RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
21ème Chambre A
ARRET DU 31 Janvier 2007
(no 2 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 04/35573
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Mai 2004 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG no 02/11229
APPELANT
Monsieur Fabien X...
...
78700 CONFLANS STE HONORINE
comparant en personne, assisté de Me Jean-Jacques Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : L.168
INTIMEE
SOCIETE MONSTER WORLDWIDE
Venant aux droits de la SA MONSTER
...
92300 LEVALLOIS PERRET
représentée par Me Benoît CAILLAU, avocat au barreau de PARIS, toque : P130
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 28 Novembre 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Elisabeth VIEUX, Présidente
Monsieur Jean Pierre MAUBREY, Conseiller
Monsieur Bernard SCHNEIDER, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Evelyne MUDRY, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par Madame Elisabeth VIEUX, Présidente
- signé par Madame Elisabeth VIEUX, Présidente et par Evelyne MUDRY, greffier présent lors du prononcé.
LA COUR,
M. F. X... a été engagé par la Sté MONSTER le 20 novembre 2000, selon contrat à durée indéterminée, en qualité "d'Administrateur Réseau Informatique, Agent de maîtrise" ;
Le 7 juin 2004, par lettre recommandée avec avis de réception adressée à son employeur il a déclaré "prendre acte de la rupture de son contrat de travail qui vous est imputable et équivaut à un licenciement sans cause réelle ni sérieuse et abusif pour les raisons suivantes:
- une partie substantielle de mes fonctions m'a été unilatéralement retirée
- un défaut de versement d'un bonus conforme à l'article 17 du contrat de travail
- une non attribution de stock-options en violation de la promesse d'embauche
- un paiement tardif du complément de salaire à verser dans le cadre de mon arrêt maladie
- un manquement aux obligations de visite médicale suite à mon arrêt maladie du 18 juillet 2002 au 1er octobre 2002 (art. R 241-54 du code du travail)"
Antérieurement M. X... avait saisi le Conseil de prud'hommes de PARIS le 9 septembre 2002, lequel aux termes d'une décision prononcée le 25 mai 2004, lui avait accordé la somme de 3 933 € au titre du bonus et a rejeté ses autres demandes ainsi formulées
- résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et dommages-intérêts
- rupture abusive
- préjudice pour harcèlement moral dommages-intérêts
- indemnité de préavis
- indemnisation de la clause de non concurrence
- préjudice lié aux stock-options ;
Ayant interjeté appel de cette décision, par conclusions visées par le greffier d'audience, M. X... demande la condamnation de la Sté MONSTER WORLDWIDE venant aux droits de la Sté MONSTER à lui payer les sommes suivantes :
- dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 39 367 €
- dommages-intérêts pour rupture abusive : 20 000 €
- violation du contrat de travail : 15 000 €
- dommages-intérêts pour harcèlement et atteinte à la personne : 39 637 €
- dommages-intérêts pour non remise de l'attestation ASSEDIC : 5 000 €
- indemnité compensatrice de préavis : 9 833 € + 983 €
- contrepartie au titre de la clause de non concurrence : 20 351 €
- bonus : 9 890,10 € + 989 € de congés payés
- dommages-intérêts liés au défaut d'ouverture de stocks options : 15 000 €
- dommages-intérêts pour non visite de reprise et rechute médicale : 5 000 €
- dommages-intérêts pour non communication de la notice de prévoyance : 5 000 €
- article 700 du nouveau code de procédure civile : 5 000 €
Par deux jeux de conclusions complémentaires visées par le greffier d'audience, la Sté MONSTER WORLDWIDE sollicite la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a alloué la somme de 3 933 € au titre du rappel de bonus, et demande en outre 3 500 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Elle demande que soient écartées les fautes que lui impute l'appelant et qu'il soit jugé que "la prise d'acte" de la rupture de son contrat de travail par M. X... soit qualifié de démission et en produise donc les effets ;
Elle demande en outre qu'il soit constaté que :
- M. X... n'était pas délié de son préavis et ne l'a pas exécuté
- M. X... n'avait pas droit au bonus de 3 933 € et doit restituer cette somme indûment saisie ainsi que 857,23 € au titre de la part de charges salariales ;
- M. X... ayant été délié de sa clause de non concurrence le 25 mars 2004 avant que son contrat de travail ne soit rompu, ce qui est confirmé le 8 juillet 2004 par courrier, ne peut prétendre à une quelconque indemnisation du fait de cette clause
- M. X... plus généralement doit être débouté de toutes ses demandes
- M. X... devra payer la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Les parties ont soutenu et développé les conclusions ci-dessus lors de l'audience de plaidoirie ;
Vu le jugement déféré,
Vu les conclusions des parties,
SUR QUOI,
Sur le harcèlement invoqué :
Considérant qu'au visa des articles L 122-49 et L 122-51 du code du travail M. X... fait grief à Mme A... de l'avoir harcelé, et à son employeur de ne pas avoir mis fin à cette situation ;
Considérant toutefois que les mails émanant de l'appelant ne sont pas de nature à établir ou à fournir des éléments propres à compléter ses allégations ;
Considérant que le mail principal du 2 mai 2002 envoyé par Mme A..., dénoncée comme l'auteur principal des faits, ne fait que traduire les aléas des relations professionnelles et affectives des deux salariés ; que l'éventuelle vivacité du comportement de Mme A... ne permet pas au vu de ce seul document de conclure à la réalité du harcèlement invoqué ;
Considérant que le mail LIARD-GROSMAN accréditant avec une précision peu commune la thèse du harcèlement connue de l'employeur, d'après Mme A..., émis le 8 mars 2006, 2 ans après le jugement n'apporte aucun élément de conviction au regard de sa production tardive et trop circonstanciée en cours de procédure ;
Considérant que le harcèlement n'étant donc pas prouvé la demande de dommages-intérêts doit être rejetée ;
Sur le grief de M. X... d'évidement de ses fonctions :
Considérant que les fonctions de l'appelant engagé par contrat à durée indéterminé le 20 novembre 2000 en qualité d'administrateur réseau, Responsable informatique, Agent de maîtrise étaient particulièrement multiples et avaient pour objet général de "garantir le développement et la maintenance de l'ensemble de l'infrastructure informatique, en conformité avec les prérogatives et la stratégie européenne" ;
Considérant que ce même article du contrat de travail prévoit en outre une possibilité d'évolution et d'adaptation au regard des besoins de la société, sans qu'il puisse s'agir d'une modification substantielle du contrat ;
Considérant que la Sté MONSTER WORLDWIDE soutient qu'en mars 2002 a été mise en place une nouvelle organisation des services informatiques à la suite de la réorganisation mondiale de ces mêmes services tant pour la gestion que l'administration du réseau et la maintenance ;
Considérant qu'elle explique notamment aux termes de ses écritures qu'a été créée une division "TMP Technologies Europe", division "fonctionnelle transversale, et cross divisionnelle"destinée à plus d'efficacité ;
Considérant que ces éléments sont repris dans une lettre particulièrement longue, précise et détaillée, adressée à M. X... le 24 août 2002, en RAR, signée de M. MATS B..., ayant pour objet de "reprendre une relation de travail normale, après un rapide rétablissement, et d'évaluer ensemble avec MM. C... et D... vos compétences et le bon accomplissement des missions qui vous ont été confiées" ;
Considérant que par des réponses précises concernant notamment la répartition des postes de direction, les conditions de travail, les primes, une éventuelle sanction qu'aurait justifié une erreur importante M. B... répondait alors aux questions principales posées par l'appelant, l'interpellant sur son accord pour modifier la consistance de ses fonctions et approuver les nouvelles attributions qui lui étaient proposées ;
Considérant toutefois que faute d'apporter une réplique précise à ce courrier et une démonstration plus ample du sort qui lui aurait été fait, M. X... n'apporte pas la preuve que les modifications apportées à ses fonctions se sont traduites par un véritable évidement ;
Considérant qu'il ne répond pas par ailleurs en fait à un courrier de la Sé WORLDWIDE du 4 février 2003 selon lequel certaines de ses tâches sont devenues plus valorisantes ;
Considérant qu'il convient dès lors de rejeter ses prétentions fondées sur ce point et de confirmer le jugement déféré, en constatant au vu des lettres ci-dessus et des documents produits aux débats que l'évolution de la société n'a pas conduit à priver l'appelant de ses attributions principales ;
Considérant que de même un bureau plus petit n'a fait que traduire les difficultés matérielles de l'entreprise ;
*
Sur les griefs tirés par M. X... de la non perception d'un bonus et de la non-attribution de stock-options :
Considérant que l'erreur matérielle contenue dans le jugement consistant à rejeter la demande de bonus puis à l'allouer dans le dispositif n'a pas d'incidence sur l'appréciation de ce litige, dès lors que la Cour, par l'effet de l'appel, est saisie de l'entier examen des sommes demandées ;
Considérant que le contrat de travail de l'appelant, dispose à l'article 17 que le versement d'un bonus trimestriel nécessite des résultats satisfaisants de l'entreprise ; que précisément il est établi que la société MONSTER WORLDWIDE se trouve en perte de résultats ;
Considérant qu'il convient dès lors d'infirmer le jugement, de dire que M. X... ne pouvait prétendre aux sommes allouées au titre du bonus et qu'il devra rembourser le cas échéant les sommes perçues par lui en exécution de ce jugement ;
*
Considérant par ailleurs que l'appelant n'est pas davantage fondé à demander des dommages-intérêts au titre d'un manque à gagner résultant de la perte de chance d'obtenir des stock-options ;
Considérant en effet qu'il est établi que la possibilité d'obtenir ces titres ne constitue qu'une vocation incertaine et que faute de prouver que son employeur a fait obstacle à l'acquisition des titres ou lui a fait perdre des chances d'en acquérir, M. X... doit être également débouté de sa demande de dommages-intérêts ;
*
Sur le défaut de visite médicale de reprise en octobre 2002 :
Considérant que ce grief n'est pas fondé puisque l'intimé produit aux débats une attestation de visite médicale datée du 9 octobre 2002 établie par le Dr Maryse E... ;
Considérant enfin que le paiement tardif du complément de salaire à l'intimé n'est pas établi ;
Considérant dès lors qu'au regard de sa lettre de prise d'acte du 7 juin 2004 de la rupture imputable selon lui, à l'intimée, M. X... ne peut se prévaloir d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Considérant que sa lettre emporte par conséquent démission ouvrant droit à une situation de préavis à compter du 8 juin ;
Considérant que faute d'avoir exécuté son préavis à compter de cette date et n'en étant pas dispensé M. X... ne peut prétendre à son paiement et doit être débouté de sa demande ;
Sur la clause de non-concurrence :
Considérant qu'aux termes de sa volonté explicite exprimée dans ses conclusions devant le Conseil de prud'hommes de PARIS le 25 mars 2004 la Sté MONSTER WORLDWIDE a expressément fait connaître sa renonciation à se prévaloir de la clause de non-concurrence contenue dans le contrat de travail de l'appelant ;
Considérant dès lors que ce dernier ne peut se prévaloir d'un quelconque préjudice pour la période s'ouvrant le 8 juin 2004 et qu'il convient de le débouter de sa demande dommages-intérêts ;
Considérant par ailleurs que M. X... ne démontre pas qu'il ait subi un préjudice au motif qu'il n'aurait pas reçu la notice de prévoyance alors que l'intimée rappelle sans être démentie qu'il a bénéficié du régime prévu au contrat groupe de la société et que le préjudice n'est donc ni caractérisé ni établi ;
Considérant qu'il convient de faire application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en faveur de l'intimée ;
*
PAR CES MOTIFS,
Constate la démission de M. X... à la date du 7 juin 2004 ;
Infirme le jugement du Conseil de prud'hommes de PARIS en date du 25 mai 2004 en ce qu'il a alloué à M. X... une somme de 3 391,99 € au titre du bonus et condamne ce dernier à restituer la somme qu'il a perçue en application de cette condamnation ;
Le confirme pour le surplus ;
Déboute M. X... de toutes ses autres demandes ;
Ordonne en tant que de besoin la production du document ASSEDIC étant toutefois rappelé que M. X... est démissionnaire ;
Le condamne aux dépens et à payer à la Sté MONSTER WORLDWIDE une somme de
1 500 € (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,