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31/10/2007 | FRANCE | N°05/08798

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0133, 31 octobre 2007, 05/08798


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre A

ARRET DU 31 Octobre 2007

(no 9 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/08798

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Juillet 2005 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU section Industrie RG no 04/00068

APPELANTE

S.A. OXFORD AUTOMOTIVE MECANISMES ET DECOUPAGE FIN

Parc d'Activités la Clé Saint Pierre

Rue du Maréchal De Lattre de Tassigny

78990 ELANCOURT

représenté

e par Me Michèle MINET, avocat au barreau de PARIS, toque : P 100 substitué par Me Valerie SCHNEIDER X..., avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre A

ARRET DU 31 Octobre 2007

(no 9 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/08798

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Juillet 2005 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU section Industrie RG no 04/00068

APPELANTE

S.A. OXFORD AUTOMOTIVE MECANISMES ET DECOUPAGE FIN

Parc d'Activités la Clé Saint Pierre

Rue du Maréchal De Lattre de Tassigny

78990 ELANCOURT

représentée par Me Michèle MINET, avocat au barreau de PARIS, toque : P 100 substitué par Me Valerie SCHNEIDER X..., avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE

Madame Evelyne Y...

...

91640 JANVRY

représentée par Me Philippe RENAUD, avocat au barreau de l'ESSONNE substitué par Me Bruno Z..., avocat au barreau de l'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Septembre 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Claude TERREAUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Alain CHAUVET, Président

Monsieur Bernard SCHNEIDER, Conseiller

Monsieur Claude TERREAUX, Conseiller

Greffier : Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur Alain CHAUVET, Président

- signé par Monsieur Alain CHAUVET, Président, et par Evelyne MUDRY, greffier présent lors du prononcé.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Evelyne Y... a été embauchée par la société OAMDF à compter du 2 janvier 2003 selon contrat à durée indéterminée du 30 septembre 2002, en qualité d'assistante de direction cadre position II indice 18 de la convention collective applicable des Ingénieurs et Cadres de la métallurgie, moyennant une rémunération mensuelle de 2950€ sur 12 mois, portée à 3038€ à compter du 1er avril 2003.Elle exerçait son activité sur le site des ULIS (91).

Afin de regrouper ses activités, la société OAMDF a déplacé son lieu de travail, ainsi que celui des autres salariés travaillant sur ce site, à ELANCOURT (YVELINES). Arguant que son contrat de travail prévoyait un délai de prévenance de 3 mois en cas de mutation géographique, Evelyne Y... a persisté à continuer à se présenter sur son ancien site de travail. Elle fut licenciée pour faute grave le 31 octobre 2003.

Par jugement du 11 juillet 2005 auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU (section encadrement) :

« -Dit le licenciement de Madame Evelyne Y... sans cause réelle et sérieuse.

En Conséquence,

-Condamne la société OAMDF à payer la somme de 9115,50 Euros à Madame Evelyne Y... à titre de préavis (3 mois)

-Condamne la société OAMDF à payer la somme de 911,55 Euros à Madame Evelyne Y... à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

-Condamne la société OAMDF à payer la somme de 15.000,00 Euros à Madame Evelyne Y... au titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

-Dit qu'il y a lieu d'assortir les condamnations de l'intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil et ordonne la capitalisation des intérêts par année entière

-Dit que la société OAMDF devra verser à Madame Evelyne Y... la somme de 760 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

-Déboute Madame Evelyne Y... de l'ensemble de ses autres demandes. »

La société OAMDF a relevé appel dudit jugement.

La société OAMDF, aux termes de ses conclusions déposées le 19 septembre 2007, dont il a été requis oralement l'adjudication à l'audience et auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et arguments, demande à la cour de :

-Déclarer la société OAMDF recevable et bien fondée en son appel,

-Infirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Y faisant droit et statuant à nouveau,

-Constater que le transfert du lieu de travail des ULIS à ELANCOURT constitue une modification des conditions de travail et non un changement d'Etablissement

-Constater le refus de Madame Y... d'exercer ses fonctions à ELANCOURT

-Déclarer dans ces conditions légitime le licenciement de Madame Y... pour faute grave

-Ordonner le remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, soit : 7 886.84 €

-La condamner au paiement d'une somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

La société OAMDF fait principalement valoir :

-qu'elle a consulté les comités central et d'établissement ;

-qu'elle a avisé de façon informelle Evelyne Y... du changement en septembre 2003, puis par courrier du 7 octobre 2003 lui annonçant le transfert à compter du 20 octobre 2003 ;

-que des échanges de courriers ont eu lieu et ont abouti au licenciement ;

-que le conseil ne s'était appuyé que sur le non-respect d'une clause du contrat ;

-qu'elle n'avait pas à mettre sur pieds un plan de sauvegarde de l'emploi car son poste n'a pas été supprimé, ce que n'a d'ailleurs pas retenu le Conseil de Prud'hommes ;

-que d'ailleurs dix-sept embauches ont eu lieu dans cette période ;

-que sur 117 salariés, 8 seulement ont refusé de se rendre à ELANCOURT ;

-que la situation n'a pas à être appréciée en fonction de la situation de salarié mais en fonction de la distance qui sépare les deux lieux de travail ;

-que le lieu de travail n'est pas mentionné dans le contrat de travail ;

-qu'il est prévu une clause de mobilité ;

-que le délai de prévenance concernait le changement de résidence et le changement d'établissement.

Evelyne Y..., par des écritures déposées le 19 septembre 2007 dont il a été requis oralement l'adjudication à l'audience et auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et arguments, demande à la Cour de :

-Dire et juger la société appelante mal fondé en son appel ;

-Recevoir Madame Evelyne Y... en son appel incident et l'y déclarée fondé ;

Réformant partiellement le jugement déféré, et statuant à nouveau,

A titre principal,

-Dire et juger nuls et de nul effet la procédure de licenciement et le licenciement subséquent de Madame Evelyne Y... ;

-Ordonner à la demande de Madame Evelyne Y... la poursuite de son contrat de travail et sa réintégration dans l'entreprise ;

-Condamner la société OAMDF à payer à Madame Evelyne Y... au titre des salaires pour la période du 23 octobre 2003 au 23 août 2007, la somme de 141 910,00 € avec intérêts au taux légal à compter des présentes conclusions ;

-Condamner la société OAMDF à payer à Madame Evelyne Y... au titre des congés payés y afférents, la somme de 14 191,00 € avec intérêts au taux légal à compter des présentes conclusions ;

-Condamner la société OAMDF à payer les salaires et congés payés postérieurs au 23 août 2007 jusqu'à la réintégration de Madame Evelyne Y... ;

- A défaut d'ordonner la poursuite du contrat de travail et la réintégration dans l'entreprise, condamner la société OAMDF à payer à Madame Evelyne Y... au titre des salaires pour la période du 23 octobre 2003 au 23 août 2007, la somme de 141 910,00 € avec intérêts au taux légal à compter des présentes conclusions ;

-Condamner la société OAMDF à payer à Madame Evelyne Y... au titre des congés payés y afférents, la somme de 14 191,00 € avec intérêts au taux légal à compter des présentes conclusions ;

-Condamner la société OAMDF à payer à Madame Evelyne Y... la somme de 617,00 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil ;

-Condamner la société OAMDF à payer à Madame Evelyne Y... la somme de 36 576,00 € au titre de l'indemnité prévue à l'article L 122-14-4 in fine C.T. ;

-Condamner la société OAMDF à payer les salaires et congés payés postérieurs au 23 août 2007 jusqu'à ce qu'il ait été définitivement statué sur les demandes de Madame Y...;

Subsidiairement,

-Dire et juger que le licenciement de Madame Evelyne Y... est abusif ;

-Condamner la société OAMDF à payer à Madame Evelyne Y... les sommes suivantes augmentées des intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes :

-9 115,00 € à titre de préavis

-9 11,50 € au titre des congés payés sur préavis

-617,00 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

-36 576,00 € à titre d'indemnité pour licenciement abusif

Très subsidiairement,

-Voir requalifier la faute grave en cause réelle et sérieuse ;

-Condamner la société OAMDF à payer à Madame Evelyne Y... les sommes suivantes augmentées des intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes :

-9 115,00 € à titre de préavis

-9 11,50 € au titre des congés payés sur préavis

-617,00 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

En tout état de cause,

-Ordonner la capitalisation des intérêts par année entière conformément à l'article 1154 du Code Civil ;

-Condamner la société OAMDF à payer à Madame Y... la somme de 3.000,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;

Evelyne Y... fait principalement valoir que :

-le déplacement de son lieu de travail était un licenciement économique déguisé, et que de nombreux salariés ont finalement démissionné ou ont été licenciés dans les 12 mois ;

-le comité d'établissement a déclenché son droit d'alerte et fait désigner un expert comptable en référé ;

-la suppression de son poste avait été fait en vue de la cession de l'entreprise à des fonds d'investissement ;

-son licenciement doit être assimilé à un licenciement économique ;

-elle demande sa réintégration ;

-elle précise que le délai de prévenance prévu dans son contrat n'a pas été respecté ;

-elle indique que son employeur a modifié unilatéralement le contrat de travail, la distance et le temps de transport étant désormais sensiblement plus longs ;

-elle n'a pas commis de faute grave.

SUR CE ;

Sur le bien-fondé du licenciement ;

Considérant que si le contrat de travail tient lieu de loi aux parties, il résulte du lien de subordination que celui-ci confère à l'employeur que ce dernier dispose d'un pouvoir de direction au sein de l'entreprise qu'il dirige et dont il doit répondre ; que ce pouvoir de direction comporte la modification des conditions de travail des salariés ;

Considérant qu'il convient de rechercher si en l'espèce le changement du lieu de travail constitue une modification du contrat de travail dont il est un élément, qui nécessite alors le consentement du salarié, ou s'il est un simple changement des conditions de travail, auquel le salarié doit se soumettre ; qu'il y a lieu d'apprécier l'importance du changement de travail non pas du point de vue de la résidence effective de chaque salarié mais en fonction de la distance entre l'ancien et le nouveau lieu de travail ;

Considérant qu'en l'espèce le regroupement d'une partie de l'activité de l'entreprise des ULIS au siége social à ELANCOURT, villes situées toutes deux dans la région parisienne et distantes de 29 km par route, constitue un simple changement des conditions de travail ; que les explications de la salariée sur ses difficultés de déplacement, au demeurant contradictoires comme le souligne la société OAMDF, n'ont pas à être prises en compte par la Cour ;

Considérant que la salariée explique que, bien qu'il se soit vu proposer un emploi similaire, le changement du lieu de travail constitue un licenciement économique déguisé en ce qu'il a conduit un certain nombre d'employés à quitter l'entreprise ; que cependant pour expliquer le déplacement du site des ULIS qui a été décidé en juillet 2003, la salariée se contente de faire valoir que le comité d'établissement a fait, par le biais de la procédure d'alerte, désigner un expert comptable dont il ne produit cependant pas le rapport ; qu'elle fait encore valoir que la société WAGON, qui a racheté l'entreprise, a, en décembre 2006, licencié 70 salariés sur les sites de POISSY et ELANCOURT ; que ces arguments sont incomplets ou concernent des éléments bien postérieurs au déplacement du site ; qu'il y a lieu, compte tenu du fait que sur les 117 salariés, seuls huit ont refusé de se rendre à ELANCOURT et deux ne sont pas restés, et que dix-sept embauches ont eu lieu à cette époque, selon les affirmations de la société OAMDF non contredite sur ce point, de dire que cette argumentation manque en fait ;

Considérant, sur le contrat de travail et la clause relative au lieu de travail, que celle-ci stipule :

« Lieu de Travail : Notre établissement des ULIS

Dans le cadre de la politique de gestion des carrières des Cadres de la société OAMDF, vous pourrez être amené, dans les conditions prévues par la Convention Collective, à bénéficier d'une affectation dans tout autre établissement de la société en France, sous réserve du respect, de notre part, d'un délai de prévenance de trois mois » ;

Considérant qu'il y a lieu de retenir de cet élément que le contrat prévoit une clause de mobilité assortie d'un délai de prévenance de trois mois dans les conditions de la convention collective qu'elle vise expressément ;

Considérant que la convention collective modifiée prévoit dans son article 8 :

« Changement d'établissement et changement de résidence

1o La modification du contrat qui concerne le lieu ou le cadre géographique de travail convenu et impose un changement de résidence devra être notifiée par écrit à l'ingénieur ou cadre.

Cette notification fait courir simultanément trois délais :

- un délai de six semaines pendant lequel l'ingénieur ou cadre devra accepter ou refuser la modification notifiée. Durant ce délai, l'intéressé et son conjoint auront la possibilité d'effectuer, au lieu de l'affectation envisagée, un voyage dont les frais seront à la charge de l'employeur après accord entre ce dernier et l'intéressé. Dans le cas d'un refus de la mutation par l'ingénieur ou cadre, la rupture éventuelle sera considérée comme étant du fait de l'employeur, lequel devra verser à l'intéressé le montant des indemnités dues en cas de licenciement ;

- un délai de douze semaines avant l'expiration duquel la mise en oeuvre du changement d'affectation ne pourra avoir lieu qu'avec l'accord de l'ingénieur ou cadre ;

- un délai de dix-huit semaines pendant lequel l'ingénieur ou cadre pourra revenir sur son acceptation de la modification notifiée par l'employeur ; dans ce cas, le contrat sera considéré comme rompu du fait de l'employeur, qui devra verser à l'intéressé le montant des indemnités dues en cas de licenciement.

2o… »

Considérant qu'il résulte de cette convention que le délai de prévenance auquel il est fait référence dans le contrat ne trouve à s'appliquer que dans l'hypothèse d'un changement d'établissement imposant un changement de résidence, dont il tend à l'évidence à rendre plus faciles les opérations de déménagement imposées par ledit changement pour le salarié ; que la salariée n'établit pas ni même n'allègue que le changement de lieu de travail lui impose de changer de résidence ; que dès lors le délai de prévenance ne s'applique pas ;

Considérant qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement entrepris, de dire que Evelyne Y..., en refusant de se rendre sur son lieu de travail délibérément, sans motif et de façon définitive malgré les rappels reçus, a commis une faute grave, que le licenciement intervenu est légitime et de la débouter de toutes ses demandes ;

Sur les demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant que la situation économique de la partie qui succombe commande qu'il ne soit pas prononcé de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

-Infirme en totalité le Jugement du Conseil de Prud'hommes du 19 septembre 2005 ;

-Déboute Evelyne Y... de toutes ses demandes ;

-Dit n'y avoir lieu de prononcer de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

-Condamne Evelyne Y... aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0133
Numéro d'arrêt : 05/08798
Date de la décision : 31/10/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Longjumeau, 11 juillet 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-10-31;05.08798 ?
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