Grosses délivrées
RÉPUBLIQUE FRANOEAISE
aux parties le :
AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
3ème Chambre - Section A
ARRÊT DU 05 SEPTEMBRE 2006
(no , pages)Numéro d'inscription au répertoire général :
05/13361Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mai 2005 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG no 04/4322 APPELANTE Madame Luce Emmanuella X... née le 13 Mai 1959 à PARIS 20ème demeurant ... 93000 BOBIGNY représentée par l SCP NABOUDET - HATET, avoués à la Cour assistée de Me REVUE Irina, avocat au barreau de PARIS, toque :
G353 INTIME Monsieur Alain Y... née le 28 Décembre 1949 à LA BASTIDE GABAUSSE (81)demeurant ... 93000 BOBIGNY représenté par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour assisté de Me Henri LECLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : P 110, COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 Juin 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Bernadette CHAGNY, Président
Monsieur Henri LE DAUPHIN, Conseiller
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Conseillerqui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du nouveau code de procédure civile.Greffier, lors des débats : Madame HOUDIN MINISTÈRE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au ministère public, ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par Madame CHAGNY, président
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par Madame CHAGNY, président et par Madame HOUDIN, greffier présent lors du prononcé.
Mme Luce X... est appelante d'un jugement du 12 mai 2005 du tribunal de grande instance de Bobigny qui a dit qu'il existait une société de fait entre elle-même et M. Y... avec comme patrimoine l'immeuble sis à Bobigny, 19 rue Henri Nozières, en a prononcé la dissolution, a ordonné qu'il soit procédé aux opérations de compte et partage, a préalablement commis un expert afin d'estimer l'immeuble et d'évaluer l'apport personnel des co-partageants et l'a condamnée à payer à M. Y... la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle soutient qu'elle a, le 23 mai 2000, acquis en son seul nom le pavillon sis 19 rue Henri Nozières au prix de 650.000 frs avec un apport personnel de 150.000 frs dont 70.000 frs prêtés par M. Y... et un prêt de 500.000 frs qu'elle a contracté seule et rembourse seule et a en outre acquitté les frais de notaire de
45.995,16 frs. Elle précise qu'elle a vécu avec M. Y... à son domicile personnel voisin, puis, qu'après leur séparation, elle a accepté de lui louer le pavillon moyennant un loyer mensuel de 414,20 euros correspondant à la moitié du crédit. Elle conteste l'existence d'une société de fait, aucune des conditions n'étant réunie. A titre subsidiaire, elle demande que l'expert soit missionné afin de déterminer le montant de l'indemnité d'occupation due par l'intimé et tienne compte des "frais notariés". Elle conteste aussi l'action de in rem verso revendiquée par M. Y..., les sommes qu'il a pu verser ayant une cause précise. Elle demande 5.000 euros en réparation du préjudicie moral que lui fait subir M. Y... et 60.000 euros représentant son manque à gagner. Elle soutient qu'elle n'est pas en possession de meubles appartenant à M. Y... et demande 3.000 euros en remboursement de ses frais de procédure.
M. Y... soutient qu'il a en 2000 décidé avec Mme X... d'acheter le pavillon en commun pour en faire un lieu professionnel commun et un lieu d'accueil de leurs amis et a financé sa part en versant, après avoir vendu des actions, la somme de 16.400 frs en avril 2000, celle de 70.000 frs le 10 mai 2000 et celle de 30.000 frs en espèces; qu'il a après l'achat pris en charge le remboursement du crédit en versant de juin à octobre 2000 une somme de 8.000 frs en espèces ou en chèques puis, de décembre 2000 à décembre 2001 une somme correspondant à l'échéance du prêt soit en espèces soit en chèques; qu'il a en outre acquitté le prix de travaux effectués dans le pavillon pour un montant de plus de 7.500 euros et versé depuis août 2002 la somme de 414,20 euros correspondant à la moitié de l'échéance du prêt. Il estime que l'existence d'une société de fait est ainsi prouvée. Il allègue que Mme X... n'avait aucun intérêt à acquérir seule le pavillon qu'elle n'a jamais habité. A
titre subsidiaire, il s'estime recevable sur le fondement de l'action de in rem verso à solliciter le remboursement de la somme de 70.000 euros et le montant des travaux. Il sollicite aussi la restitution de meubles lui appartenant et estime irrecevables les demandes en dommages et intérêts de Mme X.... Il demande 3.000 euros en remboursement de ses frais de procédure.
SUR CE LA COUR,
Considérant que le pavillon du 19 rue Henri Nozières à Bobigny a été acquis le 23 mai 2000 par Mme X... au prix de 650.000 frs payé comptant à hauteur de 150.000 frs par Mme X... dont 70.000 frs provenaient de M. Y..., ainsi qu'elle le reconnaît, et à hauteur de 500.000 frs à l'aide d'un prêt bancaire remboursable par mensualités de 5.433,63 frs (828,35 euros) consenti à Mme X...; que M. Y... n'apparaît ni dans la promesse de vente ni dans l'acte de vente ni dans l'acte de prêt; que Mme froidevaux a également réglé "les frais de notaire" d'un montant de 45.995,16 euros; que M. Y... n'a pas directement payé à la banque les échéances du prêt ou les charges afférentes à l'immeuble également réglées par Mme X...; que le litige qu'il a eu avec l'administration fiscale ne suffit pas à démontrer qu'il avait intérêt à ne pas apparaître officiellement dans un achat immobilier commun; qu'en raison de sa vie commune avec l'appelante, il apparaît normal qu'il ait participé aux dépenses communes et doit démontrer que les sommes versées à sa compagne l'ont été à titre d'apports pour l'acquisition du pavillon et de participation aux charges;
Or considérant que si la vente d'actions le 9 mai 2000 au prix de 100.000 frs justifie le versement à Mme X... de la somme de 70.000 frs le 10 mai 2000, elle ne permet pas de justifier le versement antérieur de la somme de 16.500 frs par chèque du 4 avril 2000 dont la cause n'est pas prouvée; que M. Y... ne justifie pas du versement en espèces de la somme de 30.000 frs; qu'il n'établit pas plus qu'il aurait versé une somme mensuelle de 8.000 frs entre juin et octobre 2000 ou une somme équivalente à l'échéance du prêt entre décembre 2000 et décembre 2001, les attestations produites étant imprécises et insuffisantes à rapporter la preuve des versements et de leur cause; qu'il ne conteste pas que les factures de travaux établies à son nom sont relatives à l'aménagement du sous-sol du pavillon en local pour l'hébergement des oiseaux lui appartenant en propre et non dans l'intérêt commun du couple; qu'il est constant et reconnu que M. Y... a réglé par chèques à Mme X..., après leur séparation en août 2002 la somme mensuelle de 414,20 euros correspondant à la moitié de l'échéance du prêt; qu'il résulte de ces divers éléments que M. Y... prouve avoir versé à Mme X... lors de l'acquisition du pavillon payé 650.000 frs la somme de 70.000 frs et celle mensuelle de 414,20 euros à compter d'août 2002, époque à laquelle il a, avec ses oiseaux, occupé seul le pavillon;
Considérant que les nombreuses attestations produites par M. Y... ne suffisent pas à caractériser l'intention commune des parties d'acheter en commun le pavillon et d'en partager les frais; que la participation prouvée ou reconnue de l'intimé, qui ne se distingue pas d'une participation aux charges de la vie commune et ne correspond qu'à une faible partie du montant total du prix d'achat, ne suffit pas à caractériser l'existence d'une société de fait; que
la participation au remboursement du prêt, postérieure à la séparation du couple, établit seulement que M. Y..., qui occupait seul le pavillon, reconnaissait devoir une indemnité d'occupation à sa propriétaire; que M. Y... ne caractérise pas la volonté commune des deux parties, contraire aux actes qui établissent que Mme X... a seule acheté le pavillon et en a assumé toutes les charges, de participer sur un pied d'égalité à l'achat du pavillon et à son exploitation commune avec l'intention d'en partager les bénéfices et d'en supporter les charges;
Considérant que Mme X..., qui reconnaît avoir reçu de M. Y... la somme de 70.000 frs, doit être condamnée à la rembourser; que M. Y... n'établit pas que les travaux, qu'il a fait effectuer dans son intérêt et à ses risques pour l'hébergements de ses oiseaux utiles à l'exercice de sa profession de magicien qui n'est pas celle de Mme X..., ont donné une plus value au pavillon;
Considérant que M. Y... n'établit pas la présence au domicile de Mme X... des meubles dont il revendique la restitution;
Considérant que les demandes en dommages et intérêts présentées par Mme X..., qui sont recevables pour présenter un lien de connexité suffisant avec la demande principale, ne sont pas justifiées, l'exercice de l'action tendant à faire reconnaître l'existence d'une société de fait qui n'est pas abusive n'étant pas susceptible de provoquer un préjudice moral et ne caractérisant pas un harcèlement; qu'elle ne saurait, dans le cadre du présent litige, obtenir une augmentation rétroactive ou pour le futur du loyer verbal
qu'elle a concédé à son ancien compagnon et qu'elle peut modifier selon les règles qui sont applicables à ce contrat;
Considérant qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;PAR CES MOTIFS,
Réforme le jugement déféré,
Déboute M. Y... de sa demande tendant à constater l'existence d'une société de fait,
Condamne Mme X... à lui rembourser la somme de 70.000 frs, soit 10.671,43 euros,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne M. Y... aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés, pour ceux d'appel, conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT