu dès lors de débouter Mme Y... de sa demande en remboursement des frais d'exécution forcée qu'elle a estimé utiles d'engager.

Sur la demande en remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire

Attendu que la S.A. Europe 1 Télécompagnie demande le remboursement des sommes qu'elle a versées à Mme Y... en vertu du jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de Paris assorti de l'exécution provisoire avec intérêts au taux légal à compter de leur versement.

Attendu toutefois que Mme Y... a été déboutée en cause d'appel de l'ensemble de ses prétentions à l'exception de sa demande en dommages et intérêts pour préjudice lié à son image.

Attendu qu'il s'ensuit que le présent arrêt partiellement infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement les sommes devant être restituées portant intérêts au taux légal à compter de la notification valant mise en demeure de la décision ouvrant droit à restitution,

Qu'il n'y a pas lieu en conséquence de statuer sur la demande en restitution sollicitée.

Sur l'article 700 du NCPC et les dépens

Attendu qu'il convient d'infirmer le jugement déféré sur l'application de l'article 700 du NCPC et de débouter Mme Y... et la S.A. Europe 1 Télécompagnie de leurs demandes respectives d'indemnité de ce chef formée en première instance et en cause d'appel

Qu'il convient par ailleurs de condamner Mme Y... aux entiers dépens de la procédure.

Par ces motifs

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,

Infirme partiellement le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Déboute Mme Y... de sa demande en requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée ,

Déboute Mme Y... de ses demandes d'indemnité de requalification, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de remise des documents sociaux conformes,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme Y... de ses demandes tendant à se voir reconnaître la qualification de journaliste cadre et à se voir allouer une indemnité conventionnelle de licenciement, des congés payés liés au statut de journaliste et une indemnité pour procédure vexatoire,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la S.A. Europe 1 Télécompagnie à verser à Mme Y... la somme de 2 000,00 € à titre dommages et intérêts pour préjudice lié à son image,

Y ajoutant ,

Déboute Mme Y... de sa demande en remboursement des frais d'exécution forcée qu'elle a engagés,

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande en restitution des sommes versées par la S.A. Europe 1 Télécompagnie à Mme Y... en exécution du jugement déféré assorti de l'exécution provisoire,

Déboute les parties de leurs demandes respectives d'indemnité fondée sur l'article 700 du NCPC formées en première instance et en cause d'appel,

Condamne Mme Y... aux entiers dépens de la procédure.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 04/30663
Date de la décision : 08/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-08;04.30663 ?
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