Grosses délivrées
REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES DECISION DU 8 NOVEMBRE 2006No du répertoire général : 04/21199
Décision contradictoire en premier ressort
Nous, Martine PROVOST-LOPIN, conseillère à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assistée de Gilles DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante : Statuant sur la requête déposée au greffe le 10 novembre 2004 par Maître GAY, avocat substituant Maître BAULIEU, avocat de Monsieur Seyed Massoud X..., ... ;Vu les pièces jointes à cette requête ;Vu les conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l'audience fixée au 20 septembre 2006 à 9 heures 30 ;Vu la présence de Monsieur Seyed Massoud X... ;Ou' Monsieur Seyed Massoud X..., Maître Frédérique BAULIEU, avocat plaidant pour la SCP Henri LECLERC et Associés, avocat de Monsieur Seyed Massoud X..., Maître Gauthier ROBERT, plaidant pour la SCP NORMAND-SARDA ET ASSOCIES, avocats associés, représentant Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, ainsi que Madame Lydia GRGEN, avocat général, les débats ayant eu lieu en audience publique, le 20 septembre 2006, le requérant ayant eu la parole en dernier ;Vu les articles 149, 149-1,
149-2, 149-3, 149-4, 150 et R. 26 à R. 40-7 du code de procédure pénale ;*Attendu que Monsieur Seyed Massoud X..., mis en examen des chefs d'escroquerie par cartes bancaires volées, recel de vol, a été placé en détention provisoire le 22 février 2002 ; que le 7 juin 2002, il a été placé sous contrôle judiciaire, sa mise en liberté étant subordonnée au versement préalable d'une caution de 50.000 ç ; qu'à la suite du versement du cautionnement, il a été remis en liberté le 21 juin 2002 après avoir subi une détention provisoire de 3 mois et 28 jours ; que renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris, par ordonnance du 10 avril 2003, il a été relaxé par jugement définitif du 14 mai 2004 ; Attendu que Monsieur X... sollicite les indemnités suivantes :- 20.000 ç au titre du préjudice moral,- 601.026 ç au titre de son préjudice professionnel, - 62.729,47 ç au titre des impayés bancaires, - 2.969,84 ç au titre des frais bancaires liés à la caution versée lors de sa mise en liberté,- 7.774 ç au titre des frais d'avocat,- 3.000 ç au titre d'une indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que la demande, déposée dans les délais et formes de la loi, est recevable ; Sur le préjudice matériel :- sur le préjudice professionnel :Attendu que Monsieur Seyed Massoud X... fait valoir que l'analyse des bilans qu'il produit aux débats met en évidence l'effet brutal de son placement en détention provisoire sur le fonctionnement de l'activité commerciale de ses deux sociétés MANOTO et NOVITA etamp; LUSSO ; Concernant la société MANOTO : Attendu que l'indemnité de 194.600 ç demandée repose principalement sur la perte alléguée par le requérant du fonds de commerce de la société MANOTO dont le début d'exploitation remonte au 1er juillet 2001 et dont l'associé unique est Monsieur Mehrdad Y... Z... ; Attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats dans l'instance en cours que cette société spécialisée dans le prêt à porter, ne disposant que
d'une simple domiciliation au 191 boulevard de la Croix Nivert, a eu dès l'origine des difficultés de fonctionnement avant même l'incarcération de son animateur de fait, Monsieur Seyed Massoud X... ; Qu'en effet, au vu des documents comptables, les résultats d'exploitation ont été négatifs au 31 mars 2002 (-1464) ; que le placement en détention du requérant le 22 février 2002 n'a donc eu aucune incidence l'activité commerciale ; que l'exercice suivant (31/3/2002 au 31/3/3003) au cours duquel Monsieur Seyed Massoud X... a été détenu deux mois et 21 jours a été également négatif mais plutôt moins (-721) ; qu'il ressort de ces éléments que la détention d'une durée de trois mois et 28 jours n'a pas été à l'origine de la perte alléguée de la société MANOTO dissoute plus de 21 mois après la remise en liberté de son gérant de fait ; Concernant la société NOVITA etamp; LUSSO :Attendu que l'indemnité de 378.626 ç demandée repose principalement sur le fait que la détention du requérant a eu pour conséquence la vente à perte du fonds de commerce de la société NOVITA etamp; LUSSO dont il est l'associé unique depuis 1999 mais dont le début d'exploitation remonte au 26 septembre 1991 ; qu'il précise avoir acquis ce fonds en 1991 45.000 ç et l'avoir revendu douze ans plus tard le 22 août 2003 22.868 ç ; Attendu qu'il résulte des pièces produites aux débats et notamment des bilans des exercices des années 2000 à 2003 que les résultats d'exploitation se présentent comme suit :- 1er /09/1999 au 31/08/2000 : 107.526 francs ( 16.392,23 ç)- 1er /09/2000 au 31/08/2001 : 76.521 francs ( 11.665,55 ç)- 1er /09/2001 au 31/08/2002 : (15.703,61 francs) 2.394 ç - 1er /09/2002 au 31/08/2003 : (û 83.824,75 francs) û 12.779 ç ;Qu'ainsi, ces résultats ont chuté au cours de l'exercice du 1er /09/2001 au 31/08/2002 au cours duquel le requérant a été détenu et ce durant trois mois et vingt huit jours ; qu'ainsi, il en résulte que la chute de l'activité commerciale est en relation avec la
détention de Monsieur Seyed Massoud X... ; que compte tenu des éléments produits et des prétentions du demandeur, une mesure d'expertise doit être ordonnée d'office pour déterminer la nature et l'étendue du préjudice économique subi de ce chef ; - sur les autres préjudices matériels :Attendu que Monsieur Seyed Massoud X... sollicite une somme de 62.729,47 ç se décomposant comme suit : 21.270,12 ç pour la société NOVITA etamp; LUSSO et 41.549,35ç pour la société MANOTO au titre des débits opérés par le GIE carte bancaire sur les comptes de ces sociétés correspondant à des transactions dont il n'aurait pu justifier en raison de la saisie des facturettes de cartes bleues effectuée au sein des sociétés ; Mais attendu que ces frais ne constituent pas un préjudice directement lié à la détention mais la conséquence des nécessités de l'instruction pénale ; que cette demande doit être rejetée ; - sur le remboursement des frais d'avocat concernant le contentieux de sa détention :Attendu que Monsieur Seyed Massoud X... demande à ce titre une somme de 22.724ç ; qu'il produit à l'appui de ses prétentions trois factures d'un montant respectif de 11.960 ç, 3.588 ç et 7.176 ç ;Mais attendu que ces pièces ne comportent aucun détail des prestations facturées au titre de la détention ; que seul, un relevé de diligences de Maître A... relatif à la première facture comporte certaines diligences relatives à la seule détention provisoire du requérant; qu'au vu de ces éléments, il y a lieu d'allouer à ce titre à Monsieur Seyed Massoud X... une somme de 1.000 ç ; - sur les frais bancaires :Attendu que la réparation demandée ne peut inclure les préjudices liés à la mesure de contrôle judiciaire tels que les frais bancaires liés au payement du cautionnement préalable à la mise en liberté ;Sur le préjudice moral :Attendu que l'indemnisation du préjudice moral de la personne détenue est, notamment, fonction de sa personnalité, de son mode de vie, de son comportement au cours de l'instruction, de
ses antécédents judiciaires et des périodes de détention déjà effectuées en exécution de condamnations antérieures ;Qu'en considération de ces éléments, de la durée de la détention subie, il convient d'allouer à Monsieur Seyed Massoud X..., âgé de 46 ans, marié et père d'une petite fille de 6 ans et d'un fils de 15 ans issu d'une précédente union et n'ayant, au vu de son casier judiciaire, fait l'objet d'aucune incarcération antérieure, la somme de 11.500 ç en réparation de son préjudice moral ;Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile :Attendu qu'il y a lieu d'allouer à ce titre à Monsieur Seyed Massoud X... une somme de 200 ç ; PAR CES MOTIFS ALLOUONS à Monsieur Seyed Massoud X... une indemnité de 11.500 ç en réparation de son préjudice moral ;REJETONS sa demande d'indemnisation au titre de la société MANOTO ; LE DÉBOUTONS de sa demande en payement de la somme de 62.729,47 ç au titre des frais bancaires sur impayés ; REJETONS sa demande formée au titre des frais bancaires liés au payement du cautionnement préalable à sa mise en liberté ; AVANT DIRE DROIT sur le préjudice économique de Monsieur Seyed Massoud X... lié à l'activité de la société NOVITA etamp; LUSSO :ORDONNONS une expertise ;COMMETTONS pour y procéder Monsieur Jean B... expert près la cour de cassation, ... avec pour mission de :- déterminer la nature et l'étendue du préjudice économique de Monsieur Seyed Massoud X... subi dans la cadre de l'exploitation du fonds de commerce de la société NOVITA etamp; LUSSO et le chiffrer ; - dire si ce préjudice peut être constitué par la perte de valeur du fonds de commerce de la société NOVITA etamp; LUSSO, dans l'affirmative, en évaluer le montant ; - faire toutes constatations techniques utiles ; FIXONS au 10 septembre 2007 la date à laquelle l'expert déposera son rapport au greffe de la cour de la cour d'appel ; DISONS que l'expert pourra, en tant que de besoin, entendre toutes les personnes dont l'audition
serait nécessaire à l'accomplissement de sa mission ;NOUS RÉSERVONS le contrôle de l'exécution de la mesure d'expertise ; ALLOUONS à Monsieur Seyed Massoud X... une indemnité de 200 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Ainsi fait, jugé et prononcé par le magistrat délégué soussigné, le 8 novembre 2006, où étaient présents : Madame Martine PROVOST-LOPIN, Conseillère, Madame Lydia GORGEN, Avocat Général et Monsieur Gilles DUPONT, Greffier.LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE