La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/01/2007 | FRANCE | N°257

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0242, 08 janvier 2007, 257


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

17ème Chambre - Section A

ARRET DU 08 JANVIER 2007

(no 257 , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 05/14437

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Avril 2005 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG no 04/6710

APPELANTS

Monsieur Karim X...

...

93270 SEVRAN

Mademoiselle Sakina X... agissant en qualité de DE CURATRICE DE M. KARIM X...

...

93270 SEVRANr>
représentés par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour

assistés de Me Benoit Y..., (SCP Y...), avocat au barreau de PARIS - P 220

INTIMEE...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

17ème Chambre - Section A

ARRET DU 08 JANVIER 2007

(no 257 , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 05/14437

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Avril 2005 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG no 04/6710

APPELANTS

Monsieur Karim X...

...

93270 SEVRAN

Mademoiselle Sakina X... agissant en qualité de DE CURATRICE DE M. KARIM X...

...

93270 SEVRAN

représentés par la SCP ARNAUDY - BAECHLIN, avoués à la Cour

assistés de Me Benoit Y..., (SCP Y...), avocat au barreau de PARIS - P 220

INTIMEES

Madame Sandrine Z...

...

93100 MONTREUIL

MUTUELLE D'ASSURANCES DES TRAVAILLEURS MUTUALISTES prise en la personne de ses représentants légaux

66 rue de Sotteville

76030 ROUEN CEDEX

représentées par la SCP CALARN-DELAUNAY, avoués à la Cour

assistées de Me Dominique LAURIER, avocat au barreau de PARIS - D 1418

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SEINE ST DENIS prise en la personne de ses représentants légaux

195 avenue Paul vaillant couturier

93014 BOBIGNY CEDEX

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Novembre 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Pascale GIROUD, président

Madame Jany CHAUVAUD, président assesseur

Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : lors des débats : Mademoiselle Isabelle BACOU

ARRET :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie Pascale GIROUD, président et par Mademoiselle Isabelle BACOU, greffier.

******

Vu le jugement rendu le 7 avril 2005 par le Tribunal de Grande Instance de Bobigny qui, disant le véhicule automobile de Mademoiselle Sandrine Z..., assurée auprès de la MATMUT, non impliqué dans l'accident du 21 mai 2000 à l'origine du dommage corporel de Monsieur Karim X..., a débouté celui-ci de ses demandes mais l'a condamné, en sa qualité de conducteur gardien de la motocyclette entrée en collision avec le véhicule Z..., à réparer le préjudice matériel consécutif à ladite collision.

Vu les conclusions signifiées par Monsieur X..., appelant assisté de sa curatrice, le 7 novembre 2005.

Vu les conclusions signifiées par la société d'assurances MATMUT et Mademoiselle Sandrine Z..., intimées, le 7 février 2006.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Seine Saint Denis, assignée à personne habilitée, n'a pas constitué avoué.

******

Considérant que le véhicule automobile de Mademoiselle Z... est nécessairement impliqué dans l'accident, du seul fait de sa collision avec la motocyclette sur laquelle circulaient Monsieur X... et une autre personne non identifiée.

Mais considérant que l'accident n'a pas eu de témoin, que la moto a été détruite par le feu, que les constatations effectuées par la police n'ont pas permis de connaître les conditions dans lesquelles la collision s'était produite et que les seules déclarations de la conductrice du véhicule automobile impliqué ne suffisent pas à déterminer de sorte que Monsieur X... sera indemnisé de son entier préjudice.

Considérant que le susnommé ne saurait être condamné à réparer le préjudice matériel de l'automobiliste, à défaut de preuve de sa qualité de conducteur gardien de la motocyclette dont il pouvait n'être que passager transporté.

Considérant que Monsieur X..., atteint d'un traumatisme crânien, fera l'objet d'une expertise médicale et qu'il lui sera alloué une provision de 30.000 €, compte tenu de la gravité de ses blessures, outre une indemnité de procédure de 2.500 €.

PAR CES MOTIFS

Infirmant le jugement déféré, dit que Monsieur Karim X... a droit à l'indemnisation de son entier préjudice consécutif à l'accident du 21 mai 2000,

Déboute Mademoiselle Z... et la MATMUT de la demande d'indemnisation de leur préjudice matériel,

Avant dire droit sur la réparation du préjudice corporel de Monsieur X..., ordonne une expertise médicale

Commet pour y procéder le Docteur Philippe B...

Service de rééducation neurologique

Pavillon Netter

CHU Raymond Poincaré

92380 GARCHES

qui aura pour mission de :

1) Prendre connaissance des commentaires annexés à la présente mission ;

2) Se faire communiquer par les parties ou leurs conseils :

. les renseignements d'identité de la victime

. tous les éléments relatifs aux circonstances tant factuelles que psychologiques et affectives de l'accident,

. tous les documents médicaux relatifs à l'accident, depuis les constatations des secours d'urgence jusqu'aux derniers bilans pratiqués (y compris bilans neuro-psychologiques)

. tous les éléments relatifs au mode de vie du blessé, antérieur à l'accident :

* degré d'autonomie fonctionnelle et intellectuelle par rapports aux actes élémentaires et élaborés de la vie quotidienne,

* conditions d'exercice des activités professionnelles,

* niveau d'études pour un étudiant,

* statut exact et / ou formation s'il s'agit d'un demandeur d'emploi et carrrière professionnelle antérieure à l'acquisition de ce statut,

* activités familiales et sociales s'il s'agit d'une personne restant au foyer sans activité professionnelle rémunérée,

. tous les éléments relatifs au mode de vie du blessé contemporain de l'expertise (degré d'autonomie, statut professionnel..., lieu habituel de vie...).

. tous les éléments relatifs au degré de développement de l'enfant ou de l'adolescent, antérieur à l'accident :

* degré d'autonomie fonctionnelle et intellectuelle par rapports aux actes élémentaires et élaborés de la vie quotidienne, en rapport avec l'âge.

* systématiquement les bulletins scolaires pré-traumatiques et toutes précisions sur les activités extra scolaires.

. ces mêmes éléments contemporains de l'expertise : dans l'aide au patient bien spécifier le soutien scolaire mis en place (soutien individualisé en dehors et à l'école, soutien en groupe) et le comportement face au travail scolaire. Bien préciser le cursus (classes redoublées, type de classe, type d'établissement).

. toutes précisions sur l'activité professionnelle et sociale des parents et de la fratrie (niveau de formation par exemple).

3) Après recueil de l'avis des parties, déduire de ces éléments d'information, le lieu ou les lieux, de l'expertise et prendre toutes les dispositions pour sa réalisation en présence d'un membre de l'entourage ou à défaut du représentant légal.

4) Recueillir de façon précise, au besoin séparément, les déclarations de la victime et du membre de son entourage ;

. sur le mode de vie antérieure à l'accident,

. sur la description des circonstances de l'accident,

. sur les doléances actuelles en interrogeant sur les conditions d'apparition des douleurs et de la gêne fonctionnelle, sur leur importance et sur leurs conséquences sur les actes élémentaires et élaborés de la vie quotidienne ;

5) Après discussion contradictoire en cas de divergence entre les déclarations ainsi recueillies et les documents produits,

. indiquer précisément le mode de vie du blessé antérieur à l'accident retenu pour déterminer l'incidence séquellaire :

* degré d'autonomie, d'insertion sociale et / ou professionnelle pour un adulte;

* degré d'autonomie en rapport avec l'âge, niveau d'apprentissage scolaire, soutien pédagogique ... pour un enfant ou un adolescent ;

. restituer le cas échéant, l'accident dans son contexte psycho-affectif, puis,

. avec retranscription intégrale du certificat médical initial, et totale ou partielle du ou des autres éléments médicaux permettant de connaître les principales étapes de l'évolution, décrire de façon la plus précise que possible les lésions initiales, les modalités du ou des traitements, les durées d'hospitalisation (périodes, nature, nom de l'établissement, service concerné), les divers retours à domicile (dates et modalités), la nature et la durée des autres soins et traitements prescrits imputables à l'accident,

. décrire précisément le déroulement et les modalités des 24 heures quotidiennes de la vie de la victime, au moment de l'expertise, et ce, sur une semaine, en cas d'alternance de vie entre structure spécialisée et domicile, en précisant, lorsqu'il s'agit d'un enfant ou d'un adolescent, la répercussion sur la vie des parents et des frères et soeurs, voir l'aide et la surveillance que doit apporter la famille et qu'elle ne devrait pas normalement apporter compte tenu de l'âge de l'enfant.

6) Procéder à un examen clinique détaillé permettant :

. de décrire les déficits neuro-moteurs, sensoriels, orthopédiques et leur répercussion sur les actes et gestes de la vie quotidienne,

. d'analyser en détail les troubles des fonctions intellectuelles, affectives et du comportement, et leur incidence

* sur les facultés de gestion de la vie et d'insertion ou de réinsertion socio-économique s'agissant d'un adulte

* sur les facultés d'insertion sociale et d'apprentissages scolaires s'agissant d'un enfant ou d'un adolescent.

L'évaluation neuro-psychologique est indispensable :

* Un examen neuro-psychologique récent appréciant les fonctions intellectuelles et du comportement doit être réalisé.

* Pour un enfant ou un adolescent, cette évaluation doit comporter plusieurs bilans (appréciation du retentissement immédiat et du retentissement sur la dynamique d'apprentissage).

Il convient de :

- Compléter ces évaluations par les données des bulletins scolaires actuels. Dans l'appréciation des bulletins, différencier ce qui revient au comportement, des performances scolaires proprement dites ; Ne pas se contenter du niveau de classe qui n'a parfois aucune valeur.

- Rapporter le niveau de l'enfant à celui de sa classe, et le niveau de sa classe aux normes.

- Compléter si possible par un bilan éducatif.

7) Après avoir décrit un éventuel état antérieur physique ou psychique, pouvant avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles, rechercher si cet état antérieur était révélé et traité avant l'accident (préciser les périodes, la nature et l'importance des déficits et des traitements antérieurs). Pour déterminer cet état antérieur chez l'enfant, il convient de :

* différencier les difficultés d'apprentissage et de comportement.

* décrire comment ces troubles antérieurs ont été pris en charge : type de rééducation, type de soutien scolaire, autre type de soutien, type de scolarité, en précisant bien la chronologie.

Analyser, dans une discussion précise et synthétique, l'imputabilité aux lésions consécutives à l'accident des séquelles invoquées en se prononçant sur les lésions initiales, leur évolution, l'état séquellaire et la relation directe et certaine de ces séquelles aux lésions causées par l'accident en précisant

- si l'éventuel état antérieur ci-dessus défini aurait évolué de façon identique en l'absence d'accident,

- si l'accident a eu un effet déclenchant d'une décompensation

- ou s'il a entraîné une aggravation de l'évolution normalement prévisible en l'absence de ce traumatisme. Dans ce cas, donner tous éléments permettant de dégager une proportion d'aggravation et préciser si l'évaluation médico-légale des séquelles est faite avant ou après application de cette proportion.

8) Il est nécessaire de connaître, avant de consolider un enfant ou un adolescent, la dynamique des apprentissages scolaires ainsi que la qualité d'insertion sociale de l'enfant puis de l'adolescent.

Dans le cas où la consolidation ne serait pas acquise, indiquer :

. pour un adulte, quels sont les projets thérapeutique et de vie envisagés ou mis en place et donner toutes indications de nature à déterminer les besoins nécessaires à la réalisation de ceux-ci (aménagement de matériels, aides humaines et / ou matérielle ...)

. pour une enfant ou un adolescent, quels sont les projets thérapeutique, de scolarité et de vie envisagés ou mis en place et donner toutes indications de nature à déterminer les besoins nécessaires à la réalisation de ceux-ci (aménagement de matériels, aides humaines et / ou matérielle, soutiens scolaires, rééducations telles que ergothérapie et psychomotricité, ...)

. et en tout état de cause, indiquer les fourchettes d'évaluation prévisible des différents postes de préjudice cités au paragraphe suivant.

9) Pour un enfant ou un adolescent, lorsque la consolidation semble acquise, l'évaluation des séquelles doit préalablement tenir compte des données suivantes :

La description des déficiences et du handicap doit être rapportée à ce qui est attendu pour l'âge. Bien préciser l'incidence sur la vie familiale, sur la scolarité (type de scolarité, type d'aide nécessaire), décrire les activités extra scolaires et l'insertion sociale de l'enfant. La scolarité et les activités extra scolaires sont à comparer avec celles des frères et soeurs et éventuellement avec celles pré-traumatiques. Indiquer les conséquences financières pour les parents (soutien scolaire, école privée, transport scolaire, tierce personne, psychothérapie, ergothérapie, psychomotricité, activités de loisir, vacances).

Analyser les besoins exprimés par la famille compte tenu du défaut d'autonomie pour l'âge. Analyser la qualité de vie du blessé et de sa famille (parents, frères et soeurs) ;

Donner une idée du retentissement ultérieur sur la vie professionnelle et sur les possibilités d'autonomie sociale sur les possibilités de fonder une famille.

Ces données doivent être intégrées et discutées lors de l'évaluation ci-dessous prévue au § suivant.

10) Evaluer les séquelles aux fins de :

. fixer la durée de l'I.T.T. et de l'I.T.P., périodes pendant lesquelles pour des raisons médicales en relation directe, certaine et exclusive avec l'accident, la victime a dû interrompre totalement ou partiellement ses activités habituelles,

. fixer la date de consolidation en établissant que les différents bilans et examens pratiqués prouvent la stagnation de la récupération des séquelles neurologiques et neuro-psychologiques,

. fixer le taux du déficit fonctionnel imputable à l'accident résultant de l'atteinte permanente d'une ou plusieurs fonctions persistant au moment de la consolidation.

Préciser, en outre le taux de déficit fonctionnel actuel résultant à la fois de l'accident et d'un éventuel état antérieur ;

. en cas de vie à domicile, se prononcer sur la nécessité pour le blessé d'être assisté par une tierce personne (cette évaluation ne devant pas être réduite en cas d'assistance familiale), nécessaire pour pallier l'impossibilité ou la difficulté d'effectuer les actes élémentaires mais aussi les actes élaborés de la vie quotidienne, et les conséquences des séquelles neuro-psychologiques quand elles sont à l'origine d'un déficit majeur d'initiative et / ou de troubles du comportement.

Dans l'affirmative, préciser si cette tierce personne doit, ou non, être spécialisée, ses attributions exactes ainsi que les durées respectives d'intervention de l'assistant spécialisé et de l'assistant non spécialisé. Donner à cet égard toutes précisions utiles.

Se prononcer, le cas échéant, sur les modalités des aides techniques.

. se prononcer sur l'aménagement éventuel du logement ;

. après s'être entouré, au besoin, d'avis spécialisés, dire :

* si la victime est ou sera capable de poursuivre, dans les mêmes conditions, son activité professionnelle antérieure à l'accident

* dans la négative, ou à défaut d'activité professionnelle antérieure à l'accident, si elle est ou sera capable d'exercer une activité professionnelle. Dans ce cas, en préciser les conditions d'exercice et les éventuelles restrictions ou contre-indications.

. dire si les frais médicaux, pharmaceutiques, para-médicaux, d'hospitalisation, d'appareillage et de transports postérieurs à la consolidation directement imputables à l'accident sont actuellement prévisibles et certains. Dans l'affirmative préciser lesquels et pour l'appareillage, le véhicule automobile et son aménagement, préciser la fréquence de leur renouvellement et leur surcoût.

. décrire les souffrances physiques et psychiques endurées du fait des blessures subies et les évaluer sur l'échelle habituelle de 7 degrés.

. décrire la nature et l'importance du dommages esthétique et l'évaluer sur l'échelle habituelle de 7 degrés.

. indiquer s'il existe ou existera un préjudice sexuel, de procréation, d'établissement.

. décrire le préjudice d'agrément, défini comme la perte de la qualité de vie de la victime.

11) Indiquer si l'état de la victime nécessite une mesure de protection judiciaire et notamment si elle est apte à gérer seule les fonds provenant de l'indemnisation.

12) Etablir un récapitulatif de l'évaluation de l'ensemble des postes énumérés dans la mission.

L'expert établira un pré-rapport et répondra, dans le rapport définitif, aux éventuelles observations écrites des parties.

L'expert indiquera, dans les trois mois à compter de sa saisine, le montant de sa rémunération définitive prévisible afin que soit éventuellement ordonnée une provision complémentaire dans les conditions de l'article 280 du nouveau code de procédure civile ; à défaut d'une telle indication, le montant de la consignation initiale constituera la rémunération définitive de l'expert.

COMMENTAIRES DE LA MISSION

Point numéro 2

L'expertise doit se réaliser avec le dossier médical, dossier déjà constitué en grande partie par les examens pratiqués avant consolidation. Si l'expert n'a pas procédé lui-même à ces examens, il doit reconstituer toute l'histoire clinique depuis l'arrivée des secours d'urgence jusqu'à la consolidation.

Elle doit aussi se réaliser avec le maximum d'éléments permettant à l'expert de discuter contradictoirement puis d'indiquer quel était l'état du blessé, antérieur à l'accident.

Les actes élémentaires correspondent aux activités essentielles de la vie quotidienne (se lever, s'habiller, se laver, aller aux toilettes, manger).

Les actes élaborés correspondent notamment à la faculté qu'a la victime de gérer son budget, faire ses courses, se déplacer seul à l'extérieur ...

Cette distinction est d'autant plus importante que le traumatisme crânio-encéphalique obère beaucoup plus souvent les actes élaborés que les actes élémentaires.

L'analyse du handicap comporte aussi d'autres dimensions, notamment l'examen du maintien ou de la perte du rôle familial du blessé, de ses capacités d'intégration sociale et d'insertion professionnelle.

Point numéro 3

Où doit avoir lieu l'expertise ?

Il est habituel que l'expertise se pratique au cabinet de l'expert lorsque les séquelles sont surtout d'ordre neuro-psychologique ; cependant il est recommandé que celle-ci se pratique sur le lieu de vie pour tous les cérébro-lésés présentant des handicaps les rendant dépendants pour des raisons physiques, intellectuelles ou comportementales.

Lorsque le patient séjourne dans un centre d'accueil, il peut être intéressant qu'elle se fasse dans ce centre, afin de recueillir l'avis de l'équipe soignante.

En présence de qui ?

Même si le patient est majeur, il est éminemment souhaitable qu'il soit accompagné par, au moins, un membre de la famille ou de l'entourage, ceux-ci étant en effet à même de relater les troubles intellectuels et du comportement dont le traumatisé crânien n'a pas toujours une juste appréciation.

Tout particulièrement dans ce type de dossier, il n'y a que des avantages à ce que le patient soit assisté par un médecin de son choix.

Point numéro 5

La détermination de l'état du blessé antérieur à l'accident revêt une grande importance, celle-ci doit donc être faite après discussion contradictoire des preuves de cet état, lorsqu'il y a divergence d'appréciations.

Pour la description de la vie quotidienne ou hebdomadaire du blessé, l'expert peut, si besoin est, recueillir tous avis techniques nécessaires, notamment celui d'un ergothérapeute.

Point numéro 6

Il convient de ne jamais perdre de vue que les traumatisés crâniens graves présentent des séquelles portant essentiellement sur les fonctions supérieures. Le médecin expert devra donc en faire l'étude complète et précise sans oublier de réaliser un bilan moteur par un examen neurologique somatique.

Il appartient à l'expert de procéder à la synthèse de tous les éléments recueillis (en particulier : entourage, examens complémentaires, avis spécialisés).

Point numéro 7

S'agissant d'un enfant ou d'un adolescent, si l'existence d'un état antérieur est alléguée, l'imputabilité ne pourra être déterminée qu'à partir d'une description la plus précise possible de l'état antérieur, du type de troubles constatés, de la dynamique de l'évolution. Ceci rend absolument indispensable la répétition des évaluations neuro-psychologiques et si possible éducatives, ainsi qu'un recul suffisant avant la consolidation.

Points numéro 8 et 9

Quand consolider un adulte ?

Fixer une date de consolidation est indispensable, mais n'est pas aisé ; en effet :

- les déficits neurologiques sont généralement fixés au cours de la deuxième année,

- les déficits neuro-psychologiques ne sont généralement pas fixés avant la troisième année,

- il est plus difficile de fixer un terme aux modifications du comportement ce qui ne doit pas empêcher l'expert de déterminer une date de consolidation.

En règle générale, elle n'interviendra pas avant la troisième année après l'accident, à l'exception des états végétatifs persistants et des états pauci-relationnels.

Lorsque les séquelles sont d'ordre essentiellement neuro-psychologique, une consolidation trop précoce peut entraver différents projets thérapeutiques et même ruiner l'espoir de certaines familles en la poursuite d'une amélioration ;

Quand consolider un enfant ou un adolescent ?

L'enfant à un moment donné, possède des acquis et un potentiel. C'est un être en devenir.

Longtemps il a été dit que le pronostic après atteinte cérébrale acquise était bon du fait de la plasticité neuronale. ("principe de Kennard" : plus on est jeune au moment de l'atteinte, moins c'est grave). En fait (données cliniques et expérimentales) plus l'enfant est jeune au moment de l'atteinte, moins bon est le pronostic d'autant plus que l'atteinte initiale est diffuse et importante. Car les acquis au moment de l'accident sont minimes et le traumatisme va altérer les capacités d'apprentissage. L'enfant ne sera pas celui qu'il aurait dû devenir (effet à retardement). Il ne s'agit pas d'un retard mais d'un décalage qui peut aller en s'accentuant au cours du temps.

Apprécier l'incidence du traumatisme sur le développement de l'enfant implique donc que la consolidation soit la plus tardive possible. Ne jamais consolider précocement lorsqu'il s'agit d'un traumatisme crânien grave, a fortiori quand l'enfant était jeune au moment de l'atteinte (ou alors très précocement lorsqu'il s'agit d'un traumatisme extrêmement sévère) ou lorsque existe une localisation frontale.

On ne peut comme pour l'adulte, dans le but d'apprécier les conséquences du traumatisme crânien, comparer l'enfant à ce qu'il était. Il doit être comparé à ce qu'il aurait dû devenir (capacités antérieures, fratrie).

La récupération motrice est souvent rapide et complète, les séquelles sont avant tout cognitives et comportementales (handicap invisible comme chez l'adulte).

Ces séquelles :

- peuvent être sous estimées

- sont les éléments pronostiques majeurs à considérer dans l'appréciation des possibilités d'apprentissage, d'insertion et de réinsertion. La motivation, les capacités d'attention, de compréhension, de jugement, de mémoire, les capacités de synthèse, de flexibilité mentale, de contrôle de soi sont autant d'outils nécessaires à un développement harmonieux de tout enfant.

Point numéro 10

S'agissant d'un enfant ou d'un adolescent, il convient d'apporter les précisions suivantes:

Tierce personne : Il est nécessaire d'apprécier la tierce personne avant même la consolidation en fonction de l'autonomie que l'enfant n'a pas, compte tenu de son âge.

Il est nécessaire de distinguer le rôle qu'auraient eu les parents sans l'accident, en fonction de l'âge de l'enfant, de celui qui relève de la tierce personne. L'enfant a, en dehors du cas d'un état végétatif ou d'un état pauci-relationnel, une espérance de vie normale ; Il y a donc nécessité d'anticiper sur les besoins futurs en tierce personne.

Considérer la scolarité comme faisant partie de la prise en charge thérapeutique.

Faciliter le soutien scolaire, la scolarité à petit effectif dans le but de favoriser l'insertion/ réinsertion de l'enfant.

Considérer les prises en charge autres non prises en charge par la Sécurité Sociale :

Rééducation par ergothérapie, psychomotricité, psychothérapie, ordinateur portable, poussette adaptée, siège-auto ...

Il y a lieu d'évaluer l'ensemble des besoins objectifs en aide humaine, même si elle est assurée par les proches.

Pour l'analyse des capacités professionnelles, une évaluation dans une structure spécialisée peut être nécessaire telle qu'une unité d'évaluation de réentrainement et d'orientation sociale et professionnelle pour cérébro-lésés (UEROS), une association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) un centre de préorientation ...

L'analyse des besoins en matériels divers, de leur renouvellement et de leur surcoût, peut relever de l'avis d'un ergothérapeute.

Il est rappelé que les souffrances endurées sont celles subies jusqu'à la consolidation.

Pour le préjudice d'agrément, perte de qualité de vie, il s'agit d'apprécier tant les impossibilités, les limitations que les perturbations.

Le préjudice d'établissement s'entend de la difficulté ou de l'impossibilité de former un couple, de fonder une famille et/ou de les assumer.

Dit que l'expert prendra en considération les observations des parties ou de leurs conseils, dans les conditions de l'article 276 du Nouveau Code de Procédure Civil,

Dit que M X... devra consigner au Régisseur d'avances et de recettes de la Cour d'Appel de PARIS - 34 quai des Orfèvres - 75055 PARIS CEDEX 01 - avant le 1er février 2007, la somme de 1.000€ à valoir sur les honoraires,

Dit que faute d'une telle consignation dans ledit délai, la mission de l'expert deviendra caduque,

Dit que dans les deux mois, à compter de sa saisine, l'expert indiquera le montant de sa rémunération définitive prévisible afin que soit éventuellement ordonnée une provision complémentaire dans les conditions de l'article 280 du Nouveau Code de Procédure Civile et qu'à défaut d'une telle indication le montant de la consignation initiale constituera la rémunération définitive de l'expert,

Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du Nouveau Code de Procédure Civile, et qu'il déposera son rapport au secrétariat de la Mise en Etat dans les quatre mois du jour où il aura été saisi de sa mission,

Dit que pour vérification des diligences l'affaire sera appelée à l'audience de procédure du mardi 5 juin 2007 à 13 heures,

Condamne in solidum Mademoiselle Sandrine Z... et la MATMUT à payer à Monsieur Karim X... une provision de 30.000 € à valoir sur la réparation de son préjudice corporel outre une indemnité de procédure de 2.500 €,

Rejette les plus amples demandes,

Dit qu'une copie du présent arrêt sera remise au juge des tutelles du Tribunal d'Instance d'Aulnay-Sous-Bois,

Condamne in solidum les mêmes à supporter les dépens de 1ère instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0242
Numéro d'arrêt : 257
Date de la décision : 08/01/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bobigny, 07 avril 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-01-08;257 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award