RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
21ème Chambre A
ARRET DU 10 Janvier 2007
(no 6 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/04044
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Janvier 2005 par le conseil de prud'hommes de MEAUX section Encadrement RG no 03/00845
APPELANT
Monsieur Christian X...
...
92700 COLOMBES
comparant en personne, assisté de Me Blandine SIBENALER, avocat au barreau de PARIS, toque : R.286
INTIMEES
Me Daniel Z... ès qualités de Liquidateur amiable de SA CONTINUA
...
75017 PARIS
représenté par Me NEGRE substitué par Me BOITIER, avocat au barreau de PARIS
(de la SELARL NS2A avocats au barreau de PARIS), toque : P 556
Société 2J IMPRESSION venant aux droits de la SAS SYSTEM PRINTING SERVICES SPS
Impasse Rudolf Diesel
Parc de la Devèze
33700 MERIGNAC
représentée par : Me Patrice D'HERBOMEZ, avocat au barreau de PARIS , toque C 517
SA CONTINUA
...
93607 AULNAY SOUS BOIS
non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Octobre 2006, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bernard SCHNEIDER, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Elisabeth VIEUX, Présidente
M. Jean-Pierre MAUBREY, Conseiller
M. Bernard SCHNEIDER, Conseiller
Greffier : Evelyne MUDRY, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par Mme Elisabeth VIEUX, Présidente
- signé par Mme Elisabeth VIEUX, Présidente et par Evelyne MUDRY, greffier présent lors du prononcé.
LA COUR,
Le 26 janvier 2000 avec effet au 1er février 2000 M. Christian X... a été engagé en qualité de directeur logistique par la Sté CONTINUA. Le 14 mai 2001 cette société a été reprise par la Sté SPS laquelle a repris le contrat de travail de M. X.... La société SPS a licencié ce dernier le 29 août 2002 pour motif économique.
Ultérieurement la Sté SPS a été reprise par la Sté 2J IMPRESSION.
M. X... ayant contesté la régularité de son licenciement a saisi le Conseil de prud'hommes de MEAUX le 16 juillet 2003.
Par jugement du 13 janvier 2005 cette juridiction a décidé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et alloué au demandeur les sommes suivantes :
90 € tickets restaurant
633 € congés de fractionnement
5 226 € heures supplémentaires
27 441 € dommages-intérêts sans cause réelle et sérieuse
Ayant régulièrement interjeté appel de cette décision M. X... demande la confirmation du jugement ci-dessus en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse mais sollicite :
1o) que lui soient allouées les sommes supplémentaires suivantes :
- 50 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 9 146,94 € de rappels de salaire + 914,69 €
- 7 819 € de dommages-intérêts pour le manque à gagner subi sur les indemnités de chômage
- 4 845 € sur le manque à gagner à venir sur ses prestations de retraite complémentaire
- 1 504 € sur l'indemnité conventionnelle de licenciement
- 1 440,56 € + 144,05 au titre des heures supplémentaires
2o) que soit infirmé le jugement en ce qui concerne le paiement des samedis travaillés et que lui soient alloués 914,70 € + 91,47 €
3o) que soit alloués 184,48 € de tickets restaurant
4o) que soit rectifiée la déclaration de salaire auprès de la caisse de retraite complémentaire pour 2002 et pour 2003.
Il sollicite la somme de 3 000 € d'article 700 du nouveau code de procédure civile pour la procédure d'appel ;
La Sté 2 J IMPRESSION venant aux droits de la Sté SPS conclut au débouté de M. X..., demande la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a fixé au minimum légal l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et n'a pas fait droit au paiement de la part variable sur sa rémunération de 2002 et aux heures supplémentaires pour janvier et février 2002 ;
Elle entend déclarer qu'elle se réserve le droit d'appeler en garantie la Sté CONTINUA pour la période antérieure à la reprise du contrat de travail de M. X... par SPS le 14 mars 2001 ;
Par conclusions en réponse M. Z... liquidateur amiable de la Sté CONTINUA conclut à l'irrecevabilité de la demande de la sté SPS dirigée contre cette société ;
Vu le jugement déféré ;
Vu les conclusions des parties ;
Les parties ont soutenu et développé leurs conclusions régulièrement visées par le greffier lors de l'audience de plaidoirie.
SUR QUOI :
Considérant tout d'abord qu'il n'est pas contesté que la Sté SPS est devenue l'employeur de M. C. X... à la suite de sa reprise de la Sté CONTINUA ;
Considérant que la Sté SPS a licencié M. X... le 29 août 2002 mais qu'ultérieurement elle a été reprise par la Sté 2J IMPRESSION PRINTING ;
Considérant qu'il s'ensuit que le seul débiteur éventuel à l'égard de M. X... se trouve être cette dernière société et que les conventions passées entre les parties antérieurement à la cession de la SAS SPS /2J IMPRESSION PRINTING ne s'imposent pas à l'appelant auquel ne peuvent être opposées que les limites de son contrat de travail à la date de son licenciement ;
Considérant qu'il n'est pas démontré qu'à la suite de la cession des contrats dans le cadre de l'article L 122-12 du code du travail le contrat de M. X... ait été modifié par le repreneur et que cette modification ait eu une incidence sur le présent litige ;
Sur le licenciement
Considérant que le 29 août 2002 la Société SPS a adressé à M. X... la lettre conçue dans les termes suivants :
"Suite à notre entretien du lundi 12 août 2002, nous avons le regret de vous informer que nous sommes dans l'obligation de vous notifier votre licenciement pour le motif économique suivant :
Le résultat de l'entreprise, sur le premier trimestre de l'exercice 2002, fait apparaître une perte d'exploitation de l'ordre de 80 000€, essentiellement provoquée par une faiblesse du chiffre d'affaires générée par la non concrétisation de résultats commerciaux (ventes de matériels et de services quasi nulles sur le premier semestre 2002).
Au regard de la dégradation de la situation économique de la société, il apparaît évident que l'entreprise serait dans une situation de "cessation de paiement" dans les mois à venir. Dans ces circonstances, il est indispensable de réduire rapidement nos coûts récurrents, et de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise.
Comme nous l'avions indiqué au cours du même entretien, la possibilité vous est offerte d'adhérer au dispositif "PARE Anticipé"dont les documents vous ont été remis lors de notre entretien. Nous vous rappelons que vous disposez de huit (8) jours à compter de la réception de cette lettre pour déposer votre dossier d'acceptation du "PARE Anticipé" à l'ASSEDIC.
La date à laquelle cette lettre vous aura été présentée marquera le point de départ de votre préavis, d'une durée de quatre (4) mois."
Considérant que cette lettre fait état des difficultés économiques de l'entreprise, de la nécessité de réduire les coûts, puis après avoir mentionné la possibilité de bénéficier du PARE fait en dernier lieu état du calcul du point de départ du préavis ;
Considérant cependant qu'après avoir évoqué les difficultés économiques, et les remèdes nécessaires, cette lettre ne mentionne pas que ces difficultés nécessitent la suppression de l'emploi de M. X... ;
Considérant que pour cette seule raison le Conseil de prud'hommes a justement jugé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Considérant qu'il convient de le confirmer sur ce point ;
Sur les différents préjudices
Considérant qu'au jour de son licenciement le 6 septembre 2002 M. X... allait atteindre l'âge de 55 ans et qu'à compter du 23 juin 2005 il a été dispensé par les ASSEDIC de rechercher un emploi jusqu'au 1er janvier 2008, date de sa retraite ;
Considérant qu'au regard de son dernier salaire son manque à gagner mensuel est de 1 117,37 € ; que ses pertes sont de 50 281,65 € arrêtées au 30 octobre 2006 ;
Considérant qu'au 31 décembre 2007 son manque à gagner est de 65 925 € eu égard à la perception d'indemnités ASSEDIC ;
Considérant qu'eu égard aux autres chefs de demande relatifs à une augmentation du coût de sa nouvelle mutuelle à laquelle il a dû souscrire, à une moindre évaluation du montant de sa retraite eu égard à un moindre nombre d'années travaillées il convient de faire droit à la demande d'indemnité de M. X... au titre de son licenciement à hauteur de 50000€ ;
Sur les demandes de remboursement au titre de la rémunération variable
Considérant que l'avance sur résultat prévue à l'article 5 du contrat de travail, relatif à la rémunération, fixée à 80 000 € brut pour l'année et payée par quart ne peut être conservée par le salarié qu'en fonction des résultats de l'entreprise ;
Considérant que l'appelant fait grief à l'employeur d'avoir retenu en janvier 2003, à l'occasion du solde de tout compte la somme de 9 146,94 €, qu'il a intitulé "solde de rémunération variable", au motif que les résultats de l'entreprise se sont révélés négatifs lors de l'exercice clos le 31 mars 2002 ;
Considérant que les sommes demandées au titre de la " part variable ", doivent donc être effectivement rejetées en raison de résultats insuffisants rappelés ci-dessus ;
Sur la perte au titre des primes logistiques
Considérant que l'intimé justifie par ses documents, dont l'attestation ZOPATTI, qu'il aurait perçu une prime sur le matériel vendu, s'élevant à 10 % de cette vente, soit 12 021 € à laquelle il convient d'ajouter 1 202 € de congés payés y afférents ;
Considérant que l'impact sur la retraite à hauteur de 6 000 €, doit être alloué à C. X... ;
Sur le calcul de l'indemnité conventionnelle de licenciement
Considérant que la somme de 12 021 € (ventes logistiques) doit être prise en compte pour le calcul de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
Considérant que la moyenne des salaires de l'année précédant son départ de février 2001 à janvier 2002 s'élève dès lors à 5 581,91 € ; qu'il est dû au titre du solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement : 672 € ainsi que 831,93 € au titre des ventes logistiques soit au total 1 504,19 € ;
Sur le paiement des heures supplémentaires
Considérant que M. C. X... produit ses feuilles de paie entre février 2000 et mars 2001 et que les intimées ne démontrent pas que leurs mentions étaient erronées, et notamment que le nombre d'heures travaillées et payées ait été inférieur aux demandes ;
Considérant que lors de la signature de son contrat de travail l'horaire hebdomadaire prévu était de 35 heures pour M. X... ;
Considérant que cependant sa feuille de paye mentionne en février 2000 130 heures mensuelles puis de mars 2000 à janvier 2001 169 heures ;
Considérant que ce n'est qu'en février/mars 2001 que la feuille de paye mentionne une durée modifiée de 151,67 heures de travail ;
Considérant que de mars 2000 à janvier 2001 M. X... a donc travaillé 169 heures payées 150 heures ;
Considérant que pour la période considérée il lui est dû 172 heures ;
Considérant qu'il est donc dû à l'appelant 5 762 € augmenté de 576 € de congés payés, soit au total 6 338 €, eu égard au taux horaire de 33,50 € majoré de 25 % ;
Considérant que du 1er janvier au 8 février 2001 il lui est dû 904,56 € soit 7242,56 € au total ;
Considérant qu'il convient de rejeter en revanche la demande formée au titre des indemnités pour travail du samedi et au titre des tickets-repas les explications fournies et les pièces produites émanant pour partie du demandeur lui-même étant insuffisantes à prouver l'existence des créances réclamées ;
Considérant qu'il convient de faire droit à la demande de M. X... au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à hauteur de 1000 € ;
Considérant que la Sté CONTINUA dont l'intervention n'était pas justifiée dans le seul litige prud'homal sera déboutée de toutes ses demandes ;
PAR CES MOTIFS
Déclare les demandes de M. X... recevables à l'égard de la Sté 2 J IMPRESSION aux droits de SYSTEM PRINTING SPS, employeur de M. X... lors de son licenciement ;
Confirme le jugement du Conseil de prud'homes de MEAUX en date du 13 janvier 2005, en ce qu'il a déclaré que le licenciement de Christian X... prononcé le 29 août 2002 était sans cause réelle et sérieuse.
L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau
Condamne la Sté 2 J IMPRESSION à payer à M. C. X... les sommes suivantes :
- 50 000 € (cinquante mille euros) au titre des dommages-intérêts dus pour l'indemnité de licenciement
- 6 000 € ( six mille euros) de prime "logistiques" et au titre des conséquences du défaut de sa prise en compte
- 1 504,19 € (mille cinq cent quatre euros dix neuf centimes) de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement
- 7 242,56 € (sept mille deux cent quarante deux euros cinquante six centimes) au titre des heures supplémentaires ;
Condamne la Sté 2 J IMPRESSION à payer la somme de 1 000 € (mille euros) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à M. X... ;
La condamne aux dépens.
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,