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01/04/2003 | FRANCE | N°2002/18293

France | France, Cour d'appel de Paris, 01 avril 2003, 2002/18293


COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 1er AVRIL 2003 (N , 9 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2002/18293 Pas de jonction Décision dont recours : décision de la Commission des opérations de bourse en date du 12/09/2002 Nature de la décision :

CONTRADICTOIRE Décision : REJET DEMANDEUR AU RECOURS : Monsieur FRANCIS X... ... par Maître TEYTAUD, avoué, 4-6, quai de la Mégisserie - 75001 PARIS Assisté de Maître G. TERRIER, JEANTET ASSOCIES, 87, avenue Kléber - 75116 PARIS EN PRESENCE DE : - La Commission des opérations de bourse, 17, place d

e la Bourse - 75002 PARIS Représentée aux débats par Madame Y... et Mo...

COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 1er AVRIL 2003 (N , 9 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2002/18293 Pas de jonction Décision dont recours : décision de la Commission des opérations de bourse en date du 12/09/2002 Nature de la décision :

CONTRADICTOIRE Décision : REJET DEMANDEUR AU RECOURS : Monsieur FRANCIS X... ... par Maître TEYTAUD, avoué, 4-6, quai de la Mégisserie - 75001 PARIS Assisté de Maître G. TERRIER, JEANTET ASSOCIES, 87, avenue Kléber - 75116 PARIS EN PRESENCE DE : - La Commission des opérations de bourse, 17, place de la Bourse - 75002 PARIS Représentée aux débats par Madame Y... et Monsieur Z..., munis d'un mandat régulier. COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Monsieur BREILLAT, Président Madame PEZARD, Président Monsieur LE DAUPHIN, Conseiller GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l'arrêt, Maaame PADEL, greffier MINISTERE PUBLIC : Monsieur A..., Substitut Général DEBATS : A l'audience publique du 18 Février 2003, ARRET : Prononcé publiquement le PREMIER AVRIL DEUX MIL TROIS, par Monsieur BREILLAT, Président, qui en a signé la minute avec Madame PADEL, greffier.

Après avoir entendu, à l'audience publique du 18 février 2003, le conseil du requérant, les représentants de la Commission des opérations de bourse ( COB) et le Ministère Public en leurs

observations, le conseil de M. Francis X... ayant eu la parole en dernier ;

La société SIDEL , société industrielle spécialisée dans la conception et la fabrication de machines ou de lignes intégrées productrices d'emballages, principalement en plastique "PET"(polyéthylène téréphtalate) dans le domaine agro-alimentaire, occupe depuis le début des années 1990 une position de leader mondial sur le marché de la production de bouteilles en plastique de ce type. Cette société, qui a mis au point , au cours des années 1998-1999, un nouveau procédé dénommé ACTIS devant permettre l'embouteillage de boissons gazeuses, et notamment de la bière, dans des conditions assurant la bonne conservation du produit, a effectué une communication sur les avantages de ce procédé le 29 avril 1999.

Le 13 décembre 1999, l'hebdomadaire INVESTIR a publié un entretien accordé par le président du conseil d'administration de la société SIDEL, M.Francis X..., au cours duquel celui-ci a affirmé, notamment, que la société pensait pouvoir livrer 35 à 60 machines ACTIS en 2000, une centaine en 2001 et 200 en 2002, qu'elle avait déjà 15 commandes fermes et 15 autres liées à la bonne mise en route des premières machines, et que la vente des machines ACTIS permettait "d'être plus confortable" dans la prévision de croissance annuelle de 15% du chiffre d'affaires entre 1997 et 2002 et, même au delà de cet objectif, de dépasser en quelques années le meilleur résultat d'exploitation atteint en 1998.

Cependant, depuis la fin de l'année 1999, la société SIDEL devait connaître un parcours boursier beaucoup moins favorable en raison de l'érosion de son résultat opérationnel, le marché étant également déçu par le faible essor du procédé ACTIS .

C'est dans ces circonstances qu' au vu d'une lettre du Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris du 3 août 2000 saisissant la Commission des opérations de bourse pour avis à la suite d'une plainte d'un actionnaire portant sur l'information financière diffusée par la société SIDEL, le directeur général de la COB a décidé, le 23 août 2000, l'ouverture d'une enquête sur l'information financière et le marché du titre SIDEL à compter du 1er décembre 1999.

Les investigations effectuées ont montré que le 13 décembre 1999 la société SIDEL n'avait encore reçu que quelques commandes de machines ACTIS et qu'elle n'en avait effectivement vendu que quelques-unes en 2000.

Par ailleurs, en février 2001, M.Francis X... a révélé aux commissaires aux comptes avoir fait mettre en place dès 1995 un mécanisme de transfert de charges destiné à "lisser" les résultats d'exploitation, procédé ayant eu une incidence sur les résultats déclarés au titre des exercices de 1998 et 1999 ainsi que sur la situation semestrielle au 30 juin 2000.

Le 27 mars 2001, le groupe suédois TETRA LAVAL a lancé une offre publique d'achat amicale sur le capital de SIDEL et a recueilli, au terme de cette opération, 91% de celui-ci, le prix de l'action étant fixé à 50ä, alors que le cours du titre, après avoir atteint son plus haut niveau le 20 mai 1999, soit 138ä, cotait aux alentours de 100ä dans les jours suivant la parution de l'article d'INVESTIR, puis amorçait, après un rebond, une chute quasi constante dès la fin du mois de décembre 1999.

Par décision du 12 septembre 2002, la COB a prononcé une sanction pécuniaire d' un million d'euros à l'encontre de M.Francis X... et a ordonné la publication de la décision dans son bulletin mensuel et au Journal Officiel de la République française, pour avoir commis des

manquements aux dispositions de son règlement n° 98-07 relatif à l'obligation d'information du public, essentiellement aux motifs que:

-"les informations données par M.Francis X... et la société SIDEL sur les commandes de systèmes ACTIS en décembre 1999, sur les prévisions de commandes, de chiffres d'affaires, des résultats d'exploitation et de marges et sur les comptes au titre de l'exercice 1998, 1999 et du premier semestre 2000 étaient inexactes, imprécises et trompeuses", "ni la société SIDEL, ni M.Francis X... n'ont jamais infirmé les informations portées à la connaissance du public par l'interview du 13 décembre 1999 (sur les commandes ACTIS, les prévisions de commandes et de résultats, de marges et de chiffre d'affaire) et qu'ils n'ont pas davantage corrigé les inexactitudes des comptes sociaux avant avril 2001".

Le 21 octobre 2002 M.Francis X... a formé un recours "en annulation et subsidiairement /ou en réformation" contre cette décision.

La Cour;

Vu le mémoire du 19 novembre 2002 par lequel M.Francis X..., demande à la Cour: à titre principal: - de constater :

[*que la déformation d'une partie des propos qu'il a tenus dans le cadre de l'entretien qu'il a accordé à INVESTIR le 13 décembre 1999 ne lui est pas imputable;

*] que la communication des informations relatives aux commandes ACTIS et aux perspectives de la société SIDEL lors de cet entretien n'est pas constitutive du manquement visé par l'article 3 du règlement n° 98-07;

[*que l'absence de rectification de l'information communiquée dans le cadre de l'entretien n'est pas constitutive d'un manquement aux dispositions de l'article 4 du même texte;

*]que les inexactitudes des comptes sociaux de la société SIDEL,

relatives aux exercices 1995 à 1999, n'ont pas affecté l'image fidèle de la société SIDEL, partant, n'ont pas faussé le bon fonctionnement du marché; -de juger, en conséquence, qu'il n'y a lieu à sanction à son encontre; à titre infiniment subsidiaire; - de constater l'absence de gravité des manquements allégués et qu'il n'a tiré aucun avantage ou profit de ceux-ci; -en conséquence, de réformer la décision déférée en ce qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L 621-15 du Code monétaire et financier, et , statuant à nouveau, de faire une juste application du principe de proportionnalité;

Vu les observations écrites de la COB du 27 décembre 2002 tendant à la confirmation de la décision déférée;

Vu le mémoire en réplique du 24 janvier 2003 par lequel M.Francis X... maintient ses prétentions initiales;

Vu la lettre du 10 février 2003 du conseil du requérant invoquant la modification envisagée du régime des sanctions pécuniaires prononcées par la COB;

Sur ce;

Sur les manquements

Considérant que l'article 2 du règlement COB n° 98-07 relatif à l'obligation d'information du public énonce que "l'information donnée au public doit être exacte, précise et sincère"; que selon l'article 3 de ce texte "constitue pour toute personne, une atteinte à la bonne information du public la communication d'une information inexacte, imprécise et trompeuse", qu'aux termes de l'article 4 "tout émetteur doit le plus tôt possible porter à la connaissance du public tout fait important susceptible , s'il était connu, d'avoir une incidence significative sur le cours d'un instrument financier ou sur la situation et les droits des porteurs de cet instrument financier" et

que l'article 8 du dit règlement précise que "toute information visée aux articles 4 à 7 doit être portée à la connaissance du public sous la forme d'un communiqué dont l'auteur s'assure de la diffusion effective et intégrale et que la Commission des opérations de bourse doit recevoir au plus tard au moment de la publication"; Sur l'information de décembre 1999

Considérant que, lors de l'entretien accordé à l'hebdomadaire INVESTIR et publié , dans son numéro daté du13 décembre 1999, à la rubrique ""Au coeur du marché", sous le titre ""La valorisation minimale de la société SIDEL est aujourd'hui de 160ä par action", alors qu'à l'époque le titre de la société SIDEL était coté autour de 100ä, le président du conseil d'administration de cette entreprise, M.Francis X..., a notamment déclaré: "A court terme, nous pensons livrer de trente-cinq à soixante machines l'an prochain, une centaine en 2001 et deux cents en 2002.Nous avons aujourd'hui quinze commandes fermes et quinze commandes liées à la bonne mise en route des premières machines", et en tirait ces prévisions de croissance: "....La vente des machines ACTIS nous permet d'être plus confortable dans notre prévision de croissance annuelle moyenne de 15% du chiffre d'affaires entre 1997 et 2002. Grâce à ACTIS , nous dépasserons notre objectif. Ces machines devraient totaliser environ 5% de notre chiffre d'affaires en 2000 et environ 10% en 2002. Le vrai démarrage sera effectif lors de l'installation d'une machine ACTIS chez un grand brasseur. J'escompte que cet événement ait lieu avant la prochaine assemblée générale"; que M. Francis X..., envisageant également la possibilité de percevoir des redevances sur les bouteilles produites selon le procédé ACTIS, a indiqué que "ces redevances pourraient représenter une amélioration de 2 points des taux de marge nette en 2002"; qu'enfin, interrogé sur l'évolution de

la marge de la société SIDEL, il a répondu: "Notre ebitearning before interest and taxes ou résultat d'exploitation souffre ainsi fortement cette année de lancement. Nous espérons regagner un point d'ebit l'an prochain. Notre objectif consiste dans un premier temps à retrouver l'ebit de 1998, et ensuite à le dépasser largement grâce aux redevances liées aux machines ACTIS...."; "en cas d'OPA, ma position consistera à défendre les actionnaires. J'expliquerai aisément à notre attaquant que la valorisation minimale de la société SIDEL est aujourd'hui de 160ä par action".

Considérant que M.Francis X... fait valoir que "la présentation donnée à l'interview...par l'hebdomadaire INVESTIR qui ne lui est pas imputable, a gravement déformé le sens de sa déclaration sur la valeur du titre SIDEL et , plus généralement, l'ensemble de ses propos en leur donnant la connotation"dithyrambique" qui leur est aujourd'hui reprochée"; que s'il est admis par le rapport d'enquête que "le titre de l'article du 13 décembre 1999 du journal INVESTIR est sorti de son contexte, si l'on se réfère à la citation entière du passage concerné", le caractère accrocheur, voire exagéré du titre donné à l'article litigieux s'explique par la teneur des propos incriminés que M.Francis X... n'a pas contesté avoir tenus, et qui ne s'en trouvent pas pour autant et en eux-mêmes dénaturés;

Considérant que l'enquête effectuée a montré que le 13 décembre 1999 la société SIDEL n'avait encore reçu que quelques commandes de machines ACTIS et qu'elle n'avait effectivement vendu que quelques uns de ces matériels en 2000; que selon les commissaires aux comptes, " depuis la sortie du procédé ACTIS, 6 machines ont été vendues au 31 décembre 2000"; que d'ailleurs M.Francis X... a reconnu lors de l'enquête "qu'en ce qui concerne les commandes juridiquement fermes de l'époque(décembre 1999) , nous devions en avoir cinq ou six, ce qui correspond au nombre de machines livrées sur l'exercice 2000", et

que ses prévisions n'avaient pas été tenues "parce que l'univers des brasseurs s'est avéré extrêmement conservateur et réticent au nouveau procédé ACTIS"; que la COB a chiffré "l'exagération" du chiffre d'affaires induit des commandes annoncées en nombre injustifié à 60 millions de francs en 1999, sans compter les redevances attendues en la matière; que le résultat d'exploitation a légèrement baissé en 1999 alors qu'une stabilité était espérée, et a diminué de presque la moitié au premier semestre 2000, au lieu de la hausse escomptée;

Que M. Francis X..., qui a évoqué des lettres et des engagements de commandes, certains verbaux, sans justifier de leur réalité, a considéré comme des commandes fermes ce qui n'étaient en réalité que de simples intentions, puisque d'après lui (exposé des moyens du 19 novembre 2002 p.9), la société SIDEL "estimait que parmi les 80 entreprises qui avaient manifesté leur intérêt, au moins 20 d'entre elles(en mai 1999) l'avaient fait de façon suffisamment claire pour caractériser une intention ferme de passer commande";

Qu'il a ainsi entretenu auprès du public une confusion entre la notion de commande ferme et celle de prévision de commande; qu'il soutient, sans que cette explication puisse l'exonérer des obligations pesant sur lui au sens des textes précités , s'être référé essentiellement aux "systèmes d'analyse en vigueur au sein de SIDEL, et qui apparaissaient réels et fiables à l'ensemble des intervenants", mais que le document qu'il produit , intitulé "état des commandes et des engagements de commandes ACTIS des 25/5,7/7 et 2/11/1989", n'est qu'un tableau réalisé par la société elle-même sur lequel, au demeurant, seulement quatre clients ayant acquis au total six machines sont indiqués comme ayant payé un acompte; que par ailleurs ce document indique qu'alors qu'un contrat paraît avoir été adressé à chacune des sociétés intéressées entre mai et octobre 1999,

aucune ne l'a renvoyé signé;

Que M. Francis X... ne peut non plus faire valoir avec pertinence qu'il n'aurait fait que reprendre, dans l'entretien incriminé, des informations non considérées comme fautives qui avaient déjà été communiquées par la société SIDEL au marché en avril et mai 1999, alors que cette communication ne portait que sur la description technique du procédé ACTIS et non pas sur le nombre des commandes enregistrées ou attendues, ou les incidences économiques et financières du lancement du produit;

Que M. Francis X... prétend encore que "s'agissant, enfin de la communication sur les perspectives de résultats de la société SIDEL, il a exprimé des objectifs pour l'entreprise et non des chiffres prévisionnels, et qu'il l'a fait avec suffisamment de prudence pour que le marché ne puisse être induit en erreur sur leur portée" et que "les prévisions de commandes apparaissaient réalistes et raisonnables compte tenu des informations alors disponibles dans l'entreprise d'une part et de l'état du marché du PET au mois de décembre 1999 d'autre part";

Que, toutefois, la prudence alléguée est contredite par les énonciations catégoriques de M.Francis X... non seulement sur lesdites commandes: " cela va aller très vite... nous pensons livrer 35 à 60 machines l'an prochain, une centaine en 2001 et 200 en 2002",..."grâce à ACTIS nous dépasserons notre objectif ", mais aussi sur le chiffre d'affaires, puisque l'ampleur des commandes annoncées ne pouvait manquer d'avoir des répercussions sur celui-ci qui devait, selon le requérant, augmenter de 5% en 2000 et de 10% en 2002 , et sur les résultats; que ces prévisions portaient aussi sur le très court terme puisque, d'après le requérant, " le vrai démarrage" était annoncé comme imminent, correspondant à "l'installation d'une machine

ACTIS chez un grand brasseur" qu'il escomptait devoir s'opérer " avant la prochaine assemblée générale", laquelle devait se tenir peu après l'entretien, le 22 décembre 1999, alors que les éléments sur lesquels reposaient les prévisions de résultats d'exploitation étaient faussés, puisque le nombre de commandes , inexactement énoncé, en constituait un élément central, tout comme le prix du PET sur l'évolution possible duquel aucune réserve n'était émise;

Que, par ailleurs, l'information, en raison de son inexactitude avérée, aurait dû être rectifiée par une communication au public conformément aux dispositions de l'article 4 du règlement de la COB; que, certes, M.Francis X... affirme que ni le nombre de commandes, ni les prévisions de commandes , ni les objectifs de résultats ne sont susceptibles de constituer un"fait important susceptible, s'il était connu, d'avoir une incidence significative sur le cours d'un instrument financier ou sur la situation des droits des porteurs de cet instrument financier" au sens de ce texte qui oblige en pareil cas l'émetteur à porter ce fait à la connaissance du public; que, cependant, cette argumentation se trouve démentie par la hausse à la fois du cours du titre et, surtout , dans une très grande proportion, du volume des transactions le jour de la parution de l'interview (634.614 actions échangées dans la seule journée du 13 décembre 1999, alors que le volume moyen journalier des transactions a été de l'ordre de 130.000 titres en 1999 et 2000); qu'au demeurant, M.Francis X... dans un document intitulé "analyse des écarts entre les résultats réels et les résultats publiés par la société SIDEL de 1995 à nos jours", indique sur ce point :"le fonctionnement du marché du titre SIDEL...résulte de données fondamentales que sont la progression(ou baisse) du résultat d'exploitation réalisée ou attendue et du taux de croissance à long terme attendu du résultat compte tenu de la nouvelle technologie ACTIS"; Sur l'information sur

les comptes de la société SIDEL au titre des exercices 1998 et 1999 et du premier semestre 2000

Considérant que M.Francis X..., à propos des irrégularités comptables qu'il avait lui-même dévoilées et qui ont été commises , d'après lui, aux fins " d'atténuer l'extrême volatilité du titre SIDEL", a déclaré en cours d'enquête:"je suis responsable de la volonté de mettre en place un dispositif de lissage du résultat d'exploitation tant à la hausse qu'à la baisse depuis les exercices 1995 et 1996, dans les limites de 3 à 4 % de ce résultat et très en deçà des résultats comptables"; que les commissaires aux comptes ont indiqué que ces irrégularités "se chiffrent à 3% des stocks, ce qui n'est pas en soi très significatif"; qu'ils ont plus précisément chiffré l'incidence sur le résultat avant impôt à 23 millions de francs pour 1998 et à 37 millions de francs pour 1999, ajoutant que "ceci signifie que l'incidence cumulée est de 60 millions au 31 décembre 1999. L'impact au 30 juin 2000 était de 45 millions de francs" et que ces manipulations de chiffres ont permis de majorer le résultat d'exploitation de 4% en 1999, ou un demi- point de marge brute, et de 10% à l'arrêté intermédiaire du 30 juin 2000, soit un point de marge brute; que, de plus, lorsque des corrections ont dû être effectuées, elles ont porté sur l'ensemble des inexactitudes cumulées sur plusieurs exercices; qu'ainsi les comptes de l'exercice 2000 intègrent une " régularisation des stocks SIDEL SA", et précisent que, fin juin 2000, ceux-ci étaient surévalués de 14,6 millions d'euros;

Sur la sanction

Considérant qu'il ressort des constatations qui précédent que les informations données de manière très assurée, d'une part, sur les commandes de systèmes ACTIS en décembre 1999, sur les prévisions de commandes, de chiffres d'affaires, de résultats d'exploitation et de

marges et, d'autre part, sur les comptes au titre de l'exercice 1998, 1999 et du premier semestre 2000, étaient inexactes, imprécises et trompeuses et ont faussé le bon fonctionnement du marché en ce que la valorisation de l'action SIDEL a résulté d'arbitrages fondés sur des éléments inexacts tant sur la potentialité immédiate du procédé ACTIS, amenant M. Francis X... à donner "aisément", en cas d'OPA, "une valorisation minimale ... aujourd'hui de 160ä par action", que sur les comptes sociaux; que M.Francis X..., qui a admis son entière responsabilité au titre des manipulations des comptes sociaux et qui est l'auteur des propos tenus au journal INVESTIR le 13 décembre 1999, a commis les manquements qui lui sont reprochés aux dispositions des articles 2, 3, 4 et 8 du règlement COB n° 98-07 relatif à l'obligation d'information du public et aux articles L. 621-14 et L. 621-15 du Code monétaire et financier;

Considérant qu'en vertu de ce dernier texte, le montant de la sanction pécuniaire doit être fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits tirés de ces manquements;

Considérant que M.Francis X... estime que la sanction qui a été prononcée à son encontre par la COB ne serait pas motivée et présenterait un caractère "exorbitant et disproportionné", en violation du principe de proportionnalité, eu égard à l'absence de gravité, selon lui, des fautes qui lui sont imputées, et au fait qu'il n'aurait tiré aucun avantage ou profit des dits manquements;

Considérant, cependant, que l'ensemble des manquements rappelés qui ont eu pour effet de fausser la perception que les investisseurs avaient de la situation financière de SIDEL ont perturbé le marché, dont le bon fonctionnement dépend de l'exactitude et de la sincérité des informations données au public, et ont gravement porté atteinte

aux intérêts des investisseurs qui , convaincus que le démarrage du procédé ACTIS et les perspectives de développement de la société SIDEL étaient particulièrement favorables, ont été conduits à acheter ou conserver un titre dont le cours a ensuite chuté brutalement dès lors que la réalité de la situation financière de la société a été connue; que la connaissance de la surévaluation du titre a, en définitive, conduit la direction de SIDEL à conseiller aux actionnaires d'apporter leurs titres à l'OPA de TETRA LAVAL à seulement 50ä par action en 2001, prix inférieur de 15% au cours moyen de SIDEL pendant les douze mois précédents; que la COB a évalué à " plusieurs dizaines de millions d'euros" les pertes totales ainsi subies par les investisseurs;

Que, si M. Francis X... n'a pas tiré de profit des dits manquements, en l'absence de vente de ses titres à l'époque des faits, il ne pouvait être indifférent à leur valorisation, en tant qu'actionnaire d'une société susceptible de faire l'objet d'une offre publique; que la particulière gravité des infractions relevées, à savoir une falsification délibérée des comptes et une présentation mensongèrement prometteuse de la situation économique et financière de SIDEL dans un proche avenir, justifie la sanction pécuniaire prononcée contre le requérant par la COB conformément au principe de proportionnalité; que le recours sera en conséquence rejeté;

PAR CES MOTIFS,

Rejette le recours;

Condamne M. Francis X... aux dépens. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 2002/18293
Date de la décision : 01/04/2003

Analyses

BOURSE DE VALEURS - Commission des opérations de bourse - Règlement n° 98-07 relatif à l'obligation d'information du public - Sanction pécuniaire - Dirigeant social - Applicabilité

La communication par le président du conseil d'administration d'informations inexactes, imprécises et trompeuses relatives aux commandes, aux chiffres d'affaires, aux résultats d'exploitation et sur les comptes de l'exercice de la société, est de nature à fausser le bon fonctionnement du marché et réalise les manquements prévus aux dispositions des articles 2, 3, 4 et 8 du règlement n°98-07 de la commission des opérations de bourse relatif à l'obligation d'information du public


Références :

règlement n°98-07 de la commission des opérations de bourse relatif à l'obligation d'information du public, articles 2, 3, 4 et 8

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2003-04-01;2002.18293 ?
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