La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949994

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0147, 02 mars 2006, JURITEXT000006949994


Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

15ème Chambre - Section B

X... DU 02 MARS 2006

(no , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 04/17990 Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Juillet 2004 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG no 2001/1142 APPELANT Maître Jacques ROSSI, ès qualités de commissaire au plan de la SNC THALASSO DEAUVILLE demeurant 1 rue Papegaux 61200 ARGENTAN représenté par Me Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour assis

té de Me HELLEBOID Valérie, avocat au barreau de CAEN, de la SELARL HELLEBOID-OLLIVIER, substituant Me Robert...

Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

15ème Chambre - Section B

X... DU 02 MARS 2006

(no , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 04/17990 Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Juillet 2004 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG no 2001/1142 APPELANT Maître Jacques ROSSI, ès qualités de commissaire au plan de la SNC THALASSO DEAUVILLE demeurant 1 rue Papegaux 61200 ARGENTAN représenté par Me Chantal BODIN-CASALIS, avoué à la Cour assisté de Me HELLEBOID Valérie, avocat au barreau de CAEN, de la SELARL HELLEBOID-OLLIVIER, substituant Me Robert APERY, avocat au barreau de CAEN, INTIMÉE S.A. OSEO BANQUE DU DÉVELOPPEMENT DES PME, nouvelle dénomination du CRÉDIT D'EQUIPEMENT DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 27/31 avenue du Général Leclerc 94710 MAISONS ALFORT CEDEX représentée par la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU, avoués à la Cour assistée de Me FOUCHE Olivier, avocat au barreau de CRETEILä TOQUE / PC155, de la SCP FOUCHE-EX-IGNOTIS COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le26 janvier 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrick HENRY-BONNIOT, Président

Madame Claire DAVID, Conseiller

Madame Evelyne DELBES, Conseiller qui en ont délibéré Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN X... :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Monsieur Patrick HENRY-BONNIOT, Président - signé par Monsieur Patrick HENRY-BONNIOT, président, et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier présent lors du prononcé.

La SNC Biotherm Deauville, filiale du groupe L'OREAL, exploitait un établissement de thalassothérapie à Deauville. En 1991, la société L'OREAL a décidé de mettre fin à l'activité de cette société et d'en céder les parts à la société Cures marines de Trouville. La cession, intervenue en janvier 1992, était subordonnée au remboursement des crédits de trésorerie des banques BNP, CRÉDIT LYONNAIS et société de Développement Régional de Normandie. Le CRÉDIT D'EQUIPEMENT DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES (ci-après "CEPME") a consenti le 3 décembre 1992 à la SNC Biotherm Deauville, devenue le 1er janvier 1992 la SNC THALASSO DEAUVILLE, un prêt, mis en place dès le 13 janvier 1992, d'un montant de 12 millions de francs.

Par jugement du 13 janvier 1995, le tribunal de commerce de Honfleur a prononcé le redressement judiciaire de la SNC THALASSO DEAUVILLE, Me ROSSI étant désigné en qualité d'administrateur judiciaire.

Par jugement du 13 décembre 1995, le même tribunal a arrêté le plan de redressement par voie de continuation de la SNC THALASSO DEAUVILLE.

Un jugement du 12 mars 1997 a prononcé la résolution de ce plan et ouvert une nouvelle procédure de redressement judiciaire.

Un jugement du 26 mars 1998 a finalement arrêté le plan de cession de la SNC THALASSO DEAUVILLE au profit de la société BATTEUR INVESTISSEMENTS, Me ROSSI étant désigné en qualité de commissaire à

l'exécution du dit plan.

Par acte du 5 octobre 2001, Me ROSSI, ès qualités, a assigné le CEPME devant le tribunal de commerce de Créteil en responsabilité du chef d'un octroi abusif de crédit.

Par jugement contradictoire du 1er juillet 2004, le tribunal de commerce de Créteil a dit Me ROSSI, ès qualités, recevable mais non fondé en son action, l'en a débouté et l'a condamné à payer au CEPME la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par déclaration du 6 août 2004, Me ROSSI, ès qualités, a interjeté appel de cette décision.

Les dernières écritures des parties, prises en compte par la Cour au titre de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, ont été déposées : - le 3 décembre 2004 pour Me ROSSI, ès qualités, - le 7 novembre 2005 pour la société OSEO BDPME, anciennement dénommée "CEPME".

Me ROSSI, ès qualités, demande à la Cour de : - infirmer le jugement entrepris, - dire que le CEPME a commis une faute en octroyant inconsidérément un crédit de 12 millions de francs à la SNC THALASSO DEAUVILLE, - dire qu'il devra réparer l'entier préjudice subi par les créanciers de cette société, - en conséquence, le condamner à lui verser la somme de 1 524 500 euros à titre de dommages et intérêts, - condamner l'intéressé à lui payer la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société OSEO BDPME conclut à la confirmation du jugement déféré et demande à la Cour de condamner Me ROSSI, ès qualités, à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ LA COUR :

Considérant que la société Cures Marines de Trouville, dont M. Richard Y... a pris la direction en 1987, exploitait depuis 1958 un établissement thermal à vocation essentiellement médicale ; qu'en 1991, année au cours de laquelle son chiffre d'affaires s'est élevé à 12 237 KF, elle a souhaité profiter de l'essor du marché de la thalassothérapie et s'orienter vers les cures de remise en forme et d'esthétique ;

Considérant que la SNC Biotherm Deauville, dont le capital était détenu en quasi totalité par la SA L'OREAL, a, quant à elle, exploité un établissement de ce type à Deauville jusqu'en octobre1990, date à laquelle la société L'OREAL a décidé de mettre fin à son activité avant d'envisager, en 1991, de céder ses parts ;

Considérant que selon acte du 13 janvier 1992, la SNC THALASSO DEAUVILLE a été cédée à la société Cures Marines de Trouville et aux consorts Y... pour le prix de 3 000 000 francs ;

Considérant que le prêt en litige, souscrit le 3 décembre 1992 par la SNC THALASSO DEAUVILLE, avait pour objet "la reprise des encours de la société Biotherm Deauville après rachat des parts par la société Cures Marines de Trouville" ; qu'il comportait : - une tranche de 9 000 000 F au taux de 11% jusqu'au 30 novembre 1991, date au-delà de laquelle le taux applicable sur chaque somme décaissée était minoré ou majoré du taux moyen mensuel de rendement des emprunts de l'Etat à long terme entre le mois de septembre 1991, soit 8,89%, et le mois précédent le décaissement, remboursable en 48 versements trimestriels, avec un différé d'amortissement du capital de 30 mois,

- une tranche de 3 000 000 F avec un taux variable égal au taux moyen mensuel du marché monétaire majoré de 2 points, soit au mois de septembre 1991, 9,21%, remboursable en 48 trimestrialités avec le même différé d'amortissement du capital ;

Considérant qu'il incombe à Me ROSSI d'établir que la société THALASSO DEAUVILLE se trouvait, à la date d'octroi du prêt, dans une situation irrémédiablement compromise et ce au su du prêteur ;

Considérant que les pièces produites par la société OSEO BDPME, parmi lesquelles un extrait du bilan de la société THALASSO DEAUVILLE révèle qu'à la date du prêt le passif bancaire de cette société s'élevait à 4 484 570 francs au titre de crédits à court terme, à 10 562 925 francs au titre d'emprunts contractés auprès de la BNP, du CRÉDIT LYONNAIS et de la Société de Développement Régional de Normandie à échéance d'avril 1993 et de mars et mai 1998, outre 2 202 915 francs de crédit non rémunéré consenti par le groupe L'OREAL ;

Considérant que l'opération de crédit contestée a donc permis de restructurer la dette existante en y substituant un seul prêt remboursable en 14 ans aux taux de 8,81% et 9,21% au lieu de 9,50% et 9,25%, taux de deux des prêts contractés précédemment ;

Considérant qu'il n'est pas établi, dans ces conditions, que le prêt litigieux aurait aggravé la situation d'endettement antérieur ;

Considérant que les comptes prévisionnels, établis par l'expert comptable et les conseils du repreneur que la banque a eu en sa possession, envisageaient une progression du chiffre d'affaires de 6 300 000 francs à 9 000 000 francs entre 1992 et 1994 qui n'était pas déraisonnable au regard du chiffre d'affaires moyen de 13 000 000 francs réalisé par la société avant sa mise en sommeil en octobre 1990 et de celui encore réalisé en 1990, soit 6 871 697 francs ;

Considérant que l'expérience et la réussite des repreneurs dans la gestion de l'établissement de Trouville militaient aussi en faveur de

la faisabilité de l'opération;

Considérant que Me ROSSI ne prouve pas que la quasi totalité de la clientèle de la société THALASSO DEAUVILLE était constituée de salariés et de clients de la société L'OREAL qui leur offrait leurs séjours et qu'elle était donc perdue dès lors que la société L'OREAL se retirait ; qu'il n'est, en tout cas, pas démontré que cette situation ait pu être portée à la connaissance de la banque ;

Considérant que la mise en sommeil de la société THALASSO DEAUVILLE l'année précédent la cession ne suffit pas à établir la preuve de l'absence de toute chance de reprise de l'activité et à exclure toute possibilité de rentabilité ;

Considérant que le différé d'amortissement consenti par le prêteur était de nature à favoriser le redressement de l'entreprise pendant la période nécessaire à son redémarrage ; que l'alliance entre les deux entreprises à l'activité complémentaire permettait de mettre en commun et donc de réduire les frais de gestion, d'entretien, de publicité et de commercialisation ;

Considérant que la société OSEO BDPME indique, sans être contredite sur ce point, que le montant des pertes, qui était de 8 000 000 francs avant le prêt, a été de 4 200 000 francs après l'octroi de celui-ci ;

Considérant que le redressement judiciaire de la société THALASSO DEAUVILLE n'a été prononcé que trois ans après l'octroi du prêt et a connu, sous la seule administration de Me ROSSI, le renouvellement à six reprises de la période d'observation jusqu'à l'arrêt le 13 décembre 1995 d'un plan de redressement par voie de continuation prévoyant le règlement du passif à 100% y compris la créance du CEPME ; que ces circonstances ne sont pas le signe d'une situation irrémédiablement compromise dès 1992 mais celui de la persistance de possibilités sérieuses de redressement trois ans plus tard encore, de

l'avis du tribunal de commerce mais aussi de Me ROSSI, qui ne soutient pas que son rapport, qu'il s'abstient de verser aux débats, aurait conclu à la non adoption de ce plan ;

Considérant que la résolution de celui-ci le 12 mars 1997 a donné lieu à l'ouverture, non pas d'une liquidation judiciaire, mais d'un nouveau redressement judiciaire qui a connu six renouvellements de la période d'observation et a abouti à l'adoption d'un plan de cession ; Considérant qu'il n'est pas démontré, dans ces conditions, que la société THALASSO DEAUVILLE n'était plus viable au moment de l'octroi du prêt et que ce concours rendait inéluctable l'effondrement de l'entreprise ;

Considérant que Me ROSSI recherche donc en vain la responsabilité de la banque ;

Considérant qu'il convient de confirmer, en conséquence, le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Considérant que l'équité commande de condamner Me ROSSI, ès qualités, à payer à la société OSEO BDPME la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Condamne Me ROSSI, ès qualités, à payer à la société OSEO BDPME la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Le condamne aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER LE PRÉSIDEN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0147
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949994
Date de la décision : 02/03/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2006-03-02;juritext000006949994 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award