Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
2ème Chambre - Section A
ARRET DU 14 JUIN 2006
(no , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 05/09808
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mars 2005 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG no 04/00478
APPELANT et INTIME - DEFENDEUR à la TIERCE OPPOSITION
Monsieur Philippe X...
...
94130 NOGENT SUR MARNE
représenté par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour
INTIMES et APPELANTS - DEFENDEURS A LA TIERCE OPPOSITION
Monsieur Laurent Y...
...
94350 VILLIERS SUR MARNE
Madame Isabelle Y...
...
94350 VILLIERS SUR MARNE
représentée par la SCP BASKAL CHALUT-NATAL, avoués à la Cour
assistée de Me Olivier LIGETI, avocat au barreau de Paris, toque : K 113
INTIMEE - DEFENDERESSE à la TIERCE OPPOSITION
Société OBJEKTIVA
prise en la personne de ses représentants légaux
Bergstrasse 56 D
44791 BOCHUM (Allemagne)
représentée par la SCP CALARN-DELAUNAY, avoués à la Cour
assistée de Me Franck A..., avocat au barreau de Paris, toque : R 122
DEMANDEUR à la TIERCE OPPOSITION
Monsieur le COMPTABLE de la DIRECTION GENERALE des IMPOTS de MONTREUIL OUEST (anciennement dénommé M. le Receveur Principal des Impôts)
agissant sous l'autorité de M. le Directeur des Services Fiscaux de la Seine Saint Denis et du Directeur Général des Impôts
...
93016 BOBIGNY CEDEX
représenté par la SCP NABOUDET - HATET, avoués à la Cour
assisté de Me Alexandre E... plaidant pour la SCP CHAIGNE, avocat au barreau de Paris , toque : P 278
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue, rapport a été fait conformément à l'article 31 du décret du 28 décembre 2005 modifiant l'article 785 du nouveau code de procédure civile, le 10 mai 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, Président
Madame Charlotte DINTILHAC, Conseiller
Madame Marie-Thérèse TIMSIT, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Marie-France MEGNIEN
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par Madame Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, Président
- signé par Mme Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, président et par Mme Gisèle COCHET, greffier présent lors du prononcé.
La cour est saisie de l'appel interjeté par M. X... et les époux Y... du jugement du Tribunal de Grande Instance de Créteil du 29 mars 2005 qui a révoqué rétroactivement la vente du pavillon sis à Villiers sur Marne par M. X... aux époux Y... en date du 14 novembre 2002 passée en fraude des droits de la société Objektiva, ordonné la réintégration du bien dans le patrimoine de M. X... et ordonné la publication du jugement.
Par dernières conclusions auxquelles il est référé du 26 août 2005 M. X... oppose à la société Objektiva, le défaut d'engagement de la procédure de surenchère lors de la notification du 3 juin 2003 de la vente en sa qualité de créancier hypothécaire de troisième rang de nature à l'empêcher à remettre en cause le prix de vente et d'invoquer une fraude paulienne ouverte aux seuls créanciers chirographaires .
Il demande donc d'infirmer le jugement et demande une somme de 5000€ pour frais irrépétibles.
Par dernières conclusions auxquelles il est référé du 25 avril 2006 les époux Y... exposent que le bien avait été squatté et détérioré avant leur entrée dans les lieux le 17 juin 2000 en qualité de locataires avec franchise de trois mois de loyers et que le prix de 140 253.10 € non dérisoire a été fixé dès la promesse du 26 juillet 2001 en fonction de l'état du pavillon loué et n'a pas été contesté par les créanciers hypothécaires dont le Trésor auprès de qui étaient acquittés les loyers en vertu d'un avis à tiers détenteur;
Ils dénient toute mauvaise foi et fraude n'ayant eu de rapport qu'avec M. G... de l'agence Sud Est Immobilier pour le bail et la vente, M. Lemaire résidant aux Etats-Unis;
Ils demandent donc d'infirmer le jugement et après divers dires de débouter la société Objektiva et de la condamner à payer la somme de 3 500 € pour frais irrépétibles.
Par dernières conclusions auxquelles il est référé du 14 mars 2006, M. le Comptable de la Direction Générale des Impôts de Montreuil Ouest tiers opposant au jugement et intervenant en appel en qualité de créancier hypothécaire de premier rang pour la somme de 127 228.31 € soutient qu'il a intérêt à agir pour sauvegarder ses droits dans la distribution du prix reporté sur le prix consigné et alors que l'action paulienne ne peut préjudicier à ses droits ;
Il demande donc de constater la recevabilité de sa tierce-opposition, de le dire en tout état de cause titulaire d'une inscription de premier range et en droit de percevoir les fonds à hauteur de sa créance au profit de Me I..., notaire séquestre des fonds et de lui allouer la somme de 3 588 € à titre de frais irrépétibles.
Par dernières conclusions auxquelles il est référé du 21 avril 2006 la société Objektiva évoque la conduite de M. X... qui a fait état de faux document sur la mainlevée de l'hypothèque du Trésor inscrit en premier rang, laissé impayé le prêt de 71 580.86 € consenti par acte notarié du 5 juin 1997 et passé outre à son opposition aux précédentes tentatives de vente et au commandement de payer du 12 mars 2001 et fait valoir qu'elle n'a pas effectué la procédure de surenchère trop onéreuse, ce qui n'exclut pas l'exercice de l'action paulienne ;
Elle soutient que le prix s'appliquant à l'immeuble pour 133 728.28 € est vilau regard des évaluations du bien de mars 1994 à 2 200 000F et en novembre 1996 à 1 900 000F et de l'évolution favorable des prix, des mandats de vente pour 1 350 000 F pour des pavillons voisins ;
Elle invoque la mauvaise foi des époux Y..., déniant la preuve de la détérioration du bien et de la consistance de leurs travaux sans factures et du mauvais entretien locatif, la résidence aux Etats-Unis de M. X... domicilié dans les lieux ou chez ses parents dans les documents produits et soutient que la vente a été passée à vil prix avec l'aide de M. G... dont le mandat de vente était expiré et sans mandat locatif régulier pour signer tous les documents et le concours d'un avocat pour la notification du prix qui est intervenu pour M. X... dans cette procédure et conteste la régularité des quittances de loyers et fait valoir qu'ils ont prétendu être propriétaires du bien dans une demande de prêt d'août 2001;
Elle conteste la recevabilité de la tierce-opposition du service des impôts qui conserve ses droits sur le prix qui n'est pas restitué à l'acquéreur ;
Elle demande donc de confirmer le jugement, de dire irrecevable la tierce-opposition du Comptable des impôts et de condamner chacune des autres parties la somme de 10 000 € pour frais irrépétibles.
SUR CE LA COUR
Considérant que le pavillon du ... à Villiers sur Marne a été évalué le 29 novembre 1996 par la Sarl Cei le à la requête de Philippe X... habitant dans les lieux, construit en 1982 sur une parcelle de 500 m² constitué d'un sous-sol, rez de chaussée, étage et grenier d'une surface pondérée de 188.75 m² à la somme de 1 900 000 F libre d'occupation ;
Considérant que la Deutcsche GH AG a consenti par acte notarié du 5 juin 1997à M. X... un prêt de 471 151 F visant une inscription hypothécaire de premier rang qui a été résilié dès le 27 mars 1998 et dans les droits de laquelle la société Objektiva a été subrogée par quittance notariée du 12 octobre 1998 ;
Considérant que deux notaires ont contacté la Banque, en octobre 1998 en vue d'une vente amiable du bien à des consorts J... puis en mai 1999 au prix de 1 210 000 F qui la refusait compte tenu de sa créance et des droits du Trésor;
Considérant que le commandement de saisie-vente du 2 mars 2001 de la Banque était délivré à dernier domicile connu comme indiqué à l'interphone comme sans adresse par Mme Y... et résidant à l'étranger selon les services de la Mairie ;
Considérant que Philippe X... se domiciliant chez ses parents Etienne X... à Nogent sur Marne a vendu aux époux Y..., locataires, le pavillon par acte notarié du 14 novembre 2002 faisant suite à un acte sous seing privé du 26 juillet 2001, au prix de 133 728.28 € pour l'immeuble et 6 524.82 € pour les meubles, séquestré entre les mains du notaire en vue de la procédure de purge des hypothèques et de la répartition amiable du prix dans les deux mois ou l'ouverture d'une procédure de distribution judiciaire ;
Considérant qu'il est produit deux mandats de vente à l'agence Sud Est Immobilier de juin 2001 de deux autres pavillons pour le prix de 1 350 000 F ; Que M. X... a donné un mandat de vente à cette agence le 20 juin 2001 pour une durée de trois mois renouvelable au prix de 870 000 F net vendeur ;
Considérant que les époux Y... ont fait notifier la vente aux fins de purge des hypothéques à la Banque le 3 juin 2003 faisant état de l'inscription du Trésor en premier rang, de la société Marseillaise de Crédit en second rang pour 12 774.44 € et la Banque en troisième rang, par les soins de Me K... avocat qui a également assisté M. X... dans les débuts de la procédure ;
Considérant que M. G... a attesté le 1er mars 2006 que mandaté pour la vente du bien, il a fixé le prix de vente en fonction de l'occupation et l'état du bien qui avait été vandalisé avec feu de camp au sol et porte du garage enfoncée et que les époux Y... n'ont jamais rencontré M. X..., résidant aux Etats Unis depuis 1998 avant la vente, ayant été lui-même l'intermédiaire pour la location et la négociation de vente ;
Qu'il est produit une lettre de M. X... à l'Agence du 4 février 2000 lui donnant sa nouvelle adresse à Los Angeles et un mandat de libre gestion par lettre du 21 février 2000 ne portant pas de numéro de registre de mandat ;
Que le contrat de bail au nom de M. X... avec adresse dans les lieux en date du 17 juin 2000 au loyer de 7 000 F par mois a été rédigé et signé de la main de M. G... sans indication d'intermédiaire avec dispense des loyers de juillet à septembre pour travaux de papiers peints, moquettes et peintures, de même que l'état des lieux du 22 juin 2000 avec serrure portail et porte de garage à la charge du propriétaire, les murs et sols des pièces de séjour et chambres étant en mauvais état à la charge des locataires ;
Que les quittances ont été rédigées par M. G... pour les mois d'octobre à janvier 2001 et que les loyers ont été réglés de mars 2001 à octobre 2002 entre les mains du Trésor, selon avis à tiers détenteur ;
Considérant que selon procès-verbal de constat du 19 octobre 2004, les murs et escaliers extérieurs sont en mauvais état ainsi que certaines peintures et plafonds intérieurs, salle de bains et cabinet douche ;
Considérant que l'action paulienne n'est pas réservée aux seuls créanciers chirographaires et que le créancier hypothécaire n'ayant pas exercé son droit de surenchère conserve la faculté de l'exercer ;
Considérant qu'il ressort de l'ensemble des pièces que les époux Y..., n'ont pas été contact avec M. X... tant pour la location du bien que pour la négociation de la vente menée par l'agence mandataire qui a rempli sa mission dans les délais par la signature de l'acte sous seing privé de vente du 26 juillet 2001 avant l'acte notarié de vente du 14 novembre 2002 ;
Considérant que le défaut de mandat de gestion locative enregistré et d'indication du rôle d'intermédiaire de M. G... dans les titres de location n'incombent pas aux locataires tiers au mandat ;
Considérant qu'il est avéré que le pavillon a été loué en mauvais état intérieur et dégradé et qu'il l'est également extérieurement selon le constat du 19 octobre 2004 et que les loyers ont été payés, après la franchise de trois mois, d'abord à l'agence qui a donné des quittances sur seulement quatre mois puis au Trésor ;
Considérant que la vente du bien au prix de 133 000 € s'il se situe dans la fourchette basse du marché de l'époque ne constitue pas un vil prix compte tenu du mauvais état général du pavillon et de la décote habituelle pratiquée pour la vente d'un immeuble grevé d'un bail ;
Considérant ainsi qu'il n'est pas avéré de collusion frauduleuse entre le vendeur et les acquéreurs qui ont négocié leur location et leur acquisition avec un intermédiaire professionnel et alors que si les acquéreurs connaissaient l'endettement du vendeur auprès du Trésor et tel que révélé dans l'acte de vente, ils se savaient par ailleurs exposés à la purge des hypothèques propre à sauvegarder les droits des créanciers hypothécaires au cas où le prix leur serait apparu insuffisant ;
Considérant que le Trésor créancier hypothécaire inscrit a intérêt à agir pour la sauvegarde de ses droits hypothécaires de premier rang sur le prix de vente à l'égard d'un jugement statuant sur la propriété du bien hypothéqué ;
Considérant que le bien restant la propriété des époux Y..., il appartient à la partie la plus diligente de mettre en oeuvre une procédure de distribution du prix sur laquelle il ne peut être statué dans cette procédure en l'absence des autres créanciers hypothécaires et qu'il ne peut donc être présentement ordonné le paiement de sa créance privilégiée de premier rang par le notaire séquestre des fonds comme le service des impôts le demande;
Considérant qu'il n'y a pas lieu à frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement ;
Rejette les demandes de la société Objektiva sur le fondement de l'action paulienne;
Renvoie le comptable de la Direction des Impôts de Montreuil à la distribution du prix ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne la société Objektiva aux dépens de première instance et d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du NCPC.
LE GREFFIER LE PRESIDEN