Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
23ème Chambre - Section B
ARRET DU 20 SEPTEMBRE 2007
(no , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 05/23227.
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Octobre 2005 - Tribunal de Grande Instance de PARIS 4ème Chambre 2ème Section - RG no 03/15589.
APPELANT :
Syndicat des copropriétaires 47/49 RUE MARX DORMOY 75018 PARIS,
représenté par son syndic, la SARL SULLY GESTION, ayant son siège 1 rue Agrippa d'Aubigné 75004 PARIS, elle-même prise en la personne de son gérant,
représenté par la SCP GERIGNY-FRENEAUX, avoués à la Cour,
assisté de Maître Caroline MARCEL de la SELARL MARCEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P 517.
INTIMÉE :
S.A. AXA FRANCE IARD
prise en la personne de ses représentants légaux.,
Ayant son siège 26 rue Drouot 75009 PARIS,
représentée par la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU, avoués à la Cour,
assistée de Maître Karine GERONIMI collaboratrice du Cabinet PAGANI MONTERET AMAR, avocat au barreau de PARIS, toque : P184.
INTIMÉES :
- S.A.R.L. PERSIMMO nouvelle dénomination de la Société GUILLARD et GROLEAU
prise en la personne de son gérant,
ayant son siège 32/36 rue de l'Ouest 75014 PARIS,
- Société MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD
prise en la personne de son Président directeur général,
ayant son siège 10 boulevard Alexandre Oyon 72030 LE MANS CEDEX 9,
représentées par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour,
assistées de Maître Philippe BOCQUILLON, avocat au barreau de PARIS, toque E1085.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 - 1er alinéa du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 juin 2007, en audience publique, devant Madame RAVANEL, conseiller chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur DELANNE, président,
Monsieur RICHARD, conseiller,
Madame RAVANEL, conseiller.
Greffier lors des débats : Monsieur NGUYEN.
ARRET :
Contradictoire,
prononcé publiquement par Madame RAVANEL, conseiller, laquelle a, en l'empêchement du président, signé la minute avec Monsieur NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.
La SCI MERCEDES était propriétaire de locaux - aujourd'hui vendus - au rez-de-chaussée, sous-sol et premier étage de l'immeuble 47/49 rue Marx Dormoy à Paris 18ème, dont le syndicat des copropriétaires a pour syndic, la Société SULLY GESTION venant aux droits de la Société PERSIMMO, nouvelle dénomination de la Société GUILLARD et GROLEAU, assurée auprès de la Société Mutuelles du Mans Assurances IARD.
Le syndicat des copropriétaires est assuré par la Compagnie AXA FRANCE IARD, nouvelle dénomination de la Compagnie UAP.
La SCI MERCEDES, victime de dégâts des eaux à répétition, a saisi le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris d'une demande d'expertise.
Désigné comme expert Monsieur BONNIN a déposé son rapport le 16 mai 1997.
Par ordonnance de référé du 8 juillet 1997, Monsieur BONNIN a été à nouveau désigné pour évaluer le préjudice subi par la Société MERCEDES.
Le 27 novembre 2001, l'expert a déposé un second rapport.
La SCI MERCEDES ayant cessé de payer ses charges des procédures réciproques ont été effectuées, la SCI demandant l'indemnisation de ses préjudices occasionnés par les dégâts des eaux en provenance des parties communes et le syndicat des copropriétaires concluant au paiement des charges.
Par jugement du 6 février 2001, le Tribunal de grande instance de Paris a fait droit à la demande principale en paiement de charges du syndicat des copropriétaires et condamné la SCI MERCEDES à lui payer 41.485,87 € au titre des impayés arrêtés au 2ème trimestre 1990 et débouté la SCI MERCEDES de sa demande reconventionnelle.
Sur appel de cette dernière, la Cour d'appel de Paris, par arrêt du 21 novembre 2002, a infirmé le jugement en ce qu'il avait débouté la SCI de sa demande reconventionnelle et a condamné le syndicat à lui payer 20.147,36 € au titre de ses travaux de remise en état et 178.613,54 € au titre de ses pertes locatives, soit un total de 198.760,90 €.
Le syndicat des copropriétaires a fait assigner son assureur, la Compagnie AXA FRANCE IARD, et la Société PERSIMMO ainsi que son assureur, la Société Mutuelles du Mans devant le Tribunal de grande instance de Paris.
Celui-ci, par jugement du 20 octobre 2005, a :
- déclaré irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la Compagnie AXA FRANCE IARD au titre de la condamnation de 198.760,90 € prononcée au profit de la SCI MERCEDES,
- dit recevable l'action engagée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble 47/49 rue Marx Dormoy à Paris 18ème à l'encontre de la Compagnie AXA FRANCE IARD en ce qui concerne les seuls travaux de mise en conformité entrepris suite aux dégâts des eaux pour une somme de 13.607,39 €,
- condamné en conséquence la Compagnie AXA FRANCE IARD à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 13.607,39 €,
- débouté la Compagnie AXA FRANCE IARD de son appel en garantie contre la Société PERSIMMO,
- condamné la Société PERSIMMO à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 €,
- condamné in solidum la Compagnie AXA FRANCE IARD et la Société PERSIMMO à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,
- rejeté toutes autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire.
La Cour est saisie de l'appel contre cette décision.
Vu la déclaration d'appel du 29 novembre 2005,
Vu les conclusions :
- de la Société PERSIMMO du 29 mai 2006,
- du syndicat des copropriétaires de l'immeuble 47/49 rue Marx Dormoy à Paris 18ème du 22 mai 2007,
- de la Compagnie AXA FRANCE IARD du 31 mai 2007,
SUR CE, LA COUR :
Aux termes des dispositions de l'article L114-1 du Code des assurances, toutes les actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance et quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de prescription court du jour à compter du quel ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier.
En l'espèce, il y a lieu de considérer que la demande de la SCI MERCEDES, tiers au sens des dispositions de l'article L114-1 du Code des assurances sus-visé, est nécessairement antérieure au 6 février 2001, date du jugement l'ayant déboutée de sa demande indemnitaire dirigée contre le syndicat des copropriétaires.
La date des conclusions de la SCI devant le Tribunal est celle de "l'action en justice contre l'assuré", point de départ de la prescription biennale de l'action en garantie contre l'assureur.
La demande en garantie des condamnations à dommages et intérêts prononcées au bénéfice de la SCI était prescrite au moment de la délivrance de l'assignation à la Compagnie AXA FRANCE IARD le 25 septembre 2003 et, par substitution de motifs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action dirigée conter AXA FRANCE IARD au titre de la condamnation de 198.760,90 € au profit de la SCI MERCEDES.
*
* *
Les premiers juges ont accueilli la demande en paiement du syndicat des copropriétaires portant sur la somme de 13.607,39 €.
Ces travaux ont été réalisés en 2003.
Pour s'opposer au remboursement de cette somme qui concerne, selon le syndicat des copropriétaires, des "frais de mise en conformité de l'immeuble avec la législation en matière de construction", la Compagnie AXA fait plaider l'absence d'aléa.
Les causes d'infiltrations relevées par l'expert sont multiples : utilisation anormale des sanitaires utilisés en douche par certains occupants, engorgements, fuites de canalisation sous pression, toutes à caractère accidentel et le défaut d'étanchéité des locaux sanitaires des 1er et 2ème étages n'est qu'une des causes relevées.
La Compagnie AXA n'établit pas l'absence de caractère accidentel du sinistre ni l'absence d'aléa du contrat.
Elle garantit, aux termes des conditions générales de son contrat "les frais de mise en conformité de l'immeuble avec la législation en matière de construction".
Le syndicat des copropriétaires soutient que la facture de 13.607,39 € ressort de cette rubrique.
Il produit une lettre de l'architecte de l'immeuble au syndic transmettant deux factures de ce montant total hors taxe "pour les travaux de plomberie réalisés dans les WC des 1er et 2ème étages de l'immeuble en référence, et les travaux d'entretien dans l'escalier sur cour, travaux demandés dans le cadre de l'expertise judiciaire par Monsieur BONNIN".
Les factures ne sont pas produites, ni le devis de l'entreprise Le Mehaute du 4 avril 2003 qui figure en pièce 5 de la liste des pièces communiquées en première instance.
Il n'est pas établi que la somme de 13.607,39 € corresponde à la mise aux normes du bâtiment.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la Compagnie AXA à payer la somme de 13.607,39 € au syndicat des copropriétaires.
Toutes les demandes du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la Compagnie AXA FRANCE IARD seront rejetées.
Les demandes de la Compagnie AXA FRANCE IARD à l'encontre du syndic de la copropriété et son assureur, les Mutuelles du Mans, sont sans objet.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la Compagnie AXA FRANCE IARD la charge de ses frais irrépétibles. Il n'y a donc pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la Compagnie AXA FRANCE IARD sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
*
* *
Le syndicat des copropriétaires présente une demande indemnitaire contre la Société PERSIMMO en soutenant qu'elle a commis une faute en sa qualité de syndic, pour avoir omis d'interrompre la prescription biennale.
Ce moyen a été soulevé en première instance.
La Société PERSIMMO ne justifie pas avoir fait la moindre déclaration de sinistre auprès de l'assureur de l'immeuble, ni avoir, dans le cadre de son devoir de conseil, informé le syndicat des copropriétaires de la nécessité d'agir à l'encontre de son assureur alors qu'il faisait l'objet d'une procédure de la part de la SCI.
Elle a, ce faisant, privé le syndicat des copropriétaires de la possibilité d'être garanti des condamnations prononcées à son encontre.
Il a été relevé que les dommages avaient un caractère accidentel au sens de la police souscrite par le syndicat des copropriétaires.
Toutefois, le préjudice subi par le syndicat n'est constitué que par la perte d'une chance l'information qu'aurait pu donner le syndic n'étant pas à elle seule de nature à entraîner de la part de l'assemblée générale la décision d'initier une procédure.
Compte tenu de l'importance des condamnations prononcées, cette perte de chance sera évaluée à la somme de 150.000 € que la Société PERSIMMO sera condamnée à payer au syndicat des copropriétaires avec intérêts légaux à compter de la présente décision qui statue sur le préjudice, ceci in soldium avec son assureur la Société Mutuelles du Mans Assurances IARD, dans les limites de son contrat.
Le syndicat des copropriétaires fait valoir qu'en s'abstenant de recouvrer les charges dues par la SCI, la Société PERSIMMO lui a fait perdre la période de charges de 1987 au 3ème trimestre 1990 pour la somme de 7.442,60 €.
L'arrêt du 20 décembre 2001 a relevé que l'action du syndicat des copropriétaires était prescrite pour les charges antérieures au 10 octobre 1990, le syndicat s'étant contenté de faire délivrer à la SCI MERCEDES des sommations les 18 septembre 1997 et 9 décembre 1998, et non pas un commandement, seul de nature à interrompre la prescription.
La Cour indiquait que les charges de la SCI MERCEDES étaient de 260/12000èmes pour les charges générales rubrique A et AF et de 17.415/585.189 èmes pour les charges de chauffage.
Le syndicat des copropriétaires ne verse pas les relevés de charges de l'époque concernée et se contente de fonder sa demande sur la différence entre les sommes demandées et les sommes allouées par la Cour.
En l'absence de pièces comptables, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a considéré que le préjudice subi par le syndicat s'analysait en une perte de chance et en son évaluation.
*
* *
Il apparaît inéquitable de laisser au syndicat des copropriétaires la charge de la totalité de ses frais irrépétibles et la Société PERSIMMO sera condamnée in solidum avec son assureur, la Société Mutuelles du Mans Assurances à lui payer 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la Compagnie AXA FRANCE IARD à payer la somme de 13.607,39 € au syndicat des copropriétaires, ainsi que 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ainsi que sur les condamnations relatives aux dépens ;
Statuant à nouveau,
Déboute le syndicat des copropriétaires de ses demandes en paiement dirigées contre la Compagnie AXA FRANCE IARD ;
Confirme pour le surplus le jugement ;
Y ajoutant,
Dit que l'absence de déclaration du sinistre à l'assureur de la copropriété et l'absence d'information de la copropriété relative aux conséquences de la prescription biennale ont généré pour la copropriété une perte de chance ;
Condamne en conséquence, la Société PERSIMMO à en indemniser la copropriété à hauteur de 150.000 € ;
Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Condamne la Société Mutuelles du Mans Assurances IARD en sa qualité d'assureur de la Société PERSIMMO, dans les limites de son contrat, au paiement de cette somme in solidum avec son assurée ;
Condamne in solidum la Société PERSIMMO et la Société Mutuelles du Mans Assurances IARD à payer 5.000 € au syndicat des copropriétaires de l'immeuble 47/49 rue Marx Dormoy à Paris 18ème sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ;
Rejette les autres demandes des parties ;
Fait masse des dépens de première instance et d'appel ;
Condamne in solidum la Société PERSIMMO et la Société Mutuelles du Mans Assurances IARD à leur paiement ;
Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.
Le greffier, Le Président,