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22/01/2007 | FRANCE | N°9

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0138, 22 janvier 2007, 9


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS 22ème Chambre B
ARRET DU 22 Janvier 2007 (no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05 / 06122
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Mars 2005 par le conseil de prud'hommes de Bobigny RG no 02 / 04846
APPELANTE Madame Chantal X...... représentée par Me Pascale GUILLON DELLIS, avocat au barreau de COMPIEGNE

INTIMEE Société SAINT KARL DIFFUSION 12,16, rue de Vincennes Tour Orion 93100 MONTREUIL représentée par Me Pierre VIOLET, avocat au barreau

de PARIS, toque : A 167 substitué par Me Pascale Clémence BERNARD, avocat au barreau de PARIS...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS 22ème Chambre B
ARRET DU 22 Janvier 2007 (no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05 / 06122
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Mars 2005 par le conseil de prud'hommes de Bobigny RG no 02 / 04846
APPELANTE Madame Chantal X...... représentée par Me Pascale GUILLON DELLIS, avocat au barreau de COMPIEGNE

INTIMEE Société SAINT KARL DIFFUSION 12,16, rue de Vincennes Tour Orion 93100 MONTREUIL représentée par Me Pierre VIOLET, avocat au barreau de PARIS, toque : A 167 substitué par Me Pascale Clémence BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E 221

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 Décembre 2006, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Brigitte BOITAUD, Présidente Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller Monsieur Daniel FONTANAUD, Conseiller qui en ont délibéré

Greffière : Mme Isabelle PIRES, lors des débats

ARRÊT :-contradictoire-prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente-signé par Madame Brigitte BOITAUD, présidente et par Mme Isabelle PIRES, greffière présente lors du prononcé.

Madame Chantal X..., engagée à compter du 15 avril 1996 en qualité de responsable de franchise par la société SAINT KARL DIFFUSION, a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur par courrier du 19 août 2002 :

" Je me suis présentée, ainsi que cela avait été convenu, dans les locaux administratifs de Montreuil le 19 / 8 / 2002 à 9 heures pour reprendre mes fonctions " sur de nouvelles bases ", compte tenu des multiples événements survenus au cours du mois écoulé. Je n'ai malheureusement, pu constater que rien n'avait changé et que votre attitude de repentance apparente depuis le 9 août n'a été dictée que par votre seule volonté de me pousser à une démission qui vous apparaît plus sécurisante que le licenciement monté de toutes pièces, que vous avez eu la présence d'esprit (ou plus exactement la mauvaise foi calculée) de stopper.J'ai, en effet, pu constater dès mon retour que : les dossiers qui m'avaient été intégralement retirés le 22. 7. 2002 ne m'ont été que, partiellement, restitués, ce jour à 15 heures-(V-document preuve). Sans informations stratégiques, il ne m'est pas possible d'accomplir mes fonctions.J'ai donc rendu à Séverine Z... ces dossiers incomplets, immédiatement et en confirmant par fax. Je suis maintenue à l'écart et vous laissez à ma disposition un bureau vide dans lequel je n'ai rien à faire. Le comportement de l'ensemble de l'équipe dirigeante est hostile à mon égard et constitue, ni plus ni moins, un harcèlement psychologique pour me faire craquer. Aujourd'hui, compte tenu de ces éléments, je ne puis que prendre acte de la rupture du contrat de travail nous unissant et ce, de votre fait... vous m'avez retiré tous les dossiers le 22-7-et je suis absente depuis le 27 juillet dernier suite à l'arrêt de travail dont je bénéficie consécutivement à vos comportements... "

Par lettre du 14 février 2003 la société SAINT KARL DIFFUSION notifiait à Mme X... son licenciement pour faute grave en ces termes :
"... vous nous avez notifié votre démission... nous avons formellement contesté les griefs allégués à l'encontre de la société et vous avons ainsi notifié notre refus de considérer votre contrat rompu de notre fait.
Dans ce même courrier, nous vous avons mis en demeure de reprendre vos fonctions à tout le moins pour effectuer votre préavis... nous considérons aujourd'hui que votre absence injustifiée depuis le 19 août 2002 constitue un abandon de poste... "
Par jugement du 16 mars 2005 le conseil de prud'hommes de Bobigny, considérant que la prise d'acte de rupture par Mme X... avait les effets d'une démission, a notamment condamné cette dernière à payer à son employeur une indemnité de préavis ainsi que des dommages et intérêts pour non respect du devoir de loyauté.

Mme X... en a relevé appel.

Pour les moyens et prétentions des parties, il est fait référence aux conclusions reprises oralement et visées le 5 décembre 2006.

* * *

Sur la rupture

La rupture du contrat de travail a été effective dés la notification de la prise d'acte de rupture par Mme X..., le licenciement intervenu postérieurement devenant sans objet.

Il convient donc d'examiner les griefs imputés à l'employeur d'une mise à l'écart et d'une dégradation des conditions de travail mises en oeuvre par la nouvelle direction afin de contraindre Mme X... à démissionner à l'instar des autres salariés de l'équipe commerciale.

La société SAINT KARL DIFFUSION expose que Mme X..., ne supportant pas de rendre des comptes à la nouvelle direction, souhaitait quitter l'entreprise en négociant son départ ; que les dossiers remis par la salariée étaient " incomplets ou totalement inexploitables " ; que les objectifs de 40 ouvertures de magasin fixés par l'ancienne direction, n'étaient pas atteints, que compte tenu de ses congés et absences, Mme X... n'avait en fait travaillé que 6 jours avec la nouvelle direction ; qu'il ne lui a été retiré aucune responsabilité ; qu'en réalité Mme X... avait " entamé dés le mois de juin 2002 des pourparler pour se faire embaucher par Monsieur B...(PDG du groupe concurrent COIFFURE DU MONDE)... " et développait les franchises de la marque de cette société concurrente.

Mais la chronologie des faits et les pièces du dossier établissent la volonté de la nouvelle direction de se séparer de Mme X....
Les 6 lettres recommandées avec accusé de réception adressées par cette dernière sur la période du 19 juin au 5 août 2002, soit avant la prise d'acte de rupture, relatent le comportement et les dires des membres de la nouvelle direction de manière très détaillée qui accrédite les motifs de la prise d'acte de rupture. Ces courriers sont restés sans réponse et le 29 juillet Mme X... était convoquée à un entretien préalable à un licenciement. Le 9 août 2002 la société SAINT KARL DIFFUSION avisait Mme X... en ces termes : "... j'ai le plaisir de vous informer que j'ai décidé d'abandonner la procédure de licenciement à votre encontre.A votre retour de congés, nous ferons le point ensemble sur la nouvelle politique commerciale du groupe qui sera mise en place dés septembre... ". Aucune information n'est fournie pour expliquer le motif de cette procédure et de son abandon.

Par ailleurs, il ressort de l'échange de courriers entre le 13 et 16 août 2002 que les dossiers de l'intéressée lui avaient été repris le 22 juillet (cf document signé S Z...) et que la salariée, qui en avait fait la demande, en avait refusé la restitution le 19 août 2002 au motif qu'ils étaient " incomplets " (cf fax du 19 août). Ces éléments ne sont pas utilement discutés par la société.

En outre, les affirmations de Mme X... selon lesquelles les salariés de l'ancienne équipe au nombre de 9, dont elle fournit les noms, dates et modes de départ (négocié, par prise d'acte de rupture ou par licenciement) ont quitté l'entreprise entre le mois d'août et de novembre 2002, ne sont pas démenties.

L'ensemble de ces éléments établit la volonté de l'employeur d'aboutir à une rupture du contrat de travail.
Il s'ensuit que la prise d'acte de rupture aux torts de l'employeur est fondée. Elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvrant droit à réparation.

La cour dispose des éléments nécessaires et suffisants pour fixer le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 50 000 € sur le fondement de l'article L 122-14-4 du code du travail, toutes causes de préjudice confondues, en ce compris le préjudice né du caractère vexatoire de la rupture.

Les montants des indemnités de préavis et de licenciement sollicités par Mme X..., sur la base d'un salaire moyen annuel de 7 475,05 € composé d'un fixe et d'un variable, ne sont pas subsidiairement discutés. Il est fait droit à la demande.

Sur la clause de non concurrence

La société SAINT KARL DIFFUSION reproche à Mme X... d'avoir violé cette clause de non concurrence.
Mais cette violation n'est pas établie par les pièces du dossier constituées par des fax dont les dates ne permettent pas de retenir ce reproche. Les démarches effectuées par Mme X..., s'inscrivaient dans un contexte de rupture du contrat de travail et avait pour finalité légitime de lui assurer un emploi au plus vite.
La société SAINT KARL DIFFUSION est donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour absence de loyauté et le jugement infirmé en ce sens.
L'amende civile n'est pas justifiée. Le jugement est également infirmé sur ce point.
Les circonstances commandent d'allouer à Mme X... au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile une somme de 2 000 €.

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement,
CONDAMNE la société SAINT KARL DIFFUSION à payer à Mme X... :
-22 425,15 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,-2 242,51 € congés payés afférents,-11 856,26 € à titre de d'indemnité de licenciement,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de date de la réception par la société SAINT KARL DIFFUSION de la première convocation devant le conseil de prud'hommes,
-50 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, avec intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt,
-2 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
DEBOUTE les parties du surplus des demandes,
DIT n'y avoir lieu au prononcé d'une amende civile,
MET les dépens à la charge de la société SAINT KARL DIFFUSION.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0138
Numéro d'arrêt : 9
Date de la décision : 22/01/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Bobigny, 16 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-01-22;9 ?
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