La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/11/2007 | FRANCE | N°06/11961

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0089, 07 novembre 2007, 06/11961


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

1ère CHAMBRE - Section N

REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES

DECISION DU 7 NOVEMBRE 2007

No du répertoire général : 06/11961

Décision contradictoire en premier ressort

Nous, Renaud BLANQUART, Conseiller à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Gilles DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante :

Statuant sur la requête déposée au greffe le 7 juillet 2006 par Maît

re Servane CROSNIER, avocat substituant Maître Denis GIRAUD, avocat de Monsieur Patrick Y..., demeurant ... ;

Vu ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

1ère CHAMBRE - Section N

REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES

DECISION DU 7 NOVEMBRE 2007

No du répertoire général : 06/11961

Décision contradictoire en premier ressort

Nous, Renaud BLANQUART, Conseiller à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Gilles DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante :

Statuant sur la requête déposée au greffe le 7 juillet 2006 par Maître Servane CROSNIER, avocat substituant Maître Denis GIRAUD, avocat de Monsieur Patrick Y..., demeurant ... ;

Vu les pièces jointes à cette requête ;

Vu les conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;

Vu les conclusions du requérant notifiées par lettre recommandée avec avis de réception;

Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;

Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l'audience fixée au 19 septembre 2007 ;

Vu l'absence de Monsieur Patrick Y... ;

Ouï Maître Denis GIRAUD, avocat représentant Monsieur Patrick Y..., Maître Carole PASCAREL, avocat plaidant pour la SCP UETTWILLER GRELON GOUT CANAT ET ASSOCIES, avocats associés représentant Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, ainsi que Madame Lydia GÖRGEN, avocat général, les débats ayant eu lieu en audience publique, le 19 septembre 2007, le conseil du requérant ayant eu la parole en dernier ;

Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R. 26 à R. 40-7 du code de procédure pénale ;

* *

Monsieur Y..., né le 7 février 1955, a été mis en examen du chef de participation à une association de malfaiteurs et vol aggravé le 23 juillet 1999 et placé en détention provisoire. Il a été remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire le 2 mars 2000.

Il a fait l'objet d'une décision de relaxe par jugement du tribunal correctionnel, le 1er février 2006, après, donc, une incarcération de 224 jours cette décision étant définitive.

Par requête déposée le 7 juillet 2006, aux fins de réparation à raison d'une détention, Monsieur Y... fait valoir :

- S'agissant de son préjudice moral :

qu'il a toujours nié les faits reprochés, que son épouse et sa fille, âgée de 17 ans, ont été particulièrement traumatisées par son incarcération, qui a mis en péril l'équilibre de son couple, que sa fille n'a pu être aidée ni soutenue alors quelle préparait l'examen du baccalauréat, par son épouse qui a sombré dans une grave dépression et est toujours en invalidité, que sa fille a échoué à l'examen du baccalauréat, en dépit du fait qu'elle avait été une élève brillante, réussissant cet examen l'année suivante, lorsqu'il a regagné le domicile familial, que sa détention a été d'autant plus pénible du fait de la dégradation de la santé de sa femme et des réactions de sa fille à son encontre, que ses conditions de détention ont été pénibles, alors qu'il ne pouvait rien partager avec de jeunes détenus, qu'il a subi les contraintes d'un contrôle judiciaire pendant 6 années.

Il demande l'allocation d'une indemnité de 50.000 €, de ce chef.

- S'agissant de son préjudice matériel :

que sa détention ne lui a pas permis de développer une activité de marchand de biens, alors qu'il était en cours de constitution d'une SCI.

Il demande l'allocation d'une indemnité de 20.000 €, de ce chef.

Dans ses conclusions du 22 mars 2007, Monsieur l'Agent judiciaire du Trésor, estimant la requête recevable, fait valoir :

- S'agissant du préjudice moral invoqué :

que le fait que le requérant ait toujours nié les faits reprochés ne peut être pris en considération dans le cadre de la présente instance, que les préjudices subis par l'épouse de Monsieur Y... et sa fille ne peuvent ici donner lieu à réparation, que les conséquences du contrôle judiciaire ne peuvent, non plus, donner lieu à réparation, qu'il peut être tenu compte de l'inquiétude aggravée du requérant à raison de la situation de ses proches, de la durée de sa détention, qu'il doit être tenu compte du fait que le requérant avait été précédemment détenu pendant une durée de 7 ans.

Il estime que ce préjudice peut être réparé par l'allocation de la somme de 8.000 €.

- S'agissant du préjudice matériel :

que Monsieur Y... ne justifie pas de ses affirmations, s'agissant de son projet professionnel, alors qu'il était sans emploi lors de son placement en détention provisoire et ne produit aucune pièce à l'appui de ses dires, que le rapport d'enquête rédigé le 23 juillet 1999 révèle une situation professionnelle inconsistante.

Monsieur le Procureur Général fait valoir, estimant la requête recevable,

- S'agissant du préjudice matériel :

que la réalité de ce préjudice n'est pas démontrée,

- S'agissant du préjudice moral :

qu'il doit être tenu compte du fait que le requérant était âgé de 44 ans lors de son placement

en détention, vivait en concubinage et avait une fille de 17 ans, que sa détention a été rendue d'autant plus pénible qu'il s'inquiétait de l'état de santé de sa compagne, qu'il avait été précédemment incarcéré, ayant été condamné le 27 août 1990 à 7 ans de réclusion criminelle,

que sont exclus de la présente procédure les préjudices subis du fait des mesures de contrôle judiciaire.

SUR QUOI,

Sur la requête

Attendu que la présente requête est recevable au regard des dispositions des articles 149 à 149-2 du Code de procédure pénale ;

Sur le préjudice moral

Attendu que le choc carcéral incontestable qu'a subi Monsieur Y..., du fait de sa détention, doit donner lieu à réparation ;

Que la présente procédure ne tendant qu'à la totale indemnisation du préjudice né de la seule détention, il n'y a lieu de prendre en considération l'attitude du requérant face aux accusations dont il faisait l'objet et, particulièrement, ses dénégations, pas plus que le préjudice qu'il invoque à raison du contrôle judiciaire dont il a fait l'objet ;

Que le requérant était âgé de 44 ans lorsqu'il a été placé en détention pour une durée de 224 jours à raison de la présente affaire ; qu'il doit être tenu compte, pour fixer le montant de cette réparation, des circonstances d'aggravation du préjudice considéré et, plus particulièrement, du fait qu'au moment de son incarcération, Monsieur Y... vivait en concubinage depuis 22 ans, avait une fille de 17 ans comme étant née le 7 novembre 1982, et qu'il a nécessairement vécu plus difficilement sa détention en apprenant que sa compagne faisait l'objet d'un arrêt de travail à partir du 6 septembre 1999, puis se voyait reconnaître une situation d'invalidité réduisant au moins des deux tiers sa capacité de travail et que sa fille devait poursuivre ses études en classe de terminale et présenter les épreuves du baccalauréat, examen qu'elle ne réussissait qu'après un premier échec ;

Qu'il doit être tenu compte comme élément d'atténuation du choc carcéral du fait que le requérant avait été détenu à compter du 27 août 1990 pour une durée de 7 ans avant la détention provisoire considérée ;

Qu'il y a lieu de faire droit à sa demande, de ce chef, en lui allouant la somme de 12.320 € ;

Sur le préjudice matériel

Attendu que le requérant ne produit aucun justificatif, à l'appui de sa demande de réparation d'un préjudice économique ;

Qu'il a déclaré à l'enquêteur de personnalité qui l'a reçu le 23 juillet 1999 être sans activité déclarée depuis 1996 et avoir envisagé de s'installer à son compte en créant une entreprise de lavage de voitures ;

Qu'il ne peut être fait droit à sa demande de réparation d'un préjudice matériel ;

PAR CES MOTIFS

Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R. 26 à R. 40-7 du code de procédure pénale ;

Disons la requête recevable,

Allouons à Monsieur Y... :

- une indemnité de 12.320 €, en réparation de son préjudice moral,

Rejetons sa demande d'indemnisation d'un préjudice matériel.

Ainsi fait, jugé et prononcé par le magistrat délégué soussigné, le 7 novembre 2007, où étaient présents : Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller, Madame Lydia GORGEN, Avocat Général et Monsieur Gilles DUPONT, Greffier.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0089
Numéro d'arrêt : 06/11961
Date de la décision : 07/11/2007

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-11-07;06.11961 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award