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16/01/2003 | FRANCE | N°JURITEXT000006941555

France | France, Cour d'appel de Paris, 16 janvier 2003, JURITEXT000006941555


COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section C ARRET DU 16 JANVIER 2003

(N , 15 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

2001/21257 Pas de jonction Décisions dont appel : Jugement rendu le 19 juin 2001 et jugement rectificatif rendu le 18 septembre 2001 par le J.A.F. du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS Affaires familiales (Section B, cabinet 4) RG n° : 1999/42410 et 2001/39152 Date ordonnance de clôture : 25 novembre 2002 Nature de la décision :

CONTRADICTOIRE Décision : A.D.D. - RENVOI A MISE EN ETAT APPELANT :

Monsieur Mohamed X...
r>né en 1963 à MA BENI DRAR AHFIR

de nationalité marocaine

demeurant 9, rue de l'Av...

COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section C ARRET DU 16 JANVIER 2003

(N , 15 pages) Numéro d'inscription au répertoire général :

2001/21257 Pas de jonction Décisions dont appel : Jugement rendu le 19 juin 2001 et jugement rectificatif rendu le 18 septembre 2001 par le J.A.F. du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS Affaires familiales (Section B, cabinet 4) RG n° : 1999/42410 et 2001/39152 Date ordonnance de clôture : 25 novembre 2002 Nature de la décision :

CONTRADICTOIRE Décision : A.D.D. - RENVOI A MISE EN ETAT APPELANT :

Monsieur Mohamed X...

né en 1963 à MA BENI DRAR AHFIR

de nationalité marocaine

demeurant 9, rue de l'Avre

4ème étage - Appartement 232

78340 LES CLAYES SOUS BOIS

ci-devant et actuellement

chez Madame Y...

2, avenue Pasteur

94230 CACHAN

Représenté par la S.C.P. Patricia HARDOUIN, avoué INTIMEE :

Madame Z... A...

née le 12 avril 1977 à MA AIN SFA (Maroc)

de nationalité marocaine

demeurant 7, Allée Dugay Trouin

93600 AULNAY SOUS BOIS

Représentée par la S.C.P. MOREAU, avoué

Assistée de Maître Nathalie BENCHIMOL GUEZ,

avocat à la Cour (M 1891)

AIDE JURIDICTIONNELLE TOTALE

N BAJ : 2002/007121

du Maroc à Pontoise. Il dit que Z... A... s'est présentée à deux reprises au Consulat du Maroc, dont une fois accompagnée d'une assistante sociale, qu'aucune conciliation n'a été possible et qu'il avait été précisé à Z... A..., qu'en l'absence de conciliation, le juge compétent au Maroc prononcerait le divorce. Il en tire la conclusion que Z... A... a été régulièrement convoquée par les autorités marocaines, que la requête saisissant le juge français, postérieure, est irrecevable, que le divorce marocain, dont il a exécuté les obligations financières, est définitif et que l'exception de chose jugée doit être accueillie.

En cas d'application de la loi française, il conclut au prononcé du divorce aux torts de la femme qui a quitté le domicile conjugal et ne lui laisse pas voir l'enfant commun.

Il réclame une révision à la baisse du montant de sa contribution à l'entretien de l'enfant, n'ayant depuis février 2002, date à laquelle il a retrouvé un emploi, qu'un salaire de 950 ä par mois.

Z... A... demande à la Cour de - déclarer Mohamed X... irrecevable en son exception d'incompétence faute par lui de l'avoir soulevée in limine litis, - constater qu'il ne justifie pas du contenu de la loi marocaine, - constater qu'il ne justifie pas du contenu de la loi marocaine, - dire que l'ordre public s'oppose à l'admission du contenu de la loi marocaine, - écarter l'exception de chose jugée faute par Mohamed X... de produire toutes les pièces justificatives nécessaires, - confirmer le jugement sauf en ce qui concerne le rejet de sa demande de prestation compensatoire, - le réformant de ce chef, - condamner Mohamed X... à lui payer une

Décision du 15 mars 2002

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats et du délibéré

Président : Madame B...

Conseiller : Monsieur MATET

Conseiller : Monsieur C...

GREFFIER

lors des débats et du prononcé

de l'arrêt : Mlle D...

MINISTERE PUBLIC

Représenté aux débats par Monsieur E...,

Avocat Général, qui a été entendu en ses explications.

DEBATS

à l'audience du 26 novembre 2002

tenue en chambre du conseil

prestation compensatoire de 9 146 ä avec application, si le débiteur le sollicite, des modalités de paiement prévues par l'article 275-1 du code civil, - rejeter toutes les prétentions et demandes contraires de Mohamed X..., - condamner Mohamed X... en tous les dépens.

Elle indique que l'exception de chose jugée soulevée par Mohamed X... a été écartée, après plusieurs renvois à la demande du mari, par le juge aux affaires familiales dans son ordonnance de non conciliation rendue le 7 janvier 2000 après tentative de conciliation du 17 décembre 1999.

Elle dit que l'ordonnance n'a pas été frappée d'appel.

Elle dénie toute valeur probante à des pièces qui n'ont été communiquées qu'en photocopie, notamment la pièce n° 20 et un accusé de réception daté du 4 Novembre 1999.

Elle conclut à l'irrecevabilité de l'exception d'incompétence non soulevée in limine litis devant le juge conciliateur.

Elle constate que Mohamed X... refuse de produire le contenu de la loi marocaine et dit qu'en toute hypothèse cette loi qui admet la répudiation par le mari est contraire à l'ordre public français. Elle déduit de l'ensemble de ces éléments que la loi française est applicable.

Elle sollicite la confirmation du jugement dans toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le rejet de sa demande de prestation compensatoire.

ARRET - CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement, en l'empêchement du Président,

par Monsieur MATET, Conseiller le plus ancien ayant

délibéré, lequel a signé la minute avec Mlle D..., Greffier.

Mohamed X... et Z... A..., tous deux de nationalité marocaine, se sont mariés le 5 août 1993 devant la section notariale du tribunal de première instance d'Oujda (Maroc), sans contrat préalable. Un enfant est issu de cette union, Adil, né le 18 avril 1996 à Versailles.

Statuant sur la demande en divorce formée par Z... A... sur le fondement de l'article 242 du code civil, le tribunal de grande instance de Paris, par jugement réputé contradictoire, le mari n'ayant pas constitué avocat, du 19 juin 2001, rectifié par jugement du 18 septembre 2001, a notamment : - vu l'ordonnance du 7 janvier 2000 ayant autorisé les époux à résider séparément, - prononcé le

divorce aux torts du mari, - ordonné la transcription du dispositif du jugement sur les registres du service central de l'état civil et la mention en marge des actes de naissance des époux, - constaté que l'épouse ne demande pas à conserver l'usage du nom du mari, - ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux et désigné le Président de la Chambre Interdépartementale des Notaires à Paris pour procéder à la liquidation des droits respectifs des parties, - dit irrecevable la demande de prestation compensatoire formée par Z... A..., - dit que l'autorité parentale sera exercée en commun par les parents avec résidence habituelle chez la L'avoué de Z... A... avait fait sommation et itérative sommation à celui de Mohamed X..., les 31 juillet et 19 août 2002, de communiquer notamment la requête en divorce qui aurait été déposée devant les juridictions marocaines, les pièces justificatives des trois convocations qui lui auraient été

adressées par les autorités marocaines durant l'été 1999, les pièces justificatives des trois convocations au Consulat Général du Maroc à Pontoise pour des audiences devant se tenir les 7 octobre, 17 octobre et 12 novembre 1999, l'original de la pièce n° 4 produite le 2 juillet 2002 et l'original de l'avis de réception émargé par elle ainsi que les pièces justifiant de ce qu'elle se serait présentée au Consulat du Maroc à Pontoise les 7 et 17 octobre 1999.

Les 30 octobre et 5 novembre 2002, cet avoué a fait sommation et itérative sommation à celui de Mohamed X... de produire les originaux des pièces 17, 18, 19, 20, 21 et 22 du bordereau de communication du 29 octobre 2002, ainsi que les originaux des convocations de Z... A... émargés par elle.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 novembre 2002, Mohamed X... ayant conclu le même jour.

Par lettre du 26 novembre 2002, l'avoué de Z... A... a

indiqué que la pièce n° 20 intitulée "accord de divorce entre époux et sa traduction" n'avait pas été régulièrement communiquée malgré les sommations précitées ; Sur ce, la Cour,

Considérant qu'est régulièrement produite aux débats l'ordonnance de mère, - dit que, sauf meilleur accord, le mère bénéficiera d'un droit de visite et d'hébergement s'exerçant :

+ les 1ère, 3ème et 5ème fins de semaine de chaque mois du samedi après la sortie des classes au dimanche à 20 heures,

+ la première moitié des vacances scolaires les années paires et la seconde moitié les années impaires, - dit que chaque parent ne pourra faire sortir l'enfant du territoire qu'avec l'accord de l'autre parent, - fixé la contribution mensuelle à l'entretien et à l'éducation de l'enfant mineur à la somme de 1 000 francs qui devra être versée d'avance par le père au domicile ou à la résidence de la mère, prestations familiales en sus, - en tant que de besoin, condamné le débiteur à la payer, - dit que cette somme sera indexée sur l'indice INSEE de la consommation des ménages urbains et automatiquement réajustée le 1er janvier de chaque année à compter du

1er janvier 2002 en fonction de l'indice du mois d'octobre précédant le réajustement, - dit que cette contribution sera maintenue au delà de la majorité, jusqu'à la fin des études régulièrement poursuivies, - débouté les parties de toutes leurs autres demandes, - ordonné l'exécution provisoire du présent jugement en ce qui concerne l'exercice de l'autorité parentale, le droit de visite et d'hébergement et la pension, - dit que les dépens seront supportés par Mohamed X... et recouvrés conformément aux dispositions légales de l'aide juridictionnelle.

Mohamed X... a relevé appel du jugement du 19 juin 2001 et du jugement rectificatif.

Dès ses premières conclusions du 30 janvier 2002, il a, invoquant les articles 9 et 11, alinéa 2, de la Convention franco-marocaine du 10

non conciliation du 7 janvier 2000 qui : - constate la comparution des deux époux assisté chacun d'un conseil, - dans ses motifs mais non dans son dispositif déclare irrecevable - notamment en l'absence de production de pièces originales - l'exception, soulevée in limine litis, par le mari tenant à l'autorité de la chose jugée concernant :

"en premier lieu un acte de divorce par répudiation du tribunal de première instance d'Oujda etlt;etlt;consigné le 7 décembre 1999etgt;etgt; faisant état de la comparution le 6 décembre 1999 de Monsieur X... après tentative de conciliation établie par le consulat du Maroc à Pontoise le 12 novembre 1999" et en second lieu "une ordonnance du 7 décembre 1999 du même tribunal fixant les obligations résultant du divorce visant une déclaration de divorce datée du 26 décembre 1999" - autorise l'époux demandeur à assigner en divorce, - autorise les époux à résider séparément, le mari à Les Clayes sous Bois, la femme à Paris, - fixe, avec exécution provisoire, les mesures provisoires ; Considérant dès lors que Mohamed X... ne peut, sans une particulière mauvaise foi, soutenir ne pas avoir été présent lors de l'audience de conciliation ;

Considérant que les exceptions de procédure, et tout particulièrement l'exception d'incompétence, doivent être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non recevoir ;

Qu'en vertu des articles 1074 alinéa 4 et 1110 alinéa 1 du nouveau

code de procédure civile, le second de ces textes régissant la tentative de conciliation :

"Il le juge aux affaires familiales statue, s'il y a lieu, sur les exceptions d'incompétence",

août 1981, soulevé l'incompétence de la juridiction française pour prononcer le divorce au profit du tribunal de première instance d'Oujda. Il a également, pour le cas où les juridictions françaises se déclareraient compétentes, conclut à l'application de la loi marocaine et soulevé une exception de chose jugée, le divorce ayant été prononcé par le tribunal de première instance d'Oujda le 7 décembre 1999 et une ordonnance de fixation des obligations du divorce ayant été rendue le même jour par la même juridiction.

Par note du 3 avril 2002, injonction a été donnée par le conseiller de la mise en état à l'avoué de Mohamed X... de produire les pièces exigées par la convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 pour la reconnaissance de la décision étrangère et de conclure sur la compatibilité avec l'ordre public d'une répudiation faite au Consulat Général du Maroc

en France.

Dans ses dernières conclusions, Mohamed X... demande à la Cour de : - réformer les jugements entrepris dans toutes leurs dispositions et statuant à nouveau, - vu les articles 9 et 11 alinéa 2 de la convention franco-marocaine du 10 août 1981, - le déclarer recevable et bien fondé en son exception d'incompétence, - dire les juridictions françaises incompétentes pour prononcer le divorce, les juridictions marocaines, et plus précisément le tribunal de première instance d'Oujda, étant seules compétentes, - pour le cas où les juridictions françaises se déclareraient compétentes, - dire la loi marocaine applicable, - le dire recevable et bien fondé en son exception de chose jugée en l'état du jugement de divorce prononcé par le tribunal de première instance d'Oujda le 7 décembre 1999 et de

"Au jour indiqué, le juge statue d'abord, s'il y a lieu, sur la compétence" ;

Considérant que Mohamed X... n'a pas soulevé l'incompétence des juridictions françaises lors de la tentative de conciliation alors que, présent et assisté d'un conseil, il a soulevé la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ; qu'il est irrecevable à le faire devant la Cour saisie de l'appel du jugement de divorce même s'il n'a pas comparu sur l'assignation en divorce qui lui avait été délivrée ;

Considérant, sur l'exception de chose jugée, qu'en raison de son caractère provisoire, l'ordonnance qui statue sur la recevabilité de la requête en divorce à laquelle est opposée une fin de non recevoir ne lie pas le juge du fond saisi de ce moyen de défense ; qu'il appartient donc à la Cour de statuer sur l'exception soulevée par Mohamed X..., alors surtout que le juge aux affaires familiales, dans les motifs de son ordonnance du 7 janvier 2000, dont la Cour n'est pas saisie, s'est limité à la dire irrecevable ;

Considérant que Mohamed X... soutient que le divorce a été définitivement prononcé par "jugement du tribunal de première instance d'Oujda en date du 6 décembre 1999, enregistré au registre des mariages et divorces 55 folio 454 sous le n° 489 le 7

décembre 1999, les mesures après divorce ayant quant à elles été fixées par ordonnance en date du 7 décembre 1999" ;

Considérant que selon l'article 16 de la convention franco-marocaine d'aide mutuelle judiciaire d'exequatur des jugements ... du 5 octobre 1957, en matière civile et commerciale, les décisions contentieuses l'ordonnance de fixation des obligations du divorce prononcée également le 7 décembre 1999, - constater le divorce des époux et rejeter toutes les demandes de Z... A..., - à titre infiniment subsidiaire, si la Cour rejetait l'exception d'incompétence et l'exception de chose jugée, - prononcer le divorce aux torts exclusifs de la femme, - fixer le montant de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant Adil X... mise à sa charge à la somme de 47 ä par mois, - confirmer le jugement pour le surplus, - condamner Z... A... aux dépens de première instance et d'appel dont le montant sera recouvré par la SCP Hardouin, avoué, dans les conditions de l'article

699 du nouveau code de procédure civile.

Il avait admis, dans ses conclusions du 20 octobre 2002 que le juge aux affaires familiales de Paris, dans l'ordonnance de non conciliation du 7 janvier 2000, avait statué sur l'exception de chose jugée qu'il avait soulevée. Dans des conclusions récapitulatives du 25 novembre 2002, il dit avoir été non comparant lors de l'ordonnance de non conciliation qui a dû lui être communiquée lors de l'assignation en divorce.

Il prétend que le divorce est, par application des articles 9 et 11 alinéa 2 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981, soumis aux juridictions marocaines et à la loi marocaine.

Il soutient ensuite que le divorce a été prononcé au Maroc par jugement du 6 décembre 1999. Il indique que l'épouse a été convoquée à trois reprises, au cours de l'été 1999, devant les juridictions marocaines pour procéder à la phase préalable de conciliation puis trois fois aux mêmes fins, en octobre et novembre 1999, au Consulat

et gracieuses rendues par les juridictions siégeant au Maroc ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre pays notamment si elles réunissent les conditions suivantes : - a) la décision émane d'une juridiction compétente selon les règles de droit international privé admises dans le pays où la décision est exécutée, sauf renonciation certaine de l'intéressé, - b) les parties ont été légalement citées, représentées ou déclarées défaillantes, - c) la décision est, d'après la loi du pays où elle a été rendue, passée en force de chose jugée et susceptible d'exécution, - d) la décision ne contient rien de contraire à l'ordre public du pays où elle est invoquée ou aux principes de droit public applicables dans ce pays et n'est pas contraire à une décision judiciaire prononcée dans ce pays et possédant à son égard l'autorité de la chose jugée ;

Qu'en vertu de l'article 21 de cette même convention, la partie qui invoque l'autorité d'une décision judiciaire doit produire : - a) une expédition de la décision réunissant les conditions nécessaires à son authenticité, - b) l'original de l'exploit de signification de la décision ou de tout autre acte qui tient lieu de signification, - c) un certificat des greffiers compétents constatant qu'il n'existe contre la décision ni opposition ni appel ni pourvoi en cassation, -

d) une copie authentique de la citation de la partie qui a fait défaut à l'instance, - e) une traduction complète de ces pièces certifiée conforme par un traducteur assermenté ;

Considérant par ailleurs qu'en application des articles 9 et 11 alinéa 2 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981 relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire, qui contient en son article 4 une disposition selon laquelle la loi de l'un des deux Etats ne peut être écartée par les juridictions de l'autre Etat que si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public : - la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de celui des deux Etats dont les époux ont tous deux la nationalité à la date de la présentation de la demande, cette loi s'appliquant également aux effets personnels découlant de la dissolution du mariage, - les effets relatifs à la garde des enfants et aux pensions alimentaires qui leur sont dues relèvent des dispositions du chapitre III de la convention, - au sens de l'alinéa a) de la convention d'aide mutuelle judiciaire et d'exequatur des jugements du 5 octobre 1957, par exception à la règle de compétence

territoriale donnant compétence à la juridiction du dernier domicile commun, la dissolution du mariage peut être prononcée par les juridictions de l'Etat dont les deux époux ont la nationalité ;

Considérant que sont produits par Mohamed X... : - deux copies certifiées conformes de convocations adressées les 7 et 19 octobre 1999 à Z... A... par le Consulat du Maroc à Pontoise "au sujet d'une affaire qui vous concerne", aucune justification de la réception de ces convocations par l'intéressée n'étant jointe, - une copie certifiée conforme d'une convocation adressée le 2 novembre 1999 à Z... A..., l'invitant à se présenter au Consulat du Maroc à Pontoise le 12 novembre 1999 pour "une tentative de conciliation entre vous et votre époux dans votre intérêt ainsi que celui de vos enfants", et la photocopie d'un accusé de réception d'envoi recommandé daté du 4 novembre 1999 portant une signature illisible, l'original de cet accusé de réception n'ayant pas été communiqué malgré sommations, -

la photocopie en langue arabe et la traduction (faite à Versailles le 24 octobre 2002) d'un acte - dont la communication régulière est contestée - dressé au Consulat du Maroc à Pontoise le 12 novembre 1999 intitulé "accord de divorce entre époux", faisant état d'une délégation donnée par le "juge chargé des affaires notariales près de l'Ambassade du Royaume du Maroc à Paris", ayant pour objectif d'établir que les époux sont d'accord pour divorcer, notant la présence des deux époux mais ne contenant aucun renseignement sur l'inscription au Consulat de la femme ni sur son domicile, disant que les deux époux sont d'accord pour divorcer mais rappelant que l'épouse a été convoquée par plusieurs convocations dont la dernière du 2 novembre 1999 par courrier recommandé avec accusé de réception, l'épouse ayant reçu ce courrier comme il est justifié par le bureau de poste du 20 ème arrondissement de Paris, et affirmant enfin que l'époux maintient sa volonté de divorcer, - la traduction certifiée conforme d'un acte de divorce consigné sous le n° 489, folio 454 le 7 décembre 1999 par les deux notaires près le tribunal de première instance d'Oujda, ces

notaires attestant avoir reçu le 6 décembre 1999 la déclaration de Mohamed X..., salarié à l'étranger, domicilié à Oujda, présentant le P.V. de réconciliation dressé au Consulat du Maroc à Pontoise, selon laquelle il déclarait "divorcer avec son épouse A... Z..." - la traduction certifiée conforme d'une "ordonnance de fixation des obligations du divorce", exécutoire intégralement, rendue sous le n° 368 dans le dossier 362/99, par le tribunal de première instance d'Oujda, Service du statut personnel à une date inconnue la traduction n'en comporte pas, visant la requête en divorce n° 489, registre 454 en date du 6 décembre 1999, selon laquelle les deux époux sont domiciliés à Oujda mais à des adresses différentes, fixant la pension alimentaire à 1500 DH durant la période de continence, fixant le loyer à 1 500 DH durant cette même période, fixant l'indemnité de jouissance à 1 500 DH, accordant le droit de visite du père à une fois par semaine et fixant la pension alimentaire mensuelle de l'enfant à 350 DH ;

Considérant en premier lieu que l'acte intitulé "accord de divorce entre époux" dont la communication régulière n'est pas justifiée doit être écarté des débats ; qu'en second lieu, il n'est justifié d'aucune convocation de Z... A... devant le tribunal de première instance d'Oujda qui a rendu les deux décisions citées, l'une au moins de ces décisions faisant état d'une adresse de la femme au Maroc manifestement erronée puisque l'appelant se prévaut d'une tentative de conciliation effectuée au Consulat du Maroc à Pontoise ; qu'en troisième lieu il n'est justifié ni de la signification des décisions rendues au Maroc ni de certificats de non opposition, non appel ou non pourvoi ; qu'en quatrième lieu, il n'y a de divorce en France que judiciaire, le Consulat du Maroc à Pontoise ne pouvant constater des accords de divorce pour des époux demeurant en France ; qu'en cinquième lieu l'acte de divorce du 7 décembre 1999 est un acte de répudiation de la femme par le mari, ce mode de dissolution du mariage laissé à la discrétion du mari étant manifestement contraire au principe de non discrimination énoncé à l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme - dont les dispositions

font partie intégrante de l'ordre public - et au principe d'égalité entre les époux inscrit à l'article 5 du Protocole additionnel n° 7 de cette convention ;

Que pour l'ensemble de ces raisons, la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée doit être rejetée ;

Considérant, sur la loi applicable, qu'il a été dit plus haut d'une part que la loi marocaine est applicable à la dissolution du lien matrimonial et aux effets personnels découlant de cette dissolution et d'autre part que la loi marocaine est contraire à l'ordre public international dans la mesure où elle ne prévoit, comme cause de dissolution du mariage au profit du mari, que la répudiation ; que l'affaire n'étant pas en état d'être jugée en l'absence de production de la loi marocaine, il convient d'abord d'ordonner aux parties, et à défaut d'inviter le ministère public, de produire la loi marocaine sur la dissolution du mariage et sur ses effets personnels, puis de donner injonction aux parties de conclure premièrement sur les causes du divorce, sur la demande de la femme en application de la loi marocaine et sur celle du mari en application de la loi française, la

loi marocaine étant écartée, deuxièmement sur les effets personnels de la dissolution et notamment sur l'éventuelle contrariété de la loi marocaine sur ce point à l'ordre public international, troisièmement surs effets personnels de la dissolution et notamment sur l'éventuelle contrariété de la loi marocaine sur ce point à l'ordre public international, troisièmement sur l'autorité parentale, la résidence de l'enfant et le droit de visite et d'hébergement au vu du seul intérêt de l'enfant ainsi que le prévoit l'article 19 de la Convention franco-marocaine et enfin sur les obligations alimentaires en application de la loi française, loi de la résidence du créancier d'aliment ;

Par ces motifs, - vu les conventions franco-marocaines des 5 octobre 1957 et 10 août 1981, - vu les articles 1074 et 1110 du nouveau code de procédure civile, - vu l'ordonnance de non conciliation du 7 janvier 2000, - écarte des débats la pièce n° 20 intitulée "accord de divorce entre époux", - déclare irrecevable l'exception d'incompétence des juridictions françaises soulevée par Mohamed X..., - rejette la fin de non recevoir

tirée de l'autorité de la chose jugée soulevée par Mohamed X..., - dit la loi marocaine applicable à la dissolution du mariage et aux effets personnels de cette dissolution, - écarte toutefois la loi marocaine, pour ce qui concerne la demande en divorce du mari, comme contraire à l'ordre public international et dit la loi française applicable à cette demande, - constate que la loi marocaine n'est pas produite et que l'affaire n'est pas en état d'être jugée sur le surplus des demandes, - la renvoie à la mise en état, - invite les parties, et à défaut le ministère public, à produire les dispositions de la loi marocaine sur la dissolution du mariage et les effets personnels de cette dissolution avant le 15 février 2003, - fait injonction aux parties de conclure :

1) sur la demande en divorce de la femme au vu de la loi marocaine et sur celle du mari au vu de la loi française,

2) sur les effets personnels de la dissolution du mariage au vu de la loi marocaine sous réserve d'une éventuelle éviction de cette loi pour contrariété à l'ordre public international,

3) sur l'autorité parentale, la résidence de l'enfant et le droit de visite et d'hébergement au vu de l'intérêt de cet enfant,

4) sur les obligations alimentaires au vu de la loi française de la résidence du créancier d'aliment, - dit que Mohamed X... devra conclure sur ces points avant le 15 avril 2003 sous peine de radiation et Z... A... avant le 15 juin 2003 sous peine de clôture, - dit que l'affaire sera appelée à l'audience de procédure du 24 avril 2003 à 13 heures 15 pour vérifier l'accomplissement des diligences réclamées par la Cour, - réserve les dépens. LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006941555
Date de la décision : 16/01/2003

Analyses

a

D'une part, la loi marocaine est applicable à la dissolution du lien matrimonial et aux effets personnels découlant de cette dissolution, et d'autre part, la loi marocaine est contraire à l'ordre public international dans la mesure où elle ne prévoit, comme cause de dissolution du mariage au profit du mari, que la répudiation, ce mode de dissolution du mariage étant manifestement contraire au principe de non discrimination énoncé par la Convention européenne des droits de l'homme ( dont les dispositions font partie intégrante de l'ordre public ) et au principe d'égalité entre les époux inscrit au Protocole additionnel n°7 de cette convention. L'affaire n'étant pas en état d'être jugée en l'absence de production de la loi marocaine, il convient d'abord d'ordonner aux parties, et à défaut d'inviter le ministère public, de produire la loi marocaine sur la dissolution du mariage et sur ses effets personnels, puis de donner injonction aux parties de conclure premièrement sur les causes du divorce, sur la demande de la femme en application de la loi marocaine et sur celle du mari en application de la loi française, la loi marocaine étant écartée; deuxièmement sur les effets personnels de la dissolution et notamment sur l'éventuelle contrariété de la loi marocaine sur ce point à l'ordre public international. Par conséquent, la Cour écarte la loi marocaine, pour ce qui concerne la demande en divorce du mari, comme contraire à l'ordre public international et dit la loi française applicable à cette demande, et renvoie l'affaire à la mise en état .


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2003-01-16;juritext000006941555 ?
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