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18/10/2007 | FRANCE | N°06/02840

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0135, 18 octobre 2007, 06/02840


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre C

ARRET DU 18 Octobre 2007

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/02840

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Novembre 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS section activités diverses RG no 04/15016

APPELANT

1o - Monsieur Alain Gilles X...

...

75016 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Sophie PETROUSSENKO, avocat au barreau de PARIS, toque : G0049, substituée p

ar Me Carole RUFFIN,

INTIME

2o - Monsieur Jean-Pierre A...

...

75116 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Didier VASSAL, avo...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

21ème Chambre C

ARRET DU 18 Octobre 2007

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 06/02840

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Novembre 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS section activités diverses RG no 04/15016

APPELANT

1o - Monsieur Alain Gilles X...

...

75016 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Sophie PETROUSSENKO, avocat au barreau de PARIS, toque : G0049, substituée par Me Carole RUFFIN,

INTIME

2o - Monsieur Jean-Pierre A...

...

75116 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Didier VASSAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P 0361,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Septembre 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Pierre DE LIEGE, Présidente, chargée d'instruire l'affaire, en présence de Mme LEBE, Conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Pierre DE LIEGE, président

Mme Irène LEBE, conseiller

Mme Hélène IMGERGLIK, conseiller

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats,

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Pierre DE LIEGE, présidente et par Mlle Chloé FOUGEARD, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur les appels régulièrement interjetés par M. X... et, à titre incident, par M. A..., du jugement rendu le 10 novembre 2005 par le Conseil de Prud'hommes de Paris, section Activités Diverses, chambre 4, auquel il est renvoyé pour l'exposé des éléments du litige à cette date, qui a dit que le licenciement de M. X... était fondé sur une cause réelle et sérieuse et a condamné M. A... à lui verser les sommes suivantes, en déboutant le salarié du surplus de ses demandes ainsi que l'employeur de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

- 6.725,66 Euros à titre d'heures supplémentaires,

- 672,56 Euros au titre des congés payés incidents aux heures supplémentaires,

- 190,09 Euros à titre de solde d'indemnité de préavis,

- 19 Euros au titre des congés payés incidents audit solde d'indemnité de préavis,

et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation.

Il est constant que M. X... a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée du 1er octobre 2003, à compter du 2 octobre suivant, en qualité de technicien de laboratoire par le Docteur A..., chirurgien - dentiste.

La convention collective applicable est celle des Cabinets de chirurgiens-dentistes. Son dernier salaire mensuel brut s'élevait à 2.500 Euros.

M. X... a été licencié pour insuffisance professionnelle le 10 mai 2004, après trois avertissements.

C'est dans ces conditions qu'il a saisi le 22 novembre 2004 le Conseil de Prud'hommes aux fins de voir condamner M. A... à lui verser diverses sommes aux titres de rappel d'heures supplémentaires, et de dommages-intérêts pour rupture abusive.

En cause d'appel, par conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales, M. X... soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse au moyen principal que l'insuffisance professionnelle alléguée par l'employeur n'est pas établie à son encontre et qu'il avait déjà fait l'objet de trois avertissements pour les mêmes faits alors qu'il a fait en outre des heures supplémentaires non rémunérées par M. A....

Il demande en conséquence à la Cour :

- de confirmer partiellement le jugement déféré sur les heures supplémentaires et le complément d'indemnité de préavis,

- de l'infirmer en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de dommages-intérêts pour rupture irrégulière et abusive et indemnité pour travail dissimulé,

- de condamner M. A... à lui verser la somme de 19.182 Euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- de condamner M. A... à lui verser les sommes suivantes :

* 3.197,11 Euros à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement,

* 23.652,66 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 23.652,66 Euros à titre de dommages-intérêts pour rupture dans des circonstances brutales et vexatoires,

* 2.500 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

- d'ordonner à M. A... de lui remettre une attestation Assedic rectifiée conformément à l'arrêt à intervenir, et à régler les entiers dépens.

M. A... conteste les heures supplémentaires alléguées par M. X... et soutient que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, consistant dans son insuffisance professionnelle établie par les pièces qu'il verse aux dossier, renouvelée depuis les trois avertissements qui lui avaient été adressés.

Relevant appel incident, il demande en conséquence à la Cour :

- de dire que le licenciement de M. X... est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- de confirmer en conséquence le jugement déféré en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive,

- de confirmer également le jugement déféré en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes d'indemnité pour travail dissimulé, de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure, de dommages-intérêts pour rupture brutale et vexatoire, et d'indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- d'infirmer le jugement déféré dans les condamnations prononcées à son encontre des chefs d'heures supplémentaires, congés payés incidents, complément d'indemnité de préavis et congés payés incidents,

- de condamner M. X... à lui verser la somme de 2.000 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

SUR CE, LA COUR,

Vu le jugement déféré et les conclusions des parties, soutenues oralement à l'audience par celles-ci, auxquels il convient de se référer pour de plus amples développements.

Sur les heures supplémentaires et le travail dissimulé :

S'agissant d'un conflit sur la durée du travail, il appartient à chaque partie de communiquer les éléments à l'appui de ses prétentions.

Il ressort du contrat de travail conclu entre les parties, que M. X... a été embauché pour effectuer un travail à temps complet de 35 heures par semaine.

Il n'est de même pas contesté que ses horaires de travail initiaux étaient les suivants : lundi, mardi et jeudi de 9 h. à 13 h. et de 14h. à 18 h., le mercredi de 9 h à 14h. et le vendredi de 13h. à 19 h.

Ce contrat précisait que "les heures supplémentaires réalisées selon les nécessités seront compensées par des journées de récupération".

Il convient de relever qu'aucun élément probant ne contredit utilement le contrat de travail de M. X... aux termes duquel celui-ci effectuait un temps complet. C'est donc en vain que l'employeur prétend que le salarié n'effectuait qu'un travail correspondant à 20 h. par semaine auquel s'ajoutaient les 10 heures hebdomadaires correspondant au travail de M. D... et conteste ainsi les heures supplémentaires alléguées par le salarié.

Or, alors que le salarié avait réclamé à plusieurs reprises, les 16 et 26 avril 2004 le paiement des heures supplémentaires qu'il disait avoir effectuées, l'employeur ne conteste pas utilement qu'à compter du mois de janvier 2004, M. X... a remplacé son collègue de travail, M. D... qui avait quitté le cabinet en tant que prothésiste, ce qui représentait 10 heures de travail supplémentaires par semaine pour l'intéressé.

Le bien fondé des réclamations de M. X... est également corroborées par l'attestation qu'il produit, émanant de M. E..., prothésiste dentaire de l'autre chirurgien - dentiste du cabinet dans lequel exerçait M. A..., donc à même de constater le travail confié à M. X... dont il ressort que ce dernier effectuait les heures supplémentaires dont il réclame le paiement.

En outre, l'examen des bulletins de paie montre que l'employeur a versé des primes à M. X... qu'il reconnaît lui-même comme ayant en réalité réglé des heures supplémentaires au salarié, alors qu'un tel mode de règlement est contraire à la réglementation légale de la durée du travail qui prévoit, aux termes des articles R.143-2 et suivants du Code du Travail que l'employeur doit mentionner sur les bulletins de paie les horaires effectifs du salarié.

Dans ces conditions, alors qu'il n'est ni allégué ni démontré que les heures supplémentaires effectuées par M. X... ont donné lieu à la récupération, l'employeur ne conteste pas utilement le quantum des demandes du salarié. Il y a en conséquence lieu d'y faire droit et de confirmer le jugement déféré.

Sur l'indemnité de travail dissimulé :

L'intention de dissimuler les heures effectuées par le salarié est caractérisée par l'absence de mention de ces horaires sur les bulletins de paye de l'intéressé, quand bien même l'employeur les a réglées, en partie de surcroît, sous forme de primes, ce dont il résulte une dissimulation d'heures supplémentaires.

Sur la rupture du contrat de travail :

M. X... a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 mai 2004 aux motifs "d'insuffisances professionnelles" et dans les termes suivants, avec un préavis d'un mois :

"Depuis votre entrée en fonction, vous avez accumulé les retards et les malfaçons sur bon nombre de travaux comme je vous l'ai précisé dans mon courrier du 27 avril 2004, mettant à mal mon planning et l'organisation du cabinet ainsi que le respect de ma patientèle celle-ci n'étant pas prévenue du retard dans la fabrication de ses prothèses, contrairement à mes demandes répétées.

Je ne peux pas faire face plus longtemps à vos erreurs, vos retards sur les délais impartis sans m'en avertir me mettant ainsi en délicatesse vis à vis de mes clients...".

Cependant, il convient de relever, d'une part, que M. X... a fait l'objet de trois avertissements antérieurement à son licenciement, les 7 avril 2004, lui faisant grief de "manque d'efficacité et de rendement au travail" et de retards lors sa prise de poste, ainsi que les 21 et 27 avril 2004, lui reprochant du retard dans de nombreux travaux.

D'autre part, l'employeur a invoqué dans la lettre de licenciement, non seulement des erreurs, constitutives d'insuffisance professionnelle, mais également des "retards répétés", qui avaient d'ailleurs déjà donné lieu aux avertissements précités.

Le licenciement de M. X... au motif général d'"insuffisances professionnelles" revêt en réalité également une nature disciplinaire qui doit être considérée comme déterminante au regard de ce contexte d'avertissements réitérés pour les mêmes motifs.

Or aucun élément probant n'établit que M. X... a réitéré des retards et malfaçons fautives depuis le dernier avertissement qui lui avait été adressé le 27 avril 2004.

En effet, les attestations versées par l'employeur, comme celles de M. D..., autre prothésiste du cabinet, du Dr F..., collaboratrice de M. A... et de Mme G..., assistante dentaire de M. A..., sont rédigées de façon générale et sont en conséquence trop imprécises quant aux dates, ou même plus généralement aux périodes auxquelles des retards ou des malfaçons sont reprochés à M. X... pour permettre d'établir la réitération d'un comportement fautif de l'intéressé depuis le 27 avril 2004.

Il convient au surplus d'écarter les témoignages qui se bornent à faire état d'un caractère difficile du salarié dans la mesure où la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige n'en fait pas grief à M. X..., comme celui de Mme H..., de M. I... et de Mme J... encore celles qui se limitent à déclarer n'avoir eu aucun problème de travail avec l'employeur, comme celles de MM. K... et L....

En l'absence de preuve de réitération par M. X... d'un comportement fautif depuis le dernier avertissement qu'il a reçu, son licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré est en conséquence infirmé de ce chef.

En considération du préjudice subi par M. X..., compte tenu, notamment de son ancienneté limitée et de son salaire, du fait qu'il justifie être toujours au chômage et percevoir le RMI il y a lieu de condamner M. A... à lui verser la somme de 3.000 Euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, toutes causes de préjudices confondues, y compris moral, en application des dispositions de l'article L.122-14-5 du Code du Travail dont les conditions sont réunies en l'espèce.

L'employeur ne fait valoir aucun moyen de fait ou de droit de nature à modifier le jugement déféré en ce qui concerne le solde d'indemnité de préavis dû au salarié. Le jugement déféré sera en conséquence confirmé sur ce point.

M. A... devra remettre à M. X... l'attestation Assedic que celui-ci réclame, rectifiée conformément à la présente décision.

Sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire :

M. X... ne communique aucun élément probant de la réalité des circonstances brutales et vexatoires dont il prétend que son licenciement a été entouré, le seul fait qu'il ait reçu des avertissements de façon rapprochée ne suffisant pas à corroborer ses affirmations alors qu'au surplus il n'a pas sollicité l'annulation de ces avertissements quand bien même il les avait alors contestés.

M. X... sera en conséquence débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure :

Quand bien même la lettre convoquant M. X... à un entretien préalable à son licenciement ne précisait pas l'adresse des services de l'Inspection du Travail et de la mairie auprès desquelles il pouvait obtenir la liste des conseillers du salarié qui pouvaient l'assister lors de cet entretien, force est de constater quel'intéressé ne démontre pas la réalité du préjudice qu'il prétend avoir subi de ce fait alors qu'il n'est pas contesté qu'il a été effectivement et régulièrement assisté lors de cet entretien.

Il ya en conséquence lieu de le débouter de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

Les circonstances de la cause et l'équité justifient l'application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en faveur de M. X... et de débouter M. A... de sa demande à ce titre. M. A... sera en conséquence condamné à payer à M. X... la somme de 1.000 Euros de ce chef pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement déféré sur la rupture du contrat de travail ainsi que sur l'indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. X... est sans cause réelle et sérieuse,

Condamne M. A... à verser à M. X... les sommes suivantes :

- 3.000 Euros (TROIS MILLE EUROS) à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

- 15.000 Euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 1.000 Euros (MILLE EUROS)au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel,

Déboute M. X... du surplus de sa demande ainsi que M. A... de ses autres demandes,

Condamne M. A... aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0135
Numéro d'arrêt : 06/02840
Date de la décision : 18/10/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 10 novembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-10-18;06.02840 ?
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