La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949398

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0089, 22 mars 2006, JURITEXT000006949398


Grosses délivrées

REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES DECISION DU 22 MARS 2006 No du répertoire général : 05/2910

Nous, Renaud BLANQUART, Conseiller à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Gilles X..., Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante : Statuant sur la requête déposée le 25 janvier 2005 par Monsieur Julio NARANJO Y... ... ; Vu les pièces jointes à cette requête ; Vu le

s conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ...

Grosses délivrées

REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

REPARATION DES DETENTIONS PROVISOIRES DECISION DU 22 MARS 2006 No du répertoire général : 05/2910

Nous, Renaud BLANQUART, Conseiller à la Cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Gilles X..., Greffier lors des débats et du prononcé, avons rendu la décision suivante : Statuant sur la requête déposée le 25 janvier 2005 par Monsieur Julio NARANJO Y... ... ; Vu les pièces jointes à cette requête ; Vu les conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ; Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ; Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l'audience fixée au 8 mars 2006 ; Vu l'absence de Julio NARANJO Y... ; Ou' Maître Anne-Sophie LE QUELLEC, avocat substituant la SCP CHEMOULI ET ASSOCIES, avocats associés représentant Monsieur Julio NARANJO Y... et Maître Carole PASCAREL, avocat substituant la SCP UETTWILLER GRELON GOUT CANAT ET ASSOCIES, avocats associés représentant Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, ainsi que Monsieur Gilles VACELET, avocat général, les débats ayant eu lieu en audience publique, le 8 mars 2006 ; Vu les articles 149, 150 et R. 26 à R. 40-7 du code de procédure pénale ; *

Attendu que Monsieur NARANJO Y..., vivant en ESPAGNE, a fait l'objet d'un mandat d'arrêt délivré en 1996 des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et participation à une association de malfaiteurs ; que, le 12 juin 1997, il a été condamné, par défaut, à la peine de 4 ans d'emprisonnement à raison de ces faits ; qu'interpellé en ESPAGNE, il a été placé en détention provisoire le 23 mai 2004 par les autorités espagnoles, a été transféré en FRANCE où il a fait opposition au jugement précité et a été maintenu en détention jusqu'à la date de sa nouvelle comparution ; qu'il a fait l'objet d'une décision de relaxe par jugement du 31 août 2004, après, donc, une incarcération de 3 mois et 8 jours, cette décision étant définitive ; Que, par requête déposée le 25 janvier 2005, aux fins de réparation à raison d'une détention, suivie de conclusions du 24 octobre 2005, Monsieur NARANJO Y... fait valoir : - s'agissant de son préjudice économique : qu'il a subi une perte de revenus de 4.550 ç, alors qu'il percevait, avant d'être incarcéré, une rémunération mensuelle de 1.400 ç ; qu'il n'a retrouvé de travail que courant décembre 2004, cette inactivité étant exceptionnelle pour lui et ne s'expliquant que par les effets de sa détention ; qu'il sollicite, donc, également, une indemnité de 2.800 ç en réparation d'une perte de chance de retrouver un emploi pendant 2 mois ; qu'il a travaillé de manière habituelle et suivie avant son placement en détention ; - s'agissant des honoraires d'avocat ; qu'il sollicite une indemnité de 8.000 ç correspondant aux honoraires qu'il a du régler et dont il justifie, ces frais ayant bien été engagés alors qu'il était en détention ; - s'agissant de son préjudice moral : qu'il n'avait jamais été incarcéré, a été détenu en France alors qu'il ne parle pas le français, a été mis à distance de sa famille vivant en Espagne, dont certains membres n'ont pu le voir que très difficilement et trois fois ; qu'il a été très affecté par la séparation d'avec ses

deux enfants, alors âgés de 4 et 12 ans ; que l'aîné à rencontré des difficultés scolaires nouvelles à la suite de son incarcération ; que les faits litigieux remontent à près de 10 ans, alors qu'il a toujours mené une vie laborieuse et paisible et n'a jamais déménagé, ayant été de nouveau interpellé à son retour en ESPAGNE, malgré la relaxe prononcée en FRANCE ; qu'il ne demande réparation que d'un préjudice personnel et que la découverte de son implication dans une affaire de trafic de stupéfiants de grande ampleur, 10 ans après les faits, ne peut qu'avoir accru ce préjudice moral ; qu'il sollicite, donc, à ce titre, la somme de 10.000 ç ; Que le requérant "émet des réserves" sur la recevabilité des conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor et estime, en tout état de cause, regrettable le délai pris pour les déposer; Qu'il sollicite également la somme de 1.500 ç sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, subsidiairement, le prononcé d'une mesure d'expertise et, en tout état de cause, le débouté des demandes de l'Agent Judiciaire du Trésor ; Dans ses conclusions en réplique du 7 novembre 2005, Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, estimant la requête recevable, fait valoir : - s'agissant du préjudice économique invoqué : que le requérant ne justifie pas d'un emploi stable, n'a été embauché que peu de temps avant d'être incarcéré et qu'il est impossible de savoir s'il aurait continué à travailler dans l'entreprise considérée ; qu'il conclut, donc, au rejet de la demande en réparation d'une perte de revenus ; que le requérant ne peut invoquer une perte de chance de retrouver un emploi, mais seulement une perte de temps dans sa recherche d'emploi et que, ne justifiant pas d'une activité professionnelle habituelle et suivie, il doit, également être débouté de cette demande ; - s'agissant des honoraires d'avocat réclamés :

que seuls les honoraires ayant trait à la mise en liberté peuvent donner lieu à indemnisation et qu'en l'espèce, il ne devrait y avoir

indemnisation, de ce chef, au delà de la moitié de la somme réclamée ; - s'agissant du préjudice moral : qu'il y a lieu de prendre en considération les éléments invoqués par le requérant, sauf à ne considérer que son préjudice personnel ; que, dans l'ignorance des recherches dont il faisait l'objet, le requérant ne peut invoquer l'ancienneté des faits qui lui ont été reprochés, alors qu'il a pu vivre normalement jusqu'à son interpellation ; que, par ailleurs, les conditions de cette interpellation ne sont pas à prendre en compte dans la décision à intervenir ; qu'il estime, donc, qu'une somme de 4.000 ç pourrait être allouée, de ce chef, au requérant et qu'à tout le moins sa réclamation devrait être réduite ; qu'enfin, les dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ne sont pas applicables au cas d'espèce ; Que Monsieur le Procureur Général fait valoir, estimant la requête recevable : - s'agissant du préjudice matériel : qu'il doit être fait droit à la demande, eu égard à la spécificité du mode d'exercice de l'emploi, mais dans une mesure à apprécier ; - s'agissant des honoraires d'avocat : que seuls les honoraires en lien avec l'incarcération doivent être pris en compte ; - s'agissant du préjudice moral : qu'il y a lieu de prendre en considération, pour indemniser ce préjudice incontestable, la durée de la détention, le fait que le requérant était âgé de 31 ans, avait deux jeunes enfants, n'avait jamais été condamné et que les conditions de sa détention ont du être plus difficiles que pour d'autres, puisqu'il était dans un plus grand isolement, incarcéré hors de son pays sans parler le français ; SUR QUOI, Sur la recevabilité des conclusions de Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article R31 du Code de procédure pénale, l'Agent Judiciaire du Trésor dépose ses conclusions au greffe de la cour d'appel dans le délai de deux mois à compter de la réception du dossier de la procédure ; Qu'en l'espèce, les

conclusions de Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor ont été déposées au greffe compétent le 28 septembre 2005, soit deux mois et un jour après qu'il ait reçu, le 27 juillet 2005, le dossier de la procédure ; Que si la loi prévoit que le dossier peut être transmis au procureur général sans conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor si ce dernier n'a pas conclu, elle ne prévoit pas que soient déclarées irrecevables ses conclusions tardives ; Qu'il n'y a lieu, en conséquence, de déclarer irrecevables les conclusions de l'Agent Judiciaire du Trésor dans la présente affaire ; Sur la requête Attendu que la présente requête est recevable au regard des dispositions des articles 149 à 149-2 du Code de procédure pénale ; Sur le préjudice économique Attendu que le requérant justifie avoir travaillé, en qualité de maçon, de manière habituelle, sur divers chantiers, du mois de janvier au mois d'avril 2004 ; qu'au moment de son incarcération, il percevait un salaire net mensuel de 1.400 ç ; qu'il y a lieu, en conséquence, de réparer le préjudice économique qu'il a subi pendant 3 mois et 8 jours, par l'allocation d'une indemnité de 4.550 ç ; Que le requérant ne justifie pas de façon suffisante de la perte de chance de retrouver un emploi pendant 2 mois dont il demande réparation ; qu'il y a lieu de rejeter sa demande, de ce chef ; Sur les honoraires d'avocat Attendu que, s'agissant des honoraires d'avocat, seuls peuvent être pris en compte, dans le cadre de la présente instance, ceux effectivement exposés en relation avec la détention ; que les frais engagés par le requérant l'ont été pendant sa période de détention en France ; qu'ils ont été exposés, indistinctement, en relation avec sa détention comme avec l'organisation et la mise en oeuvre de sa défense au fond ; qu'il y a lieu, de ce fait, de faire droit partiellement à sa demande, en lui allouant une indemnité de 6.000 ç ; Sur le préjudice moral Attendu que le requérant était âgé de 32 ans

lorsqu'il a été placé en détention et pour une durée exacte de 101 jours ; qu'il n'avait jamais été incarcéré, a été détenu en France, ne parlant pas le français, a été coupé de sa famille vivant en Espagne, ne pouvant recevoir que très peu de visites, ce qui constitue un préjudice personnel ; qu'il a été séparé de ses deux enfants, alors âgés de 4 et 12 ans ; que l'indemnisation du choc carcéral qu'il a subi ne peut prendre en considération les conditions de son interpellation à son retour en ESPAGNE, ni les celles dans lesquelles il a découvert avoir été mis en cause ; Qu'il y a lieu, en conséquence, de lui allouer une indemnité de 6.000 ç, de ce chef ; Sur la demande fondée sur l'article 475-1 du Code de procédure pénale Attendu que les dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ne sont pas applicables à la présente procédure ; que la demande, de ce chef, est irrecevable ; PAR CES MOTIFS Vu les articles 149 à 150 et R 31 du Code de procédure pénale, Disons la requête recevable, Disons n'y avoir lieu à déclarer irrecevables les conclusions de Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, Allouons à Monsieur NARANJO Y... : - une indemnité de 4.550 ç, en réparation de son préjudice économique, - une indemnité de 6.000 ç, au titre de ses honoraires d'avocat, - une indemnité de 6. 000 ç en réparation de son préjudice moral, Disons irrecevable sa demande fondée sur les dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Ainsi fait, jugé et prononcé par le magistrat délégué soussigné, le 22 mars 2006, où étaient présents :

Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller, Monsieur Gilles VACELET, Avocat Général et Monsieur Gilles X..., Greffier. LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0089
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949398
Date de la décision : 22/03/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2006-03-22;juritext000006949398 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award