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07/11/2007 | FRANCE | N°06/09282

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0089, 07 novembre 2007, 06/09282


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

1ère CHAMBRE - Section N

REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES

DECISION DU 7 NOVEMBRE 2007

No du répertoire général : 06/09282

Décision contradictoire en premier ressort

Nous, Renaud BLANQUART, Conseiller à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Gilles DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante :

Statuant sur la requête déposée au greffe le 24 mai 2006 par Maître

Virginie BIANCHI, avocat substituant Maître Gérard TCHOLAKIAN, avocat de Monsieur Hicham Y..., demeurant 13 Villag...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

1ère CHAMBRE - Section N

REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES

DECISION DU 7 NOVEMBRE 2007

No du répertoire général : 06/09282

Décision contradictoire en premier ressort

Nous, Renaud BLANQUART, Conseiller à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Gilles DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante :

Statuant sur la requête déposée au greffe le 24 mai 2006 par Maître Virginie BIANCHI, avocat substituant Maître Gérard TCHOLAKIAN, avocat de Monsieur Hicham Y..., demeurant 13 Village Calmette 89100 SAINT CLEMENT ;

Vu les pièces jointes à cette requête ;

Vu les conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;

Vu les conclusions du requérant notifiées par lettre recommandée avec avis de réception;

Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;

Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l'audience fixée au 19 septembre 2007 ;

Vu l'absence de Monsieur Hicham Y... ;

Ouï Maître Virginie BIANCHI, avocat substituant Maître Gérard TCHOLAKIAN, avocat représentant Monsieur Hicham Y..., Maître Fabienne Z..., avocat représentant Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, ainsi que Madame Lydia GÖRGEN, avocat général, les débats ayant eu lieu en audience publique, le 19 septembre 2007, le conseil du requérant ayant eu la parole en dernier ;

Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R. 26 à R. 40-7 du code de procédure pénale ;

* *

Monsieur Y..., né le 16 décembre 1978, a été mis en examen du chef de viol le 12 juillet 2000 et a été placé en détention provisoire. Il a été remis en liberté le 14 septembre 2000. Il a fait l'objet d'une décision d'acquittement par arrêt de la Cour d'assises des mineurs de l'Yonne du 17 mars 2006, après, donc, une incarcération de 65 jours, cette décision étant définitive. Il n'avait jamais été détenu précédemment.

Par requête déposée le 24 mai 2006, aux fins de réparation à raison d'une détention, Monsieur Y... fait valoir :

- S'agissant de son préjudice matériel :

que son employeur, la société VALEO, un des rares employeurs de la région auxerroise ne l'a pas réembauché, alors qu'il percevait environ 1.100 € avant son incarcération et à eu de grosses difficultés à retrouver un emploi, que très perturbé par son incarcération, il a enchaîné les périodes de travail en intérim et de chômage, ce qui ne lui a pas permis de quitter le domicile familial, qu'il a difficilement retrouvé du travail en raison de la publicité qui a entouré son arrestation et son incarcération, mais aussi de la longueur de la procédure qui a conduit, au terme de près de 6 années, à son acquittement, qu'il n'a réussi à se stabiliser professionnellement qu'en janvier 2006, qu'il s'est retrouvé en détention dans des conditions matérielles préjudiciables, que son avocat a été contraint de se déplacer à la maison d'arrêt d'Auxerre à plusieurs reprises ce qui a engendré un surcoût de frais pour obtenir sa mise en liberté.

Il réclame la somme de 6.000 €, de ces chefs.

- S'agissant de son préjudice moral :

qu'il a été extrêmement perturbé par sa détention et s'y est retrouvé dans des conditions morales préjudiciables.

Il réclame la somme de 8.000 €, de ce chef.

Dans ses conclusions du 6 mars 2007, Monsieur l'Agent judiciaire du Trésor, estimant la requête recevable, fait valoir :

que les conditions dans lesquelles a été menée l'instruction et la longueur de la procédure sont inopérants pour apprécier le préjudice au regard des dispositions de l'article 149 du NCPC,

- S'agissant du préjudice moral,

que le requérant était âgé de 22 ans au moment de son incarcération, a effectué deux mois de détention et ne justifie pas de circonstances particulières relatives à ses conditions de détention si ce n'est une sanction disciplinaire pour s'être battu avec un co-détenu, que le casier judiciaire du requérant portait la mention de deux condamnations : une peine de travail d'intérêt général et, "le 26 août 1999, une peine de 6 mois d'emprisonnement dont trois mois avec sursis et mise à l'épreuve pour outrage, rébellion, violence sur dépositaire de l'autorité publique et dégradation".

Il estime que ce préjudice peut être réparé par l'allocation de la somme de 2.200 €.

- S'agissant du préjudice économique invoqué :

que le requérant n'explicite pas le montant de sa demande, qu'à la date de son incarcération, il effectuait des missions d'intérim pour la société VALEO, que, pendant les deux mois de sa détention, Monsieur Y... a perdu une chance de retrouver un emploi, qu'il n'établit pas avoir recherché un emploi de 2001 à 2003, excepté une période d'intérim en décembre 2003 et n'apporte aucun élément concernant ces trois années, qu'il effectuait des missions de 4 jours environ pour une rémunération moyenne de 200 €,

Il estime que ce préjudice peut être réparé par l'allocation de la somme de 2.000 €.

Monsieur le Procureur Général fait valoir, estimant la requête recevable,

- S'agissant du préjudice matériel :

qu'il convient de faire droit à la demande au titre d'une perte de chance d'occuper un emploi,

que sont exclus les préjudices subis du fait de la médiatisation de l'affaire et de la longueur de la procédure,

- S'agissant du préjudice moral :

que ce préjudice doit être apprécié au regard de la détention subie, de 2 mois et 4 jours, du fait que le requérant était âgé de 21 ans et qu'il s'agissait d'une première incarcération.

SUR QUOI,

Sur la requête

Attendu que la présente requête est recevable au regard des dispositions des articles 149 à 149-2 du Code de procédure pénale ;

Sur le préjudice matériel

Attendu que le requérant produit, à l'appui de sa demande de réparation d'un préjudice économique, divers documents justifiant du fait qu'il a exercé 4 missions d'intérim pendant tout le mois de février 2000 en qualité d'agent de production, pour une rémunération nette totale de 1.277, 78 €, qu'il a été interpellé, le 12 juillet 2000, sur son lieu de travail, à l'usine Valéo de SAINT CLEMENT, qu'il a exercé, à nouveau, des mission d'intérim en 2003, 2004 et 2005, avant que d'être embauché le 27 janvier 2006, en vertu d'un contrat de travail à durée indéterminée, pour une rémunération mensuelle brute de 1.463, 42 € ;

Que seules les conséquences de la détention provisoire subie par Monsieur Y... pouvant donner lieu à indemnisation, il n'y a lieu de prendre en considération la publicité ayant entouré son arrestation ou la longueur de la procédure d'information qu'il invoque;

Que la perte de chance du requérant d'exercer des missions d'intérim pendant le temps de sa détention est suffisamment démontrée ;

Qu'il y a lieu de lui allouer, de ce chef, une indemnité de 2.000 € ;

Sur le préjudice moral

Attendu que le choc carcéral incontestable qu'a subi Monsieur Y..., du fait de sa détention, doit donner lieu à réparation ;

Que le requérant était âgé de 21 ans lorsqu'il a été placé en détention pour une durée de 65 jours à raison de la présente affaire ; qu'il doit être tenu compte, pour fixer le montant de cette réparation, des circonstances d'aggravation du préjudice considéré et, plus particulièrement, du fait qu'à la lecture de son casier judiciaire, il apparaît qu'il n'avait pas été précédemment détenu ;

Qu'il y a lieu de faire droit à sa demande, de ce chef, en lui allouant la somme de 6.500 €;

PAR CES MOTIFS

Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R. 26 à R. 40-7 du code de procédure pénale ;

Disons la requête recevable,

Allouons à Monsieur Y... :

- une indemnité de 2.000 €, en réparation de sa perte de chance d'exercer des missions d'intérim pendant le temps de sa détention,

- une indemnité de 6.500 €, en réparation de son préjudice moral.

Ainsi fait, jugé et prononcé par le magistrat délégué soussigné, le 7 novembre 2007, où étaient présents : Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller, Madame Lydia GORGEN, Avocat Général et Monsieur Gilles DUPONT, Greffier.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0089
Numéro d'arrêt : 06/09282
Date de la décision : 07/11/2007

Références :

Décision attaquée : Cour d'assises des mineurs de l'Yonne, 17 mars 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-11-07;06.09282 ?
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